Chapitre 2 Résolution numérique de l’équation f (x) = 0 I) Introduction Soit f une fonction de R dans R, la détermination des solutions exactes de l’équation f (x) = 0 est parfois di¢ cile, voire impossible; le recours aux méthodes numériques nous permet alors de calculer des valeurs approchées de ces solutions dont on controlera l’erreur absolue. Soit une solution de l’équation f (x) = 0 i.e. f ( ) = 0, la solution s’appelle aussi racine de f (x) = 0 ou bien zéro de la fonction f . II) Séparation (ou lacalisation) des racines Dé…nition : La séparation des racines réelles i de l’équation f (x) = 0 revient à déterminer des intervalles [ai ; bi ] tels que i 2 [ai ; bi ] et j 62 [ai ; bi ] pour tous i 6= j. (chaque intervalle contient une seule racine). i) Méthode graphique (ou géométrique) : on peut séparer les racines de f (x) = 0 en localisant visiblement les abscisses des points d’intersection des graphes (ou courbes) de fonctions f1 et f2 avec f (x) = f1 (x) f2 (x). Exemple : soit f (x) = x2 cos x. Posons f1 (x) = x2 et f2 (x) = cos x y 24 22 20 18 16 14 12 10 8 6 4 2 -5 -4 -3 -2 -1 1 2 3 4 5 x alors l’intersection des courbes de f1 et f2 montre bien que l’équation f (x) = 0 possède deux racine 1 et 2 telles que 1 2 [ 1; 0] et 2 2 [0; 1]. ii) Méthode analytique : on peut séparer les racines de f (x) = 0 en se basant sur le théorème des valeurs intermédiaires. 1 Théorème : Soit f : [a; b] ! R une fonction continue, si f (a)f (b) 0 alors il existe 2 [a; b] tel que f ( ) = 0 (…n du théorème). Si de plus f est strictement monotone sur [a; b] alors est unique. Exemple : soit f (x) = 2x e x . On a lim f (x) = 1, lim f (x) = x! 1 x!+1 +1 et f 0 (x) = 1 + e x > 0 sur R alors l’équation f (x) = 0 possède une unique racine réelle . De plus, on a f (0) = 1 < 0 et f (1) = 2 e 1 > 0 donc 2 [0; 1]. Dé…nition : Etant donné une solution d’une équation f (x) = 0, si (xn ) est une suite obtenue par un algorithme censé approcher , on dira que cet algorithme converge si lim xn = , dans ce cas les termes x0 ; x1 ; :::; xn ; ::: n!+1 sont des valeurs approchées de . On appelle erreur d’approximation (d’ordre n) de l’algorithme la quantité j. n = jxn III) Méthode de Dichotomie (ou de la bissection) : c’est un algorithme basé sur le théorème des valeurs intermédiaires qui consiste à répéter des partages d’un intervalle en deux parties puis à sélectionner le sousintervalle dans lequel existe un zéro de la fonction. Soit f : [a; b] ! R une fonction. On suppose que i) f est continue sur [a; b] ii) f (a) f (b) < 0 iii) il existe un unique 2 [a; b] tel que f ( ) = 0 Alors, on dé…nit trois suites (an ), (bn ) et (xn ) de la manière suivante : a0 + b 0 a0 = a; b0 = b et x0 = 2 Si f (x0 )f (b0 ) 0 alors 2 [x0 ; b0 ], prendre a1 = x0 et b1 = b0 : Si f (x0 )f (b0 ) > 0 alors 2 [a0 ; x0 ], prendre a1 = a0 et b1 = x0 : a1 + b 1 Prendre x1 = 2 Si f (x1 )f (b1 ) 0 alors 2 [x1 ; b1 ], prendre a2 = x1 et b2 = b1 : Si f (x1 )f (b1 ) > 0 alors 2 [a1 ; x1 ], prendre a2 = a1 et b2 = x1 : a2 + b 2 Prendre x2 = 2 Ainsi de suite on construit des intervalles [a1 ; b1 ]; [a2 ; b2 ]; :::; [an ; bn ] et une an + b n suite xn = tels que 2 [an ; bn ] ::: [a2 ; b2 ] [a1 ; b1 ] [a0 ; b0 ]. 