Chapitre 5 Les nombres complexes (2) 1 Argument d’un nombre complexe. − − Un point M peut être repéré dans le plan muni d’un repère orthonormé direct (O; → u ,→ v ) de deux façons : par ses coordonnées −−→ − cartésiennes x et y ou par ses coordonnées polaires notées r et θ où r = OM et θ = (→ u , OM) si M est distinct de O. Définition − − Soit z un nombre complexe non nul et M le point d’affixe z dans le plan muni d’un repère orthonormé direct (O; → u ,→ v ). −−→ → − On appelle argument de z, noté arg(z), une mesure de l’angle orienté de vecteurs ( u ; OM). Remarques : • 0 n’a pas d’argument. • Tout point M est repéré dans le plan complexe par son affixe z = x + i y, et lorsque M est différent de O, par ses coordonnées polaires |z| et arg(z). 2 Ecriture trigonométrique Théorème : Soit z un nombre complexe non nul d’écriture algébrique z = a + i b et θ un argument de z. Alors : a = |z| cos θ et b = |z| sin θ. On a alors z = |z|(cosθ + i sin θ). M (z = a + ib) b r = |z| = OM θ = arg(z) ~v O ~u a En effet, z est un nombre complexe non nul et M le point d’affixe z dans le plan complexe. On sait que OM = |z|. Donc on a bien a = |z| cos θ et b = |z| sin θ. Définition Soit z un nombre complexe non nul. L’écriture z = |z|(cos θ + i sin θ), où θ désigne un argument de z est appelée écriture trigonométrique ou forme trigonométrique de z. Remarque : Soit z un nombre complexe non nul. – Si on connaît une écriture trigonométrique de z, z = r (cosθ+i sinθ) (r > 0), alors on obtient son écriture algébrique a +i b en écrivant : a = r cos θ et b = r sin θ. – Si on connaît l’écriture algébrique de z, z = a + i b, alors on obtient son écriture trigonométrique z = r (cos θ + i sin θ) en écrivant : p a b r = a 2 + b 2 , cos θ = p , sin θ = p . a2 + b2 a2 + b2 Exercice : p • On pose z1 = 3 + i . Trouver la forme trigonométrique de z1 . π • z2 est le complexe de module 3 et d’argument − . Quelle est la forme algébrique de z2 ? 4 Propriétés Soit z un nombre complexe. • z est un réel non nul si, et seulement si, arg(z) = 0 + kπ (k ∈ Z). • z est un réel strictement positif si, et seulement si, arg(z) = 0 + 2kπ (k ∈ Z). • z est un réel strictement négatif si, et seulement si, arg(z) = π + 2kπ (k ∈ Z). π • z est un imaginaire pur si, et seulement si, arg(z) = + kπ (k ∈ Z). 2 Théorème : Egalité de complexes écrits sous forme trigonométrique Si z = r (cosθ + i sin θ) et z ′ = r ′ (cos θ′ + i sin θ′ ) sont égaux, alors puisqu’ils sont associés au même point, on a r = r ′ et θ = θ′ + 2kπ (k ∈ Z). z = z′ équivaut à r = r ′ et θ = θ′ (mod 2π). Remarque : Si z = r (cosθ + i sin θ) avec r > 0, alors |z| = r et arg(z) = θ mod 2π. 3 Propriété des arguments. 3.1 Premières propriétés. • arg(z̄) = − arg(z) mod 2π • arg(−z) = π + arg(z) mod 2π 3.2 Argument d’un produit Théorème : Quels que soient les nombres complexes non nuls z et z’ : arg(zz ′ ) = arg(z) + arg(z ′ ) mod 2π Démonstration : Exemple h :³ π ´ ³ π ´i ³ π´ ³ π ´i p h z = 2 cos + i sin et z ′ = 3 cos − + i sin − . 5 5 4 4 ³ π´ ³ π ´i p p h π π π |zz ′ | = 2 × 3 et arg(zz ′ ) = − mod 2π = − mod 2π, d’où zz ′ = 2 3 cos − + i sin − . 5 4 20 20 20 Conséquences : On peut alors Démontrer que |z n | = |z|n et arg(z n ) = n arg(z) mod 2π. Formule De Moivre : Pour tout entier n et tout nombre réel θ, (cos θ + i sin θ)n = cos(nθ) + i sin(nθ). Exercice : p Donner la forme algébrique du nombre z = (1 − i 3)5 . 