¶ 13-021-B-10 Hémophilie : physiopathologie et bases moléculaires J.-F. Schved L’hémophilie est une maladie hémorragique liée à un déficit le plus souvent constitutionnel en facteur VIII (hémophilie A) ou en facteur IX (hémophilie B). Le rôle de ces deux facteurs dans le processus général de coagulation permet de mieux comprendre les aspects cliniques de cette maladie : les facteurs antihémophiliques sont indispensables à la phase d’amplification de la coagulation qui permet de générer de façon explosive des quantités suffisantes de thrombine pour créer le caillot. L’absence ou la diminution congénitale de l’un de ces deux facteurs dont le gène est situé sur le chromosome X entraîne une maladie hémorragique dont la principale expression est ostéoarticulaire. La répétition des hémarthroses provoque une arthropathie chronique dans laquelle interviennent le rôle pathogène des dépôts de fer, la destruction du cartilage, très sensible au saignement chez le jeune enfant, l’hypertrophie synoviale et les lésions osseuses. Les hématomes sont les autres grandes complications de l’hémophilie. Ils peuvent être dangereux par leur taille ou leur localisation et sont parfois à l’origine de séquelles graves. Enfin, parmi les complications iatrogènes, l’apparition d’inhibiteurs constitue le risque le plus redouté. Leur prévalence, beaucoup plus importante dans l’hémophilie A que dans l’hémophilie B, est liée en partie à des facteurs génétiques tels que le type de mutation, mais pourrait aussi être influencée par les modalités thérapeutiques : type de produit et mode de traitement. Une meilleure connaissance de la physiopathologie de l’hémophilie pourra permettre de faire les choix thérapeutiques les plus adaptés aux différents moments de la vie de l’hémophile. © 2008 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés. Mots clés : Hémophilie ; Facteur VIII ; Facteur IX ; Hémarthroses ; Inhibiteurs ; Hémostase Plan ¶ Introduction 1 ¶ Facteurs antihémophiliques Structure et métabolisme Rôle des facteurs antihémophiliques A et B dans la coagulation Génétique Pathologie moléculaire Conséquences du déficit en facteur antihémophilique sur l’hémostase 1 1 3 4 5 ¶ Hémophilie Complications hémorragiques de l’hémophilie Physiopathologie de l’atteinte articulaire 6 6 6 ¶ Physiopathologie des complications iatrogènes Anaphylaxie Anticorps inhibiteurs Anticorps inhibiteurs du FIX 5 9 9 10 12 ■ Introduction L’hémophilie est une maladie hémorragique due à un déficit le plus souvent constitutionnel en l’un des deux facteurs antihémophiliques : le facteur VIII (FVIII), facteur antihémophilique A, ou le facteur IX (FIX), facteur antihémophilique B. Elle est de transmission récessive liée au sexe, touchant un nouveau-né sur 5 000 enfants de sexe masculin, mais il existe aussi des hémophilies acquises par auto-immunisation, contre le FVIII principalement. Hématologie Nous envisageons successivement la structure biochimique des facteurs antihémophiliques A et B, leur rôle dans le processus de coagulation, les bases génétiques du déficit et les conséquences du déficit sur le processus normal de coagulation. Nous abordons ensuite la physiopathologie de la maladie et de ses complications. ■ Facteurs antihémophiliques Structure et métabolisme Facteur VIII Structure [1-3] Le FVIII est une protéine de 2 332 acides aminés comportant trois domaines homologues A, un domaine B et deux domaines C organisés suivant la séquence A1-A2-B-A3-C1-C2 (Fig. 1 à 3). Entre ces domaines ont été identifiées des régions acides : a1 entre A1 et A2, a2 entre A2 et B, et a3 entre B et A3. Il existe une grande homologie parmi les espèces pour les acides aminés des trois domaines A et des deux domaines C. Les trois domaines A, essentiels pour l’activité cofacteur, présentent une homologie avec ceux du facteur V de la coagulation et de la céruloplasmine. Une grande partie du domaine B peut être délétée sans perte de l’activité. Avant sa sécrétion, le FVIII est clivé à la jonction B-A3 puis à l’intérieur du domaine B. Ceci 1 13-021-B-10 ¶ Hémophilie : physiopathologie et bases moléculaires a1 A1 génère une chaîne lourde comportant A1, A2, et B et une chaîne légère composée des domaines A3, C1 et C2. L’association entre les chaînes lourdes et légères est médiée par un cation divalent. Immédiatement après sa libération dans la circulation, il forme un complexe non covalent avec le facteur von Willebrand (vWF) pour lequel il a une très forte affinité (kd < 0,5 nM). Deux régions de la chaîne légère du FVIII sont impliquées dans la liaison avec le vWF : la région a3, qui précède le domaine A3, et une ou plusieurs régions des domaines C1 et C2. Dans le complexe [vWF-FVIII], le facteur VIII est protégé de l’action catalytique de la protéine C activée, du FIXa et du facteur X activé (FXa), permettant de maintenir un taux de FVIII normal dans le plasma avant son activation. Le taux plasmatique est faible : 0,10 à 0,20 mg/l. a2 A2 B Ion++ a3 A3 C1 C2 A Activation et inactivation du FVIII a1 A1 La forme active du FVIII, ou FVIIIa, est formée sur le site où se déroule le processus de coagulation par l’action sur le FVIII de deux enzymes : la thrombine (facteur II activé : FIIa) et le FXa. Ces deux sérine protéases clivent la molécule FVIII au niveau des résidus Arg372 et Arg740 dans la chaîne lourde et Arg1689 dans la chaîne légère. Ceci forme le FVIIIa, hétérotrimère A1, A2, A3-C1-C2 dans lequel l’association entre A1 et A3-C1-C2 reste médiée par un ion divalent. L’inactivation du facteur VIII peut se faire par dégradation protéolytique : clivage du FVIIIa par la protéine C activée (PCa) ou par le FXa. En fait, cette voie n’est pas majoritaire : il se produit aussi une inactivation par dissociation spontanée du domaine A2-a2 du dimère. Le catabolisme du FVIIIa fait intervenir une protéine apparentée aux récepteurs des lipoprotéines de faible densité (low density receptor-related protein : LRP), facilité par des protéoglycanes d’héparine sulfatée. Le FVIII délété du domaine B subirait une inactivation par la PCa deux à trois fois plus rapide que celle du FVIII plasmatique ou recombinant [4]. Ion++ a2 A2 C2 C1 A3 B Figure 1. Facteur VIII (FVIII) et FVIII activé. Représentation schématique de la structure. A. La molécule FVIII comporte une chaîne lourde de 93 kDa, constituée de trois sous-unités : A1, A2 et B, et une chaîne légère de 80 kDa constituée de trois sous-unités : A3, C1 et C2. Entre ces domaines ont été isolées des régions acides. Ces chaînes sont liées par un ion divalent. B. Le FVIII activé est un hétérotrimère, comportant la sous-unité A1 associée à la région acide a1, la sous-unité A2 avec la région acide a2 et les sous-unités A3-C1-C2. 1. 2.3.4.5.6. 7.8. 9.10.11.12.13. 14. 15.16.17.18.19.20.21.22. 23.24.25 26. 5' 3' NH2 A1 A2 a1 B A3 a2 C1 C2 COOH a3 Figure 2. Gène du facteur VIII (FVIII). Le gène du FVIII, situé en Xq28, est un long gène de 186 kb comportant 26 exons transcrit en un acide ribonucléique (ARN) de 9 kb. L’exon 14 est la plus grande séquence exonique. Il code le domaine B. FX LRP et FIXa NH2 A1 PGHS et FIXa A2 a1 FIXa FIXa vWF B a2 vWF, PL a3 A3 FXa C1 1 IIa LRP, vWF, PL C2 COOH 2332 A3 et domaine B lon métal A1 1 a1 372 A2 a2 373 740 LRP PGHS A3 C1 C2 1690 COOH 2332 LRP Figure 3. Facteur VIII. Structure et régions impliquées dans les principales interactions moléculaires. vWF : facteur von Willebrand. LRP : low density receptor related protein ; PGHS : protéoglycanes d’héparine sulfatée ; PL : phospholipides. 2 Hématologie Hémophilie : physiopathologie et bases moléculaires ¶ 13-021-B-10 1 2 3 4 5 6 7 8 5' NH2 Prepropeptide 3' Gla AH EGF-1 EGF-2 Domaine d'activation Domaine catalytique COOH S-S Chaîne légère Chaîne lourde Figure 4. Gène du facteur IX (FIX), FIX et FIX activé. La molécule FIX est monocaténaire, composée de 415 acides aminés. Le peptide signal de 19 acides aminés est excisé lors de la sécrétion. Le second exon code la région riche en résidus gammacarboxylés (Gla), le 3e pour un petit domaine hydrophone (AH), les 4e et 5e pour les domaines epidermal growth factor (EGF)-like, le 6e pour le domaine d’activation, les 7e et 8e pour le domaine catalytique. Facteur IX Structure Le FIX est une sérine protéase plasmatique circulante composée de 415 acides aminés [5] . Son poids moléculaire est de 57 kDa. Il comporte certains domaines ou structures caractéristiques : vers la partie N-terminale se trouvent 12 résidus gammacarboxylés (domaine GLA) qui permettent la liaison du FIX aux phospholipides par l’intermédiaire d’ions calcium (Fig. 4). Cette propriété est commune à tous les facteurs vitamine K-dépendants : FII, facteur VII (FVII), FIX, FX, protéine C et protéine S. Les deux domaines suivants sont de type epidermal growth factor (EGF). Le premier domaine, de type B, contient des résidus impliqués dans la liaison de haute affinité avec le calcium ; le