Cours Droit des sociétés

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DROIT DE L’ENTREPRISE
I.- Qu’est-ce qu’une société ?
A.- Quels éléments faut-il pour qu’il y ait société ?
L’article 1832 du Code civil donne la définition de la société : « La société est instituée par deux
ou plusieurs personnes qui conviennent par un contrat d’affecter à une entreprise commune des
biens ou leur industrie en vue d’en partager le bénéfice ou de profiter de l’économie qui pourra
en résulter.
Elle peut être instituée, dans les cas prévus par la loi, par l’acte de volonté d’une seule personne.
Les associés s’engagent à contribuer aux pertes ».
Quatre éléments doivent être réunis pour que l’on soit en présence d’une société. Trois de ces
éléments sont visés par l’article 1832 du Code civil : il s’agit d’une part de l’existence d’apports
de la part des associés ( affecter à une entreprise commune des biens ou leur industrie ), d’autre
part de l’objectif que doivent poursuivre les parties, à savoir le partage de bénéfices ou la
réalisation d’une économie. Une société peut ainsi être valablement constituée même si elle a
vocation à être chroniquement déficitaire, ce qui est souvent le cas des sociétés civiles
professionnelles de moyens. En troisième lieu, les associés s’engagent à contribuer aux pertes.
Etant précisé que par « pertes » il ne faut pas entendre les éventuels déficits constatés en fin
d’exercice. Les « pertes » seront constituées du solde négatif constaté après la liquidation de la
société. Dans les sociétés dites à « risque limité », les associés y contribueront à concurrence du
montant de leurs apports. Par contre, dans les sociétés dites à « risque illimité », l’engagement de
l’associé pourra dépasser le montant de ses apports. Précisions encore que dans les sociétés à
risque illimité, l’associé, outre sa contribution aux pertes, est aussi obligé à la dette sociale, cette
obligation s’exécutant quant à elle en cours de vie sociale. Le quatrième élément indispensable
pour qu’il y ait société est l’ « affectio societatis ». Par cette notion est désignée la volonté des
associés de collaborer ensemble, sur un pied d’égalité, au succès de l’entreprise commune. Le
rôle de cette notion apparaît en période de crise : par exemple si est invoqué le vice de fictivité de
la société, c’est-à-dire le fait d’être en présence d’une mascarade de société, dont la qualification
sera remise en cause. Afin de constater la fictivité de la société, l’absence d’affectio societatis des
« hommes de paille », des simples comparses du maître de l’affaire, fournira un critère souvent
déterminant. En sens inverse, l’ affectio societatis permettra de caractériser la société créée de
fait, en la distinguant de formes voisines de collaboration, comme le prêt ou le contrat de travail.
B.- En quoi la société se distingue t-elle de groupements et
mécanismes voisins ?
1°) Société et association
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2°) Société et fondation
3°) Société et GIE
4°) Société et indivision
C.-Quelles sont les différentes sortes de sociétés ?
La question du choix d’une structure sociétaire suppose naturellement que soient connues les
différentes sortes de sociétés. Cela est d’autant plus important à savoir que, dans certains cas, en
fonction de l’activité projetée ou des objectifs poursuivis par les fondateurs, une forme
particulière de société pourra s’imposer. En effet, il existe à côté des sociétés à vocation générale,
des sociétés réservées à des situations particulières (1°). Mise à part cette distinction de base, une
distinction doit être faite entre les sociétés de personnes et les sociétés de capitaux (2°), mais
aussi entre les sociétés à risqué limité et les sociétés à risqué illimité (3°), les sociétés à capital
fixe et les sociétés à capital variable (4°).
1°) Sociétés à vocation générale et sociétés réservées à des situations
particulières
Les sociétés à vocation générale, que l’on appelle aussi sociétés types, sont celles qui a priori
peuvent être choisies, sinon pour toute activité, du moins pour un large éventail d’activités. Ces
sociétés doivent être présentées en premier lieu (a), avant qu’un mot soit dit ensuite des sociétés
réservées à des situations particulières (b).
a)Sociétés à vocation générale
. Une nouvelle distinction s’impose ici entre sociétés dotées
de la personnalité morale, et celles qui n’en sont pas dotées.
