Les mycobactéries

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Cours de microbiologie
Les mycobactéries
Les infections par les mycobactéries ont vu leur nombre augmenter ces dernières années :
-
les cas de tuberculose en raison des conditions de vie précaires dans certaines parties de la
population ;
-
les infections par les mycobactéries non tuberculeuses chez les personnes immunodéprimées
(SIDA en particulier).
1. Généralités : classification, habitat et pouvoir pathogène
Domaine
Bacteria
Phylum
Actinobacteria
Sous-classe
Actinobacteridae
Ordre
Actinomycetales
Familles
Mycobacteriaceae
Corynebacteriaceae
Micrococcaceae
Genres
Mycobacterium
Corynebacterium
Micrococcus
Plus de 50 espèces ont été décrites : ces bactéries peuvent être retrouvées dans l’environnement
(saprophytes) ou au contact d’un hôte animal ou humain en tant que commensales ou pathogènes
(strictes ou opportunistes) :
MYCOBACTERIES PATHOGENES STRICTES
TUBERCULOSE
Mycobactéries du « complexe
Mycobacterium tuberculosis »
MYCOBACTERIES
PATHOGENES
LEPRE
OPPORTUNISTES
Mycobacterium leprae
Mycobactéries « atypiques »
-
Mycobacterium tuberculosis La lèpre est une maladie
Responsables d’infections
-
Mycobacterium bovis
infectieuse chronique
pulmonaires, ganglionnaires,
-
Mycobacterium africanum
touchant principalement la
cutanées, de suppurations et
-
Mycobacterium canettii
peau, les nerfs
d’infections systémiques) :
-
Mycobacterium microti
périphériques, la muqueuse -
Mycobacterium avium,
-
Mycobacterium pinnipedii
des voies respiratoires
-
M. intracellulare,
supérieures ainsi que les
-
M. kansasii,
yeux. Cette maladie est
-
M. xenopi,
rencontrée principalement
-
M. malmoense…
en Asie et en Afrique.
2. Caractères morphologiques
Les mycobactéries sont des bacilles droits ou légèrement incurvés, de 0,2 à 0,6 µm de diamètre
sur 1,0 à 10,0 µm de longueur, présentant parfois des renflements ou des ramifications, formant
occasionnellement des filaments qui se fragmentent très facilement en éléments bacillaires. Elles sont
immobiles et non sporulées.
Ces bactéries sont difficilement colorées par la coloration de Gram mais sont considérées comme
à Gram positif. En fait, la paroi des mycobactéries possède une structure plus complexe que la paroi
des bactéries à Gram positif et, sur un frottis coloré par la technique de Gram, les mycobactéries
apparaissent souvent comme non colorées.
Leur mise en évidence repose sur leur propriété particulière d’acido-alcoolo-résistance, ce pourquoi
on les appelle des B.A.A.R. (Bacilles Acido-Alcoolo Résistants).
Deux colorations sont utilisées : la coloration de Ziehl-Neelsen (et ses variantes) et la coloration à
l'auramine (Dugommier).
Dans la technique de Ziehl-Neelsen, la fuchsine L'auramine
se
fixe
sur
le
bacille
et
le
rend
colore en rouge les bacilles qui conservent cette fluorescent, après traitement à l'acide-alcool et contrecoloration après traitement par l'acide nitrique (ou coloration du fond de la préparation. Celle-ci est
sulfurique) dilué et par l'alcool. Le fond de la examinée au microscope en fluorescence (x25). La lame
préparation
méthylène.
est
ensuite
Les
coloré
bacilles
au
bleu
de est explorée plus rapidement, le champ observé étant
Acido-Alcoolo- plus grand qu'à l'immersion. Les B.A.A.R. apparaissent
Résistants (B.A.A.R.) apparaissent rouges sur fluorescents, brillants sur fond noir de la préparation.
fond bleu. La lecture se fait à l'objectif à immersion Ils sont dénombrés par champ microscopique (diagnostic
(x100). Elle est longue car le champ observé est positif si au moins un B.A.A.R. pour 10 champs
petit.
observés).
M. tuberculosis (coloration de Ziehl-Neelsen)
M. tuberculosis (coloration de Dugommier)
Sur le plan structural, les mycobactéries se caractérisent par une paroi riche en lipides (60 % des
constituants) et dont la constitution explique, au moins partiellement, les propriétés tinctoriales, la
pathogénicité et la résistance à divers antibiotiques.
