Phénologie de quelques espèces ligneuses du parc

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Article de recherche
Sécheresse 2007 ; 1E (4) : 1-13
Phénologie de quelques espèces ligneuses
du Parc national du « W » du Niger
Ali Mahamane1,2
Saadou Mahamane2
Jean Lejoly1
1
Laboratoire de botanique systématique
et de phytosociologie
Université libre de Bruxelles (ULB)
CP 169
50, avenue FD Roosevelt
B-1050 Bruxelles
Belgique
<[email protected]>
2
Département de biologie
Faculté des sciences
Université Abdou Moumouni
BP 10662
Niamey
Niger
<[email protected]>
<[email protected]>
Résumé
La phénologie de 28 espèces ligneuses du Parc National du « W » du Niger est
analysée. Les phases suivies sont la feuillaison, la floraison et la fructification. Suivant leurs caractéristiques phénologiques, les espèces sont réparties en quatre groupes (espèces sempervirentes, espèces semi-caducifoliées, espèces caducifoliées à
fructification brève et espèces caducifoliées à fructification prolongée). Les différents
stades phénologiques sont sous le contrôle des variations de l’humidité de l’air déterminée par les flux de mousson. Aussi, les feux de brousse allumés d’octobre à
décembre provoquent des repousses vertes utilisées par la faune comme nourriture
pendant la saison sèche. L’importance de ces repousses est variable suivant la géomorphologie.
Mots clés : hygrométrie, ligneux, Niger, phénologie, pluviométrie.
Abstract
Phenology of some woody species of the “W” National Park (Niger)
The phenology of 28 woody species in the W National Park, Niger, is analysed.
The phenological stages monitored are leafing, flowering and fruiting. According
to the phenological characteristics, the species are classified into four groups: evergreen, semi-evergreen, deciduous with a short fruiting period and deciduous with a
long fruiting period. The phenological stages are under the control of variations in
air moisture determined by flows of the monsoon. Therefore, bushfires lit from October to December cause regrowth of green plants used by fauna as food during the
dry season. The periods during which such regrowth can be effective varies according to the geomorphology of the region.
Key words: hygrometry, Niger, phenology, rainfall, woody species.
doi: 10.1684/sec.2007.0189
L
Tirés à part : A. Mahamane
Sécheresse vol. 1E, n° 4, octobre-novembre-décembre 2007
e Parc national du W est situé à
150 km au sud de Niamey, en zone
de transition soudano-sahélienne [1].
Le site se situe dans le centre d’endémisme
régional soudanien qui comporte plus de
1 000 espèces de phanérogames endémiques ou semi-endémiques [2]. C’est le
domaine des forêts claires et des savanes
[3].
Plusieurs travaux conduits sur la phénologie
des espèces ligneuses de cette région
phytogéographique ont montré une
synchronisation entre les modèles phénologiques et le rythme des saisons [4, 5]. La variabilité des phénophases entre les individus
correspond à une aptitude propre à chaque
espèce dans la conquête du milieu [6, 7].
Des résultats similaires sont obtenus sur des
savanes au Venezuela [8].
Dans le Parc national du W, la conservation
a permis le maintien de plusieurs faciès de
végétation qui jouent un rôle de refuge pour
la faune et la flore. C’est la zone de plus
grande diversité de faune au Niger, spécialement pour les herbivores comme les buffles, les éléphants et plusieurs espèces d’antilopes qui y trouvent une quiétude et une
source importante de nourriture.
Cependant, en saison sèche, le fourrage vert
est rare, voire même quasi absent au sein de
certaines communautés végétales localisées
sur terre ferme. Des observations courantes
1
du paysage montrent des modifications
remarquables de la physionomie des divers
faciès de végétation au cours de l’année à
travers l’apparition et la chute progressives
des feuilles, fleurs et fruits des arbres et
arbustes. Ces modifications phénologiques
se répercutent sur la faune qui se nourrit
des différents organes des plantes.
Or, au cours de cette même saison sèche,
les feux de brousse, allumés aux périodes
favorables, sont en mesure de stimuler des
repousses vertes chez la végétation aussi
bien ligneuse qu’herbacée, ce qui permet
sans doute de suppléer les besoins alimentaires de la faune sauvage, en rendant le
fourrage vert disponible au cours de cette
même saison sèche.
Le présent travail se justifie par la nécessité
de bien cerner la phénologie des principales essences ligneuses et les modifications
utiles que peuvent engendrer les feux afin
de proposer des solutions techniques aux
aménageurs, qui tiennent compte de l’écologie de ces communautés. Les résultats
attendus doivent permettre de renforcer
les efforts de surveillance et d’aménagement des écosystèmes pour améliorer l’alimentation de la faune sauvage. Cet article
s’inscrit ainsi dans le processus de caractérisation de la dynamique des communautés végétales du parc. Il décrit la phénologie des populations ligneuses de 28
espèces fréquentes dans la végétation et
présente la première classification phénologique des espèces ligneuses du parc.