second domaine, de type A, pourrait jouer un rôle dans la liaison du FIX avec les plaquettes et dans l’interaction du FIXa avec son cofacteur, le FVIII. Après les domaines EGF-like se situe un peptide d’activation de 35 acides aminés qui précède le domaine sérine protéase, avec la triade catalytique histidine-aspartate-sérine. Activation et inactivation du FIX Le FIX circule sous forme monocaténaire à un taux plasmatique de 3 à 5 mg/l. L’excision du peptide d’activation génère le FIXa, qui comporte une chaîne légère de 145 acides aminés, liée par un pont disulfure (C132-C289) à une chaîne lourde de 234 acides aminés. L’inactivation plasmatique du FIXa est due à l’antithrombine, qui forme un complexe stœchiométrique 1 : 1 avec le FIXa. Le mécanisme, bien que plus lent, est identique pour les FXa et FIIa. Il peut être accéléré par la présence d’héparines ou d’héparanes sulfates. Rôle des facteurs antihémophiliques A et B dans la coagulation Schéma général du processus de coagulation La coagulation, qui vise à consolider le caillot formé lors de l’hémostase primaire, a pour élément clé une enzyme, la thrombine (FIIa). La thrombine est l’enzyme qui clive le fibrinogène en fibrine. La fibrine se polymérise en créant un réseau qui constitue la trame du caillot fibrinocruorique. Le processus de coagulation peut se décomposer en trois phases : une phase d’initiation, qui conduit à la génération de faibles traces de thrombine à la surface de cellules exprimant du facteur tissulaire (FT) ; une phase d’amplification, qui aboutit à l’accumulation de facteurs activés à la surface des plaquettes ; puis une phase de propagation comportant l’assemblage de larges complexes enzymatiques à la surface des plaquettes, la génération « explosive » de fortes concentrations de thrombine induisant la formation d’un caillot stable [6, 7]. Hématologie Les facteurs antihémophiliques sont indispensables à la phase de propagation [8]. Phase d’initiation de la coagulation La coagulation est initiée par le complexe FT-FVII. Le FVII est une proenzyme de type sérine estérase, vitamine K-dépendante. Le FT est une glycoprotéine cellulaire de 263 acides aminés, en position transmembranaire, comportant une extrémité intracellulaire, un portion transmembranaire et une partie externe qui lui donne une fonction récepteur [9]. Il appartient à la famille des récepteurs de cytokines de classe 2, comme les récepteurs aux interférons. Certaines cellules (fibroblastes, myocytes, cellules adventitielles) l’expriment de façon constitutive, d’autres (monocytes, cellules endothéliales) ne l’expriment à leur surface qu’après activation. Le FVII se lie au FT et forme un complexe [FT-FVII]. La liaison du FVII au FT entraîne une modification conformationnelle du FVII, sans libération de peptide d’activation, générant le facteur VII activé (FVIIa). Le complexe [FT-FVIIa] peut activer le FIX et le FX. L’activation directe du FX est faible car elle est limitée par un inhibiteur appelé tissue factor pathway inhibitor (TFPI). L’activation du FX par le FIXa est faible aussi car elle nécessite la présence d’un cofacteur non présent à cette phase : le FVIIIa. Cette phase d’initiation ne génère donc que des traces de thrombine. La quantité de thrombine générée ne suffit pas pour produire la fibrine nécessaire à la constitution du caillot, mais permet le déclenchement de la phase de propagation de la coagulation (Fig. 5). Phase d’amplification La thrombine générée sur le site de coagulation clive le FVIII et forme l’hétérotrimère FVIIIa. Après que la thrombine, et à un moindre degré le FXa, ont activé le FVIII, celui-ci se sépare du vWF pour se lier aux phospholipides plaquettaires sur lesquels il est concentré. C’est donc à la surface des plaquettes que se produit la phase d’amplification : le FIXa généré pendant la phase d’initiation est fixé de façon diffuse sur les plaquettes, où il se lie au FVIIIa en présence de calcium. La liaison IX-VIII implique les domaines A2 et A3 du FVIIIa. Le complexe ainsi créé [IXa-VIIIa] s’appelle aussi ténase ou ténase intrinsèque. Dans ce complexe, la présence du FVIIIa augmente la catalyse du FX par le FIXa d’un facteur supérieur à 105, induisant la présence de FXa en forte concentration [7]. De plus, la thrombine a un autre impact : elle active le facteur V (FV) en facteur V activé (FVa) qui se fixe lui aussi à la surface des plaquettes. Le complexe [FXa-FVa] s’appelle aussi complexe prothrombinase. À la fin de la phase d’amplification se trouvent donc à la surface des plaquettes activées des facteurs de coagulation activés en concentration importante (Fig. 6). 3 13-021-B-10 ¶ Hémophilie : physiopathologie et bases moléculaires Domaine catalytique du FVII VIIa EGF2 EGF2 FT1 FT1 EGF1 EGF1 FT2 FT2 Gla Gla B A Figure 5. Phase d’initiation de la coagulation. A. Le facteur tissulaire (FT) est une protéine transmembranaire. La partie extracellulaire comporte deux sous-unités FT1 et FT2 qui interagissent avec le facteur VII (FVII) de la coagulation. Le FVII est une proenzyme, comprenant un domaine Gla, deux sous-unités epidermal growth factor (EGF)-like (EGF1 et EGF2) puis un domaine catalytique. B. L’interaction avec le FT induit une modification conformationnelle du FVII qui démasque son site catalytique. Il en résulte un complexe [FT-FVIIa] qui activera le FX. Facteur tissulaire (FT) VII FT-VIIa VII XI FT-VIIa XIa IX IX IXa VIII X VIIIa IXa Xa X Va Xa V Fibrinogène II Fibrinogène IIa II IIa XIIIa Fibrine Fibrine B A Figure 6. Phase d’amplification de la coagulation. A. Le complexe [FT-FVIIa] peut activer le FX et le FIX. Le FIXa active lui aussi le FX. Le FXa active la prothrombine (FII) en thrombine (FIIa). La thrombine génère les premières traces de fibrine, trame du caillot. Cette réaction se déroule à la surface des plaquettes. B. La thrombine transforme le dimère FVIII en hétérotrimère FVIIIa. Le complexe [FVIIIa-FIXa] ou ténase intrinsèque induit une activation importante du FX. En outre la thrombine active le FV en FVa et le FXI en FXIa. À la fin de cette phase se concentrent à la surface des plaquettes plusieurs facteurs activés dont le FXa, le FIIa, le FIXa, le FVIIIa et le FVa. Phase de propagation À la surface des plaquettes, le complexe ténase génère des quantités importantes de FXa. L’activation du FX en FXa par le complexe ténase est 50 fois supérieure à celle du FX par le complexe [FT-FVIIa]. Le complexe prothrombinase clive la prothrombine en thrombine, mais après la phase d’amplification, la présence à la surface des plaquettes de concentrations élevées de facteurs activés permet la génération « explosive » de quantités importantes de thrombine (thrombin burst) qui aura de multiples effets : activation en boucle du facteur XI (FXI), du FVIII et du FV, activation des plaquettes et surtout protéolyse du 4 fibrinogène en monomères de fibrine (Fig. 7). La polymérisation spontanée de ces monomères crée la trame du réseau de fibrine qui structure le caillot. Ce caillot est consolidé par l’action du FXIII, lui-même activé par la thrombine. Génétique Facteur VIII Le gène du FVIII est situé sur le bras long du chromosome X (Xq28). Il s’agit d’un long gène de 186 kb comportant 26 exons et codant un acide ribonucléique messager (ARNm) de 9 kb [10, Hématologie Hémophilie : physiopathologie et bases moléculaires ¶ 13-021-B-10 proximité du télomère, soit en position distale (88 % des cas), soit en position plus proximale (12 % des cas). Ceci aboutit à une impossibilité de transcription du gène et à un déficit très sévère en FVIII. Une autre forme d’inversion a été décrite, portant sur l’intron 1, liée à une recombinaison avec une zone télomérique. Elle est à l’origine de 3 % à 5 % des déficits sévères en FVIII [18]. Va IX IXa II IIa Xa VIIIa X Figure 7. Phase de propagation de la coagulation. Le complexe ténase intrinsèque a généré à la surface des plaquettes des quantités importantes de facteurs activés dont surtout le FXa. Ceci déclenche une génération « explosive » de thrombine qui permet la création d’un caillot fibrinocruorique. 