La paroi est constituée de trois couches : la plus interne est formée d'un peptidoglycane sur lequel est fixé
un polymère de molécules d'arabinose et de galactose (arabino-galactane) qui s'attachent par des liaisons
esters à des acides mycoliques situés dans la couche intermédiaire (apparaissant comme un espace clair en
microscopie électronique). La partie externe de la paroi, est formée d'une matrice de phospholipides, de
molécules amphiphiles, de protéines dont certaines sont sans doute des porines et de mycosides. Les
mycosides sont des peptidoglycolipides dont la structure antigénique permet, pour certaines espèces, de décrire
des sérovars. Chez certaines souches, la couche externe de mycosides peut être très épaisse et forme une
pseudocapsule. La paroi est traversée de part en part par des molécules de lipo-arabinomananne qui sont
ancrées par leur partie lipidique dans la membrane cytoplasmique et dont la partie polysaccharidique gagne la
surface cellulaire. Ces molécules joueraient un rôle dans la cohésion de la paroi.
Schémas des enveloppes cellulaires des mycobactéries
3. Culture des mycobactéries (Cf. AT)
Selon les espèces, les exigences et le temps de génération des mycobactéries sont variables : les
colonies ne sont visibles qu'après un temps d'incubation compris entre 2 jours et 10 semaines à
37°C en aérobiose (les mycobactéries sont aérobies strictes). En fonction de leur vitesse de
croissance et de leurs exigences, les espèces du genre Mycobacterium sont divisées en 2 groupes :
-
les mycobactéries à croissance lente (incluant les mycobactéries responsables de la
tuberculose), ne formant des colonies qu'après au moins 7 jours de culture sur milieu enrichi à
l’œuf coagulé (Löwenstein-Jensen) et incapables de cultiver sur des milieux standards ;
-
les mycobactéries à croissance rapide, formant des colonies en moins de 5 jours et aptes à se
développer sur gélose trypticase soja.
NB : Mycobaterium leprae n’est pas cultivable sur milieu de culture.
4. La tuberculose
4.1.
Contamination
La tuberculose se transmet principalement de manière directe par voie aérienne : Mycobacterium
tuberculosis (bacille de Koch) est une espèce strictement humaine pénétrant dans les voies
respiratoires lors de l’inhalation d’aérosols chargés en bactéries (émis par les malades ).
Cependant, la résistance des mycobactéries au froid et à la dessication leur permet de persister sur
des poussières.
La tuberculose à Mycobacterium bovis peut être contractée par des personnes vivant au contact
d’animaux malades mais aussi par consommation de lait contaminé et non pasteurisé (cas très rares).
4.2.
Primo-infection
Une fois parvenus au niveau des alvéoles pulmonaires, les bacilles déclenchent une réaction
inflammatoire et sont phagocytés par les macrophages alvéolaires. Au lieu d’être éliminées, les
bactéries se multiplient à l’intérieur des phagocytes (inhibition de la fusion phago-lysosomiale),
qui finissent par être lysés. Le foyer infectieux se développe et forme ainsi des follicules
tuberculeux détectables par radiographie pulmonaire. A ce stade, les symptômes sont d’intensité
variable et la maladie évolue généralement vers la latence, mais elle peut aussi se compliquer
directement en méningite (ou autres atteintes).
Les follicules contenant des macrophages géants plurinucléés et des bactéries peuvent se nécroser et
se transformer en « caséum » (masse solide). Celui ci peut régresser (évolution vers une guérison) ou
persister plusieurs années.
4.3.
Réactivation : tuberculose secondaire
Chez certains malades, au niveau pulmonaire, le caséum du follicule se ramollit, sous l'action de
facteurs inconnus provoquant une réaction d’hypersensibilité exagérée, créant une « caverne » par
évacuation du contenu dans le poumon. Les bacilles, jusqu’alors quiescents, retrouvent une bonne
oxygénation se multiplient activement. La guérison est rare à ce stade et le malade est extrêmement
contagieux. Les bacilles peuvent ensuite coloniser de nombreux sites de l’organisme.
4.4.
Test à la tuberculine
4.5.
Traitement et prévention
La lutte contre la tuberculose s'appuie sur le dépistage des cas, la prise en charge et le traitement des malades,
en particulier des malades contagieux, et la vaccination par le BCG. Celle-ci a pour but principal de protéger les
jeunes enfants des formes graves de la tuberculose précoce, notamment les méningites tuberculeuses.
La liste des personnes concernées par la vaccination obligatoire est fixée dans le code de la santé publique. Y
sont soumis notamment, sauf contre-indication attestée par un certificat médical : les étudiants en médecine, en
chirurgie dentaire et en pharmacie, ainsi que les étudiants sages-femmes et les étudiants inscrits dans des
écoles préparant aux professions à caractère sanitaire ou social ; les personnes qui exercent une activité dans
les laboratoires d'analyse de biologie médicale ; les personnels des établissements pénitentiaires ; le personnel
soignant des établissements et des services de santé ; les professionnels du secteur social ;les assistantes
maternelles ; les sapeurs-pompiers des services d'incendie et de secours.
