Synthèse Ann Biol Clin 2017 ; 75 (2) : 129-45 Actualisation des traitements et du suivi moléculaire dans la prise en charge de la leucémie myéloïde chronique Copyright © 2017 John Libbey Eurotext. Téléchargé par un utilisateur anonyme le 06/04/2017. Treatment and molecular monitoring update in chronic myeloid leukemia management Nathalie Sorel1 Émilie Cayssials2 Françoise Brizard3 Jean-Claude Chomel1 1 Service de cancérologie biologique, CHU de Poitiers, Poitiers, France <[email protected]> 2 Service d’oncologie hématologique et thérapie cellulaire, CHU de Poitiers, Poitiers, France 3 Service d’hématologie biologique, CHU de Poitiers, Poitiers, France Résumé. La leucémie myéloïde chronique (LMC) est une hémopathie maligne du groupe des néoplasies myéloprolifératives. Elle est la conséquence de la translocation t(9;22)(q34;q11) qui est à l’origine du gène de fusion BCR-ABL1 codant une protéine à fonction tyrosine kinase exacerbée. Sa prise en charge a été exceptionnellement améliorée grâce à l’utilisation d’inhibiteurs de tyrosine kinase ou ITK (imatinib, dasatinib, nilotinib, bosutinib, ponatinib). En effet, la plupart des patients diagnostiqués aujourd’hui ont une espérance de vie voisine de celle de la population générale. L’efficacité thérapeutique peut être régulièrement contrôlée grâce à un suivi moléculaire adapté, basé sur la quantification des ARNm BCR-ABL1 par RT-PCR en temps réel et par la recherche des mutations du domaine kinase de BCR-ABL à l’origine de résistances plus ou moins sévères à la thérapie ciblée. Des recommandations internationales permettent au clinicien, en se basant sur les paramètres biologiques, d’apprécier la réponse au traitement et d’envisager, si nécessaire, un changement d’ITK. Dans certaines circonstances, appelées « réponses moléculaires profondes de longue durée », une interruption du traitement peut être proposée, et environ la moitié des patients reste en rémission moléculaire. Pour l’autre moitié des patients, l’observation de rechutes moléculaires pourrait provenir de la persistance de cellules souches leucémiques (CSL). Comment prévoir ces rechutes ? Comment éradiquer les CSL résiduelles ? Est-ce vraiment nécessaire ? De nombreux travaux de recherche fondamentale ou clinique tentent de répondre à ces questions afin de pouvoir envisager une véritable guérison de la LMC, idée révolutionnaire pour une affection maligne chronique. doi:10.1684/abc.2017.1233 Mots clés : leucémie myéloïde chronique, inhibiteurs de tyrosine kinase, suivi moléculaire, BCR-ABL1, résistance Article reçu le 21 mars 2016, accepté le 11 mai 2016 Tirés à part : J.-C. Chomel Abstract. Chronic myeloid leukemia (CML) is a myeloproliferative neoplasm resulting from the t(9;22)(q34;q11) translocation. It is characterized by the presence of the BCR-ABL1 fusion gene encoding the BCR-ABL oncoprotein characterized by a deregulated tyrosine kinase activity. Targeted therapies using tyrosine kinase inhibitors (TKI) such as imatinib, dasatinib, nilotinib, bosutinib, or ponatinib have profoundly changed the natural history of the disease with a major impact on survival. Indeed, most patients diagnosed today can enjoy a near normal life expectancy. The efficacy of TKI treatment can be accurately evaluated by a molecular monitoring based on the quantification of BCR-ABL1 mRNA transcripts and the detection of resistance mutations in the BCR–ABL kinase domain. International recommendations for an optimal management of CML using biological parameters are regularly published. They were designed to evaluate the response to the treatment and to consider, if necessary, a switch Pour citer cet article : Sorel N, Cayssials É, Brizard F, Chomel JC. Actualisation des traitements et du suivi moléculaire dans la prise en charge de la leucémie myéloïde chronique. Ann Biol Clin 2017 ; 75(2) : 129-45 doi:10.1684/abc.2017.1233 129 Synthèse to another TKI. A sustained and deep molecular response is obtained in a significant percentage of patients. Clinical trials of TKI discontinuation were performed in such a population, and half of patients do not relapse. In the remaining patients, a rapid appearance of the malignant clone was observed, undoubtedly the consequence of the persistence of residual leukemic stem cells (LSCs). How to discriminate patients who may safely stop TKI? How to target residual LSCs, and do we have to eradicate all these cells? Additional research investigation and clinical trials are needed to answer these questions in order to consider a potential cure of CML. Copyright © 2017 John Libbey Eurotext. Téléchargé par un utilisateur anonyme le 06/04/2017. Key words: chronic myeloid leukemia, tyrosine kinase inhibitors, molecular monitoring, BCR-ABL1, resistance La leucémie myéloïde chronique (LMC) est une hémopathie maligne faisant partie du groupe des néoplasies myéloprolifératives comprenant également la polyglobulie de Vaquez, la thrombocytémie essentielle et la myélofibrose primitive [1]. En France, la LMC représente 600 à 700 nouveaux cas par an (environ 1 cas pour 100 000 habitants) et 15 % des leucémies de l’adulte (Fi-LMC, France Intergroupe de la leucémie myéloïde chronique). L’âge médian au diagnostic est de 59 ans. Dans les premiers temps de la maladie, l’état général du patient reste conservé. Il peut cependant éprouver de la fatigue et présenter une splénomégalie. De nos jours, le diagnostic se fait fréquemment au cours d’un examen de routine. La numération formule sanguine met alors en évidence une hyperleucocytose (à polynucléaires neutrophiles), une myélémie, ainsi qu’une basophilie. Le diagnostic de LMC nécessite la mise en évidence du chromosome Philadelphie ou Ph1 (observé dans plus de 95 % des cas) et du réarrangement moléculaire BCR-ABL1, conséquences directes de la translocation t(9;22)(q34;q11). En l’absence de traitement, la maladie évolue d’une phase chronique (3-5 ans) à une phase aiguë ou blastique, en passant par une phase d’accélération. Nous détaillerons dans cet article les aspects thérapeutiques ainsi que le suivi moléculaire, tout en soulignant les problématiques actuelles de la LMC et en évoquant le futur d’une maladie devenue au fil du temps un modèle biologique. Historique de la LMC Les premières descriptions d’une leucémie myéloïde chronique (sans doute en phase aiguë) ont été réalisées par le français Alfred Donné, l’écossais John Hughes Bennet et l’allemand Rudolph Virchow au milieu du XIXe siècle [2]. Les autopsies pratiquées par Bennet semblaient montrer la présence de matières purulentes dans le sang des patients. En se basant sur des observations microscopiques, Virchow apporta la preuve qu’il s’agissait en fait d’un large excès de 