-Sociétés dotées de la personne morale, étant précisé que par personnalité morale de la société,
on entend sa faculté à disposer d’une personnalité juridique propre, c’est-à-dire avoir les attributs
traditionnellement attachés à la personnalité juridique, notamment un patrimoine composé d’un
actif et d’un passif propres.
* Les sociétés civiles, indique l’article 1845, sont celles auxquelles la loi n’accorde pas un autre
caractère, à raison de leur forme, de leur nature ou de leur objet. Ainsi, dans notre Droit, la
société civile est le principe. Mais ce principe s’avère bien réduit, en raison de la place occupée
par les sociétés commerciales.
* Les sociétés sont en effet commerciales, soit parce qu’elles ont pour objet l’accomplissement
d’actes de commerce, soit parcequ’elles revêtent une forme qui leur confère de plein droit le
caractère de société commerciale, quelque soit leur objet : SNC, sociétés en commandite simple,
Sarl et sociétés par actions.
La ligne de partage entre sociétés civiles et sociétés commerciales se situe ainsi dans l’activité
exercée, les sociétés civiles accomplissant des activités de nature civile, mais aussi à travers la
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forme de la société. Cependant, cette ligne de partage se brouille parfois pour deux raisons. Tout
d’abord, il arrive que des sociétés commerciales acccomplissent des activités de nature civile. De
plus, le régime juridique des sociétés civiles s’est grandement rapproché du régime applicable
aux sociétés commerciales. Par exemple, le droit des entreprises en difficultés, traditionnellement
reserve aux sociétés commerciales, s’applique à present à toutes les sociétés, du moins si elles
sont pourvues de la personnalité morale. Le rapprochement est tel que l’on estime généralement
que la société civile immatriculée a un régime juridique fort proche de celui de la SNC.
-Sociétés dépourvues de personnalité morale
*La société en participation : la société en participation est une société créée en connaissance de
cause par des partenaires, mais qui n’est pas immatriculée. Selon l’image parlante d’auteurs, la
société en participation est à la société immatriculée ce que le concubinage est au mariage, avec
ses deux variantes. La société en participation peut ainsi être occulte, non révélée aux tiers, mais
aussi ostensible. N’étant pas immatriculée, la société en participation ne possède aucun des
attributs attachés à la personnalité juridique : pas de patrimoine propre, pas de siège social, pas de
nationalité, pas de responsabilité pénale, ne souscrit aucun engagement personnel, ne peut exercer
une action en justice…..En réalité, les apports en numéraire seront réunis dans le patrimoine
d’une seule personne. Si des biens sont mis à disposition de la société, les apporteurs en restent
propriétaires.
*La société créée de fait : la société créée de fait est celle qui ne ressort pas de la volonté
délibérée de créer une société, mais dont l’existence sera constatée a posteriori par un juge, dans
le contexte d’un conflit sera invoquée l’existence où sera invoquée l’existence d’une société,
resultant du comportement de plusieurs personnes, qui se seront comportées comme s’il y avait
une société. Mais par qui va être invoquée l’existence d’une société créée de fait ? encore un
double contexte peut d’observer.
Dans le premier, une personne participe à un groupement bénéficiaire et va revendiquer le statut
d’associé dans le but d’obtenir les droits financiers reconnus à celui-ci. Par exemple, deux époux
mariés sous le régime de la séparation de biens ont exploité un fonds de commerce appartenant
en propre à l’un d’entre eux. S’il n’existe pas de société entre les époux, les biens acquis pour
l’exploitation du fonds seront propres, et le conjoint non propriétaire du fonds n’aura en principe
pas de droit sur le partage des biens acquis en cours d’union. Ce qui va le conduire à invoquer
l’existence d’une société créée de fait dans le but d’obtenir en tant qu’associé sa part suite à la
dissolution de cette société prétendue.