2 Théorème : Avec les mêmes notations, on a 1 i) 0 < bn an = n (b0 a0 ). 2 ii) Les suites (an ), (bn ) et (xn ) convergent vers . 2 jb0 a0 j iii) L’erreur d’approximation véri…e n = j xn j ; 8n 0. 2n+1 Preuve 1 i) il est clair que bn an = n (b0 a0 ) ! 0 quand n ! +1 2 ii) Noter que (an ) est croissante et que (bn ) est décroissante donc (an ) et (bn ) sont adjacentes, alors elles convergent vers la même limite l 2 R. Comme an + b n xn = donc (xn ) converge aussi vers l. Mais an bn donc 2 quand n ! +1 on obtient l l d’où = l: an b n iii) On a an bn donc an xn xn bn xn d’où 2 b n an jbn an j jb0 a0 j xn alors j xn j = . 2 2 2n+1 IV) Méthode du Point …xe (ou des approximations successives) Dé…nitions : Soit ' : R ! R une fonction. i) On dit qu’un réel est un point …xe de ' si '( ) = . ii) On dit que ' est stable sur le segment [a; b] si '([a; b]) [a; b]. iii) On dit que ' est lipschitzienne sur [a; b] s’il existe une constante k 2 R+ tel que j'(x) '(y)j k jx yj pour tout (x; y) 2 [a; b]2 . Si de plus k 2 [0; 1[, on dira que ' est contranctante sur [a; b]. Théorème du point …xe : Soit ' : R ! R une fonction. Si ' est stable et contractante sur [a; b] de constante k, alors la suite récurrente (xn ) dé…nie par xn+1 = '(xn ) converge vers l’unique point …xe de ' sur [a; b] et ceci pour tout x0 de [a; b]. L’erreur d’approximation véri…e n = jxn j kn jx1 x0 j, 8n 1. 1 k Preuve : i) Montrons que ' admet un unique point …xe : comme ' est contractante sur [a; b] donc elle est continue sur [a; b]. Soit (x) = '(x) x, alors (a) = '(a) a 0 et (b) = '(b) b 0 donc il exsite 2 [a; b] tel que ( ) = 0 i.e '( ) = . Supposons que ' possède deux points …xes 1 ; 2 2 [a; b] avec '( 1 )j k j 2 k j 2 1 6= 2 alors j'( 2 ) 1 j d’où j 2 1j 1 j alors 1 k : contradiction, donc 1 = 2 . ii) On a jxn j = j'(xn 1 ) '( )j k jxn 1 j ::: k n jx0 j, n comme 0 k < 1 donc lim k = 0 d’où lim xn = . n!+1 n!+1 On a jxn+p xn j k jxn 1+p xn 1 j ::: k n jxp jxp xp 1 j + jxp 1 xp 2 j + :::: + jx1 x0 j et jxi xi 1 j ::: k i 1 jx1 x0 j 3 x0 j et jxp x0 j k jxi 1 xi 2 j donc jxp 1 1 k jx1 obtient j (k p x0 j 1 x0 j ainsi jxn+p xn j k n + kp xn j 2 + ::: + 1) jx1 kn 1 k jx1 x0 j = kp 1 k jx1 x0 j x0 j et quand p ! +1 on jx1 x0 j. 1 k –Détermination pratique de la constante k Si ' 2 C 1 ([a; b]), la formule des accroissements …nis s’écrit : pour tous x; y 2 [a; b], il existe c 2 [x; y] ou [y; x] tels que '(x) '(y) = (x y)'0 (c). Ainsi j'(x) '(y)j = j(x y)j j'0 (c)j j(x y)j max j'0 (t)j. t2[a;b] k = max j'0 (t)j Prendre t2[a;b] – Application du théorème du point …xe à la résolution numérique de f (x) = 0 Soit f (x) = 0 une équation où x 2 [a; b], alors on introduit une nouvelle fonction ' telle : 8x 2 [a; b]; f (x) = 0 () '(x) = x. Ainsi les zéros de f sont exactement les points …xes de ' et on applique alors la méthode du point …xe à '. Exemple : Soit f (x) = 2x e x où x 2 [0; 1]. On a f (0) = 1; f (1) = 2 e 1 = 1; 63:::et f 0 (x) = 2 + e x > 0 donc 9! 