130 leucocytes. Plus de cent ans après, Peter Nowell et David Hungerford mettaient en évidence un petit chromosome ressemblant au chromosome Y et présent dans les cellules sanguines des patients atteints de LMC (figure 1 A). Cette anomalie chromosomique a été la première décrite dans une pathologie maligne. Ce chromosome, appelé chromosome Philadelphie (ou Ph1) fut ensuite caractérisé par Janet Rowley en 1973. Il s’agissait d’un chromosome 22 raccourci résultat d’une translocation réciproque et équilibrée, la translocation t(9;22)(q34;q11). Les années 1980-90 ont été caractérisées par une intense activité de recherche dans les domaines de la biologie cellulaire et moléculaire. Il a été démontré que les gènes ABL1 et BCR, localisés respectivement sur les chromosomes 9 et 22, étaient impliqués dans la translocation t(9;22). Il a été également prouvé que le gène BCR-ABL1 était à l’origine de la maladie. L’activité tyrosine kinase dérégulée de la protéine BCR-ABL a été décrite comme l’événement majeur du processus de leucémogenèse et les différentes voies de signalisation induites par cette oncoprotéine ont été répertoriées. En 1998, un premier inhibiteur de tyrosine kinase (ITK) d’ABL (et donc de BCR-ABL) a été testé avec succès chez des patients LMC en phase chronique (figure 1A). Ce médicament (imatinib) a ouvert la voie à une thérapie ciblée particulièrement efficace. Enfin, plus récemment des essais d’arrêt de traitement ont montré qu’environ la moitié des patients demeurait en rémission moléculaire malgré l’absence d’inhibiteur. Ces travaux, ainsi que les études sur les cellules souches leucémiques, la niche hématopoïétique et les agents pouvant agir à ce niveau permettent d’envisager une guérison de la LMC dans un futur proche. Traitement de la LMC Thérapies historiques Le premier traitement symptomatique de la LMC a été publié par Heinrich Lissauer en 1865. Il préconisait Ann Biol Clin, vol. 75, n◦ 2, mars-avril 2017 Traitement et suivi moléculaire de la LMC A 20 80 19 19 50 50 18 Guérison 10 1973 : La translocation t(9;22)(q34;q11) Arsenic Irradiation splénique Busulfan Hydroxyurée Allogreffe de CSH Interféron α Imatinib ITK-2 B ITK-3 100 % 90 % Imatinib 80 % 70 % Survie globale Copyright © 2017 John Libbey Eurotext. Téléchargé par un utilisateur anonyme le 06/04/2017. 1998 : 1ère utilisation d’un inhibiteur de tyrosine kinase (ITK) ? 1960 : Le chromosome Philadelphie (Ph1) 1842-1846 : 1ères descriptions d’une leucémie 2010 : 1ers essais d’interruption de traitement par ITK 1983-1995 : L’oncogenèse BCR-ABL 60 % 50 % 40 % Interféron-α 30 % 20 % Hydroxyurée 10 % Busulfan 2 4 6 8 10 12 14 16 18 20 22 24 Années après le diagnostic Figure 1. Historique de la leucémie myéloïde chronique (LMC). D’après [2, 62]. A : Les dates clés et les découvertes essentielles sont représentées, de même que les traitements utilisés. CSH : cellules souches hématopoïétiques, ITK : inhibiteur de tyrosine kinase. B : Le graphique présente la survie globale en fonction des traitements (busulfan, hydroxyurée, les différents essais utilisant l’interféron-␣ et l’imatinib). l’utilisation d’une solution d’arsénite de potassium (titrée à 1 % en trioxyde d’arsenic). Ce produit découvert par Thomas Fowler en 1786 (appelé liqueur de Fowler) a été utilisé pendant plus d’un siècle comme médicament ou tonique [2]. Ann Biol Clin, vol. 75, n◦ 2, mars-avril 2017 L’irradiation splénique, utilisée dès la fin du XIXe siècle en tant que traitement palliatif, apportait une amélioration temporaire chez certains patients en phase chronique de leur maladie. La chimiothérapie conventionnelle 131 Copyright © 2017 John Libbey Eurotext. Téléchargé par un utilisateur anonyme le 06/04/2017. Synthèse reposant sur le busulfan (dès les années 1950) ou l’hydroxyurée (années 1970) permettait la normalisation de l’hémogramme (figure 1 A et B). Cependant ces traitements ne permettaient pas de stopper l’évolution naturelle de la maladie vers une leucémie aiguë. De nos jours encore, l’hydroxyurée est utilisée au diagnostic lorsque le nombre de leucocytes sanguins est élevé (> 80-100×109 /L) et poursuivie jusqu’à la confirmation de la présence du chromosome Ph1 et /ou la mise en évidence d’un réarrangement BCR-ABL1. Au début des années 1980, l’allogreffe de cellules souches hématopoïétiques (CSH) devient le seul traitement curatif de la LMC. Cependant, du fait des effets secondaires de la greffe et du manque de donneurs, ce traitement ne peut concerner qu’un nombre restreint de patients. L’interféron␣, introduit par le centre médical MD Anderson (Texas, USA) au début des années 1980, était capable d’induire des rémissions cytogénétiques complètes (absence de chromosome Ph1) chez une minorité de patients (moins de 20 %). L’association de la cytarabine (ou cytosine arabinoside), un analogue nucléosidique de la pyrimidine, à l’interféron-␣ a permis d’améliorer le taux de réponse cytogénétique et le pourcentage de survie à 3 ans (86 % vs 79 %) [3]. Dans de rares cas, des rémissions moléculaires de longue durée (ARNm BCR-ABL1 non détectable dans le sang) ont été observées, certaines ayant conduit à des arrêts de traitement sans rechute [4]. Ainsi, depuis les années 1950 et jusqu’au début des années 2000, la survie globale des patients atteints de LMC a été sans cesse améliorée (figure 1B). Néanmoins les traitements utilisés ne permettaient, chez la plupart des patients, que de contrôler la maladie en tentant d’éviter la transformation aiguë. Seule l’allogreffe de cellules souches hématopoïétiques restait susceptible de conduire à une guérison de la maladie. Les tyrosines kinases sont, le plus souvent, dans une conformation inactive (inaccessible à l’ATP). Pour la protéine ABL, cette auto-inhibition implique des interactions fortes entre les domaines de régulation SH2 et SH3 (en amont du domaine kinase) et le domaine kinase. De plus, le groupement myristate N-terminal permet de verrouiller la protéine (sur le site d’insertion du myristate du domaine tyrosine kinase) en position inactive ou autoinhibée. L’activation se fait par déverrouillage du groupe myristoyl, déclampage des domaines SH2/3 et changement de conformation de la boucle d’activation permettant l’autophosphorylation sur la tyrosine en position 393 stabilisant la protéine sous sa forme active (figure 2B). L’imatinib Un inhibiteur de BCR-ABL doit pouvoir cibler spécifiquement cette protéine (notamment sa fonction enzymatique), doit avoir une toxicité acceptable et doit pouvoir pénétrer à l’intérieur des cellules. De plus, son activité doit être restreinte aux cellules malignes. Un analogue des phénylamino-pyrimidines (le STI571) s’est révélé être un puissant inhibiteur de la