3.3 Argument d’un quotient Théorème : Quels que soient les nombres complexes non nuls z et z ′ : arg ³z´ z′ = arg(z) − arg(z ′ ) mod 2π z |z| , on obtient Zz ′ = z, ce qui donne |Zz ′ | = |Z||z ′ | = |z| et |Z| = ′ z′ |z | et arg(Zz ′ ) = arg(Z) + arg(z ′ ) mod 2π = arg(z) mod 2π, d’où arg(Z) = arg(z) − arg(z ′ ) mod 2π. En effet, en posant Z = Conséquences : ¯ ¯ µ ¶ ¯1¯ 1 1 Si z est non nul, ¯¯ ¯¯ = et arg = − arg(z) mod 2π. z |z| z Exercice : (1 + i )4 • Donner la forme trigonométrique du nombre Z = p . ( 3 + i )3 p z1 3 − i , z2 = 1 − i et Z = . z2 π π Ecrire Z sous forme algébrique, en déduire les valeurs exactes de cos et sin . 12 12 • Ecrire sous forme trigonométrique les nombres complexes z1 = 4 Interprétations géométriques −→ −−→ −→ • Soit AB un vecteur et M le point tel que OM = AB. → = z − z , donc | z |=| z − z |. On a zM = z− AB B A M B A −−→ −→ De plus, ar g (zM ) = ar g (zB − z A ) = (~ u ; OM) = (~ u ; AB). Ainsi, AB =| zB − z A | et −→ (~ u ; AB) = ar g (zB − z A ) . ¯ ¯ CD ¯¯ zD − zC ¯¯ • Soit A, B, C et D tels que A 6= B et C 6= D. Alors =¯ ¯. AB ¯ zB − z A ¯ à ! zD − zC −→ −−→ −→ −−→ −−→ −→ (AB ; CD) = (AB ; ~ u ) + (~ u ; CD) = (~ u ; CD) − (~ u ; AB) = ar g (zD − zC ) − ar g (zB − z A ) = ar g . zB − z A à ! zD − zC −→ −−→ Ainsi, (AB ; CD) = ar g . zB − z A 5 Applications −→ −−→ • ABCD est un parallélogramme ⇐⇒ AB = DC ⇐⇒ zB − z A = zC − zD . • ABC est isocèle en A ⇐⇒ AB = AC ⇐⇒ |zB − z A | = |zC − z A |. • Soit ∆ la médiatrice de [AB] : M(z) ∈ ∆ ⇐⇒ AM = BM ⇐⇒ |z − z A | = |z − zB |. • Soit C le cercle de centre A et de rayon r : M ∈ C ⇐⇒ |z − z A | = r . à ! zD − zC z − zC −→ −−→ • (AB)//(CD) ⇐⇒ (AB ; CD) = 0 (mod π) ⇐⇒ ar g = 0 (mod π) ⇐⇒ D ∈ R∗ . zB − z A zB − z A ~′ (z ′ ) sont colinéaires non nuls ⇐⇒ z ∈ R∗ . Autrement dit, ~ u (z) et u z′ à ! zC − z A z − zA −→ −→ • A, B et C sont alignés ⇐⇒ (AB ; AC) = 0 (mod π) ⇐⇒ ar g ∈ R∗ . = 0 (mod π) ⇐⇒ C zB − z A zB − z A à ! z − zC zD − zC π π −→ −−→ = (mod π) ⇐⇒ D est un imaginaire pur non nul. • (AB)⊥(CD) ⇐⇒ (AB ; CD) = (mod π) ⇐⇒ ar g 2 zB − z A 2 zB − z A ~′ (z ′ ) sont orthogonaux non nuls ⇐⇒ z est un imaginaire pur non nul. Autrement dit, ~ u (z) et u z′ à ! zC − z A z − zA π π −→ −→ = (mod π) ⇐⇒ C est un imaginaire pur. • ABC rectangle en A ⇐⇒ (AB ; AC) = (mod π) ⇐⇒ ar g 2 zB − z A 2 zB − z A ¯ ¯ à ! ¯z −z ¯ z − zA π ¯ A¯ • ABC rectangle isocèle en A ⇐⇒ ar g C = (mod π) et ¯ C ¯ = 1. ¯z −z ¯ zB − z A 2 A ¯ ¯B à ! ¯z −z ¯ z − zA π π ¯ A¯ • ABC est équilatéral ⇐⇒ ar g C = ou − (mod 2π) et ¯ C ¯ = 1. ¯z −z ¯ z −z 3 3 B A B A 6 La forme exponentielle 6.1 Définition Posons f (θ) = cos θ + i sin θ (θ ∈ R). On a démontré que f (θ + θ′ ) = f (θ) f (θ′ ). La fonction f est donc une solution (complexe) de l’équation fonctionnelle f (a + b) = f (a) f (b). Or, on sait que les solutions de cette équation fonctionnelle sont solutions des équations différentielles y ′ = a y. Si on prolonge aux complexes les propriétés de la dérivation, on vérifie que f ′ (θ) = i f (θ). D’où f (θ) = f (0)e iθ = e iθ . Cette constatation rend parfaitement légitime la notation suivante : Pour tout réel θ, on pose e i θ = cosθ + i sin θ. Cette forme est la forme exponentielle de z. e iθ désigne donc le nombre complexe de module 1 et d’argument θ : |e iθ | = 1 et ar g (e iθ ) = θ [2π] Exemples : e i0 = 1, π i e 2 = i, e iπ = −1 e i2π = 1, e −i π 2 = −i . Un nombre complexe z de module r et d’argument θ s’écrit z = r e iθ . Remarque : Le conjugué de e iθ est e −iθ . Exercice : 1. Ecrire sous forme algébrique les nombres complexes : p π 2e 3i 4 ; 6e i 2π 3 . 