2 [0; 1] tel que f ( ) = 0. Pour tout x 2 [0; 1], on a : 1 f (x) = 0 () 2x = e x () x = e x () x = '(x) avec 2 1 x '(x) = e 2 1 x i) On a '0 (x) = e < 0, pour tout x 2 [0; 1] donc ' est décroissante 2 sur [0; 1]. 1 1 Comme '(0) = 2 [0; 1] et '(1) = = 0; 18::: 2 [0; 1] donc ' est stable 2 2e sur [0; 1]. 1 ii) Posons g(x) = j'0 (x)j = e x , cherchons le max de g sur [0; 1]. 2 1 x 0 On a g (x) = e < 0 donc g est décroissante sur [0; 1] ainsi 2 1 max g(x) = g(0) = : x2[0;1] 2 Donc ' est contractante sur [0; 1]. Conclusion : La méthode du point …xe est applicable à ' sur [0; 1] et la suite xn+1 = '(xn ) converge vers et ceci pour tout x0 2 [0; 1]. 4 V) Méthode de Newton (ou de la tangente) Dé…nition : On appelle méthode de Newton pour la résolution 8 numérique x0 2 [a; b] < f (xn ) de l’équation f (x) = 0 sur l’intervalle [a; b], le processus itératif : xn+1 = xn f 0 (xn ) 0 avec f 6= 0. –Interprétation géométrique : Soit x0 2 [a; b], soit ( 0 ) la droite tangente à la courbe de f au point (x0 ; f (x0 )) et soit f(x0 ; 0)g = ( 0 ) \ (xx0 ) où (xx0 ) est l’axe des abscisses. -Exprimons x1 en fonction de x0 L’équation de la droite ( 0 ) est : y f (x0 ) = f 0 (x0 ) (x x0 ) comme f(x0 ; 0)g = ( 0 ) \ (xx0 ) donc f (x0 ) = f 0 (x0 ) (x1 x0 ) f (x0 ) . d’où x1 = x0 f 0 (x0 ) f (x1 ) De la même façon, on retrouve x2 = x1 et par suite xn+1 = f 0 (x1 ) f (xn ) xn . f 0 (xn ) Théorème : Soit f : [a; b] ! R une fonction de classe C 2 ([a; b]). Supposons que i) f (a) f (b) < 0 ii) 8x 2 [a; b]; f 0 (x) 6= 0 iii) f 00 garde un signe constant sur [a; b] f (c) a si jf 0 (a)j jf 0 (b)j iv) b a avec c = b sinon f 0 (c) f (xn ) converge Alors la suite récurrente (xn ) dé…nie par xn+1 = xn f 0 (xn ) vers l’unique zéro de f sur [a; b] et ceci pour tout x0 de [a; b]. L’erreur d’approximation véri…e M2 j jxn xn 1 j2 , 8n 1 n = jxn 2m1 avec M2 = max jf 00 (x)j et m1 = min jf 0 (x)j. x2[a;b] x2[a;b] Propriété i) Si f 0 et f 00 sont du même signe sur [a; b] alors c = a ii) Si f 0 et f 00 sont de signes contraires sur [a; b] alors c = b Exemple : Soit f (x) = ex 4x où x 2 [0; 1]. On a i) f (0) = 1 et f (1) = e 4 = 1; 28::: donc f (0)f (1) < 0 5 ii) f 0 (x) = ex 4 e 4 < 0 sur [0; 1] iii) f 00 (x) = ex 0 sur [0; 1] e 4 f (1) = = 1 b a = 1. iv) f 0 f 00 < 0 donc c = b = 1 et 0 f (1) e 4 Conclusion : la méthode de Newton est applicable à f sur [0; 1] et la suite f (xn ) xn+1 = xn converge vers l’unique zéro de f sur [0; 1] et ceci pour f 0 (xn ) tout x0 de [0; 1]. 6