11]. Parmi ceux-ci, 24 exons font entre 69 et 262 paires de base, alors que l’exon 14 est composé de 3 106 paires de bases et que l’exon 26 en comporte 1 958. Cependant, une grande partie de l’exon 26 est dans l’extrémité 3', non transcrite, ce qui fait de l’exon 14 la plus grande séquence exonique. Ceci est important pour la physiologie et surtout les applications thérapeutiques, en particulier la production de FVIII recombinant : l’exon 14 code le domaine B du FVIII, qui n’intervient pas dans sa fonction. Un gène délété de cette longue chaîne qu’est l’exon 14 pourra donc coder un FVIII fonctionnel. La Figure 3 montre le positionnement des 26 exons et les domaines correspondants de la protéine FVIII [12]. Facteur IX Le gène codant le FIX est lui aussi situé sur le bras long du chromosome X (Xq29). Il est plus petit que le gène du FVIII puisqu’il comporte 34 kb, avec neuf exons [13, 14]. Il code un ARNm de 2,8 kb. Le second exon code le domaine Gla, le 4e et le 5e les domaines EGF, le 6e le peptide d’activation et les 7e et 8e le domaine catalytique. Il existe une homologie de séquence avec le FVII, le FX et la protéine C qui fait évoquer un ancêtre commun [15]. Pathologie moléculaire Facteur VIII De nombreuses anomalies dans la séquence nucléotidique ont été décrites à l’origine de déficits congénitaux en FVIII. Les mutations causales sont recensées dans une base de données internationale nommée « Hemophilia A Mutation, Search, Test and Resource site » (HAMSTeRS) accessible par internet (http:// europium.csc.mrc.ac.uk). Ces anomalies génétiques entraînent un déficit plus ou moins sévère en FVIII, qui va de la simple diminution du taux de FVIII par diminution de sécrétion ou présence de FVIII instable jusqu’à l’absence totale de FVIII fonctionnel (absence de FVIII ou FVIII tronqué). La présence ou non d’une molécule de FVIII circulant décelable par son antigénicité permet de différencier les déficits dits cross-reacting material positive (CRM+) et les déficits cross reacting material negative (CRM–). Inversions La plus fréquente, puisqu’elle représente près de 50 % des cas de déficit sévère, est une inversion sur l’intron 22 du gène du FVIII [16, 17]. Elle résulte d’une recombinaison de séquences homologues, dont l’une est située sur l’intron 22 et l’autre à Hématologie Délétions Les délétions sont arbitrairement séparées en larges ou partielles. Les délétions larges sont responsables de déficits sévères en FVIII. Les conséquences des délétions de fragments plus petits sont variables. Une délétion, même minime, d’un nombre de nucléotides non multiple de 3 engendre un décalage du cadre de lecture (mutation frameshift) à l’origine d’une protéine aberrante, voire de l’apparition d’un codon stop prématuré, responsable d’un déficit très sévère. À l’inverse, la délétion en phase d’un ou de plusieurs codons triplets pourra n’entraîner qu’un déficit partiel. À côté de ces délétions, on relève aussi, parmi les réarrangements importants du gène, de rares insertions ou des duplications. Mutations ponctuelles De nombreuses mutations ponctuelles ont été décrites. Un tiers de ces mutations ponctuelles surviennent dans des zones à haut risque de mutations (hot spot), au niveau d’un doublet CpG, du fait de l’instabilité des cytosines méthylées. L’erreur est moins efficacement corrigée par les processus normaux de réparation de l’ADN. Les conséquences des mutations ponctuelles sont variables selon leur localisation. Les mutations nonsens sont habituellement sévères, alors que les mutations fauxsens peuvent avoir différents degrés de sévérité mais sont le plus souvent modérées. Les mutations impliquant les sites d’épissage de l’ARN revêtent des aspects de sévérité variable selon la position de la mutation par rapport à la jonction exon-intron. Facteur IX Les déficits congénitaux en FIX relèvent dans plus de 95 % des cas de mutations ponctuelles. Les lésions moléculaires du gène FIX sont très nombreuses et hétérogènes. Dans de nombreux cas, chaque famille possède sa propre mutation. Les mutations sont colligées dans une base de données accessible par internet (http://www.kcl.ac.uk/ip/petergreen/haemBdata base.html) qui, dans sa dernière édition (version 13), comportait 2 891 entrées patients, 211 délétions courtes (moins de 30 nucléotides) et/ou insertions, 91 larges délétions et 962 mutations ponctuelles. Ici encore, on trouve des anomalies récurrentes sur les doublets CpG. Les mutations non-sens ou décalantes induisent en général des déficits sévères, CRM–. Les mutations faux-sens représentent deux tiers des mutations décrites. La responsabilité de ces mutations faux-sens est parfois difficile à établir. Certaines mutations dans la zone du promoteur induisent un déficit particulier par son profil évolutif : sévère dans l’enfance, ce déficit se corrige partiellement ou totalement à la puberté. La forme typique est la mutation Leyden, responsable de l’hémophilie B du même nom. Elle induit une modification des sites de liaison des facteurs de transcription et une réduction de celle-ci. Après la puberté, le déficit de transcription est corrigé par les androgènes, qui seraient capables de réactiver le promoteur muté [19, 20]. Conséquences du déficit en facteur antihémophilique sur l’hémostase Les deux facteurs antihémophiliques, FVIII et FIX, sont très différents. Le FIX a une activité enzymatique, forte lorsqu’il est dans sa forme active FIXa ; il est vitamine K-dépendant et n’a aucune homologie avec le FVIII. Le FVIII n’a pas d’activité enzymatique, c’est un cofacteur, non vitamine K-dépendant, labile. Néanmoins, le déficit congénital en l’un de ces deux facteurs crée la même pathologie, l’hémophilie. Les manifestations cliniques de ces deux déficits sont similaires. Ceci conduit à étudier les conséquences d’une anomalie du complexe antihémophilique sur la coagulation. 5 13-021-B-10 ¶ Hémophilie : physiopathologie et bases moléculaires Différents modèles ont été proposés [8, 21]. L’un consiste à étudier dans des plasmas normaux ou issus de patients hémophiles la cinétique d’activation de la coagulation in vitro, d’après la cinétique d’apparition de métabolites liés à la génération de thrombine : les complexes thrombine-antithrombine (TAT) et le fibrinopeptide A. Dans le plasma issu d’hémophilies A, de la thrombine est générée, mais avec retard et en quantité moindre. Le retard dans la génération de thrombine indique un ralentissement de la coagulation. Ce ralentissement est corrigé par l’ajout de FVIII recombinant. Il existe aussi chez l’hémophile un ralentissement de la génération du facteur V activé, alors que l’activation des plaquettes est ralentie mais non réduite. Ainsi, dans le plasma déficient en FVIII, l’activation de la coagulation se fait, mais de façon retardée, alors que l’activation plaquettaire est pratiquement normale. L’activation plaquettaire est largement indépendante de la ténase intrinsèque. Ceci confirme les anciennes observations faites chez l’hémophile à partir du temps de saignement [22] : la formation initiale du caillot plaquettaire est normale, permettant à l’hémophile d’avoir un temps de saignement normal ; en revanche, le caillot hémostatique secondaire, composé normalement en périphérie du caillot plaquettaire et en son centre d’un caillot riche en fibrine, est anormal chez l’hémophile, ne contenant que peu de fibrine. Ces données ont été confirmées dans un autre modèle [21] étudiant en vidéomicroscopie la croissance du caillot à la surface d’une couche monocellulaire de fibroblastes en culture. L’activation de la coagulation est déclenchée par le FT exprimé à la surface des fibroblastes. Cette technique permet de visualiser l’existence de deux phases dans la croissance du caillot : une phase d’initiation, localisée directement à la surface activatrice et à proximité, et une phase d’expansion, qui se fait à partir de ce caillot et diffuse dans le plasma. Dans le plasma d’hémophile, cette deuxième phase est très altérée ; la croissance du caillot représente environ 30 % de celle mesurée dans un plasma normal. “ À retenir FVIII et FIX : deux facteurs que tout oppose • Le facteur IX est une proenzyme qui devient une enzyme, le FIXa, après activation. Il est de faible poids moléculaire (57 kDa), vitamine K-dépendant, de petite taille (415 acides aminés), en concentration plasmatique importante (3 à 5 mg/l). Sa synthèse est sous la dépendance d’un gène de petite taille : 34 kb, neuf exons. Les mutations causales sont très diverses, pratiquement propres à chaque patient. • Le FVIII est une coenzyme du FIXa, sans activité catalytique. Il est de grande taille (2 332 acides aminés), de poids moléculaire élevé (330 kDa). Il n’est pas vitamine K-dépendant ; sa concentration plasmatique est faible (0,10 à 0,20 mg/l). Sa synthèse est sous la dépendance d’un gène de grande taille : 186 kb, 26 exons. Plus de la moitié des hémophiles sévères portent la même mutation. ... mais le déficit de l’un ou l’autre engendre la même maladie. Ces données permettent de mieux approcher le déroulement du processus d’hémostase chez l’hémophile [23]. L’adhésion plaquettaire se fait normalement sur le site de la lésion vasculaire, où la présence de FT exprimé à la surface des cellules permet l’initiation de la coagulation, générant des traces de thrombine et de FXa. En présence de quantités réduites de FVIII ou de FIX, la phase d’initiation est modérément ralentie [7]. Les plaquettes n’exprimant pas de FT, les faibles quantités de thrombine et de FXa produites le sont à la surface d’autres cellules : fibroblastes, monocytes, cellules périvasculaires, voire cellules endothéliales. En revanche, en l’absence d’une ténase 6 intrinsèque