2. Ecrire sous forme exponentielle les nombres suivants : 5i ; 4 + 4i . 6.2 Règles de calculs Théorème : ′ ′ e iθ × e iθ = e i(θ+θ ) e iθ ′ e iθ ′ = e i(θ−θ ) ³ e iθ ´n = e inθ pour n ∈ Z La notation exponentielle rend les calculs très simples... Exemples : π π z = 2e i 4 , z ′ = 3e −i 3 alors zz ′ = 6e i π 4−3 ¡π ¢ π = 6e −i 12 ; z 2 ¡ π π ¢ 2 7π = e i 4 + 3 = e i 12 . ′ z 3 3 Formule de Moivre : Pour tout θ ∈ R et tout n ∈ Z, (cos θ + i sin θ)n = cos(nθ) + i sin(nθ) Formules d’Euler : cos θ = e iθ + e −iθ 2 et sin θ = e iθ − e −iθ 2i Démonstrations : Utilisons les formes exponentielles : ³ ´n (cos θ + i sin θ)n = e iθ = e niθ = cos(nθ) + i sin(nθ) e iθ + e −iθ = cos θ + i sin θ + cos(−θ) + i sin(−θ) = 2cos θ. e iθ − e −iθ = cos θ + i sin θ − cos(−θ) − i sin(−θ) = 2i sin θ. Exercice : p Ecrire sous forme exponentielle le nombre suivant : ( 3 − i )5 . Exercice : i πh θ est dans 0; . Donner une forme exponentielle du complexe z = 1 + e iθ . 2 Théorème : M appartient au cercle de centre A(z A ) et de rayon r si, et seulement si : z = z A + r e iθ avec θ réel. Démonstration : M appartient au cercle de centre A et de rayon r équivaut à AM = r , c’est à dire |z − z A | = r . On a alors z − z A = r e iθ c’est à dire z = z A + e iθ . 7 Liens entre les nombres complexes et certaines transformations du plan Théorème : Ecriture complexe d’une translation La translation de vecteur ~ u , d’affixe a, transforme un point M(z) en un point M′ (z ′ ) tel que : z′ = z + a "Ajouter un nombre a, c’est translater d’un vecteur d’affixe a" M ′ (z + a) 2 M (z) 1 A(a) -2 -1 1 O 2 4 3 -1 Démonstration : Dire que M′ est l’image de M par la translation de vecteur ~ u signifie : −−−→′ MM = ~ u Ce qui se traduit, en termes d’affixes, par z ′ − z = a. D’où le théorème. Théorème : Ecriture complexe d’une rotation La rotation de centre Ω(ω) et d’angle θ transforme un point M(z) en un point M′ (z ′ ) tel que : z ′ − ω = e iθ (z − ω) "Multiplier par e iθ , c’est faire tourner d’un angle θ" Illstration dans le cas où Ω = O : M ′ (eiθ z) 2 M (z) 1 θ arg(z) -2 -1 1 O 2 3 -1 Démonstration : Si M = Ω, la relation z ′ − ω = e iθ (z − ω) est triviale. Supposons M 6= Ω. Dire que M′ est l’image de M par la rotation de centre Ω et d’angle θ signifie : ( ΩM′ = ΩM −−→ −−−→ (ΩM ; ΩM′ ) = θ ′ |z − ω| = |z − ω| µ ′ ¶ Ce qui se traduit en termes d’affixes, par : z −ω ar g =θ z −ω ′ z −ω On en déduit = e iθ . D’où le résultat. z −ω 4 Cas particuliers : • Si Ω = O, alors l’écriture complexe de la rotation devient z ′ = e iθ z • Si θ = π (quart de tour de sens direct), alors l’écriture complexe de la rotation devient 2 z ′ − ω = i (z − ω) • Si Ω = O et θ = π , alors l’écriture complexe de la rotation devient : 2 z′ = i z • Cas du triangle équilatéral. Soient A, B et C trois points du plan d’affixes respectives z A , zB et zC . ABC est équilatéral de sens direct ⇐⇒ zC − z A = e i π3 (zB − z A (en effet, c’est équivalent de dire que C est l’image de B par la rotation de centre A et d’angle π ). 3 Théorème : Ecriture complexe d’une homothétie L’homothétie de centre Ω(ω) et de rapport k ∈ R∗ transforme un point M(z) en un point M′ (z ′ ) tel que : z ′ − ω = k(z − ω) Démonstration : Dire que M′ est l’image de M par l’homothétie de centre Ω et de rapport k signifie : −−−→′ −−→ ΩM = k ΩM Ce qui se traduit bien, en termes d’affixes, par : z ′ − ω = k(z − ω).