Matériel et méthode
La phénologie est définie comme l’étude
des variations des événements biologiques
et physiologiques répétitifs visibles à l’œil
A
20
2
20
uve
Fle
Nig
er
Niger
Mali
10
Guinée
Conakry
Burkina Faso
Nigeria
10
Bénin
10
Le site d’étude
Le Parc national du W se situe en Afrique
occidentale, entre 11° 50’ et 12° 35’ de
latitude Nord et 2° et 2° 50’ de longitude
Est (figure 1A). Il s’étend sur quatre unités
géomorphologiques : les plateaux cuirassés au centre, les buttes cuirassées dans
la partie occidentale, les bancs de grès à
l’est et au sud, la vallée de la rivière
Mékrou (figure 1B). Les sols sont de types
ferrugineux tropicaux s’étendant sur des
roches du Précambrien [9].
Le climat est de type continental caractéristique de la zone des savanes boisées soudaniennes et est marqué par une courte
saison des pluies, de juin à septembre, et
une longue saison sèche, de novembre à
avril. La pluviométrie moyenne annuelle est
de 704,7 mm à la station météorologique
de la Tapoa. En saison des pluies, la pluviométrie est supérieure à l’évapotranspiration potentielle (ETP) seulement au cours
du mois d’août qui est le mois le plus pluvieux (figure 2A). Les températures moyennes journalières varient suivant les saisons
entre 10 et 44 °C. Les vents sont dominés
par l’harmattan en saison sèche et par la
nu et des causes biotiques et abiotiques de
leur synchronisation [10].
Un total de 1 305 arbres et arbustes,
représentant 28 espèces ligneuses, est étudié dans quatre faciès de végétations
(tableau 1) et sur 12 stations (figures 1B
et 3). La nomenclature employée suit celle
de Lebrun et Storck [11]. Le choix des
essences se justifie par leur importance
dans le peuplement et leur rôle présupposé
dans l’alimentation de la faune. Les relevés
sont réalisés tous les 15 jours, de la fin de
la saison sèche à la fin de la saison des
pluies (d’avril à octobre) et tous les mois en
mousson qui génère les pluies. L’humidité
atmosphérique, très faible en février et
mars, augmente graduellement à partir
du mois d’avril avec la remontée du front
intertropical et atteint son maximum en
août (figure 2B).
B
0
10
Centre d’endémisme régional sahélien
Centre d’endémisme régional soudanien
Parc régional du W
Frontières d’États
400000
410000
420000
430000
440000
450000
460000
470000
480000
NIGER
1390000
1390000
27
1380000
1380000
Tapoa
1370000
1370000
1360000
1360000
1350000
1350000
Légende
Placettes et formations
BENIN
1340000
Fourrés arbustifs
Forêt claire
Altitude
(m)
150
Galerie forestière
N
1330000
W
410000
E
Frontière d'État
Cours d’eau
BURKINA FASO
400000
Savane arbustive
S
420000
430000
440000
450000 460000
Piste carrossable
Route nationale
UTM WGS 84
MNT: SRTM
200
250
300
350
400
Figure 1. Site d’étude et localisation des stations suivies.
A) site ; B) stations suivies.
Sécheresse vol. 1E, n° 4, octobre-novembre-décembre 2007
A
mm
°C
140
300
29,7°C
La Tapoa
704,7
(223)
120
250
(81-02)
100
200
80
150
60
– entre 10 et 50 % de feuilles et entre 10 et
50 % de fleurs épanouies, et de 10 à 50 %
de fruits murs ;
– plus de 50 % des feuilles et fleurs épanouies et plus de 50 % de fruits mûrs ;
– entre 10 et 50 % des feuilles et des fleurs
sèches, début de dessèchement des fruits ;
– chute de plus de 50 % des feuilles et des
fleurs et fruits secs en dissémination.
L’impact des feux est suivi sur 12 sites
(figure 3). Ces feux sont allumés en octobre, novembre et décembre. Les repousses
sont suivies au cours des mois qui suivent.
Pour chaque stade phénologique, la
moyenne est calculée par mois sur
l’ensemble des individus de l’espèce.
100
40
50
20
Spectre phénologique global
0
0
J
F
M
A
M
J
J
A
S
O
Température (°C)
B
Résultats
N
D
Pluie (mm)
mm
%
300
80
70
250
60
200
50
150
40
30
100
20
50
10
0
0
J
ETP
F
M
A
M
ETP/2
J
J
A
S
O
N
D
Humidité relative (%)
Figure 2. Courbes ombrothermiques de la station de La Tapoa (A) et relation entre l’humidité
relative et l’évapotranspiration potentielle (B).
ETP : évapotranspiration potentielle ; ETP/2 : moitié de l’évapotranspiration potentielle.
saison sèche (de novembre à mars).
Le nombre d’individus suivis par espèce
est fonction de la densité des arbres et
arbustes dans les communautés végétales,
mais avoisine 12 par site. À chaque
relevé, la présence des feuilles, fleurs et
fruits est notée sur des fiches préétablies.
Sécheresse vol. 1E, n° 4, octobre-novembre-décembre 2007
Les échelles utilisées dérivent des échelles
connues dans la littérature [4, 10, 12].