fonctionnelle, du fait soit d’un déficit de l’enzyme FIXa, soit d’un déficit du cofacteur, le FVIIIa ne permet pas l’activation de FX à la surface des plaquettes. En outre, l’activation du FX par le FVIIa est bloquée par le TFPI, tandis que l’antithrombine circulante inhibe les FXa et FIIa non liés à des phospholipides. Enfin, l’adhésion des plaquettes au niveau de la lésion tend à occulter les sites d’expression du FT [24], empêchant la migration du FXa et des autres facteurs vers la lumière vasculaire où il pourrait, grâce au FT natif circulant (blood-borne TF), participer à la propagation du caillot. En l’absence d’un complexe antihémophilique fonctionnel, il ne peut pas y avoir cette « explosion de thrombine » nécessaire à la phase de propagation et indispensable pour conférer une structure stable au caillot. L’hémophilie apparaît ainsi essentiellement comme un défaut de la génération de thrombine à la surface des plaquettes [23], conduisant à la génération plus lente d’un caillot de structure altérée. ■ Hémophilie Complications hémorragiques de l’hémophilie L’étude des conséquences du déficit en FVIII ou en FIX sur la coagulation permet de mieux appréhender les complications cliniques rencontrées dans les déficits congénitaux correspondants : hémophilie A et hémophilie B. Toutes les complications non iatrogènes de l’hémophilie sont liées aux hémorragies et à leurs conséquences, immédiates ou retardées du fait de leur répétition. Ces hémorragies ont des caractères communs : elles touchent peu la peau et les muqueuses, probablement du fait que l’hémostase physiologique de ce type de saignements fait appel essentiellement aux plaquettes, dont nous avons vu la faible implication dans le désordre hémostatique induit par les déficits en FVIII ou IX. Il n’y a donc pas de purpura pétéchial ni d’ecchymoses spontanées, pas de saignement prolongé pour les petites coupures ou les piqûres, peu d’épistaxis ou d’hémorragies muqueuses en dehors des hématuries. Les saignements sont le plus souvent des hémorragies provoquées, touchant préférentiellement l’appareil locomoteur, essentiellement à partir du moment où il est très sollicité, c’està-dire à l’apprentissage de la marche. Les symptômes hémorragiques sont donc en général peu marqués, voire absents dans la période périnatale et jusqu’à la fin de la première année. Les caractéristiques du syndrome hémorragique s’accordent bien avec la physiologie de la coagulation chez l’hémophile : c’est à la suite d’une brèche vasculaire, généralement provoquée, que le saignement survient, du fait du retard à la formation du caillot et surtout de sa fragilité liée à l’altération de sa structure. Certaines complications dominent le tableau clinique et le pronostic : les hémarthroses et les hématomes. Physiopathologie de l’atteinte articulaire (Fig. 8) L’atteinte articulaire constitue à la fois la caractéristique clinique de l’hémophilie et l’élément clé du pronostic fonctionnel. Les hémarthroses, qui peuvent être révélatrices de la maladie, surviennent le plus souvent à l’apprentissage de la marche. Les constatations cliniques déjà anciennes distinguent trois tableaux. L’hémarthrose aiguë, régressive sous traitement, ne laisse aucune séquelle cliniquement décelable. Les hémarthroses subaiguës surviennent après répétition des épisodes d’hémarthroses sur une même articulation. À cette phase, l’articulation ne récupère pas totalement ; des signes cliniques d’atteinte articulaire sont décelables entre les saignements, avec diminution de mobilité et gonflement articulaire dans lequel peuvent intervenir un épanchement liquidien articulaire chronique, une hypertrophie synoviale et des atteintes ligamentaires. Enfin survient le stade de l’arthropathie chronique, avec déformations articulaires évoluant vers la destruction articulaire. Anatomiquement, deux éléments sont constitutifs et caractéristiques : Hématologie Hémophilie : physiopathologie et bases moléculaires ¶ 13-021-B-10 Saignement intra-articulaire Arrêt de la synthèse de matrice cartilagineuse Dépôt de fer Inflammation de la synoviale c-myc, mdm2 VEGF Blocage apoptose Synoviocyte/prolifération Nécrose des chondrocytes Néovascularisation Altération de la structure des os Pannus synovial hypervascularisé Destruction du cartilage Figure 8. Physiopathologie de l’arthropathie hémophilique. La répétition des saignements articulaires induit un dépôt de fer, responsable d’une synovite hypervascularisée. Le fer pourrait aussi favoriser l’activation d’oncogènes (c-myc et mdm2) qui, par prolifération et/ou blocage de l’apoptose des synoviocytes, participeraient au processus pathologique. La conséquence de ces hémarthroses répétées est le développement d’un pannus synovial hypervascularisé, source de récidive de saignements intra-articulaires et d’altération de la structure osseuse. En parallèle, les saignements intra-articulaires ont une toxicité propre sur les chondrocytes, qui aboutit à la destruction du cartilage. VEGF : vascular endothelial growth factor. “ À retenir L’hémophilie : une maladie hémorragique dont les saignements sont peu visibles • L’hémophilie est une maladie hémorragique, mais les hémorragies les plus fréquentes sont en général non extériorisées. Les principales localisations des hémorragies sont en effet : C les hémarthroses, responsables d’arthropathies chroniques invalidantes ; C les hématomes musculaires ou sous-cutanés dont la gravité potentielle est liée à la taille et la localisation ; C les hématomes rétropéritonéaux, les hématomes intracérébraux ; C les complications immunologiques : anaphylaxie et surtout apparition d’inhibiteurs. • Les hémorragies digestives ou urinaires sont rares. Les saignements cutanés sont habituellement consécutifs à des coupures ou effractions. l’atteinte synoviale avec synovite hypertrophique, constituant un pannus hypervascularisé favorisant la répétition des saignements et la destruction cartilagineuse. En pratique, si la physiopathologie de l’atteinte articulaire chez l’hémophile est de mieux en mieux connue, de nombreuses questions restent non élucidées. Pourquoi l’articulation hémophilique saigne-t-elle ? S’il est aisé de comprendre pourquoi une articulation dans laquelle s’est développé un pannus synovial hypervascularisé subit des saignements répétés, la raison pour laquelle les saignements surviennent préférentiellement dans l’articulation, même saine, n’est pas totalement expliquée. L’âge de survenue des premières hémarthroses, qui correspond à l’apprentissage de la marche le plus souvent, et les localisations – genoux et Hématologie chevilles – peuvent s’expliquer par les contraintes et microtraumatismes que subissent ces articulations à cette période. Cependant, la constatation dans les formes sévères d’hémarthroses survenues avant l’apprentissage de la marche, ou localisées au coude, amène à chercher des explications physiopathologiques complémentaires. Facteurs anatomiques L’anatomie de la synoviale normale apporte de premiers éléments de compréhension. La membrane synoviale comprend deux couches distinctes [25] : une couche fine et une couche profonde. La couche fine, contiguë à la cavité synoviale, est composée d’une à quatre assises de cellules. Ces cellules, appelées synoviocytes, sont de deux types : synoviocytes de type A, macrophagiques, dérivant des monocytes sanguins, et synoviocytes de type B, riches en ergastoplasme granuleux, responsables de la synthèse des constituants du liquide synovial, dont l’acide hyaluronique. La couche fine repose directement sur la couche profonde, faite surtout de tissu fibreux, de cellules de type fibroblastique, de cellules macrophagiques et d’adipocytes. Dans cette couche profonde, fusionnée à la capsule, les capillaires se concentrent en un espace très étroit situé 6 à 11 mm sous la surface. Ce nœud capillaire, essentiel pour les échanges liquidiens, est à l’origine des premiers saignements. Il est intéressant de relever qu’il n’y a pas de terminaison nerveuse dans la membrane synoviale. Facteurs physiologiques La physiologie articulaire apporte d’autres éléments de réponse. Il a été montré [26, 27] que le liquide synovial contenait des microparticules ayant une activité procoagulante, d’origine monocytaire ou granulocytaire. Ces microparticules sont pauvres en annexine V, mais riches en FT, et sont capables de générer de la thrombine selon un mécanisme dépendant du FVII. Dans l’articulation normale, le complexe FT-FVIIa active la coagulation, probablement par un mécanisme dépendant de la ténase intrinsèque. L’absence chez l’hémophile de FVIII ou de FIX ne permet pas la formation intra-articulaire de cette ténase. La faible quantité de thrombine générée ne permet pas l’hémostase, ce qui favorise la poursuite du saignement intra-articulaire. 