Dans le second, c’est un tiers, un créancier qui invoquera l’existence d’une telle société créée de
fait, dans le but d’élargir sa garantie en poursuivant le conjoint ou le concubin qui s’est immiscé
dans la gestion, ou afin d’étendre à lui la procédure collective ouverte à l’encontre de l’autre
conjoint ou de l’autre concubin.
Observons que, pour que soit constatée l’existence d’une société créée de fait, il sera necessaire
que puissent être constatés les différents éléments constitutifs du contrat de société, à savoir des
apports, la volonté de réaliser des bénéfices ou une économie, une volonté de participer aux
résultats de l’exploitation, et notamment aux pertes, ainsi qu’un affectio societatis. La
qualification de société créée de fait” est rarement retenue par les juges, qui se montrent
exigeants quant à la prevue des éléments constitutifs. Indiquons enfin que la “société créée de
fait” ne doit pas être confondue avec la “société de fait”, appellation qui traduit une réalité, celle
de la survie de la personnalité morale de la société pour le temps de sa liquidation.
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b)Sociétés réservées à des situations particulières
: ici le choix de la société
se voit imposé en fonction soit de la philosophie recherchée à travers la constitution du
groupement, qui va se traduire par un statut juridique particulier, soit en raison de ce que sera
l’objet de l’activité de la société, c’est-à-dire ce que l’on appelle son “objet social”.
-Les sociétés particularisées par leur statut juridique particulier. L’exemple pouvant être donné ici
est celui des sociétés cooperatives. Une coopérative est la combinaison d'un regroupement de
personnes et d'une entreprise fondée sur la participation économique des membres, en capital et
en opérations. Son organisation et son fonctionnement sont caractérisés par des principes et des
valeurs qui confèrent à chaque coopérative un caractère universel, quel que soit son objet ou son
secteur d'activité. Les principes coopératifs sont au nombre de 7 : Démocratie : « Les dirigeants
sont élus démocratiquement par et parmi les membres. Tous les membres, sans discrimination,
votent selon le principe : une personne, une voix. ». Solidarité : « La coopérative et ses membres
sont solidaires entre eux et envers la communauté. ». Responsabilité : « Tous les membres, en
tant qu’associés ou en tant qu’élus, sont responsables de la coopérative. » « Pérennité : « La
coopérative est un outil au service des générations présentes et futures. » « Transparence : « La
coopérative a une pratique de transparence à l’égard de ses membres et de la
communauté. » « Proximité : « La coopérative contribue au développement régional et à
l’ancrage local. »Service : « La coopérative fournit des services et produits dans l’intérêt de
l’ensemble de ses membres en vue de satisfaire leurs besoins économiques et sociaux ». Une
partie de ces principes et valeurs, comme la démocratie à travers l'égalité de voix entre les
membres, est traduite en norme juridique. Les coopératives font partie de l’économie sociale et
solidaire au même titre que les associations, les mutuelles, les fondations et les entreprises sous
statut commercial ayant la qualité d' "entreprise de l'ESSS. Le concept d'économie sociale et
solidaire (ESS) désigne un ensemble d'entreprises organisées sous forme de coopératives,
mutuelles, associations, ou fondations, dont le fonctionnement interne et les activités sont fondés
sur un principe de solidarité et d'utilité sociale. Ces entreprises adoptent des modes de gestion
démocratiques et participatifs. Elles encadrent strictement l'utilisation des bénéfices qu'elles
réalisent : le profit individuel est proscrit et les résultats sont réinvestis. Leurs ressources
financières sont généralement en partie publiques. Elles bénéficient d'un cadre juridique renforcé
par la loi n° 2014-856 du 31 juillet 2014 relative à l'économie sociale et solidaire.
Sociétés particulières en raison de leur objet : sociétés d’exercice libéral, sociétés dans le
domaine agricole : société civile d’exploitation agricole, groupement agricole d’exploitation en
commun, exploitation agricole à responsabilité limitée.