Les stades retenus sont :
– pas de feuilles, de fleurs et de fruits ;
– bourgeons foliaires et floraux et moins de
10 % de fleurs épanouies, début de fructification et moins de 10 % de fruits mûrs ;
Pour l’ensemble des espèces, les stades
phénologiques varient suivant les saisons
(figures 4A, 4B, et 4C). Le développement
foliaire débute en avril-mai, juste avant les
premières pluies, et est maximal en juillet,
août et septembre. La chute des feuilles
s’amorce en octobre et la défeuillaison
est maximale en février et mars.
Des fleurs sont observées toute l’année,
mais la floraison est maximale en avril,
mai et juin. Quant à la fructification, elle
est prépondérante en mai, juin et juillet.
Groupes phénologiques
Suivant la densité des feuilles, les espèces
sont classées en trois groupes phénologiques principaux et deux sous-groupes :
– espèces caducifoliées, subdivisées en
deux sous-groupes :
– espèces caducifoliées à fructification
brève ;
– espèces caducifoliées à fructification prolongée ;
– espèces semi-caducifoliées, qui sont
défeuillées une partie de l’année ;
– espèces sempervirentes, qui gardent
leurs feuilles toute l’année.
Spécificité des groupes
• Les espèces caducifoliées
à fructification brève
Les espèces caducifoliées à fructification
brève sont : Lannea acida A. Rich., L.
microcarpa Engl. et K. Krauze, Xeroderris
stuhlmannii (Taub.) Mend. et Sous., Pteleopsis suberosa Engl. et Diels, Albizia zygia
(DC.) J. F. Mocer., Pterocarpus erinaceus
Poir. et Sclerocarya birrea (A. Rich.)
Hochst (figures 5A, 5B, 5C, 5D, 5E, 5F
et 5G). Ces espèces se caractérisent par
la formation précoce de bourgeons floraux
3
4
Sécheresse vol. 1E, n° 4, octobre-novembre-décembre 2007
Loganiaceae
Combretaceae
Sapotaceae
-
Strychnos spinosa Lam.
Terminalia avicennioides Guill. & Perr.
Vitellaria paradoxa C.F. Gaertn.
Nb d’individus / site
89
-
-
-
-
8
12
8
12
-
12
9
-
-
12
12
-
-
12
G
L
FC
1375993
0436824
S2
116
-
-
12
12
-
-
-
12
12
-
12
12
-
12
12
-
-
-
12
Pl
SG
FA
1376209
0437621
S3
95
-
-
-
-
-
8
12
-
12
12
-
12
12
7
8
-
-
12
Pl
SG
FA
1377683
0441494
S4
10
168
12
12
10
-
9
7
-
12
12
12
-
12
12
-
12
12
12
-
-
12
G
SA
SA
1388331
0442232
S5
73
12
12
11
12
-
-
-
-
12
2
12
-
-
-
-
-
-
V
LS
FC
1380911
0443260
S6
-
-
9
166
8
12
10
-
10
12
-
-
6
12
12
5
12
12
12
12
-
12
10
-
V
LS
FC
1380910
0443270
S7
137
12
-
-
-
-
-
7
12
12
12
-
12
12
-
12
12
12
12
-
-
10
P
A
FC
1375409
0433632
S8
89
-
-
5
-
-
-
-
12
12
-
-
12
12
12
12
-
12
-
-
P
SL
SA
1371045
0431136
S9
Formations végétales : SA : savane arbustive ; FC : forêt claire ; FA : fourrés arbustifs sur plateau cuirassé ; GF : galerie forestière.
Géomorphologie : G : glacis, Pl : plateau, V : versant et P : plaine.
Type de sol : A : sol argileux ; SL : sol sablo-limoneux ; L : sol limoneux ; SG : sol gravillonnaire ; SA : sol argileux ; LS : sol limono-sableux ; S : sol sableux ; Si : numéro des stations.
138
-
8
-
5
-
Fabaceae
Anacardiaceae
12
9
Pterocarpus erinaceus Poir.
Sclerocarya birrea (A. Rich.) Hochst.
Euphorbiaceae
Combretaceae
Fluegga virosa (Roxb. ex Willd.) Voigt
Guiera senegalensis J.F. Gmel.
12
-
Capparaceae
Combretaceae
Mimosaceae
Ebenaceae
Dichrostachys cinerea (L.) Wight & Arn.
Diospyros mespiliformis Hochst. ex A. DC.
12
12
-
Boscia senegalensis (Pers.) Lam. ex Poir.
Pteleopsis suberosa Engl. & Diels
Combretaceae
Rubiaceae
Caesalpiniaceae
Combretum nigricans Lepr. Ex Guill. & Perr.
Crossopteryx febrifuga (Afz. ex G. Don) Benth.
Daniellia oliveri (Rolfe) Hutch. & Dalz.
12
12
Bignoniaceae
Anacardiaceae
Anacardiaceae
Combretaceae
Combretaceae
Combretum glutinosum Perr. ex DC.
Combretum micranthum G. Don
12
12
Kigelia Africana (Lam.) Benth.
Lannea acida A. Rich.
Lannea microcarpa Engl. & K. Krause
Combretaceae
Combretaceae
Combretum aculeatum Vent.