7 13-021-B-10 ¶ Hémophilie : physiopathologie et bases moléculaires Conséquences de la répétition des saignements sur le cartilage : rôle du fer On sait depuis longtemps que la répétition des saignements sur une même articulation entraîne des anomalies synoviales et cartilagineuses [28-30]. Dans un modèle d’hémarthroses expérimentales répétées, il a été démontré que 6 mois après l’arrêt des hémarthroses, les cellules de la zone synoviale fine et les macrophages de la zone profonde contiennent encore de l’hémosidérine [31], ce qui témoigne des capacités très limitées de la synoviale à éliminer le fer. La présence de dépôts d’hémosidérine dans la synoviale de l’articulation hémophile a fait suspecter le rôle pathogène du fer dans la genèse de l’arthropathie [32]. Le fer d’origine érythrocytaire est épuré de la cavité articulaire par les macrophages synoviaux, son accumulation donnant à la synoviale une teinte brune caractéristique. Le rôle délétère du fer pourrait être dû à plusieurs facteurs : le fer serait responsable d’une inflammation de la membrane synoviale qui entraîne son hypertrophie et crée une néovascularisation. Il a été montré [33] que les zones de dépôts de fer sont le siège d’une production accrue de cytokines pro-inflammatoires : interleukines (IL)1, IL6 et tumor necrosis factor (TNF). Il est peu probable que ce soit l’hémosidérine elle-même qui induise la production de cytokines. Celle-ci serait liée à la phagocytose de l’hémosidérine par les cellules synoviales et les macrophages. Il faut malgré tout souligner que l’articulation hémophilique est peu inflammatoire, comparée à celle de la polyarthrite rhumatoïde, considérée parfois comme un modèle de l’arthropathie hémophilique. Récemment, une autre hypothèse a été avancée sur le rôle du fer, impliquant deux oncogènes : c-myc [34] et mdm2 [35] : il a été montré que le fer induit une prolifération de cellules fibroblastiques en culture, associée à une augmentation d’expression du proto-oncogène c-myc. L’oncogène mdm2 intervient dans la régulation de la protéine suppresseur de tumeur p53, qu’il inactive. Le fer induit une augmentation d’expression de mdm2 d’environ 8 fois dans les cellules synoviales humaines en culture. En outre, une expression augmentée de mdm2 est observée après une hémarthrose chez la souris hémophile A. L’oncogène mdm2 pourrait donc intervenir dans la genèse de l’arthropathie hémophile en bloquant l’apoptose des cellules synoviales et/ou en bloquant leur prolifération. Destruction du cartilage dans l’articulation hémophile Si la synovite et l’hypertrophie synoviale engendrées ou au moins favorisées par les dépôts de fer jouent un rôle indiscutable dans l’aggravation de l’arthropathie hémophilique, elles n’expliquent probablement pas l’atteinte cartilagineuse constatée après saignements intra-articulaires. De nombreux arguments expérimentaux montrent que le saignement articulaire lui-même est responsable d’une atteinte cartilagineuse avant même l’apparition d’une synovite. Le cartilage humain est constitué d’un nombre assez faible de chondrocytes au milieu d’une abondante matrice extracellulaire faite principalement de collagène et de protéoglycanes. La solidité, voire la viabilité du cartilage nécessite un équilibre permanent entre synthèse et destruction de cette matrice. Lorsque des cellules cartilagineuses en culture sont mises en présence de sang pendant 4 jours, il apparaît une inhibition dose-dépendante de la synthèse de protéoglycanes, témoignant d’un arrêt de la synthèse de la matrice cartilagineuse. Cet effet est irréversible et suivi d’une mort cellulaire des chondrocytes [36]. Ceci est lié à la présence de cellules mononucléées et de globules rouges et pourrait être dû à la toxicité de métabolites oxygénés et d’autres médiateurs. L’effet délétère du sang sur le cartilage est retrouvé pour des durées plus courtes d’exposition [37] : ainsi, après 2 jours d’exposition en sang fortement dilué (1 volume pour 10), il est possible de mettre en évidence une réduction de la synthèse de protéoglycanes. Cet effet serait donc largement indépendant du temps d’exposition. Ceci est retrouvé en expérimentation animale, mais avec une différence importante : l’injection intraarticulaire de sang autologue induit rapidement une diminution de synthèse de protéoglycanes, mais 10 semaines après la dernière injection, le cartilage retrouve son intégrité, ce qui 8 tendrait à prouver que les dégâts articulaires irréversibles seraient dus à des facteurs additionnels. Parmi ceux-ci, deux éléments complémentaires issus de l’expérimentation animale (chien) valent d’être soulignés. D’une part, la réparation cartilagineuse s’effectue mieux chez le chien âgé [38] : en d’autres termes, le cartilage articulaire du jeune chien est beaucoup plus sensible à la présence de sang que celui du chien adulte. D’autre part, toujours chez le chien, la mise en charge d’une articulation dans laquelle du sang a été injecté induit une inflammation synoviale et réduit considérablement sa capacité de réparation cartilagineuse [39]. Ceci tendrait à prouver qu’après saignement intra-articulaire, la dégénérescence cartilagineuse est aggravée par la mise en charge de l’articulation. Toutes ces données ne sont pour le moment pas applicables à l’arthropathie hémophile chez l’homme. Néanmoins, elles vont dans le sens de certaines constatations cliniques : plus grande sensibilité du cartilage chez le jeune enfant, possibilité d’atteinte articulaire avec dégénérescence cartilagineuse alors même que peu d’hémarthroses cliniques ont été constatées – ceci est particulièrement vrai pour la cheville, soumise à des contraintes mécaniques majeures. Elles constituent un argument pour la prévention très précoce de l’arthropathie hémophilique. Hypertrophie synoviale, néovascularisation et lésions osseuses Les premières hémarthroses sont souvent modérées et peu douloureuses. L’examen histologique de la synoviale 4 jours après une simple hémarthrose montre déjà de petites aires de formations villeuses et un petit infiltrat périvasculaire, sans fibrose [40]. Ces lésions aiguës sont réversibles. La répétition des hémarthroses et l’accumulation conséquente d’hémosidérine induisent une hypertrophie synoviale chronique avec de grosses villosités, le développement d’une fibrose et une néovascularisation, peut-être liée à l’action du vascular endothelial growth factor (VEGF) [30]. La néovascularisation agit comme une fistule artérioveineuse sur la plaque épiphysaire de croissance, induisant une hypertrophie épiphysaire responsable d’une accélération de l’ossification, mais aussi d’altérations de structure de l’os. Les lésions osseuses constituent un stade évolutif sévère de l’arthropathie hémophilique, avec ostéopénie et apparition de kystes sous-chondraux remplis de liquide hématique, dont la survenue est favorisée par la surcharge. Malgré toutes ces données, le mécanisme des lésions osseuses reste incomplètement compris. La polyarthrite rhumatoïde a été prise comme modèle de l’arthropathie hémophilique [30] en raison de grandes similarités cliniques, biochimiques et histologiques. De grandes différences existent pourtant. L’articulation de l’hémophile est peu inflammatoire comparée à celle de la polyarthrite rhumatoïde, alors que le rôle des suffusions hémorragiques est certainement minime dans la polyarthrite rhumatoïde. Néanmoins, certains parallèles sont intéressants : ainsi, par assimilation avec les lésions de la polyarthrite rhumatoïde a été suspecté le rôle du récepteur receptor activator of nuclear factor kappa B (RANK) et de son ligand RANKL, qui active les récepteurs ostéoclastiques. L’ostéoprotégérine (OPG) est une substance soluble produite par les ostéoblastes, capable elle aussi de se fixer sur RANKL, ce qui aboutit à l’arrêt de l’ostéoclastogenèse. Le ratio OPG/RANKL peut être modulé par l’IL1, l’IL6 ou le TNF-a présents en quantité dans le liquide synovial [40]. Enfin, la participation d’enzymes hydrolytiques telles que la cathepsine D et les phosphatases acides, présentes elles aussi dans la cavité articulaire de l’hémophile, a été suspectée dans les destructions tissulaires synoviales, cartilagineuses et osseuses. Physiopathologie des hématomes et de leurs complications Les hématomes constituent l’autre grande complication de l’hémophilie. Leur mode de survenue et leur histoire clinique s’expliquent assez bien par les données physiopathologiques présentées ci-dessus : ces hématomes ne sont pas spontanés mais succèdent à un traumatisme, parfois minime. L’impossibilité de générer rapidement une quantité suffisante de thrombine empêche la réalisation du processus d’hémostase normal. La Hématologie Hémophilie : physiopathologie et bases moléculaires ¶ 13-021-B-10 conséquence est donc la prolongation du saignement : l’hémophilie n’induit généralement pas, à la différence des pathologies plaquettaires graves, de saignement spontané ou d’hémorragie massive. La constitution de