Depuis juillet 2007, l'obligation vaccinale par le BCG est suspendue et remplacée par une recommandation forte
de vaccination pour : les enfants de moins de 6 ans accueillis en collectivité (par exemple : en crèche, à l'école
maternelle, en centre de loisirs, chez une assistante maternelle) ; les mineurs et les jeunes adultes jusqu'à 21
ans qui fréquentent des établissements d'enseignement, ou accueillis en centres spécialisés (établissements de
prévention, établissements médico-sociaux).
5. Les mycobactéries « atypiques » opportunistes
Les mycobactéries atypiques sont les bacilles acido-alcoolo-résistants autres que M. tuberculosis, M.
bovis, M. africanum, M. leprae (qui sont des parasites stricts et ont un pouvoir pathogène spécifique).
Responsables d'infections humaines opportunistes, elles se caractérisent par une forte activité
catalasique thermostable, une absence de pouvoir pathogène pour le cobaye et une résistance à la
plupart des antibiotiques antituberculeux. Bien que plus de 40 espèces mycobactériennes “atypiques”
aient été identifiées, les principales espèces isolées en bactériologie clinique se réduisent à 12
potentiellement pathogènes pour l'homme. Leur identification repose toujours sur la classification en 4
groupes proposée en 1959 par Runyon. Depuis l'épidémie de SIDA, le rôle pathogène de M. aviumintracellulare a considérablement augmenté.
CAS PARTICULIER : En 1997, éclatait le scandale de la clinique du sport (Le Figaro du 12/09/1997)
Entre janvier 1988 et mai 1993, les interventions chirurgicales réalisées dans cet établissement parisien auraient
été effectuées avec des instruments d'endoscopie mal stérilisés. Plus de 800 malades ont été invités à passer
des examens de santé.
L'affaire était restée confidentielle pendant plusieurs années. Il a fallu la création d'une association de malades
et leur désir d'informer le public pour qu'elle sorte de l'ombre. A ce jour, 31 personnes ayant subi une opération
pour hernie discale à la Clinique du sport, à Paris, dans le 5e arrondissement, souffrent d'une infection osseuse
majeure, parfois avec des séquelles très importantes, due à une bactérie, Mycobacterium xenopi. Un défaut de
stérilisation du matériel chirurgical serait à l'origine de la contamination. Cette infection hospitalière soulève une
fois de plus la question du respect très strict des règles de stérilisation du matériel chirurgical.
En 1993, la clinique du Sport alerte la Direction générale de la santé au ministère de la Santé : les premiers cas
d'infection à M. xenopi viennent d'être identifiés chez des patients opérés d'une hernie discale. Après une
enquête très longue, menée par la Direction des affaires sanitaires et sociales et le laboratoire d'hygiène de la
Ville de Paris, la bactérie M. xenopi est mise en évidence dans le réseau d'eau de la clinique utilisé pour la
stérilisation à froid de certains instruments.
Les patients auraient été contaminés lors d'une intervention pour soigner une hernie discale. Ce sont les
instruments, introduits à travers les disques vertébraux, qui ont été insuffisamment stérilisés. Ils auraient été
d'abord trempés pendant un temps trop court dans le liquide désinfectant. Puis, rincés non pas à l'eau stérile
comme il se doit, mais avec de l'eau du robinet, contenant cette fameuse M. xenopi. Dans tous les cas, les
procédures de désinfection à froid pour les arthroscopes, non stérilisables en autoclaves, n'ont pas été
respectées.
Mycobacterium xenopi est un germe de l'environnement que l'on retrouve de façon fréquente dans l'air et dans
l'eau propre à la consommation. Cette bactérie, identifiée en 1958 chez un crapaud, est donc connue depuis fort
longtemps. « Elle n'est en général pas pathogène pour l'homme, mais peut être à l'origine d'une authentique
maladie respiratoire chez des individus fragilisés par des antécédents de tuberculose pulmonaire, explique le
docteur Véronique Vincent (laboratoire des mycobactéries, Institut Pasteur de Paris). Le grand problème, c'est
que l'infection est résistante aux antibiotiques usuels.
Quand la porte d'entrée se fait non plus par voie aérienne, mais par voie chirurgicale, orthopédique, avec du
matériel contaminé, la maladie s'apparente à une tuberculose osseuse, avec des inflammations, des abcès. Le
diagnostic est difficile et le traitement chirurgical consiste à nettoyer les lésions et éliminer les abcès. Avec un
traitement antibiotique dont les résultats sont incertains.
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