
une place de plus en plus visible à l’information stratégique dans
la gestion de leurs affaires.
Notre article s’inscrit parfaitement dans ce contexte caractérisé
par un environnement incertain et imprévisible, notre objectif
consiste à donner des précisions et des réponses à la question :
comment armer les entreprises pour prévoir l’imprévisible ?
Pour répondre à cette question, notre article confronte le discours
académique et la pratique managériale sur le thème de
l’intelligence économique. Peu exploré jusqu’à maintenant,
thème de recherche transdisciplinaire et concept en maturation,
il fait progressivement l’objet de travaux de recherche en sciences
de gestion (S. Larivet, 2002 ; D. Phanuel et D. Levy, 2003 ;
M. Oubrich, 2004, 2005). L’intelligence économique (IE) repré-
sente une discipline récente en France (Ph. Baumard, 1991 ;
H. Lesca, 1994 ; H. Martre, 1994 ; H. Dou, 1995 ; A. Bloch, 1995;
F. Bournois et PJ. Romani, 2000,) qui se situe au carrefour de
plusieurs sciences.
1.1. Problématique de recherche
La littérature permet d’affirmer que la création des connais-
sances est désormais une préoccupation majeure pour les organi-
sations, qui les considèrent comme un avantage concurrentiel, ou
comme une nécessité dans le cadre de changements internes ou
environnementaux. La recherche en sciences de gestion a produit
une littérature riche sur le sujet (GP. Huber, 1991 ; M. Girod,
1995; J.-C. Spender, 1996 ; M. Polanyi, 1966 ; I. Nonaka, 1994,
I. Nonaka et H. Tackeuchi, 1995). Malgré le large consensus à
l’effet que l’intelligence économique contribue à la création de
nouvelles connaissances, nous dénombrons peu d’études dans
le domaine (F. Bournois et PJ. Romani, 2000 ; J.-L. Levet, 2001;
A. Du Toit, 2003 ; M. Oubrich, 2003, 2004, 2005,).
Les thèses en sciences de gestion soutenues sur le thème de
l’intelligence économique se sont focalisées sur la réalité des
pratiques d’intelligence économique dans les PME (CRM. de
Vasconcelos, 1999 ; S. Larivet, 2002), elles sont donc plutôt quali-
fiées comme des recherches sur le contenu. Or, l’intelligence
économique apparaît aussi comme un processus qui permet de
fournir une réponse « intelligente » à une problématique qui
semble aujourd’hui incontournable en sciences de gestion, celle
de la création des connaissances (M. Oubrich, 2004). Nous
estimons qu’aucun des travaux cités ne nous permet de répondre
à cette problématique. Aussi sommes-nous amené à nous inter-
roger sur l’existence d’une recherche en cours en sciences de
gestion sur ce thème. A ce propos, le fichier central des thèses
nous confirme qu’aucune recherche doctorale n’est consacréeà
cette problématique.
Finalement notre problématique de recherche est : Comment
l’intelligence économique permet-elle de créer des connais-
sances nouvelles dans l’entreprise ?
La problématique de cet article s’inscrit à la croisée des deux
thèmes : l’intelligence économique et la création des connais-
sances. Nous ne cherchons pas à apporter une nouvelle méthode
d’organisation de l’intelligence économique au sein des entre-
prises. En revanche, nous nous intéressons à la création collec-
tive de connaissances. Par création collective, nous entendons la
manière dont des individus interagissent pour arriver à une
compréhension explicite de l’environnement.
A travers cette problématique, nous répondons aux préoccupa-
tions actuelles d’une part, en gestion des connaissances qui
évoluent vers des problématiques liées à la création des connais-
sances plutôt qu’à la seule question du stockage/mémorisation
des connaissances, et d’autre part en intelligence économique
cherchant à montrer que l’intelligence économique ne se réduit
pas à la gestion de l’information, mais à la création des connais-
sances nécessaires à la prise de décision et à l’innovation.
1.2. Question de recherche
Notre problématique peut être traitée de différentes manières, il
nous apparaît nécessaire à ce stade de faire un choix qui guidera
notre raisonnement tout au long de cette recherche. Le terme
mécanisme a attiré notre attention, par rapport à d’autres termes
comme déterminant, condition… Le dictionnaire le Robert définit
mécanisme comme une « combinaison ou agencement de pièces,
d’organes, montés en vue d’un fonctionnement ». En ce qui nous
concerne, nous entendons par « mécanisme » l’agencement ou la
combinaison des éléments organisationnels, stratégiques et
cognitifs, en vue de créer des connaissances pour l’entreprise.
Nous nous plaçons dans le cas particulier de connaissances
créées par un processus d’intelligence économique, et nous
cherchons à identifier le ou les mécanismes de cette création des
connaissances. Notre recherche vise ainsi à répondre à la
question suivante : Par quel(s) mécanisme(s) le processus
d’intelligence économique crée-t-il des connaissances dans
l’entreprise ?
1.3. L’intérêt de la recherche
L’intérêt de cette recherche pour les entreprises et leurs
dirigeants découle pour une part essentielle de l’approche
théorique et empirique que nous présenterons ultérieurement.
Nous avons soulevé antérieurement quelques points qui clarifient
les objectifs de notre recherche. Nous allons ici développer un
peu plus et d’une façon plus structurée la réflexion sur les intérêts
de cette recherche. Ces intérêts s’analysent en trois points :
– sur le plan théorique : apporter une réponse à la question de
création des connaissances dans un processus d’intelligence
économique à travers une littérature centrée à la fois sur
l’information et sur la connaissance ;
– sur le plan pratique: proposer un modèle de l’intelligence
économique comme processus de création des connaissances
dans les entreprises, puis élaborer un cadre méthodologique
La Revue des Sciences de Gestion, Direction et Gestion n° 226-227 – Stratégie78
Dossier
Économie de la connaissance
juillet-octobre 2007