ARTICLE DE REVUE Progrès en Urologie (1995), 5, 911-924
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Gangrène des organes génitaux externes
Jacques HUBERT(1), Georges FOURNIER (2), Philippe MANGIN (1), Monga PUNGA-MAOLE (3)
(1) Service d’Urologie, CHU Brabois, Nancy, (2) Service d’Urologie, CHU Morvan, Brest,
(3) Service d’Urologie, Cliniques Universitaires, Kinshasa, Zaïre
RESUME
Le terme de gangrène des organes génitaux
externes (OGE) de l’homme regroupe deux entités
différentes.
La gangrène primitive des OGE (5% des cas) appe-
lée maladie de Fournier décrite en 1883 : gangrène
des téguments des OGE sans cause loco-régionale,
de mécanisme inconnu et d’évolution inéluctable
vers une nécrose de topographie déterminée quel
que soit le traitement.
La gangrène «secondaire» des OGE (95% des cas)
liée à une cause loco-régionale, cutanée, urogénitale
ou digestive, dont l’évolution peut être modifiée par
la précocité et le type du traitement.
La précocité du diagnostic est essentielle :
- Dans la vraie maladie de Fournier, pour éviter les
complications générales de cette nécrose.
- Dans la gangne secondaire pour limiter l’ex-
tension loco-régionale et prévenir les complica-
tions générales. Compte tenu de lévolution galo-
pante de la maladie et dans un but de diagnostic
ultra-rapide, de nombreux auteurs pconisent :
ponction locale, biopsie ou re c h e rche de gaz sous-
cutané par méthode radiologique ou ultrasonique.
Le traitement comporte :
• Une antibiothérapie, bi ou tri-thérapie permettant
de couvrir la flore bactérienne habituellement
mixte (Cocci gram positifs, bacilles gram négatifs et
anaérobies).
• Un débridement chirurgical à la demande, éven-
tuellement répété pour exciser les zones nécrosées,
drainer les collections et mettre en place une irriga-
tion des cavités.
• Une oxygénothérapie hyperbare.
• Eventuellement une dérivation urinaire (cystosto-
mie) ou digestive (colostomie) si l’un des deux appa-
reils est en cause ou si la dérivation facilite la ges-
tion des soins.
• La reconstruction chirurgicale (greffe ou lam-
beaux) si besoin.
La mortalité reste lourde, de l’ordre de 20% :
<10% si le patient est jeune, si son état général est
bon, si le diagnostic est précoce, s’il est bien traité,
> 50% s’il est âgé, s’il existe des tares, un retard de
diagnostic et de traitement.
Mots clés : Fasciite, gangrène, appareil uro-génital, maladies,
gangrène de Fournier.
Progrès en Urologie (1995), 5, 911-924.
La publication initiale sur la gangrène des organes
génitaux externes (OGE) date de 1764 et revient à
BAURIENNE (in 51,57,74). Jean Alfred FOURNIER à l’oc-
casion de 2 mémoires publiés en 1883 [38] et 1884 (in
74) portant sur 5 cas eût le mérite d’en faire le premier
une description détaillée.
Cette gangrène était réputée potentiellement léthale.
Ces caractéristiques furent confirmées dans les travaux
ultérieurs [44, 78]. Des cas chez l’enfant [57] et chez la
femme [15] furent également rapportés, donnant un
caractère moins restrictif à la maladie.
Les progrès en trapeutique améliorèrent considérable-
ment l’évolution et le pronostic de cette affection. M
C
C
R E A
[63] dans sa revue de la litrature allant de1764 à
1945 colligea 267 cas et montra dune part l’effet béné-
fique de lantibiothérapie, dautre part le caracre cru-
cial dune prise en charge thérapeutique précoce, faits
confirmés par d’autres auteurs durant les anes 1950
[18, 92]. Les travaux de H
I M M A L
et D
U F F
en 1967 [46]
révérent l’intérêt de l’oxygénothérapie hyperbare
(OHB). Lévolution de la maladie, devenue dans bien des
cas subaiguë [82], mais aussi la nécessité dun traitement
précoce ouvrirent, au plan diagnostique, la porte aux
moyens d’investigation modernes. Cet article propose
une revue générale sur la gangrène des OGE de lhomme
à la lumière des connaissances actuelles.