l’hématome se fait progressivement et son diagnostic est souvent retardé, parfois à l’occasion d’une complication locale. La gravité de l’hématome peut venir de sa taille ou de sa localisation. Hématomes de grande taille La taille de l’hématome dépend souvent de la région anatomique dans laquelle il se développe : ainsi, un hématome souscutané atteint rarement une taille importante puisqu’il est diagnostiqué et traité rapidement. De plus, lorsqu’il se développe dans un espace limité, par exemple entre la peau et une surface osseuse dure, sa mise en tension progressive favorise, indépendamment des gestes thérapeutiques, la réduction du saignement. À l’inverse, un hématome du psoas ou d’une loge musculaire large (fessier, crural, mollet) peut atteindre une taille importante car le saignement se produit dans un espace extensible, qui tolère de fortes augmentations de volume avant de donner des signes cliniques. En outre, et c’est particulièrement le cas pour les hématomes du psoas, les signes cliniques peuvent être trompeurs, ajoutant au retard diagnostique. C’est la raison pour laquelle le diagnostic n’est souvent fait qu’au stade de complication : atteinte neurologique par compression ou anémie sévère. En outre, il faut savoir que même sous traitement substitutif, la résorption des hématomes est extrêmement longue, nécessitant la prolongation de ce traitement. Hématomes de localisation dangereuse Certains hématomes peuvent être dangereux par leur localisation et engager le pronostic vital : il en va ainsi des hématomes (et hémorragies) du système nerveux central, en général post-traumatiques, en particulier chez l’enfant. Les hémorragies intracrâniennes représentaient 25 % des causes de décès chez l’hémophile avant l’épidémie de sida [41]. Les autres localisations à risque vital sont le cou, le plancher de la bouche, voire la langue. La localisation d’un hématome à proximité d’une racine ou d’une terminaison nerveuse ou d’un paquet vasculaire peut compromettre le pronostic fonctionnel. Il en va ainsi des hématomes péri- ou rétro-orbitaires, avec risque de cécité ; des hématomes périrachidiens, avec risque de paraplégie ; des hématomes du creux axillaire, exposant le plexus brachial ; de la fesse ou du creux poplité, avec une possible atteinte sciatique. Les hématomes de la loge antérieure de l’avant-bras sont dangereux aussi, soit du fait d’une atteinte du nerf médian ou cubital, soit parce qu’ils peuvent constituer un syndrome de Volkmann avec rétraction tendineuse particulièrement gênante et de traitement difficile. Hématomes avec séquelles évolutives : pseudotumeurs hémophiliques Les pseudotumeurs sont des complications assez spécifiques de l’hémophilie, rencontrées chez 1 % à 2 % des patients [42, 43]. Elles peuvent siéger dans les os longs ou, assez fréquemment, dans la région pelvienne, en particulier le long des crêtes iliaques. Elles se constituent à la suite d’hématomes musculaires qui ne se résorbent pas ou incomplètement. Il se crée alors autour de l’hématome une coque fibreuse, adhérant aux tissus environnants. Le centre de la pseudotumeur comporte du sang, ou un liquide hématique fait de débris nécrotiques et de caillots. La répétition des hémorragies, voire le saignement continu à l’intérieur de ces pseudotumeurs en fait la gravité évolutive, car elles sont en croissance permanente, envahissant les tissus adjacents et érodant les structures osseuses. Certains se fistulisent à la peau et s’infectent. Le traitement, le plus souvent chirurgical, est difficile, souvent incomplet et délabrant. Autres complications hémorragiques Les autres complications hémorragiques rencontrées dans l’hémophilie n’ont rien de caractéristique quant à leur physiopathologie. Les plus fréquentes sont les hématuries, dont le Hématologie bilan étiologique est souvent négatif. Elles peuvent se compliquer de colique néphrétique, surtout si elles sont traitées par du facteur antihémophilique, qui favorise la génération de caillots. Ces traitements sont donc contre-indiqués. Les hémorragies digestives sont le plus souvent liées à une cause organique et nécessitent un bilan étiologique. ■ Physiopathologie des complications iatrogènes Nous n’abordons pas ici les complications liées aux agents transmissibles : virus de l’immunodéficience humaine (VIH), virus des hépatites et parvovirus essentiellement. Les autres complications iatrogènes liées au produit se résument à l’anaphylaxie et au développement d’inhibiteurs. Anaphylaxie Des réactions anaphylactiques ont été décrites dès l’utilisation de produits antihémophiliques, tant chez l’hémophile A que chez l’hémophile B. Mais si la littérature comporte encore des rapports et données sur l’anaphylaxie au FIX, il semble que ces réactions aient pratiquement disparu pour le FVIII. La physiopathologie en est probablement différente. Dans l’hémophilie A Les premières descriptions d’anaphylaxie dans l’hémophilie A ont été faites après injection de cryoprécipité [44]. Leur fréquence était alors estimée à 19 % [45, 46]. Ces produits contenaient en fait de nombreuses protéines et il est probable que les réactions constatées ne relevaient pas d’une intolérance au FVIII luimême. Avec l’apparition de produits hautement purifiés, puis recombinants, les réactions anaphylactiques sont devenues très rares, mais restent décrites, qu’ils s’agisse de concentrés immunopurifiés [47] ou de recombinants issus de cellules CHO [48] ou BHK [49], voire de réaction à ces trois types de produits [50]. Les allergènes en cause sont, dans tous ces cas, hypothétiques [45] : protéines de souris, car l’immunopurification utilise des anticorps de souris anti-VIII, ou albumine, qui servait à stabiliser le FVIII, ou FVIII lui-même. De même, il n’existe aucun élément suffisamment solide pour impliquer une réaction d’hypersensibilité médiée par IgE, IgG2 ou IgG4 [45]. Dans l’hémophilie B Les réactions anaphylactiques chez l’hémophile B sont rares, assez curieusement de description plus récentes [51], mais restent d’actualité. Elles sont souvent associées au développement d’anticorps inhibiteurs [45], complication rare de l’hémophilie B puisqu’elle touche 1 % à 2 % des patients seulement, contre 15 % à 25 % dans l’hémophilie A. La raison de l’« apparition » de réactions anaphylactiques chez l’hémophile B n’est pas connue : sont-elles passées inaperçues auparavant, ou bien la meilleure disponibilité de FIX a-t-elle permis d’exposer plus de patients à ce risque ? Le fait que ces réactions puissent se voir avec le FIX recombinant pourrait aussi s’expliquer par une immunogénicité accrue du FIX recombinant, en raison de différences de glycosylation ou d’autres modifications posttraductionnelles. Une donnée importante ressort de la littérature : la nature de la mutation causale influe fortement sur le risque de réaction anaphylactique. En particulier, il semble que les réactions anaphylactiques soient beaucoup plus fréquemment associées aux délétions larges, dans lesquelles le risque atteindrait 26 % [52]. Dans ces cas, il est possible que l’absence d’expression de la protéine, même partielle, puisse prédisposer à l’anaphylaxie. Une autre explication pourrait être que la délétion entraîne l’absence d’un autre gène proche. L’effet de ce gène codélété serait d’augmenter la réponse immune anaphylactique [52]. Une autre hypothèse avancée pour expliquer ces réactions anaphylactiques serait la plus grande distribution extravasculaire du FIX, liée à sa petite taille. La encore, la nature de l’anticorps causal n’est pas connue. Elle n’est peut-être pas univoque : IgG1 [53] ou IgE [54]. 