phosphorylation de la kinase BCR-ABL. Il reconnaît la forme inactive de la protéine (inhibiteur de type II) et fonctionne comme un inhibiteur compétitif de l’ATP (figure 2C). Dès le début des années 1990, le STI571 a montré son efficacité sur des modèles cellulaires et murins [6]. Des résultats spectaculaires chez les patients atteints de LMC ont été observés dans l’essai de phase I. Enfin, le STI571 (imatinib) a montré une efficacité supérieure au traitement de référence (interféron-␣ + cytarabine) [7]. Après 6 ans de traitement par imatinib de patients diagnostiqués en phase chronique, la survie globale est voisine de 90 % (figure 1B) [8]. L’imatinib est ainsi devenu le traitement de référence de la LMC et le modèle d’une thérapie ciblée dans le domaine des affections malignes. Les protéines à fonction tyrosine kinase L’oncoprotéine BCR-ABL ayant une fonction tyrosine kinase exacerbée, une thérapie ciblée était envisageable. Chez l’homme, plus de 500 protéines kinases ont été décrites, dont 90 tyrosines kinases [5]. Leur structure, notamment leur domaine kinase, se ressemble beaucoup. Dans sa partie N-terminale, la protéine ABL (non réarrangée) est constituée des domaines régulateurs SH2 et SH3 (pour SRC-homology) et des deux lobes du domaine tyrosine kinase ou SH1 (lobes N et C-terminaux). Ce domaine comprend une suite d’hélices␣ et de feuillets-. La boucle P permet la fixation du groupe phosphate de l’ATP, la boucle A est impliquée dans l’activation de la protéine et le site catalytique (boucle C) permet la phosphorylation de protéines substrats (figure 2A). 132 Résistances à l’imatinib Malgré les résultats extraordinaires apportés par l’imatinib, des résistances sont rapidement apparues. En dehors d’une mauvaise compliance, celles-ci dépendent, soit de l’imatinib (pharmacocinétique, pompes d’influx, pompes d’efflux), soit de la cellule leucémique (instabilité génétique, activation d’autres voies de signalisations oncogéniques), soit de la cible BCR-ABL (amplification génique BCR-ABL1, mutation du domaine kinase de BCR-ABL) [9]. Ces mutations représentent environ 25 % des causes de résistance à l’imatinib. Plus de 100 mutations ont été répertoriées touchant plus de 70 acides aminés [10]. Les mutations les plus fréquemment retrouvées sont localisées dans la boucle P (G250E/R, Y253F/H, E255K/V), la charnière (T315I), la zone de contact SH2, le site Ann Biol Clin, vol. 75, n◦ 2, mars-avril 2017 Traitement et suivi moléculaire de la LMC Lobe C-terminal β6 31 30 0 25 αD αE β7-8 β9-12 αF β13 αG 0 β5 40 αC 35 0 β4 5 β3 0 β2 αH αI αJ 50 0 Lobe N-terminal 45 0 A C N Boucle P Charnière Boucle A Zone de contact SH2 Myristate B Lobe N N Site de fixation de l’ATP SH3 SH3 Lobe N Y Boucle d’activation (boucle A) Activation de la Y SH2 Copyright © 2017 John Libbey Eurotext. Téléchargé par un utilisateur anonyme le 06/04/2017. Zone de contact SH3 Boucle C tyrosine kinase ABL TK (SH1) SH2 TK (SH1) N Lobe C Lobe C C C Conformation inactive Site de fixation du myristate Conformation active C Inhibiteurs compétitifs de l’ATP (ITK) BCR BCR N Inhibiteurs compétitifs de l’ATP (ITK) N Dasatinib (ITK-2, type I) Bosutinib (ITK-2, type I) Imatinib (ITK-1, type II) Dasatinib (ITK-2, type I) Nilotinib (ITK-2, type II) Bosutinib (ITK-2, type I) Ponatinib (ITK-3, type II) Y Y Inhibiteurs allostériques C ABL001 GNF2 C Figure 2. Les domaines tyrosines kinases d’ABL et de BCR-ABL. D’après [63, 64]. A : Le domaine kinase d’ABL (ou de BCR-ABL) est composé d’un enchaînement de feuillets- et d’hélices-␣. Il comprend différentes zones fonctionnelles indispensables à l’activité enzymatique. B : L’activation de la protéine ABL non transloquée nécessite le déverrouillage du groupe myristoyl, la dissociation des interactions des domaines SH2/3 avec le domaine tyrosine kinase et le changement de conformation de la boucle d’activation. C : La protéine BCR-ABL peut également se présenter dans un état inactif ou actif. Les inhibiteurs de tyrosine kinase (ITK) peuvent prendre la place de l’ATP et ainsi inhiber l’activité enzymatique. Les inhibiteurs allostériques peuvent induire un changement conformationnel rendant l’enzyme inactive. catalytique (M351T, F359C/I/L/V) ou la boucle d’activation (H396P/R) (figure 3). Ces mutations faux sens peuvent altérer des points de liaison entre l’imatinib et le domaine kinase (perte d’une liaison hydrogène en T315, perte d’une liaison de van der Walls en Y253), être à l’origine d’un encombrement de l’entrée de la poche ATP (G250), d’une modification de la flexibilité Ann Biol Clin, vol. 75, n◦ 2, mars-avril 2017 de la boucle P ou d’une déstabilisation de la forme inactive de la protéine (H396) [11]. Les différentes mutations sont associées à une réduction plus ou moins importante de la sensibilité à l’imatinib, objectivée in vitro par les rapports IC50 mutant/sauvage [12, 13]. Les mutants de la boucle P et la mutation T315I sont à l’origine d’une résistance totale à l’imatinib (figure 4). 133 Synthèse Mutations Mutations A217P Zone de contact SH3 Y232H I242T Charnière M244V Copyright © 2017 John Libbey Eurotext. Téléchargé par un utilisateur anonyme le 06/04/2017. Boucle P (fixation du P de l'ATP) L298V V379I W V299L F311L/I/V/Y M237V L248V Mutations W A380T W F382L W T315A H L384M T315I H L387M/F/V F317L/V/I/C W Boucle A (activation) M388L G250A/E/V/R L324Q Q252E/H/R Y342H H396P/R/A M343T A397P A344V S417F/Y Y253F/H W E255K/V Zone de contact SH2 Y393C A350V I418S/V W261L M351T/V A433T L273M E355D/G/A S438C E275K/Q F359V/I/C/L P441L D276G D363Y E450K/G/A/V T277A L364I E453G/K/V/Q E258D Boucle C (catalytique) E279K V280A V289A/I W A365V E459K/V/G/Q A366G M472I L370P W P480L E292V/Q V371A F486S I293V E373K E507G H375Y G514S Figure 3. Les mutations du domaine kinase de BCR-ABL. D’après [63]. Les mutations en rouge sont celles retrouvées le plus souvent. W et H représentent respectivement les acides aminés impliqués dans des liaisons de van der Walls et des ponts hydrogènes. Les ITK de 2e et 3e génération Afin de pouvoir être utilisés chez les patients intolérants à l’imatinib et conserver une efficacité sur les mutants du domaine kinase de BCR-ABL, des inhibiteurs de deuxième génération (ou ITK-2) ont été développés (figure 2C). Le nilotinib (analogue de l’imatinib) ne fonctionne que sur la forme inactive de l’oncoprotéine (inhibiteur de type II) [14]. Le dasatinib et le bosutinib (inhibiteurs mixtes SRC/ABL) peuvent se fixer sur la protéine BCR-ABL en conformation active et inactive [15, 16]. Ces agents thérapeutiques sont efficaces sur la plupart des mutants à l’exception des mutations de la boucle P pour le nilotinib, des mutations V299L et T315A pour le dasatinib, et de la mutation