Combretum collinum Fresen.
-
-
Combretaceae
Sterculiaceae
Anogeissus leiocarpa (DC.) Guill. & Perr.
Cola laurifolia Mast.
-
Caesalpiniaceae
Bombacaceae
Mimosaceae
Adansonia digitata L.
Albizia zygia (DC.) J.F. Macbr.
12
Isoberlinia doka Craib & Stapf
Mimosaceae
Acacia macrostachya Reichenb. ex Benth.
G
SL
8
-
Géomorphologie
Texture du sol
SA
Xeroderris stuhlmannii (Taub.) Mendonça & Sousa Fabaceae
-
Formation végétale
0435887
1376441
Longitude
Latitude
Coordonnées géographiques (UTM)
S1
-
Stations (S1 … S12)
Tableau I. Nombre d’espèces suivies par site, les noms des espèces suivent la nomenclature de Lebrun et Stocks (1991-1999).
60
-
-
-
-
-
-
12
12
-
-
12
12
-
-
-
12
P
S
SA
1355241
0433286
S10
-
-
128
-
12
-
-
8
-
-
-
12
12
12
-
12
12
-
12
12
12
12
-
V
L
FC
1363174
438063
S11
46
-
-
-
3
-
-
-
-
12
-
8
-
12
11
-
V
A
GF
1354880
0433609
S12
19
1305
44
36
22
29
39
24
11
14
7
8
53
68
129
72
19
108
105
12
96
92
43
92
46
12
12
11
82
-
-
-
-
Nb ind./
espèces
Est
S5
S4
S3
Ouest
S2
S1
Glacis sableux
Versant
Plateau cuirassé
(annuellement
parcouru
par les feux
d’aménagement)
S7
Replat
Glacis
(suivi des feux)
S6
Glacis sableux
(suivi des feux)
Vallée
(observations repousse
d’Andropogon gayanus
après passage du feu)
Nord
Versant
Plateau
Sud
S9
S10
S8
S11
S12
Rivière Mèkrou
Vallée
Buttes
Buttes sableuses
(stations exposées
aux feux accidentels)
Vallée
Vallée
• Allumage de feu sur les stations : S1, S3, S4, S5, S6, S7, S9, et S10.
• Pas de feu : S2, S8, S11et S12.
Figure 3. Localisation schématique des 12 stations suivant la géomorphologie.
Si : numéro des stations.
en avril-mai à la suite de l’augmentation de
la teneur en eau de l’air qui avoisine 43 %
en mai et 55 % en juin.
L’initiation florale est accompagnée d’une
formation de boutons foliaires. Les fruits
qui se développent constituent un appoint
alimentaire important pour les oiseaux et
les singes, principalement au cours de
cette période où les ressources alimentaires sont rares. Ces essences, après un
développement foliaire important en saison des pluies, perdent leurs feuilles très
tôt au cours de la courte période de transition entre la saison des pluies et la saison
sèche, vraisemblablement à cause de la
forte diminution de l’humidité relative en
octobre.
Sécheresse vol. 1E, n° 4, octobre-novembre-décembre 2007
• Les espèces caducifoliées
à fructification prolongée
Les espèces caducifoliées à fructification
prolongée sont : Adansonia digitata L.,
Daniellia oliveri (Rolf.) Hutch. et Dalz.,
Strychnos spinosa Lam, Vitellaria paradoxa
C. F.Gaertn. et Flueggea virosa (Rxb. ex.
Willd.) Voigt (figures 6A, 6B, 6C, 6D). L’initiation du développement foliaire et floral
chez ces essences démarre en mai-juin
avec l’augmentation de l’humidité atmosphérique et se prolonge pendant une
grande partie de la saison des pluies. En
octobre, la diminution brusque de l’humidité
ambiante entraîne la chute des feuilles.
La fructification de ces espèces a lieu en
saison des pluies et se prolonge en octobre.
• Les espèces semi-caducifoliées
Sept espèces appartiennent à cette
catégorie : Combretum aculeatum Vent.,
C. micranthum G.Don., C. nigricans var
elliotii (Engl. ex Diels) Aubrev., Crossopteryx febrifuga (G.Don.) Benth., Acacia
macrostachya Reich. ex Benth., Anogeissus leiocarpus (DC.) Guill. et Perr. et
Dichrostachys cinerea (L.) Wight et Arn.
(figures 7A, 7B, 7C, 7D, 7E, 7F, 7G).
Ces espèces se caractérisent par une
chute plus tardive des feuilles comparativement aux deux premiers groupes. L’initiation foliaire et florale a lieu en fin de saison
sèche et début de saison des pluies en juin.
Les fruits secs persistent sur la plante pendant plusieurs mois.