9 13-021-B-10 ¶ Hémophilie : physiopathologie et bases moléculaires Histoire familiale Ethnie Mutations FVIII HLA; IL10; TNF-α Génétique Âge à la première injection Mode d'administration Chirurgie Inflammation Anticorps inhibiteurs anti-VIII Modalités du traitement Glycosylation Polymorphismes Facteur von Willebrand Procédé d'inactivation Contaminants Thérapeutique Figure 9. Facteurs de risque de l’apparition d’inhibiteurs anti-VIII. Deux types de facteurs paraissent influencer la prévalence des inhibiteurs antiVIII : des facteurs de susceptibilité individuelle, essentiellement d’origine génétique, et des facteurs liés aux choix thérapeutiques : âge au premier traitement, modalités d’administration du produit, pathologies associées lors de l’administration et type de produit, recombinant ou plasmatique. HLA : human leukocyte antigen ; IL : interleukine ; TNF : tumor necrosis factor (TNF). Anticorps inhibiteurs La complication iatrogène la plus redoutée actuellement est l’apparition chez l’hémophile traité par facteur antihémophilique d’un anticorps qui inhibe l’activité procoagulante du facteur antihémophilique, le rendant inefficace (Fig. 9). Sa présence chez un hémophile nécessite le recours à des thérapeutiques lourdes, de maniement difficile, et coûteuses. Cette complication se voit principalement au cours de l’hémophilie A, pathologie où elle a été le plus étudiée. Les anticorps sont considérés comme des alloanticorps, très différents des autoanticorps, anti-FVIII essentiellement, responsables de l’hémophilie acquise, qui ne sont pas étudiés ici. Nous envisageons surtout les anticorps anti-FVIII, beaucoup plus fréquents que les anti-FIX. L’hémophilie n’est pas le seul domaine où une activité catalytique d’anticorps a été retrouvée : cette propriété peut exister dans l’asthme, le lupus érythémateux disséminé, ou la maladie de Hashimoto [55]. Des anticorps anti-FVIII non inhibiteurs peuvent être retrouvés chez l’hémophile [65]. Ils peuvent être dirigés contre des épitopes dits « non fonctionnels » des domaines A1 ou C1, voire B [66]. Ils pourraient être responsables d’une augmentation de la clairance du FVIII en formant des complexes immuns phagocytés par le système réticuloendothélial [67] . Un autre mode d’action possible de ces anticorps serait de favoriser l’interaction avec la LRP, protéine apparentée aux récepteurs des lipoprotéines de faible densité, puisque les domaines A2, A1 et C2 sont les domaines d’interaction avec la LRP. Ceci reste une hypothèse. À ce jour, la signification et les conséquences cliniques des anticorps non inhibiteurs restent inconnues. Mécanisme d’apparition des anticorps anti-FVIII L’apparition d’anticorps inhibiteurs est la conséquence d’une réponse immune impliquant trois types cellulaires : les cellules présentatrices de l’antigène (CPA), les lymphocytes T CD4+ et les lymphocytes B [55, 68, 69]. La synthèse des anticorps nécessite l’action initiale des CPA qui, après endocytose, interagissent avec une cellule T CD4+. Cette interaction comporte la présentation de l’antigène grâce aux molécules du complexe majeur d’histocompatibilité, reconnues par le récepteur T CD4+. En même temps surviennent deux interactions essentielles : l’une entre un récepteur B7 de la CPA et un récepteur CD28 du lymphocyte T CD4+ , l’autre entre un CD40 de la CPA et le CD40-ligand (CD154) de la cellule CD4+. L’activation T qui en résulte induit une expansion clonale importante des CD4+ mais aussi une production de cytokines par les cellules T CD4+ : interféron gamma, TNF, IL2 secrétés par la sous-classe Th1, tandis que la sous-classe Th2 sécrète l’IL4 et l’IL10. Ces cytokines et les interactions CD40/CD40-ligand induisent une activation des lymphocytes B, qui synthétisent les anticorps antiFVIII. Des données récentes suggèrent que le vWF réduit l’endocytose du FVIII par les CPA, ce qui pourrait réduire l’immunogénicité du FVIII [70]. Facteurs de risque d’apparition des anti-FVIII Mode d’action des alloanticorps anti-FVIII Les anticorps anti-FVIII ne reconnaissent pas un épitope spécifique, mais sont le plus souvent dirigés contre les domaines A2 ou C2 [55, 56]. Ceux dirigés contre le domaine C2 ont été les plus étudiés : ils empêchent la liaison du FVIII aux phospholipides par encombrement stérique [57]. Certains anticorps dirigés contre le domaine C2 empêchent la liaison au vWF. Théoriquement, ceci n’a pas d’effet inhibiteur, mais en empêchant la protection du FVIII par le vWF, ces anticorps rendent le FVIII plus sensible aux protéases qui l’inactivent, en particulier la PCa, le FXa et le FIXa. Des anticorps dirigés contre le domaine a3 ont aussi la capacité d’empêcher la fixation du vWF au FVIII [58]. Les anticorps anti-FVIII peuvent, par encombrement stérique, empêcher l’interaction du FVIII avec le FIXa : c’est le cas de certains anticorps anti-A2 ou anti-A3 qui bloquent l’interaction entre le FVIIIa et le domaine EGF-like du FIXa, bloquant ainsi la constitution de la ténase intrinsèque [59]. Certains autres anticorps pourraient aussi empêcher l’activation du FVIII en bloquant le site de liaison avec la thrombine [60] ou avec le FXa [61]. Certains anticorps auraient une activité catalytique [62-64]. Il a été montré que l’incubation de FVIII avec des IgG purifiées ou des anticorps anti-FVIII issus de patients hémophiles avec inhibiteur induit une dégradation du FVIII. Ces mêmes IgG ne dégradent ni le FIX, ni l’albumine. En revanche, les IgG humaines non issues de patients hémophiles avec inhibiteurs n’ont pas cette activité protéolytique sur le FVIII. Une activité catalytique serait retrouvée chez 50 % des patients hémophiles avec inhibiteurs alors qu’elle n’est présente ni chez les sujets sains, ni chez les patients hémophiles sans inhibiteurs [63]. 10 La prévalence des inhibiteurs anti-FVIII chez l’hémophile est estimée diversement : 4 % à 20 % selon les travaux. Cette diversité tient en partie aux caractéristiques des patients étudiés – les hémophiles sévères ayant un risque 4 fois plus élevé que les hémophiles modérés – mais aussi à l’évolution de l’inhibiteur : les inhibiteurs sont transitoires dans la moitié des cas. Les 5 % à 10 % d’inhibiteurs persistants constituent un problème thérapeutique difficile. C’est la raison pour laquelle les facteurs de risque de leur apparition ont été particulièrement étudiés. Deux groupes de facteurs peuvent être distingués : un risque individuel, lié aux caractéristiques génétiques de l’hémophile, et un risque lié aux modalités thérapeutiques. Facteurs génétiques de risque Il a été constaté très tôt que l’existence d’antécédents familiaux d’inhibiteurs multiplie par 2 le risque de développer un inhibiteur [71, 72] . En outre, le risque est d’autant plus important que la parenté est proche, ceci étant particulièrement net chez les jumeaux monozygotes. Plusieurs facteurs ont été mis en évidence. Le plus important est le type d’anomalie causale. Les formes avec délétion étendue ou mutation nonsens sont les plus exposées, avec 40 % à 60 % d’inhibiteurs, puis vient l’inversion de l’intron 22, où la fréquence des inhibiteurs est de 25 % à 30 %, puis viennent les petites délétions, les mutations faux-sens et les anomalies d’épissage (database HAMSTeRS). Le lien entre développement d’inhibiteurs et le système HLA a aussi été étudié, en particulier pour les antigènes de classe II. Ces études sont rendues difficiles par la variabilité des fréquences alléliques dans les populations et la diversité des mutations causales. Quelques travaux incluant des patients ayant tous la même anomalie génétique, l’inversion de Hématologie Hémophilie : physiopathologie et bases moléculaires ¶ 13-021-B-10 l’intron 22 [73, 74], ont permis d’éviter certains biais. Ces études mettent en évidence une augmentation de fréquence de certains haplotypes HLA, mais les différences ne sont que rarement significatives. Un élément très intrigant et retrouvé de façon constante est l’influence de l’origine ethnique. La fréquence des inhibiteurs dans les populations noires américaines est le double de celle observée dans les populations caucasiennes [75]. La fréquence est également augmentée, à un moindre degré, dans les populations latino-américaines [76] . La seule explication proposée est la présence de variations génétiques et de polymorphismes du FVIII [77]. Deux autres facteurs de risque génétiques ont été décrits. Le polymorphisme –388G>A sur le gène du TNF-a est plus fréquemment associé au développement d’inhibiteurs, mais l’augmentation de fréquence est faible et les intervalles de confiance très larges [78]. Une constatation identique a été faite avec un allèle situé dans la région du promoteur du gène de l’interleukine 10 [79]. Risques liés aux modalités thérapeutiques Le type de traitement utilisé et ses modalités d’application pourraient entraîner des risques différents. Dans les modalités d’application, les deux facteurs qui paraissent ressortir le plus souvent sont l’âge précoce de début des injections et le traitement « à la demande ». Âge de première exposition. Une étude rétrospective dans une cohorte de jeunes hémophiles espagnols [80] a mis en évidence une incidence d’inhibiteurs d’autant plus élevée que le traitement a été commencé tôt : 41 % d’inhibiteurs en cas de début avant 6 mois, 29 % entre 6 et 12 mois, 12 % entre 12 et 18 mois. Une étude rétrospective néerlandaise a corroboré ces observations, avec des incidences assez proches [81]. Ces faits n’ont pas été confirmés par deux plus larges études rétrospectives, menées chez des hémophiles britanniques [82] et canadiens [83], ni par une étude cas-témoin italienne [84]. Un élément doit être pris en considération pour analyser ces résultats : un enfant a d’autant plus de probabilité d’être traité tôt qu’il a une anomalie génétique induisant un phénotype sévère (grande délétion, mutation non-sens, inversion de l’intron 22). Nous avons vu que ces anomalies prédisposent au développement d’inhibiteurs. La prévalence pourrait donc être liée à la mutation causale plutôt qu’à l’âge de première exposition. Prophylaxie versus traitement à la demande. Deux des études citées précédemment évoquent un