Théorie algébrique des formes quadratiques

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EPFL - Section de Mathématiques
Théorie algébrique des formes quadratiques
Prof. E. Bayer Fluckiger
Semestre d’été 2007
Feuille d’exercices 2
21.03.07
Tout au long de cette feuille d’exercices, on désigne par k un corps quelconque. Par ’espace
vectoriel’, nous entendons ’espace vectoriel sur k’. Si I et J sont deux ensembles, on désigne
par Maps(I, J) l’ensemble des fonctions de I vers J. Si X, Y et Z sont trois espaces vectoriels,
on note Hom(X, Y ) l’espace vectoriel des application linéaires de X vers Y , et Bilin((X, Y ), Z)
l’espace vectoriel des applications bilinéaires X × Y −→ Z. Enfin, on pose X ∗ = Hom(X, k).
Exercice 1. Espace vectoriel de base un ensemble donné.
Soit I un ensemble. Considérons k (I) , l’espace vectoriel des fonctions f : I −→ k telles que f (i)
est non nul seulement pour un nombre fini de i ∈ I. Pour i ∈ I, notons ei l’élément de k (I)
dont toutes les composantes sont nulles, sauf la i-ième qui vaut 1. Alors {ei , i ∈ I} est une base
de k (I) sur k. Montrer que, pour tout espace vectoriel X, il existe une bijection canonique
φX : (Hom(k (I) −→ X)) −→ Maps(I, X).
Ces bijections doivent être canoniques dans le sens suivant:
i) Si X et Y sont deux espaces vectoriels, et si f : X −→ Y est une application linéaire, alors
le diagramme suivant commute:
Hom(k (I) −→ X)
◦f
/
Hom(k (I) −→ Y )
φX
Maps(I, X)
◦f
/
φY
Maps(I, Y ).
ii) De plus, on demande que, pour tout i ∈ I, on ait φk(I) (identité)(i) = ei .
Exercice 2. Produit tensoriel de deux espaces vectoriels.
Soient V et W deux espaces
vectoriels. Le but de cet exercice est de montrer l’existence
N
d’un espace vectoriel V k W , appelé produit tensoriel de V et W , qui représente le foncteur
Bilin((V, W ), .), dans un sens que nous allons préciser plus bas (n’ayez pas peur si vous ne savez
pas ce qu’est un foncteur, on n’en aura pas besoin).
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Feuille d’exercices 2
Soit I = V × W . Considérons le sous-espace U ⊂ k (I) engendré par les éléments de la forme
e(v+v0 ,w) − e(v,w) − e(v0 ,w) ,
e(v,w+w0 ) − e(v,w) − e(v,w0 ) ,
λe(v,w) − e(λv,w) ,
λe(v,w) − e(v,λw) ,
où λ ∈ k, v, v 0 ∈ V et w, w0 ∈ W . Soit
O
V
W := k (I) /U.
k
(I)
Pour
N v ∈ V et w ∈ W , on note v ⊗ w l’image
N de e(v,w) par l’application quotient k −→
V k W . Les éléments v ⊗ w engendrent V k W , mais ne sont clairement pas linéairement
indépendants.
i) Vérifier que l’application canonique:
bV,W : V × W −→ V
O
W,
k
(v, w) 7→ v ⊗ w
est bilinéaire. Soit maintenant X un espace vectoriel, et b : V × W −→ X une application
bilinéaire. Montrer qu’il existe une unique application linéaire
O
b̃ : V
W −→ X,
k
telle que b̃(v ⊗ w) = b(v, w).
ii) En utilisant la question précédente, montrer que, pour tout espace vectoriel X, il existe une
unique bijection
O
W, X) −→ Bilin((V, W ), X),
ψX : Hom(V
k
vérifiant des conditions de compatibilité analogues aux
N point i) et ii) du précédente exercice
(on explicitera ces conditions). L’espace
vectoriel
V
k W est appelé le produit tensoriel de
N
V et W . On le note parfois aussi V
W lorsqu’il n’y a pas de confusion possible quant à la
dépendance en k.
iii) Montrer que, si V ,W , E et F sont quatre espaces vectoriels, et si f : V −→ E et g : W −→ F
sont deux applications linéaires, alors il existe une unique application linéaire
O
O
f ⊗g :V
W −→ E
F,
telle que (f ⊗ N
g)(v ⊗ w) = f (v) ⊗ g(w). En termes catégoriques, cela signifie que l’association
(V, W ) −→ V
W est fonctorielle.
N
L’objet V
W est essentiellement unique, dans le sens vague suivant: imaginons
que, pour
N0
tout triplet (V, W, X) d’espaces vectoriels, on ait N
la donnée d’un espaceN
V
W , et
Nde bijec0
tions ψX
satisfaisant les mêmes propriétés que V
W et ψX . Alors V
W et V 0 W sont
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canoniquement isomorphes. Ceci est évident si l’on est familier avec les catégories; sinon, c’est
une vérification pas tout à fait évidente que l’on ne demande pas de faire ici.