T315I pour tous les ITK-2 (figure 4) [9]. Des essais cliniques ont récemment démontré que le nilotinib ou le dasatinib utilisés en première ligne montraient des réponses moléculaires plus précoces et plus profondes qu’avec l’imatinib [17, 18]. Le ponatinib est un ITK de 3e génération (ITK-3) de type II se fixant uniquement dans la conformation inactive de BCR134 ABL (figure 2C). À la différence des autres inhibiteurs, il ne contracte pas de liaison hydrogène avec la thréonine en position 315. Il est ainsi efficace, du moins in vitro, sur toutes les mutations, y compris la substitution T315I (figure 4) [19]. Mutations du domaine kinase d’ABL et résistances aux ITK-2 et ITK-3 Tous les mutants du domaine kinase de BCR-ABL sont (du moins in vitro) sensibles à au moins un ITK. Dans quelques rares cas, plus d’une mutation du domaine kinase d’ABL peut être détectée (en majorité des mutations doubles). Si ces mutations sont présentes dans la même cellule, il s’agit alors de mutations composées (par exemple E255K/T315I). Si elles sont présentes dans des cellules différentes, il s’agit de mutations polyclonales (par exemple E255K + T315I). Les mutations composées représentent 70 % des mutations doubles [20]. La plupart des mutations composées comportant la mutation T315I entraînent une résistance globale à Ann Biol Clin, vol. 75, n◦ 2, mars-avril 2017 Traitement et suivi moléculaire de la LMC Imatinib Nilotinib Dasatinib Bosutinib Ponatinib wt M244V G250E Q252H Y253H E255K E255V V299L F311L T3151 T315A F317L M351T Résistant F359V V3791 H396R H396P F486S M244V/T315I G250E/T31I Q25H/T315I Y253H/T315I E255V/T3151 F311L/T315I Mutations composées Copyright © 2017 John Libbey Eurotext. Téléchargé par un utilisateur anonyme le 06/04/2017. Sensible T315I/M351T T315I/F359V T315I/H396R G250E/V299L Y253H/E255V Y253H/F317L E255V/V299L V299L/F317L V299L/M351T V299L/F359V F317L/F359V Figure 4. Activité des inhibiteurs de tyrosine kinase sur les mutants BCR-ABL les plus fréquemment détectés dans le cadre de résistance. D’après [12, 13, 21]. Les couleurs sont basées sur le coefficient de multiplication des IC50 (non muté ou wt = 1). Ann Biol Clin, vol. 75, n◦ 2, mars-avril 2017 135 Copyright © 2017 John Libbey Eurotext. Téléchargé par un utilisateur anonyme le 06/04/2017. Synthèse tous les ITK, y compris le ponatinib [21]. Des mutations composées ne comportant pas la mutation T315I sont à l’origine d’une résistance totale à plusieurs ITK (figure 4). Les mutants V299L/F317L sont résistants à l’imatinib et au dasatinib. La mutation simple T315M générée par deux mutations séquentielles touchant le même acide aminé (T315I puis I315M) entraîne une résistance globale à tous les ITK. Ainsi, la présence de ces mutations (observée dans de rares cas) pourrait conduire à une impasse thérapeutique. Cependant, il a été montré récemment, en se basant sur des analyses NGS (next generation sequencing), que la présence de mutations du domaine kinase de BCR-ABL (y compris les mutations composées) pouvait ne pas être la cause majeure de résistance au ponatinib chez des patients déjà résistants aux autres ITK [22]. Les inhibiteurs allostériques Les inhibiteurs allostériques ne se fixent pas au niveau de la poche ATP mais peuvent rendre la kinase inactive en modifiant sa conformation. Ils peuvent, comme GNF2 et ABL001, se fixer sur le site d’insertion du myristate et ainsi mimer l’autoinhibition existante dans la protéine ABL non réarrangée (figure 2C) [23]. Ils pourraient être utilisés en combinaison avec un ITK afin de réduire le risque de résistance. L’association ABL001-nilotinib est en cours d’essai de phase I chez des patients atteints de LMC ou de LAL (leucémie aiguë lymphoblastique) à chromosome Ph1. Le clinicien dispose désormais d’un arsenal thérapeutique complet et extrêmement efficace auquel il faut ajouter l’allogreffe de cellules souches hématopoïétiques qui est encore utilisée dans des situations particulières. Diagnostic génétique et suivi moléculaire des LMC Le diagnostic génétique Le diagnostic génétique de LMC repose sur des analyses de cytogénétique et de biologie moléculaire. Les premières comportent la mise en évidence du chromosome Philadelphie (caryotype sanguin ou médullaire) et/ou du réarrangement BCR-ABL1 par hybridation in situ en fluorescence (FISH). Dans plus de 95 % des cas de LMC, le chromosome Ph1 peut être mis en évidence sur un caryotype conventionnel. Dans tous les cas de LMC, la FISH met en évidence un réarrangement entre les gènes BCR et ABL1. Le chromosome Ph1 peut ne pas être visible en cytogénétique conventionnelle (Ph1 masqué) lors d’une insertion cryptique d’ABL1 dans le gène BCR (sur le chromosome 22), de la localisation du gène de fusion sur le chromosome 9 ou dans certaines translocations complexes (impliquant un ou plusieurs autres chromosomes partenaires). 136 Les analyses moléculaires sont basées sur une RT-PCR (Reverse transcription-polymerase chain reaction) multiplexe permettant la mise en évidence de tous les réarrangements BCR-ABL1 possibles. Les réarrangements les plus communément détectés dans la LMC sont de type e13a2 (jonction de l’exon 13 de BCR avec l’exon 2 d’ABL1) et e14a2 (jonction de l’exon 14 de BCR avec l’exon 2 d’ABL1) [24]. Les réarrangements de type e1a2 sont rencontrés dans des LAL Ph1. D’autres réarrangements sont plus rarement observés comme e6a2 et e19a2, ou des réarrangements complexes pouvant comporter des insertions introniques [25, 26]. Lorsqu’un réarrangement rare est mis en évidence, il doit être complètement caractérisé par séquençage. En analyse de routine, les réarrangements moléculaires BCR-ABL1 sont caractérisés au niveau de l’ADNc car au niveau génomique les points de cassure (le plus souvent introniques) sont différents d’un patient à l’autre. La protéine BCR-ABL peut également être mise en évidence par western blot mais cette analyse ne rentre pas dans le cadre des tests de routine, de même que les protocoles d’étude de l’activité tyrosine kinase de l’oncoprotéine BCR-ABL. Le suivi par RQ-PCR Le suivi de la maladie repose classiquement sur des numérations formules sanguines, des caryotypes médullaires (réalisés jusqu’à l’obtention d’une rémission cytogénétique complète ou en cas de rechute cytogénétique) et des RT-PCR quantitatives ou RQ-PCR. Le suivi moléculaire, classiquement réalisé tous les 3 mois, est désormais indispensable au clinicien. Il permet de vérifier l’efficacité du traitement en fonction de recommandations européennes (European LeukemiaNet ou ELN), de mettre en évidence une mauvaise compliance au traitement ou une résistance à l’ITK utilisé, et permet ainsi d’initier un changement d’ITK. Pour les réarrangements BCR-ABL1 