rôle protecteur de la prophylaxie [83, 84]. La prophylaxie commencée tôt réduirait le risque d’inhibiteur de 60 % [83], voire 80 % [84]. Elle induirait une sorte de tolérance immune en délivrant très tôt des doses importantes de FVIII et empêcherait le développement d’inhibiteurs. Autres facteurs thérapeutiques. L’une des circonstances d’immunisation est l’apport massif de facteurs antihémophiliques, tel qu’il est réalisé lors des interventions chirurgicales ou en cas d’hémorragie grave engageant le pronostic vital. Ceci a été particulièrement bien mis en évidence chez les hémophiles modérés [85, 86]. Les raisons peuvent être la présence de cofacteurs stimulant l’immunité, comme l’inflammation ou l’infection, ou l’existence de grandes lésions tissulaires qui pourraient aussi libérer des substances immunogènes. La pratique de la perfusion continue de FVIII a aussi été incriminée [86], du fait d’une possible altération du FVIII dans le liquide de perfusion, ou du risque plus grand de diffusion sous-cutanée, voie réputée la plus immunogène pour la plupart des antigènes. Risque lié au type de produits La question de l’influence du type de produits – plasmatique ou recombinant – sur le risque de développer un inhibiteur a été posée dès l’apparition des recombinants sur le marché. En l’absence d’étude contrôlée prospective, il n’y a pas, à l’heure actuelle, de réponse définitive. Des éléments de réponse peuvent venir de travaux fondamentaux ou du croisement de données Hématologie rétrospectives issues d’études observationnelles. Un groupe d’experts réunis à l’Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé (AFSSAPS) a tenté de faire le point sur cette question. Une argumentation détaillée et une large bibliographie figurent dans le rapport disponible sur le site de l’AFSSAPS (www.afssaps.sante.fr). Seuls sont abordés ici les aspects fondamentaux. Les facteurs VIII d’origine plasmatique ne sont pas identiques aux recombinants. Il est donc possible qu’ils aient une immunogénicité différente. Les principales différences au niveau du produit fini portent sur le niveau de la glycosylation, la diversité polymorphique du FVIII plasmatique, la présence ou non de vWF, et les altérations moléculaires pouvant être générées par les méthodes d’inactivation virale. Influence de la glycosylation. Le niveau et les sites de glycosylation peuvent avoir une influence sur l’immunogénicité. Or il est bien établi que les protéines recombinantes comportent des degrés de glycosylation différents des molécules naturelles. Ceci a été vérifié pour les concentrés de FVIII [87]. Les sites de glycosylation du FVIII sont situés sur le domaine B. Il n’existe cependant aucune donnée expérimentale confirmant l’influence de la glycosylation sur l’immunogénicité des différentes préparations de FVIII. Polymorphismes du FVIII. Le FVIII humain est réputé peu polymorphe, mais l’on sait maintenant que des polymorphismes existent, en particulier dans les domaines A2 et C2 [77], les plus immunogènes. On peut donc envisager que dans les concentrés issus du plasma existent des formes moléculaires différentes de FVIII, ce qui n’est pas le cas pour les recombinants. Les recombinants pourraient, théoriquement, en amenant une quantité suffisante d’une seule forme moléculaire, atteindre plus facilement le seuil nécessaire à l’activation du système immunitaire. Là encore, il s’agit de spéculations théoriques. Rôle de vWF. L’existence de vWF dans les préparations de FVIII plasmatique pourrait avoir des conséquences à la fois sur l’effet biologique de l’inhibiteur et sur l’immunogénicité du produit. Il semble en effet que le vWF présent dans les concentrés plasmatiques puisse avoir un certain effet protecteur sur la neutralisation du FVIII par les anticorps inhibiteurs. Ces constatations anciennes [88] ont été confirmées récemment [89, 90]. Les conséquences cliniques sont difficiles à évaluer. Il est peu probable que ces propriétés soient de nature à influer sur l’immunogénicité. En revanche, des données d’expérimentation animale suggèrent une plus forte immunogénicité des composés ne contenant pas de vWF, qu’il s’agisse de FVIII d’origine plasmatique déplété en vWF ou de FVIII recombinant [91]. En outre, les épitopes reconnus par les anticorps inhibiteurs sont différents selon que le produit contienne ou non du vWF. Une des explications possibles serait l’effet du vWF sur la réponse immune. Il a été montré que le vWF réduit l’endocytose du FVIII par les CPA [70]. L’endocytose étant la première étape dans le déroulement de la réponse immunitaire anti-FVIII, cette propriété pourrait réduire l’immunogénicité des concentrés de FVIII comportant du vWF. Modification d’antigénicité par les procédés d’inactivation virale. Les procédés d’inactivation virale auxquels sont soumis les dérivés plasmatiques peuvent entraîner des modifications de l’antigénicité. On en connaît deux exemples. Le premier concerne des patients belges et néerlandais qui ont reçu, en 1990, un dérivé FVIII plasmatique pasteurisé à 60 °C. Un inhibiteur est apparu chez 19 patients, dont 15 avaient plus de 200 jours d’exposition à l’antigène. Après changement de produit, l’inhibiteur a disparu chez 18 patients, ce qui confirme le rôle du nouveau produit dans l’immunisation [92, 93]. Le second exemple a été l’apparition d’inhibiteurs chez 8 hémophiles belges parmi 140 multitransfusés [94] et 12 hémophiles allemands parmi 109 antérieurement traités, tous après introduction d’un même concentré de FVIII purifié par chromatographie échangeuse d’ions, puis traité par double inactivation : solvant-détergent puis pasteurisation. Il est intéressant de 11 13-021-B-10 ¶ Hémophilie : physiopathologie et bases moléculaires relever que dans les deux cas, l’anticorps était dirigé uniquement contre la chaîne légère du FVIII (domaine A3-C1-C2). En outre, l’anticorps d’un patient fort répondeur était neutralisé in vitro à plus de 95 % par le domaine C2. Dans les deux cas, l’inhibiteur a disparu après l’arrêt du concentré incriminé et son remplacement par un autre produit [94, 95]. Contaminants des produits. Les procédés d’extraction des dérivés plasmatiques ont évolué pour permettre l’obtention de produits très hautement purifiés et sécurisés. En fonction des périodes, voire des lieux de production dans les différents pays où ils sont préparés, les dérivés plasmatiques contiennent des contaminants divers en quantité variable. Certains de ces contaminants peuvent avoir une influence sur la réponse immune. Le contaminant le plus souvent cité est le transforming growth factor b (TGF-b) [96, 97], qui pourrait moduler la réponse immune en diminuant la réponse lymphocytaire T aux mitogènes et en augmentant l’apoptose de sous-classes cellulaires T. En fait, le rôle du TGF-b a été mis en doute du fait des très faibles concentrations de cytokine dans les dérivés plasmatiques [98]. Le rôle d’autres contaminants possibles tels que le fibrinogène ou la fibronectine a été évoqué, mais sans arguments précis. Pour les produits recombinants, un contaminant a été particulièrement suspecté de modifier la réponse immune : les anticorps d’origine murine, présents sur les colonnes utilisées pour purifier le composé initial par chromatographie d’affinité. Ici encore, il n’existe aucun argument expérimental à l’appui de cette hypothèse. Anticorps inhibiteurs du FIX . Si le développement d’anti-IX est possible dans l’hémophilie B, la plupart des études cliniques montrent une prévalence faible, chiffrée entre 1 % et 3 % [99]. Seule une étude suédoise a montré une prévalence d’anti-IX plus élevée, estimée à 23 % [100]. L’une des raisons avancées pour cette faible prévalence est la moindre fréquence des mutations non-sens dans l’hémophilie B, mutations qui, tout comme les grandes délétions, induisent l’absence de traces de FIX circulant. D’autres facteurs ont été évoqués. On constate en effet que dans les formes liées à une mutation non-sens, la prévalence d’inhibiteurs est moindre dans l’hémophilie B : 6 % contre 30 % dans l’hémophilie A. D’autre part, la grande homologie du FIX avec les autres facteurs vitamine K-dépendants et la plus large distribution extravasculaire du FIX, du fait de son faible poids moléculaire, pourraient aussi être des facteurs de protection contre la réponse immune. L’origine ethnique ou le type de produit, plasmatique ou recombinant, ne semblent pas modifier la prévalence des anti-IX chez l’hémophile B. Enfin, cliniquement, la réponse immune anti-IX s’accompagne fréquemment de réactions allergiques sévères, témoignant probablement d’une réponse immune particulière. 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Disponibles sur www.em-consulte.com Arbres décisionnels 14 Iconographies supplémentaires Vidéos / Animations Documents légaux Information au patient Informations supplémentaires Autoévaluations Hématologie