5
A
Feuilles
% des sujets
100 %
Pas de feuilles
80 %
Entre 5 et 10 % de feuilles
60 %
Entre 10 et 40 % de feuilles
40 %
Entre 40 et 60 % de feuilles
Entre 60 et 80 % de feuilles
20 %
Plus de 80 % de feuilles
0%
J
F M A M J
J
A
S O N D
Mois
Impacts des feux d’aménagement
sur la phénologie des arbres
et arbustes
B
Fleurs
% des sujets
100 %
Pas de fleurs
80 %
Entre 5 et 10 % de fleurs
60 %
Entre 10 et 40 % de fleurs
Entre 40 et 60 % de fleurs
40 %
Chute de 60 à 80 % de fleurs
20 %
Chute de plus de 80 % des fleurs
0%
J
F M A M J
J
A S O N D
Mois
C
Fruits
% des sujets
100 %
Pas de fruits
80 %
Entre 5 et 10 % de fruits
60 %
Entre 10 et 40 % de fruits
40 %
Entre 40 et 60 % de fruits
Chute de 60 à 80 % des fruits
20 %
Chute de plus de 80 % de fruits
0%
J
F M A M J
J
A
S O N D
Mois
Figure 4. Stades phénologiques globaux.
A) feuilles ; B) fleurs ; C) fruits.
• Les espèces sempervirentes
Il s’agit de Combretum glutinosum Perr. ex
DC., C. collinum , Guiera senegalensis
J.G. Gmel., Boscia senegalensis (Pers.)
Lam. Ex Poir., Diospyros mespiliformis
Hochst. ex. A. DC., Cola laurifolia Mast.,
6
K. africana et C. laurifolia sont des essences caractéristiques de galerie forestière.
Ces dernières continuent à puiser l’eau
des nappes phréatiques en saison sèche.
B. senegalensis et G. senegalensis développent un système racinaire profond pouvant atteindre 20 à 30 mètres et leur permettant de prospecter les couches
profondes du sol [13]. Les feuilles sont également très sclérifiées afin de réduire les
pertes en eau par transpiration. Pour ces
essences, la défoliation est graduelle dans
le temps. Elle est due aussi en partie au
traumatisme causé par le passage des
feux accidentels qui surviennent en avril
et mai.
Kigelia africana (Lam.) Benth., Isoberlinia
doka Craib. et Stapf. et Terminalia avicennioides Guill. et Perr. (figures 8A, 8B, 8C,
8D, 8E, 8F, 8G, 8H, 8I). Parmi ces espèces, C. glutinosum et B. senegalensis
connaissent une large répartition dans
tous les habitats alors que D. mespiliformis,
La figure 9 illustre l’impact des feux chez 8
essences ligneuses dominantes sur les
stations 1 à 11. Il s’agit de C. glutinosum,
C. collinum, L. microcarpa, C. nigricans,
I. doka, P. suberosa, G. senegalensis et
C. febrifuga.
Les résultats consignés dans le tableau 2
font ressortir l’importance des variations
dues au feu. Ainsi, la feuillaison induite
par le feu est importante de décembre à
mars-avril. Aussi, ces espèces produisent
des fleurs qui, pour une bonne part, avortent en raison des rigueurs de la saison
sèche, même si des cas de fructification
remarquables sont fréquents chez C. glutinosum.
Par ailleurs, les observations phénologiques conduites en avril-mai sur les zones
brûlées au cours de ces mêmes mois montrent de fortes mortalités de tiges chez les
espèces multicaules (C. micranthum, C.
collinum, C. nigricans, D. cinerea, P. suberosa). Enfin, les vagues de débourrement
obtenues en début de saison des pluies
pour les sites non brûlés ne sont pas observées sur ces sites brûlés tardivement.
Les feuilles vertes issues des repousses sont
consommées par les herbivores qui trouvent ainsi un fourrage vert de qualité.
À partir de ces résultats, il nous semble
nécessaire de faire une différence suivant
la profondeur des sols intimement liée à la
géomorphologie :
– sur les stations des points élevés de toposéquences (S1, S2 et S4) à sols peu profonds, ce sont les feux d’octobre qui sont
efficaces pour déclencher des repousses
chez la végétation ligneuse. Les feux de
décembre causeraient plus de mortalité
de tiges ;
– sur les stations à sols profonds (plus de
40 cm), les feux de novembre et décembre
sont plus efficaces (S3, S5, S6, S7, S8, S9,
S10). En effet, pour ces stations, le bilan
Sécheresse vol. 1E, n° 4, octobre-novembre-décembre 2007
A
B
Stades phénologiques
L. acida
80
60
40
20
0
A
M
J
J
A
S
Fe
O
N
D
J
Fl
F
Stades phénologiques
60
40
20
0
J
A
S O
Fe
20
0
N D
J
Fl
J A S O N D J F M
Fl
F
M
100
P. suberosa
80
60
40
20
0
A M J
Fr
J A
S O N D
Fe
E
60
40
20
0
A M
J
J
A
S O N
Fe
Fl
D J
F M
Stades phénologiques
Stades phénologiques
80
Fr
Stades phénologiques
G
Fr
80
60
40
20
0
A M J
Fe
100
F M
P. erinaceus
100
A. zygia
J
Fl
F
100
Fr
D
80
J
40
Fe
X. stuhlmannii
M
60
A M J
100
A
80
Fr
C
L. microcarpa
100
M
Stades phénologiques
Stades phénologiques
100
J A
S O N D
Fl
J F M
Fr
S. birrea
80
60
40
20
0
A M J
J A S O N D J F M
Fe
Période d'allumage des feux d'aménagement
Fl
Fr
Périodes d'apparition des feux accidentels
Figure 5. Espèces caducifoliées à fructification brève.