2°) Sociétés de personnes et sociétés de capitaux
-Les sociétés de personnes sont celles les associés s’unissent en consideration de leur
personnalité, parce qu’ils se font mutuellement confiance. L’intuitus personae est ainsi
predominant, ce qui va influencer le régime juridique de la société. Par exemple, les cessions de
titres sont extrêmement contrôlées, de façon à ne pas permettre l’entrée inopinée d’un tiers dans
la société. De même, les évènements affectant la personne d’un associé pourront entraîner la
disparition de la société. Relèvent de cette catégorie de société la SNC, la société civile.
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- Les sociétés de capitaux, à l’opposé, sont celles où, au contraire, la personne de l’associé est
indifférente. Les associés, généralement, ne se connaissent pas, et par consequent peuvent céder
librement leurs titres. Contrairement à ce qui se passe dans une société de personnes, les
évènements affectant les associés n’auront pas d’impact sur la vie de la société. Relève de cette
catégorie de société la SA.
- La distinction entre sociétés de personnes et sociétés de capitaux n’est pas simple à mettre en
oeuvre, ne serait-ce que parceque la forme de société la plus répandue, à savoir la Sarl, se
présente comme une société hybride qui, par certains côtés rappelle la société de personnes ( par
exemple le régime juridique de la cession des parts sociuales ), mais par d’autres rappelle la
société de capitaux ( par exemple son mode de fonctionnement qui emprunte beaucoup au régime
de la SA ). En outre, la SAS, qui normalement devrait figurer dans la catégorie des sociétés de
capitaux, se présentera souvent comme teintée d’intuitus personae, les statuts prévoyant le moyen
de controller les mouvements de l’actionnariat.
3°) Sociétés à risque limité et sociétés à risque illimité
-
Obligation aux dettes sociales et contribution aux pertes sociales
:
l’obligation aux dettes sociales concerne la période de fonctionnement de la vie sociale, et traduit
la capacité d’action des créanciers de la société Durant le fonctionnement de celle-ci. Dans les
sociétés à risqué limité, seule la société est en principe obligée aux dettes, et peut donc faire
l’objet de poursuites de la part des créanciers sociaux. En revanche, dans les sociétés à risqué
illimité, la personnalité morale de la société ne fait pas écran entre les créanciers sociaux et les
associés, qui peuvent ainsi être indéfiniment poursuivis par les créanciers sociaux. La
contribution aux dettes sociales est quant à elle contemporaine de la phase de disparition de la
société, qui comme on le sait donne lieu à sa liquidation. L’hypothèse est ici celle d’une
liquidation laissant subsister un passif de la société à l’égard de créanciers sociaux. Si la société
est à risque limité, le principe de la contribution aux pertes se traduira par le fait que, puisque le
passif est supérieur à l’actif, aucun des associés ne pourra récupérer l’apport qu’il avait effectué
lors de l’entrée dans la société. Si la société est à risque illimité, la contribution aux pertes se
traduira non seulement par l’impossibilité des associés de récupérer leur mise, mais encore par la
faculté pour les créanciers sociaux de les poursuivre indéfiniment sur leurs biens personnels.
-Identification des sociétés à risque limité et des sociétés à risque illimité : tandis que la SNC, la
société civile, la société en participation et la société créée de fait sont des sociétés à risqué
illimité, la Sarl, la SA et la SAS se présentent comme des sociétés à risdque limité. Mais, entre
les deux, une forme hybride existe, celle des sociétés en commandite, certaines categories
d’associés, les commandités, supporteront une obligation ainsi qu’une contribution aux dettes
sociales indéfinie, tandis que la responsabilité des associés commanditaires sera quant à elle
limitée.
4°)
Société à capital fixe et société à capital variable
: toute soc dotée de la
personnalité morale a un capital social. Le capital social peut se définir comme la somme des
valeurs apportées par les associés à la société. Mais seuls y entrent les apports effectués en
numéraire ou en nature. Les apports en industrie ne concourrent pas à sa formation. N’y rentrent
pas non plus ce qu’on appelle les quasi-fonds propres, qui sont de véritables dettes envers les
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