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Pilly - Préparation ECN - Item 81 - ©CMIT
Item 81
3-6. Infections chez les patients sous anti-cytokines
Les anticorps monoclonaux utilisés à visée immunosuppressive ont connu un très large essor dans les maladies systémiques auto-immunes (poly arthrite
rhumatoïde, spondylarthrite ankylosante, psoriasis, rhumatisme psoriasique, maladie de Crohn…). Il s’agit d’anticorps anti-TNFα ou anti-récepteur
soluble du TNFα, plus récemment d’anticorps anti-IL6 et d’anticorps anti-intégrine α indiqués dans la sclérose en plaque. Les essais thérapeutiques et la
surveillance post-AMM ont mis en évidence un risque accru d’infections (risque relatif de 2 à 3), notamment de réactivation tuberculeuse.
On peut ainsi rencontrer :
- le réveil d’une tuberculose ayant échappé au dépistage par les tests cutanés ou à la détection de la production d’interféron gamma en présence
d’antigène tuberculeux, et n’ayant pas reçu de prophylaxie antituberculeuse (recommandations)
- des infections bactériennes : arthrite (prothèse), septicémie, légionellose, listériose, salmonellose
- des infections virales extensives : Herpès, VZV.
- cryptococcose, toxoplasmose
- lymphome fébrile
- leuco-encéphalite multifocale progressive (LEMP) sous natazulimab.
Les anticorps monoclonaux sont plus fréquemment impliqués dans ce type de complications que les anti-récepteurs.
4. Infections en rapport avec une pathologie métabolique
4-1. Diabète
L’hyperglycémie perturbe le chimiotactisme, l’activité phagocytaire et la bactéricidie des polynucléaires.
Les infections plus particulièrement rencontrées chez le diabétique sont :
- les infections urinaires et les candidoses génitales (vaginites et balanites)
- surtout les infections des «pieds diabétiques» à pyogènes cutanés :
• infections des parties molles (dont le mal perforant plantaire), ostéite des orteils ou des métatarsiens.
4-2. Alcoolisme et cirrhose
Altération du chimiotactisme.
¼ des décès des patients cirrhotiques est d’origine infectieuse.
Pneumonies à pneumocoque bactériémiques.
Infections du liquide d’ascite (translocation bactérienne à E. Coli ou autres entérobactéries).
4-3. Insuffisance renale chronique
Responsable d’une discrète perturbation de l’immunité cellulaire et d’une altération de la phagocytose des monocytes.
Les infections rencontrées sont à staphylocoque doré (nosocomial), à point de départ cutané, fistule artérioveineuse ou dialyse péritonéale (asymp-
tomatique dans 95 % des cas).
5. Prophylaxie
5-1. Infections virales
Aciclovir systématique en post-greffe de moelle.
Vaccinations anti-VZV (Varivax®, Varilrix®) à discuter en pré-greffe.
Prophylaxie VZV par Valaciclovir si contage et absence d’immunité.
CMV : la prophylaxie primaire n’est pas justifiée. Traitement précoce par voie IV (Ganciclovir) ou orale (Valganciclovir) ou Foscarnet par voie IV.
5-2. Infections bacteriennes
Attention particulière vis-à-vis de la tuberculose. Recommandations AFFSAPS si traitement anti-TNF pour dépister une éventuelle tuberculose-
infection.
Éradication des salmonelles.
Légionellose et listériose plus fréquentes et plus graves sur ce terrain. Pas de prophylaxie.
Prévention des infections sur cathéter central :
- mise en place en milieu chirurgical et tunnelisation recommandée
- asepsie stricte lors de toute utilisation.
5-3. Infections parasitaires
Le Cotrimoxazole assure la prophylaxie de la pneumocystose et de la toxoplasmose chez les greffés comme chez les patients VIH (en règle
CD4 < 200/mm3 ou 15 %). À défaut, aérosols de Pentamidine.
Ivermectine (Stromectol®) si risque d’anguillulose, en particulier si séjour tropical prolongé et hyperéosinophilie.
5-4. Infections fongiques
Chimioprophylaxie par :
Fluconazole de la candidose systémique en cas de greffe de moelle. Elle reste discutée pour les greffés hépatiques.
Posaconazole, pour la prophylaxie des infections fongiques invasives (Aspergillus) :
- patients en induction ou en consolidation pour une leucémie aiguë myéloblastique ou un syndrome myélodysplasique
- patients greffés de moelle sous immunosuppresseur à haute dose pour une GVH.
En résumé : situations complexes mêlant le plus souvent plusieurs types de déficits, nécessitant une enquête exhaustive systématique ou formalisée
dans les services où sont admis et hospitalisés les patients les plus sévères. La clinique est en effet souvent en retard et encore plus qu’ailleurs, la
précocité du diagnostic est un facteur essentiel du pronostic.