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3. Mécanismes physiopathologiques
De nombreuses douleurs de la région cervicale sont attribuées à des
douleurs des muscles trapèzes, encore appelées myalgies du trapèze.
Elles sont liées au travail statique maintenu dans le temps et ont fait
l’objet d’études physiologiques et biologiques pour en comprendre les
mécanismes de déclenchement. Parmi les avancées en matière de
recherche, l’hypothèse des bres de Cendrillon a été développée par
Hägg (1991). Elle part du constat selon lequel pour générer une activité
motrice, les unités motrices sont recrutées selon un ordre établi, celles
ayant un faible seuil d’excitation (bres de type I) étant recrutées en
premier et le restant jusqu’au relâchement total du muscle.
Par ailleurs, les biopsies musculaires des patients atteints de myalgies
du trapèze montrent un pourcentage élevé de bres de type I et
l’endommagement sélectif de certaines bres qui ont l’apparence de bres
rouges loqueteuses (red ragged bers) ou de bres « mitées » (moth eaten
bers), donnant au tissu musculaire l’aspect d’un lainage mité composé
de trous (moth eaten bers) entouré de tissu sain (cellules musculaires
parfaitement saines). Ces dommages cellulaires s’expliqueraient par le fait
que, dans le travail statique prolongé, certaines unités motrices travaillent
pour l’ensemble des unités motrices composant le tissu musculaire, restent
activées tout au long du travail depuis son origine jusqu’au relâchement
musculaire complet, à l’instar de Cendrillon, levée la première et couchée
la dernière, qui travaille et s’épuise pour toute la maisonnée.
Par un phénomène se développant sur des mois, voire des années, les
cellules musculaires se nécrosent du fait d’une altération du métabolisme
oxydatif et de dommages de la membrane cellulaire consécutifs à une
trop longue activation et à un temps de récupération fonctionnelle
trop faible. D’autres travaux de recherche sont venus compléter les
connaissances sur les mécanismes physiopathologiques des myalgies du
trapèze. Ainsi, des études électromyographiques montrent notamment
que l’absence de récupération musculaire a un effet particulièrement
délétère sur la santé.
Des études sur la vascularisation ont montré l’existence de compressions
vasculaires locales liées au maintien de certaines postures et sur le
plan microscopique, des défauts de perfusion localisés, du fait d’une
répartition hétérogène et compartimentée de la pression intra-musculaire
dans le travail statique. De même, des troubles de la vasoconstriction
et de la vasodilatation ont été constatés chez les sujets myalgiques.
Enn, des mécanismes neurophysiologiques interviennent aussi dans
le développement des myalgies du trapèze. Ils sont engendrés par des
phénomènes de sensibilisation périphérique et centrale favorisant la
survenue de douleurs musculaires. Au plan biochimique, de nombreuses
perturbations du métabolisme cellulaire sont constatées.
Elles concernent par exemple l’accroissement de l’absorption
mitochondriale d’ions calcium, délétère pour le fonctionnement aérobie
et la stimulation d’enzymes (protéases et lipases) qui dégradent la
membrane cellulaire.