e13a2 ou e14a2, comme pour le réarrangement e1a2 de certaines LAL, un protocole européen de standardisation de la PCR en temps réel (amorces et sonde TaqMan) a été établi en 2003 (Europe against cancer program) [27]. De plus, différents gènes de référence ont été testés, et ABL1 (non transloqué) est apparu comme le plus stable [28]. En Europe, le suivi moléculaire des ARNm BCR-ABL1 s’exprime le plus souvent par le pourcentage BCR-ABL1/ABL1 (rapport du nombre de copies d’ADNc BCR-ABL1 sur le nombre de copies d’ADNc ABL1). Le suivi des réarrangements moléculaires rares est également possible de la même façon, mais avec des amorces et/ou des sondes spécifiques « maison ». Il est donc essentiel de caractériser les réarrangements BCRABL1 au diagnostic afin d’utiliser, pour le suivi, l’outil moléculaire le plus adapté. Ann Biol Clin, vol. 75, n◦ 2, mars-avril 2017 Traitement et suivi moléculaire de la LMC Copyright © 2017 John Libbey Eurotext. Téléchargé par un utilisateur anonyme le 06/04/2017. Standardisation de la méthode de quantification La description d’une méthode de RQ-PCR de référence en 2003 a permis aux résultats d’être cohérents et comparables au sein d’un même laboratoire. Pour que les résultats soient comparables d’un laboratoire à l’autre, un long processus de standardisation a été mis en place au sein de sociétés savantes européennes (ELN) ou nationales (Groupe des biologistes moléculaires des hémopathies malignes ou GBMHM). Dans un premier temps, l’ensemble du processus technique (de l’extraction à la quantification, en passant par la reverse transcription) a été analysé et des recommandations ont été publiées [29]. Un problème demeure néanmoins, celui du gène contrôle (le plus souvent ABL1) qui peut entraîner des distorsions de linéarité au-dessus d’un pourcentage BCR-ABL1/ABL1 de 15 %. En effet, les amorces amplifiant ABL1 amplifient aussi BCR-ABL1 et le rapport BCR-ABL1/ABL1 est équivalent au rapport BCR-ABL1/(ABL1+BCR-ABL1), ce qui, au-dessus de 15 % sous-estime le résultat. Il est possible d’éliminer ce phénomène en changeant le gène contrôle ABL1 par GUS (-glucuronidase). Cependant, ce dernier apparaît moins stable au cours du suivi qu’ABL1. Il a également été montré qu’il existait un important degré de variabilité en dessous de 0,01 %. La zone de confiance de la quantification BCRABL1 réalisée avec le gène contrôle ABL1 est donc comprise entre 0,01 % et 15 %. Hors, la zone 10 % est en train de devenir décisionnelle pour le clinicien. En effet, à 3 mois de traitement, il a été observé qu’un taux de BCRABL1/ABL1 < 10 % était statistiquement lié à une évolution plus favorable [30, 31]. Le système actuel apparaît cependant discriminant dans la majorité des cas. Une expérience de RQ-PCR pour la quantification des ARNm BCR-ABL1 comprend classiquement des témoins négatifs (eau distillée, témoin négatif de reverse transcription, témoins non BCR-ABL1), des témoins positifs et une gamme de plasmides calibrés. Ces divers échantillons, ainsi que les ADNc de patients sont passés en double pour la quantification ABL1 et en double, voire en triple pour BCR-ABL1 (afin d’assurer une meilleure sensibilité chez les patients en réponse moléculaire). Des contrôles de qualité interne stables ont été récemment développés [32]. Une fois l’amplification et les courbes d’étalonnage réalisées, divers paramètres sont analysés afin de valider l’expérience suivant les recommandations nationales (GBMHM) et internationales (figure 5) [33] : – pente des droites d’étalonnage ABL1 et BCR-ABL1, (-3,15 ≤ pente ≤ -3,5) ; – seuil de détection reproductible (≤ 10 copies) ; – sensibilité, déterminée à partir de l’ordonnée à l’origine ; – limite de détection, un nombre de copies égal à 3 est affecté à tout échantillon positif comprenant moins de 3 copies (loi de Poisson) ; Ann Biol Clin, vol. 75, n◦ 2, mars-avril 2017 – nombre de copies ABL1 par puits ≥ 20 000 copies ; – duplicats ou triplicats, Ct ≤ 1 dans la zone reproductible (0,01 % - 15 %) ; – témoins positifs, ≤ ± 2 fois la valeur attendue. Une fois la quantification réalisée, les pourcentages BCRABL1/ABL1 doivent être exprimés en valeur internationale (IS : international scale) par l’utilisation d’un facteur de conversion (FC) [29]. Les facteurs de conversion sont calculés par rapport à un matériel de référence (lignée cellulaire). Ils sont déterminés soit par échange d’échantillons avec un laboratoire de référence national (lui-même calibré par rapport aux laboratoires de référence internationaux), soit par l’utilisation d’un calibrateur analysé dans chaque expérience. Quoi qu’il en soit le résultat s’exprime comme suit : % BCR − ABL1/ABL1IS = nombres de copies BCR − ABL1 ×FC×100 nombres de copies ABL1 Les résultats exprimés sur l’échelle internationale permettent de définir des valeurs de réponse moléculaire communes à tous les laboratoires suivant l’étude IRIS (International randomized study of interferon and STI571) [34]. Le tableau 1 présente les définitions des réponses hématologiques, cytogénétiques et moléculaires [33, 35]. La réponse moléculaire majeure (RMM) est définie par un pourcentage BCR-ABL1/ABL1 de 0,1 % et la définition des réponses moléculaires profondes (RM4 , RM4,5 , RM5 ) est précisée suivant que les transcrits BCR-ABL1 sont détectables ou non. Depuis quelques années, des kits industriels sont commercialisés et permettent d’obtenir des résultats concordants avec la méthode de référence [36]. Les courbes de suivi Des recommandations européennes sont régulièrement publiées par l’ELN afin de définir les réponses optimales au traitement par ITK en première et deuxième ligne en se basant sur les données cytologiques, cytogénétiques et moléculaires (tableau 2) [37, 38]. La quantification des ARNm BCR-ABL1 dans les cellules nucléées du sang périphérique est classiquement réalisée tous les 3 mois à partir du diagnostic. Les prélèvements peuvent être rapprochés en cas de contrôle de rechute moléculaire ou de suivi après arrêt de traitement ou espacés en cas de rémission moléculaire profonde stable et de longue durée. Des courbes de suivi moléculaire permettent de visualiser l’évolution du pourcentage BCR-ABL1/ABL1 (exprimé en valeur internationale sur une échelle logarithmique) en fonction du temps. La figure 6 montre quelques exemples de suivi moléculaire de LMC. Une évolution optimale est caractérisée par une courbe biphasique (figure 6A). La première pente (1) évalue la destruction des cellules leucémiques matures et la deuxième plus douce (2), celle des progéniteurs leucémiques [39]. Dans de rares cas, les ITK permettent d’obtenir seulement une rémission hématologique (figure 6B). Un phénomène de résistance primaire 137 