A) Lannea acida ; B) Lannea microcarpa ; C) Xerderris stuhlmannii ; D) Pteleopsis suberosa ; E) Albizia zygia ; F) Pterocarpus erinaceus ; G) Sclerocarya birrea.
hydrique est relativement meilleur comparativement aux précédentes ;
– enfin, dans les vallées, les ressources en eau
sont meilleures. Ces stations sont rarement parcourues par le feu. En revanche, à cause de la
faible profondeur de la nappe phréatique, les
espèces ligneuses sont sempervirentes.
Sécheresse vol. 1E, n° 4, octobre-novembre-décembre 2007
Différence interstations
Dans l’écosystème du Parc du W, on
observe un décalage de la mise en place
de phases phénologiques des individus
d’une même espèce sur des sites présentant
des différences de texture de sol. Les indivi-
dus d’A. leiocarpus de la station 8 sur sol
argileux présentent un retard dans le débourrement des feuilles par rapport à ceux de la
station 2 sur sol limono-sableux. Ce décalage
est de l’ordre de 3 semaines. À l’inverse, en
fin de saison des pluies, les populations d’A.
leiocarpus ont tendance à garder plus long-
7
A. digitata
80
60
40
20
0
A M
J
J A
S O
Fe
N D
J
Fl
F M
S. spinosa
80
60
40
20
0
M
Fe
J
J
A
S
Fl
80
60
40
20
0
A M
O
N
E
D
J
Fr
J
A S
F
O N D
Fl
J
F
M
Fr
100
F. virosa
80
60
40
20
0
A
M J
J A
Fe
S O
Fl
N D
J F
M
Fr
F. virosa
100
Stades phénologiques
J
Fe
D
100
A
D. oliveri
100
Fr
C
Stades phénologiques
Stades phénologiques
B
100
Stades phénologiques
Stades phénologiques
A
80
60
40
20
0
A M J J A S O N D J F M
Fe
Fl
Fr
Figure 6. Espèces caducifoliées à fructification prolongée.
A) Adansonia digitata ; B) Daniellia oliveri ; C) Strychnos spinoza ; D) Vitellaria paradoxa ; E) Flueggea virosa.
temps leurs feuilles sur la station argileuse.
Les sols à texture fine présentent une bonne
réserve en eau utile mais un point de fanaison permanente plus élevé [14, 15].
Variation interannuelle
Sur le site d’étude, la variation interannuelle de la phénologie est déterminée,
d’une part, par la variation du degré
d’hygrométrie, en fin de saison sèche et
de saison des pluies, et, d’autre part, par
le régime des précipitations. Le déficit
pluviométrique entraîne un retard et une
diminution du taux de réalisation des différentes phases phénologiques. L’impact des
précipitations sur la croissance et le développement de la végétation au Sahel a été
décrit [16]. La figure 7F et les figures 7D et
9H illustrent ce phénomène pour A. leiocarpus et C. febrifuga respectivement, au
8
sein d’une forêt claire sur un sol à texture
limono-argileuse de 0 à 17 centimètres et
argileuse de 18 à 50 centimètres de profondeur, au cours des années 1998
et 1999 (station 8). Les deux espèces présentent un comportement différent suivant
l’importance et la répartition de la pluviométrie annuelle qui était de 863 mm en
1998 et de 643 mm en 1999, soit un déficit de 221 mm. Il en a résulté, sur les sols
argileux peu approvisionnés en eau, une
régression progressive dans l’établissement des phénophases aussi bien dans le
temps que dans leur taux de réalisation.
Discussion
Pour les communautés végétales du parc,
deux périodes sont capitales pour le suivi
phénologique des essences ligneuses : la
fin de la saison sèche et celle de la saison
des pluies. La transition de la saison sèche
à la saison des pluies se caractérise par
une augmentation de la teneur en eau
dans l’air due à la remontée du Front intertropical (FIT). Il se produit des phases successives de bourgeonnements foliaires et
floraux. La chute des feuilles commencée
en octobre est maximale en février et
mars pour toutes les espèces caducifoliées.
Au cours de cette période, l’hygrométrie
est inférieure à 20 %. Ainsi, les phases
de défoliation et de foliation sont sous la
dépendance étroite des conditions climatiques, notamment de l’humidité atmosphérique. Pendant la période de décembre à
février, le Front intertropical occupe sa
position la plus méridionale, et de juillet à
septembre, sa position la plus septentrionale [17]. Corrélativement à la baisse de
Sécheresse vol. 1E, n° 4, octobre-novembre-décembre 2007
A
B
C. aculeatum
Stades phénologiques
Stades phénologiques
100
100
80
60
40
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0
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M J
J
A
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S O N
D
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J
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A
Fr
M
J
J
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N
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J
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F
M
Fr
D
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Stades phénologiques
Stades phénologiques
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M
C
C. nigricans
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60
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0
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80
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0
Fr
E
C. febrifuga
100
J A S O N D J F M
Fe
A M J
J A S O N D
Fe
Fl
J F M
Fr
F
A. macrostachya
100
Stades phénologiques
Stades phénologiques
C. micranthum
80
80
60
40
20
0
A
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J
J
A
Fe
S O
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D
Fl
Stades phénologiques
G
J
F
100
A. leiocarpus
80
60
40
20
0
M
A M J
Fe
Fr
100
J A
S O N D
Fl
J
F M
Fr
D. cinerea
80
60
40
20
0
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Fe
J
A S
O N D
Fl
J
F M
Fr
Figure 7. Espèces semi-caducifoliées.