Exercice 3. Commutativité, associativité et distributivité du produit tensoriel. Elément neutre.
N N
N
N
i) Soient U, V et W trois espace vectoriels. Il est clair que U (V
W ) et (U
V) W
ne sont pas égaux en tant qu’ensembles. Cela dit, ils sont canoniquement isomorphes. Plus
précisément, montrer qu’il existe un unique isomorphisme linéaire
O O
O
O
U
(V
W ) −→ (U
V)
W,
envoyant u ⊗ (v ⊗ w) sur (u ⊗ v) ⊗ w, N
pour tous
∈V N
et w ∈ W . Cet isomorphisme
N u ∈ U , vN
nous permet en pratique
d’identifier
U
(V
W
)
et
(U
V
)
W ; cela a donc un sens de
N N
parler de l’objet U
V
W.
ii) Montrer qu’il existe un unique isomorphisme linéaire
O
O
V
W −→ W
V,
envoyant v ⊗ w sur w ⊗ v. Remarquer que, lorsque V = W , cet isomorphisme est une involution
non triviale (elle permute les facteurs).
iii) Montrer qu’il existe un unique isomorphisme
M
O
O M
O
(V
W)
U −→ (V
U)
(W
U ),
envoyant (v, w) ⊗ u sur (v ⊗ u, w ⊗ u).
iv) Soit W = k. Montrer que V ⊗ W est alors canoniquement isomorphe à V . Ainsi, l’espace
vectoriel k peut être considéré comme un élément neutre pour le produit tensoriel.
Exercice 4. Produit tensoriel d’espaces vectoriels de dimension finie.
Soient V et W deux espaces vectoriels de dimension finie, de dimensions respectives n et m.
i) TrouverN
la dimension de Bilin((V, W ), k) (comme k-espace vectoriel). En déduire la dimension de V
W . Prouver que, si v1 , ..., vn (resp. w1 , ...,N
wm ) est une base de V (resp. de W ),
alors (vi ⊗ wj , 1 ≤ iN
≤ n, 1 ≤ j ≤ m) est une base de V
W . En particulier, on peut identifier
n
m
mn
canoniquement k
k et k .
ii) Montrer qu’il existe une unique application linéaire
O
O
V∗
W ∗ −→ (V
W )∗ ,
telle que φ ⊗ ψ 7→ (v ⊗ w 7→ φ(v)ψ(w)), et que c’est un isomorphisme. En d’autres termes, le
produit tensoriel ’commute’ à la formation du dual.
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Feuille d’exercices 2
ii) Montrer qu’il existe une unique application linéaire
O
V∗
W −→ Hom(V, W ),
telle que φ ⊗ w 7→ (x 7→ φ(x)w),
N ∗ et que c’est un isomorphisme. En particulier, il existe un
élément canonique dans V
V , correspondant à l’identité de Hom(V, V ). Essayez de décrire
cet élément à l’aide d’une base (v1 , ..., vn ) de V .
Exercice 5. Produit tensoriel de formes bilinéaires. Produit tensoriel de formes quadratiques
(car(k) 6= 2).
Dans cet exercice, tous les espaces vectoriels sont de dimension finie.
i) Soient V et W deux espaces vectoriels. Considérons deux formes bilinéaires b : V × V −→ k
et b0 : W × W −→ k. Montrer qu’il existe une unique forme bilinéaire
b ⊗ b0 : (V ⊗ W ) × (V ⊗ W ) −→ k,
telle que (b ⊗ b0 )(v1 ⊗ w1 , v2 ⊗ w2 ) = b(v1 , v2 )b0 (w1 , w2 ). La forme b ⊗ b0 est appelée le produit
tensoriel de b et b0 . Montrer que b ⊗ b0 est non dégénérée si et seulement si b et b0 le sont toutes
deux. Montrer que b ⊗ b0 est symétrique si b et b0 le sont, et que la réciproque est vraie si b et
b0 sont toutes deux non nulles.
ii) On suppose ici que char(k) 6= 2. Vous savez alors qu’il existe une correspondance bijective
entre les formes quadratiques et les formes bilinéaires symétriques, donnée par
(V, q) 7→ (V, P (q))
et
(V, b) 7→ (V, Q(b)),
.
où P (q)(x, y) := q(x + y) − q(x) − q(y) est la forme polaire de q, et Q(b)(x) = b(x,x)
2
0
Soient (V, q) et (W, q ) deux espaces quadratiques. Définissons leur produit tensoriel comme
étant l’espace
(V ⊗ W, q ⊗ q 0 ),
où
1
q ⊗ q 0 = Q(P (q) ⊗ P (q 0 )).
2
n
m
Supposant V = k , W = k , q =< x1 , ...., xn > et q 0 =< y1 , ..., ymN
> (où les xi et les yj sont
des éléments de k), décrire la forme q ⊗ q 0 sur l’espace vectoriel k n k m = k mn .
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