Synthèse A 10 1 ΔRn Ct (ou Cp) 0,1 Copyright © 2017 John Libbey Eurotext. Téléchargé par un utilisateur anonyme le 06/04/2017. Seuil de positivité 0,01 0,001 1 5 10 15 20 25 30 35 40 45 50 Cycles B 41 39 37 35 33 31 Ct 29 pente -3,437153 ordonnée à l’origine 40,623135 r2 0,9997562 27 25 23 21 19 17 1 10 100 1000 10000 100000 1000000 Nombre de copies Figure 5. Quantification des ARNm BCR-ABL1 par RQ-PCR. A : Le graphique représente les courbes d’amplification BCR-ABL1 d’un plasmide calibrateur (échantillons passés en double). Rn : différence entre la fluorescence observée en un point et la fluorescence initiale. Le Ct (cycle threshold) ou Cp (crossing point) est dépendant de la quantité initiale de la cible. B : Courbe standard établie à partir des plasmides de référence (carrés bleus) permettant la détermination du nombre de copies chez les patients (croix rouges). Les paramètres d’une courbe (pente, ordonnée à l’origine et coefficient de corrélation) sont présentés. est ainsi objectivé en l’absence de mutations du domaine kinase de BCR-ABL. Si aucun ITK n’est actif, l’allogreffe de cellules souches hématopoïétiques est envisageable de même que de nouvelles molécules (comme les inhibiteurs allostériques) en essais cliniques. Après une période de 138 rémission moléculaire profonde de plus de 2 ans, l’ITK peut être stoppé au sein d’essais académiques [40]. On peut alors observer soit une persistance de la rémission moléculaire (figure 6C) soit une réapparition des ARNm BCR-ABL1 (figure 6D). Dans ce dernier cas, la reprise Ann Biol Clin, vol. 75, n◦ 2, mars-avril 2017 Traitement et suivi moléculaire de la LMC Tableau 1. Définition des réponses hématologiques, cytogénétiques et moléculaires. D’après [33, 35]. Réponse hématologique Réponses cytogénétiques RCyC Réponse cytogénétique complète Leucocytes < 9 G/L, formule normale, taux de plaquettes < 450 G/L Disparition des symptômes et signes cliniques de la maladie (notamment la splénomégalie) Ph1 0 % RCyP Réponse cytogénétique partielle Ph1 [1 %–35 %] RCyM Réponse cytogénétique majeure RCyC + RCyP, Ph1 < 35 % Réponse cytogénétique mineure Ph1 [36 %–65 %] Réponse cytogénétique minime Ph1 [66 %–95 %] Pas de réponse cytogénétique Ph1 > 95 % Réponse moléculaire majeure BCR-ABL1/ABL1IS ≤ 0,1 % RHC Copyright © 2017 John Libbey Eurotext. Téléchargé par un utilisateur anonyme le 06/04/2017. RCym RMM RM4 Réponse hématologique complète RM5 BCR-ABL1/ABL1IS ≤ 0,01 % avec copies ABL1 > 10 000 RQ-PCR négative Copies ABL1 [10 000–31 999] RQ-PCR positive BCR-ABL1/ABL1IS ≤ 0,0032 % avec copies ABL1 > 32 000 RQ-PCR négative Copies ABL1 [32 000–99 999] RQ-PCR positive BCR-ABL1/ABL1IS ≤ 0,001 % avec copies ABL1 > 100 000 RQ-PCR négative Copies ABL1 > 100 000 Réponse moléculaire profonde Réponses moléculaires RM4.5 RQ-PCR positive Réponse moléculaire profonde Réponse moléculaire profonde Tableau 2. Réponses hématologiques, cytogénétiques et moléculaires au cours du traitement par inhibiteurs de tyrosine kinase. D’après [38]. A- Traitement par ITK première ligne Durée du traitement Réponse optimale Alertes Échec du traitement 3 mois BCR-ABL1/ABL1IS ≤ 10 % ou Ph1 ≤ 35 % BCR-ABL1/ABL1IS > 10 % ou Ph1 35 % - 95 % Pas de RHC ou Ph1 > 95 % 6 mois BCR-ABL1/ABL1IS ≤ 1 % ou Ph1 = 0 BCR-ABL1/ABL1IS 1 % - 10 % ou Ph1 1 % - 35 % BCR-ABL1/ABL1IS > 10 % ou Ph1 > 35 % 12 mois BCR-ABL1/ABL1IS ≤ 0,1 % BCR-ABL1/ABL1IS 0,1 % - 1 % BCR-ABL1/ABL1IS > 1 % ou Ph1 ≥ 1 % B- Traitement par ITK seconde ligne Durée du traitement Réponse optimale Alertes Échec du traitement 3 mois BCR-ABL1/ABL1IS ≤ 10 % ou Ph1 < 65 % Ph1 65 % - 95 % Pas de RHC, BCR-ABL1/ABL1IS > 10 %, Ph1 > 95 % Nouvelles mutations * 6 mois BCR-ABL1/ABL1IS ≤ 10 % ou Ph1 ≤ 35 % Ph1 35 % - 65 % BCR-ABL1/ABL1IS > 10 %, Ph1 > 65 % Nouvelles mutations * 12 mois BCR-ABL1/ABL1IS ≤ 1 % ou Ph1 = 0 BCR-ABL1/ABL1IS 1 % - 10 % ou Ph1 1 % - 35 % BCR-ABL1/ABL1IS > 10 %, Ph1 > 35 % Nouvelles mutations * RHC : rémission hématologique complète ; ITK : inhibiteurs de tyrosine kinase ; * mutations du domaine kinase de BCR-ABL. d’un ITK permet au patient de regagner rapidement une réponse moléculaire profonde et stable. La présence d’une mutation du domaine kinase de BCR-ABL peut être à l’origine d’une résistance à un ou plusieurs ITK. Sa caractérisation permet alors de choisir l’ITK de deuxième ou Ann Biol Clin, vol. 75, n◦ 2, mars-avril 2017 troisième ligne le plus approprié. La figure 6E montre une résistance secondaire sous nilotinib avec découverte d’une mutation de la boucle P (Y253H). Dans ce cas, le dasatinib représente une alternative possible (figure 4). Une décroissance du rapport BCR-ABL1/ABL1 est observée 139 Synthèse B A % BCR -ABL1/ABL1IS % BCR -ABL1/ABL1IS imatinib 100 100 10 10 nilotinib dasatinib imatinib ø ø ø 1 1 (1) 0,1 0,1 Copyright © 2017 John Libbey Eurotext. Téléchargé par un utilisateur anonyme le 06/04/2017. (2) 0,01 0,01 0,001 0,001 0 3 6 9 12 15 18 21 24 27 30 33 36 39 42 45 48 51 54 57 60 Mois 0 3 6 9 12 15 18 21 24 27 30 33 36 39 42 45 48 51 54 57 60 Mois D C % BCR -ABL1/ABL1IS % BCR -ABL1/ABL1IS arrêt imatinib 100 100 10 10 1 1 0,1 0,1 0,01 0,01 0,001 0,001 0 3 6 9 12 15 18 21 24 27 30 33 36 39 42 45 48 51 54 57 60 arrêt imatinib Mois E 0 3 6 imatinib 9 12 15 18 21 24 27 30 33 36 39 42 45 48 51 54 57 60 Mois F % BCR -ABL1/ABL1IS imatinib % BCR -ABL1/ABL1IS nilotinib dasatinib imatinib dasatinib 100 ponatinib Allogreffe de CSH 100 ø Y253H 10 F317L 10 V299L Y253H/T315I 1 1 0,1 0,1 0,01 0,01 0,001 0,001 0 3 6 9 12 15 18 21 24 27 30 33 36 39 42 45 48 51 54 57 60 Mois DLI nilotinib 0 3 6 9 12 15 18 21 24 27 30 33 36 39 42 45 48 51 54 57 60 Mois Figure 6. Courbes de suivi des pourcentages BCR-ABL1/ABL1 au cours du traitement. A : La courbe de suivi présente une évolution optimale avec les deux pentes caractéristiques de la destruction des cellules matures (1) et des progéniteurs leucémiques (2). B : Le suivi montre une résistance primaire à différents ITK utilisés, sans détection de mutation du domaine kinase (Ø). C-D : L’arrêt d’imatinib peut conduire dans 40 % des cas à la persistance d’une rémission moléculaire profonde (C) ou dans 60 % des cas à une rechute moléculaire (D). E-F : Les courbes présentent diverses évolutions en présence de mutations du domaine kinase de BCR-ABL. 140 Ann Biol Clin, vol. 75, n◦ 2, mars-avril 2017 Copyright © 2017 John Libbey Eurotext. Téléchargé par un utilisateur anonyme le 06/04/2017. Traitement et suivi moléculaire de la LMC dans un premier temps suivie d’une réaugmentation avec la mise en évidence d’une mutation composée Y253H/T315I. Ces mutants sont décrits, du moins in vitro, pour résister à tous les ITK, y compris le ponatinib. La figure 6F décrit l’évolution