A) Combretum aculeatum ; B) Combretum micranthum ; C) Combretum nigricans ; D) Crossopteryx febrifuga ; E) Acacia macrostachya ; F) Anogeissus leiocarpus ;
G) Dichrostachys cinerea.
Sécheresse vol. 1E, n° 4, octobre-novembre-décembre 2007
9
B
100
80
60
C.glutinosum
40
20
0
A M J J A S O N D J F M
Fe
Fl
Fr
80
60
40
20
0
A M J J A S O N D J F M
Fe
Fl
Fr
Stades phénologiques
D
Stades phénologiques
C
C. collinum
100
Stades phénologiques
Stades phénologiques
A
G. senegalensis
100
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0
A M J J A S O N D J F M
Fe
Fl
Fr
100
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B. senegalensis
40
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0
A
M J
Fe
J A
S O
Fl
N D
J
F
Fr
F
Stades phénologiques
Stades phénologiques
E
D. mespiliformis
100
80
60
40
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0
100
80
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40
0
A M J J A
Fe
A M J J A S O N D J F M
Fe
Fl
Fr
G
C. laurifolia
20
S O N D J F M
Fl
Fr
Stades phénologiques
Stades phénologiques
H
100
80
K. africana
60
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20
0
T. avicennioides
100
A M J J A S O N D J F M
Fe
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Fr
80
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0
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J A S O N D J F M
Fe
Fl
Fr
Stades phénologiques
I
100
I. doka
80
60
40
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0
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Fe
J A
S O N D J F M
Fl
Fr
Figure 8. Espèces sempervirentes.
A) Combretum glutinosum ; B) Combretum collinum ; C) Guiera senegalensis ; D) Boscia senegalensis ; E) Diospyros mespiliformis ; F) Cola laurifolia ; G) Kigelia africana ;
H) Terminalia avicennioides ; I) Isoberlinia doka.
10
Sécheresse vol. 1E, n° 4, octobre-novembre-décembre 2007
B
100
Stades phénologiques
Stades phénologiques
A
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C. glutinosum
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40
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0
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J
J A S O N D
Fe
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60
40
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0
A M J
J F M
Fl
C. collinum
80
Fr
J A S O N D
Fe
J F M
Fl
Fr
D
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Stades phénologiques
Stades phénologiques
C
P. suberosa
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60
40
20
0
A M
J
J A
S O N D
Fe
J
Fl
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I. doka
80
60
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20
0
A M
F M
J J A S O N D J F M
Fr
Fe
Fl
Fr
F
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L. microcarpa
80
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J
A
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S
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Fl
D
J
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Stades phénologiques
Stades phénologiques
E
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80
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C. nigricans
40
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0
A M J J A S O N D J F M
Fe
Fr
Fl
F
Stades phénologiques
100
80
60
40
G. senegalensis
20
0
A M J
J A S O N D J F M
Fe
Fl
Fr
Période d'allumage des feux d'aménagement
Stades phénologiques
H
G
100
80
C. febrifuga
60
40
20
0
A M
Fe
J
J A S O N D
Fl
J F M
Fr
Périodes d'apparition des feux accidentels
Figure 9. Impact des feux chez huit essences ligneuses.
A) Combretum glutinosum ; B) Combretum collinum ; C) Pteleopsis suberosa ; D) Isoberlinia doka ; E) Lannea microcarpa ; F) Combretum nigricans ; G) Guiera senegalensis ;
H) Crossopteryx febrifuga.
Sécheresse vol. 1E, n° 4, octobre-novembre-décembre 2007
11
Tableau II. Variations en pourcentage de la feuillaison chez huit essences ligneuses soumises au régime des feux.
Mois
Espèces
Combretum collinum
C. glutinosum
C. nigricans
Lannea microcarpa
Isoberlinia doka
Pteleiopsis suberosa
Guiera senegalensis
Crossopteryx febrifuga
A
M
J
J
A
S
O
N
D
J
F
M
17
0
0
0
75
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100
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0
0
75
86
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0
25
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0
33
67
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0
0
0
0
0
0
0
0
0
0
0
0
0
0
0
0
0
0
0
0
0
0
0
0
0
0
0
0
0
0
40
0
0
0
0
0
75
75
0
0
0
0
25
20
83
100
33
100
30
88
25
40
100
100
33
100
40
100
50
40
100
100
50
100
10
100
88
100
100
100
60
100
75
100
Les pourcentages expriment le surplus de feuillaison par rapport au témoin. On note un renouvellement des feuilles après le passage du feu. Chez la plupart des
espèces, les feuilles persistent sur les sujets en saison sèche.
l’humidité relative, on note une augmentation de la température et de l’ETP.