particulière d’un patient traité en première ligne par imatinib. Après la mise en évidence d’une résistance primaire sans mutation, l’imatinib est remplacé par du dasatinib. Très rapidement, une mutation V299L (spécifique de cet ITK) est détectée, ce qui conduit à une allogreffe de CSH (le patient étant jeune). Après une période de « PCRfluctuation », une rechute est objectivée. Dans un premier temps, un traitement par DLI (donor lymphocyte infusion) est essayé sans succès et une mutation F317L est détectée ; un traitement par ponatinib est alors initié avec des résultats remarquables. Le suivi thérapeutique de la LMC par la détermination du rapport BCR-ABL1/ABL1 est ainsi un outil indispensable permettant au clinicien de pouvoir réagir le plus rapidement possible à une évolution défavorable (rechute moléculaire) avant que la maladie ne réapparaisse au niveau clinique. Détection des mutations du domaine kinase de BCR-ABL Du fait de la grande efficacité des ITK utilisés en première intention, les mutations du domaine kinase de BCR-ABL ne sont plus un problème majeur. Elles concernaient, il y a quelques années, environ un cas de résistance aux ITK sur 4 [9]. Les mutations du domaine kinase sont assez rarement détectées dans les résistances primaires. Dans les cas de résistance secondaire, la recherche de mutation est préconisée lorsque notamment le rapport BCR-ABL1/ABL1 est augmenté de 0,5 log (soit 3,2 fois). Avant toute analyse, il est opportun de vérifier la bonne compliance, ainsi que la concentration plasmatique de l’inhibiteur [37]. Une recherche de mutation ne doit pas être initiée si le pourcentage BCR-ABL1/ABL1 est inférieur à 0,1 % [9]. Cette analyse, complémentaire à la quantification des ARNm BCR-ABL1, fait partie intégrante du suivi moléculaire et permet, en fonction des résultats, d’envisager clairement les options thérapeutiques possibles. Des recommandations de l’ELN précisent quand rechercher les mutations du domaine kinase de BCR-ABL et comment interpréter les résultats [41]. La méthode de référence reste le séquençage double brin des nucléotides correspondant aux acides aminés 240-500 d’ABL [9, 42]. Afin de restreindre cette analyse à ABL1 transloqué, une première PCR BCR-ABL1 est réalisée suivie de PCR nichées sur la zone correspondant au domaine kinase. La sensibilité de cette technique étant de l’ordre de 15-20 %, les clones minoritaires ne seront pas dépistés. De plus, les mutations composées ne peuvent être différenciées des mutations polyclonales. Pour ces dernières, la Ann Biol Clin, vol. 75, n◦ 2, mars-avril 2017 PCR clonage est la méthode de choix même si elle n’est pas applicable en routine hospitalière. Le pyroséquençage et les méthodes de criblage comme l’HRM (analyse des courbes de fusion à haute résolution), la DHPLC (chromatographie liquide à haute performance sur gel dénaturant) et la DGGE (électrophorèse sur gel en gradient dénaturant) sont utilisables. Ces dernières méthodes ont une sensibilité de 3 à 5 %, et peuvent mettre en évidence une mutation composée au sein d’un même fragment PCR. Un séquençage doit cependant être réalisé afin de caractériser toute anomalie détectée. Les amplifications allèles spécifiques permettent uniquement la mise en évidence des mutations connues, avec cependant une sensibilité élevée (0,1-0,01 %). Avancées technologiques La quantification des ARNm BCR-ABL1 par RQ-PCR est désormais une méthode fiable. Sa sensibilité est connue et ne peut pratiquement plus être améliorée (autour de 10-5 ). La PCR digitale (ou PCR numérique) pourrait être une alternative intéressante à la RQ-PCR [43]. S’agissant d’une quantification d’emblée absolue, l’utilisation de gammes de standards calibrés n’est pas nécessaire et la sensibilité pourrait être un peu améliorée. De plus, la méthode s’affranchit du recours à un gène contrôle qui peut parfois poser problème. Une augmentation de sensibilité pourrait se révéler utile, notamment dans les situations de rémissions moléculaires profondes et de choix d’arrêt thérapeutique [44]. Le séquençage haut débit ou NGS est un outil parfaitement adapté à la recherche des mutations de résistance BCRABL. De par sa sensibilité (1 %), il permet non seulement de mettre en évidence les mutants majoritaires, mais aussi les mutants minoritaires [45]. Ainsi, des mutations importantes comme la T315I ou une mutation de la boucle P peuvent être détectées plus précocement. Cependant, les mutants minoritaires, sans réel impact sur la résistance peuvent être caractérisés. Faut-il être aussi sensible dans la recherche des mutations du domaine kinase ? Seules des études à long terme pourront répondre à la question. Les mutations composées peuvent être dépistées si elles sont présentes sur la même séquence. Pour faciliter leur détection, une méthode basée sur du NGS longue distance a récemment été publiée [46]. Ainsi, en plus des méthodes déjà en place, des innovations technologiques importantes apparaissent dans le domaine du suivi moléculaire de la LMC. Arrêt de traitement et persistance des cellules souches leucémiques Le clinicien dispose désormais pour le traitement des patients atteints de LMC de 5 inhibiteurs de tyrosine kinase (imatinib, nilotinib, dasatinib, bosutinib, ponatinib). De 141 Copyright © 2017 John Libbey Eurotext. Téléchargé par un utilisateur anonyme le 06/04/2017. Synthèse plus, il peut se reposer sur un système de suivi moléculaire performant, lui permettant d’adopter les options thérapeutiques les plus efficaces. Ainsi, pour la plupart des patients (ceux qui vont répondre à la thérapie ciblée), l’espérance de vie est sensiblement la même que celle de la population générale [47]. Les conséquences de cette situation (inédite dans une affection maligne) sont très importantes. Tout d’abord, les ITK ont transformé une pathologie grave en une maladie chronique. Les patients atteints de LMC diagnostiqués aujourd’hui peuvent bénéficier d’une vie active normale, même si les nombreux effets indésirables et parfois délétères des thérapies ciblées doivent être pris en compte. Le revers de la médaille, c’est que l’impact économique de cette pathologie (dû au coût des ITK) devient de plus en plus important, tant pour les systèmes de protection sociale, que pour les patients dans certains pays. L’arrivée prochaine de médicaments génériques de l’imatinib (dont le brevet arrive à expiration en France fin 2016) devrait diminuer de façon importante cette dépense de santé [48]. Une autre option est envisageable, il s’agit de l’arrêt de traitement après une période suffisante de réponse moléculaire profonde et d’exposition aux ITK. Protocoles d’arrêt de traitement Un premier essai d’arrêt de l’imatinib chez des patients avec un transcrit BCR-ABL1 indétectable depuis plus de 2 ans avait montré sa faisabilité [49]. Le protocole STIM (Stop imatinib) a ensuite été initié par l’intergroupe français de la LMC (Fi-LMC) avec comme promoteur le groupe de Bordeaux. Il comprenait les critères suivants : traitement par imatinib pendant au moins 3 ans, obtention d’une réponse moléculaire profonde (RQ-PCR négative, ≥ RM5 ) et stable pendant au moins 2 ans. Après arrêt, le ratio BCR-ABL1/ABL1 était vérifié tous les mois pendant la première année. La rechute moléculaire était définie comme une repositivation du rapport BCR-ABL1/ABL1, vérifiée sur un deuxième prélèvement. Le traitement par imatinib était alors repris. Cette étude avait porté sur 100 patients, dont la moitié avait été préalablement traitée par interféron-␣ [40]. Une rechute moléculaire a été observée chez 60 % des patients, le plus souvent dans les 7 premiers mois. Il est à noter que les patients en rechute moléculaire sont restés sensibles à l’imatinib ou à un autre ITK (nilotinib, dasatinib). Chez les patients demeurant en rémission moléculaire profonde (40 %), celle-ci semble se prolonger sans rechute au-delà de 5 ans. D’autres essais thérapeutiques d’arrêt des ITK sont en cours comme l’essai français STIM2 ou l’essai européen EUROSKI (European stop kinase inhibitor). Ils comportent quelques différences dans le protocole expérimental (notamment dans les critères de reprise de traitement), mais les résultats préliminaires vont dans le même sens que l’essai STIM. 142 Persistance des cellules souches leucémiques Chez les patients atteints de LMC, les ITK sont efficaces sur la plupart des cellules CD34+ [50]. Cependant ils paraissent incapables d’éradiquer la fraction quiescente la plus primitive des cellules souches leucémiques (CSL) [51-53]. En fait, les ITK conservent leur efficacité sur la kinase BCR-ABL, mais les CSL pourraient se libérer en partie de leur dépendance à l’oncoprotéine BCR-ABL [54]. Plusieurs équipes ont ainsi montré la persistance de ces cellules souches résiduelles chez des patients en rémissions cytogénétiques et/ou moléculaires profondes [55, 56]. La persistance à long terme de ces cellules pourrait expliquer les rechutes moléculaires observées dans la majorité des patients chez qui le traitement par ITK est arrêté. Ces inhibiteurs sont efficaces sur les cellules leucémiques matures et les progéniteurs leucémiques. Sur une très longue période de traitement (plusieurs décennies), ils pourraient également l’être sur les cellules souches leucémiques les plus primitives. Des médicaments ciblant les cellules souches leucémiques pourraient permettre une érosion plus rapide de ce compartiment [57, 58]. Cependant, ces agents ne sont pas, le plus souvent, spécifiques de l’hématopoïèse leucémique et peuvent donc conduire à des effets secondaires inacceptables pour le patient. On peut cependant citer deux exemples de médicaments pouvant jouer un rôle important dans ce domaine et ayant déjà été utilisés en pratique clinique, l’interféron-␣ et la pioglitazone. Le mode d’action de l’interféron-␣, traitement de référence de la LMC avant l’ère des ITK, est encore mal connu. Cependant, il exerce de très nombreuses actions sur les cellules leucémiques ou leur environnement comme l’activation du système immunologique ou la remise en cycle des cellules souches hématopoïétiques [59]. L’association imatinib + interféron-␣ a d’ailleurs montré de meilleurs taux de réponse moléculaire par rapport à l’imatinib seul [60]. D’autres associations ITK-2 + interféron-␣ sont en phase d’étude. Plus récemment, une association imatinib + pioglitazone (un antidiabétique) a montré son efficacité dans l’érosion du compartiment souche leucémique en agissant sur la voie STAT5 impliquée dans le maintien de l’état de quiescence [61]. Un essai clinique à long terme devrait permettre d’analyser la performance de cette association sur une grande cohorte de patients. De nouveaux champs d’investigation sont en train de s’ouvrir dans la recherche sur la LMC et sur une possible guérison de la maladie. Les essais d’interruption de traitement posent clairement le problème de la persistance de cellules souches leucémiques. Faut-il tenter de les éradiquer ou d’essayer de dépister les patients à risque de rechute après arrêt du traitement ? Nous n’avons pas la réponse à cette question, mais il est clair qu’une meilleure Ann Biol Clin, vol. 75, n◦ 2, mars-avril 2017 Traitement et suivi moléculaire de la LMC compréhension du compartiment souche leucémique et de la niche hématopoïétique, ainsi qu’une recherche dans le domaine immunologique sont désormais essentielles. Copyright © 2017 John Libbey Eurotext. Téléchargé par un utilisateur anonyme le 06/04/2017. Conclusion La leucémie myéloïde chronique occupe une place à part dans les affections malignes. De grandes découvertes se sont accumulées depuis un demi-siècle aboutissant à une compréhension biologique assez complète de la maladie et à la mise en place de traitements de plus en plus performants, ce qui est rare dans une affection maligne. Le clinicien de 2016 dispose d’un ensemble cohérent de médicaments extrêmement efficaces et peut espérer le prochain développement d’un arsenal thérapeutique complémentaire. Il peut se reposer sur un suivi moléculaire sensible et reproductible, avec des améliorations technologiques en cours de mise au point. Cependant, ce même clinicien doit gérer les effets secondaires de la thérapie ciblée et participer à la maîtrise des dépenses de santé. Ainsi, d’un point de vue clinique, la LMC peut être considérée comme une maladie chronique avec une espérance de vie similaire à celle de la population générale. D’un point de vue biologique, tant qu’il reste une cellule souche leucémique, la maladie ne peut être considérée comme éradiquée et des avancées sont encore nécessaires pour aboutir à une véritable guérison de la LMC (tant clinique que biologique) qui désormais est à portée de main. 6. Druker BJ, Tamura S, Buchdunger E, Ohno S, Segal GM, Fanning S, et al. Effects of a selective inhibitor of the Abl tyrosine kinase on the growth of Bcr-Abl positive cells. Nat Med 1996 ; 2 : 561-6. 7. O’Brien SG, Guilhot F, Larson RA, Gathmann I, Baccarani M, Cervantes F, et al. Imatinib compared with interferon and low-dose cytarabine for newly diagnosed chronic-phase chronic myeloid leukemia. N Engl J Med 2003 ; 348 : 994-1004. 8. Hochhaus A, O’Brien SG, Guilhot F, Druker BJ, Branford S, Foroni L, et al. Six-year follow-up of patients receiving imatinib for the first-line treatment of chronic myeloid leukemia. Leukemia 2009 ; 23 : 1054-61. 9. 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