Ces changements se caractérisent généralement par une chute brutale des feuilles en
réponse au stress hydrique [18]. Le dessèchement accentue l’évaporation et
contraint la végétation à réagir, le plus souvent par la perte des feuilles. Ainsi, la forte
évaporation provoquée par l’harmattan est
l’élément clé du déclenchement de la chute
des feuilles, de sorte que les espèces caducifoliées comme C. micranthum présentent
une activité photosynthétique principalement en saison des pluies.
C. glutinosum présente une floraison et une
fructification décalées par rapport aux
autres espèces. Sur des sites non perturbés, elles ont lieu essentiellement en saison
sèche. Nos résultats peuvent être comparés à ceux obtenus sur des savanes au
nord de la Côte d’Ivoire [7], sur une
savane soudano-sahélienne au nord du
Cameroun [15], en zone sahélienne [16]
et dans la Réserve de biosphère de la
« Boucle de Baoulé » au Mali et dans quatre réserves forestières au Burkina Faso
[19].
Le stress hydrique est plus perceptible sur
les points élevés de toposéquence [6].
Aussi, G. senegalensis comporte une
grande flexibilité de la phénologie au
niveau des individus en fonction de la
situation topographique, ce qui a favorisé
l’espèce dans les jachères du Sud-Ouest du
Niger [6].
Chez les espèces sempervirentes, les pertes en eau sont souvent compensées de
deux façons : par l’alimentation à partir
des nappes phréatiques pour les stations
des galeries forestières et par un système
racinaire très développé doublé de feuilles
fortement sclérifiées pour limiter les pertes
en eau dans le cas des stations sèches [13,
19]. Des résultats similaires sont obtenus
sur les forêts sèches au Costa Rica où les
galeries forestières restent toujours vertes
[18].
12
Dans la région de Bondoukuy (Burkina
Faso), des pics de floraison sont notés en
février-mars [4], alors que dans l’écosystème du Parc du W, ce stade est remarquable en avril, mai et juin. Il ressort
donc un retard dans les différentes phases
phénologiques qui serait lié au décalage
temporel dans la remontée du Front intertropical.
L’allumage des feux doit se faire en fonction de la situation géomorphologique des
sites. Pour les savanes arbustives à C.
nigricans, C. micranthum, G. senegalensis, P. suberosa et L. microcarpa sur plateaux gréseux ou cuirassés, les feux précoces en octobre sont les mieux indiqués. En
effet, ces milieux sont caractérisés par des
sols peu profonds et donc s’assèchent très
tôt après la saison des pluies. En revanche,
cette période doit être prolongée en fonction de la profondeur des sols le long de la
toposéquence. Sur les sols lourds de vallée
et de bas-fonds, l’allumage des feux en
novembre ou décembre permet d’obtenir
des résultats plus intéressants.
En dehors de ces périodes, l’allumage tardif des feux n’induit pas de repousses chez
la végétation ligneuse qui subit au
contraire une forte mortalité de tiges.
Conclusion
Les résultats obtenus montrent que pour les
communautés végétales du parc, les différents stades phénologiques sont corrélés
avec les paramètres climatiques. Cette synchronisation des phénophases correspond
à une adaptation des formes de vie des
plantes. Les facteurs du milieu (sol et topographie) induisent des variations dans
l’expression des phénophases. Aussi, les
feux de brousse allumés en novembre et
décembre modifient les phénophases habituelles des essences ligneuses. Ces feux
induisent l’apparition de nouvelles feuilles
et fleurs qui constituent une source importante de nourriture pour la faune au cours
de la période de soudure alimentaire de la
saison sèche. C’est donc un élément clé
dans la gestion des faciès déterminés par
les ligneux à même de produire du fourrage vert en saison sèche. En revanche,
le passage de feux incontrôlés, en saison
sèche, provoque une importante mortalité
de tiges chez les essences ligneuses multicaules. Pour pallier ce problème, nous proposons que les périodes d’allumage des
feux soient corrélées à la profondeur des
sols, elle-même fonction de la géomorphologie. Pour plus d’efficacité, le gestionnaire
peut concentrer ses efforts sur les stations à
sol peu profond pour allumer les feux précoces en octobre. Ces stations se répartissent généralement sur les points hauts de
toposéquence et sont facilement reconnaissables sur le terrain. En novembredécembre, il peut focaliser ses efforts sur
les stations à sols profonds qui se répartissent généralement dans les vallées. ■
Remerciements
Les auteurs remercient le ministère de
l’Hydraulique, de l’Environnement et de la
Lutte contre la Désertification du Niger qui
les a autorisés à travailler sur la végétation
du parc. Ils remercient également le Projet
ECOPAS, l’Académie africaine pour la
Science, l’université libre de Bruxelles et l’université Abdou Moumouni de Niamey qui ont
mis à leur disposition les moyens humains et
matériels nécessaires à la conduite des
observations sur le terrain.
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