NOSOLOGIE
L’entité nosologique réalisée par la gangrène des OGE
repose sur un tableau clinique, un mode évolutif, une
bactériologie et la nature des tissus lésés. Se basant sur
ces éléments, les auteurs ont désigné la gangrène des
Manuscrit reçu le 6 avril 1994, accepté : avril 1995.
Adresse pour correspondance : Pr.Ph. Mangin, Service d’Urologie, CHU Brabois,
54511 Nancy.
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OGE selon diverses appellations: gangrène fulgurante
[31], gangrène synergistique du scrotum [82], gangrè-
ne idiopathique du scrotum [78], fasciite nécrosante
synergistique du périnée [7, 60], gangrène essentielle,
gangrène scrotale, syndrome de Fournier [28, 30, 31],
gangrène gazeuse du scrotum et du périnée [46], cellu-
lite streptococcique du scrotum [31].
Cette riche terminologie est le fait d’imprécisions étio-
pathogéniques historiques. Par conséquent, les dif-
rentes dénominations ne renseignent que de manière
imparfaite sur les aspects de la maladie qu’elles sont
censées décrire. Les connaissances actuelles nous per-
mettent de revoir la nosologie en tenant compte des élé-
ments suivants:
La nature des lésions
En 1924, MELENEY décrivit 20 cas d’infection des tégu-
ments extragénitaux d’évolution rapide, extensive et
souvent léthale. Il s’agissait de cellulite évoluant vers la
nécrose à la fois du tissu cellulaire sous-cutané et des
plans aponévrotiques sous-jacents. WILSON en 1952 (in
94) désigna cet état pathologique sous le terme, consa-
cré depuis, de fasciite nécrosante (FN). De nombreux
auteurs [13, 22, 60, 81, 94,] considèrent la gangrène des
OGE comme une forme topographique particulière de
FN.
Ce terme crit un état histopathologique. Nous lui pré-
férons l’appellation de gangrène qui se réfère à un état cli-
nique et dont la définition n’est pas en contradiction avec
la FN. La gangrène est une mortification des tissus, quel-
le qu'en soit la nature, par nécrose ischémique [65].
L’étiologie et le mode évolutif
Ces éléments permettent de définir deux cas de figure
correspondant à notre avis à deux entités nosologiques:
• L’étiologie ou les facteurs prédisposants restent incon-
nus : la maladie, quel que soit le traitement, évolue
alors vers la nécrose en accord avec la définition prin-
ceps. C’est la gangrène primitive des OGE.
• L’étiologie ou les facteurs prédisposants sont mis en
évidence : dans ce cas, l’évolution de la maladie peut
être modifiée par un traitement spécifique précoce.
C’est la gangrène secondaire des OGE.
CLINIQUE
Fréquence et âge
La gangrène des OGE est une pathologie rare.
L’incidence en est de 1/7500 pour B
EJANGA
[10] en
1979 et de 1/5300 pour P
UNGA
en 1986 [76]. B
ASKIN
et
al. [7] en 1990 relevaient environ 500 cas dans la litté-
rature. Nous dénombrons, quant à nous, de 1990 à
1993, 204 cas [3, 11, 16, 21, 23, 25, 27, 29, 33, 34, 40,
41, 52, 56, 67, 68, 70, 71, 73, 83, 84, 89, 90, 91, 96, 98].
La gangrène des OGE survient à tout âge avec les
extrêmes publiés de quelques jours à 89 ans [1, 22, 34].
Classiquement, elle a une prédilection pour l’adulte
jeune de 20 à 50 ans. On note cependant un accroisse-
ment de l’âge moyen. Il est passé de 40,6 ans entre
1883 et 1945 dans la revue de MCCREA [63] à 51,3 ans
entre 1945 et 1979 dans l’étude de JONES [51]. De nom-
breux travaux des années 1980 et 1990 rapportent une
moyenne généralement supérieure à 54 ans [7, 22, 27,
40, 55, 86, 99].
Antécédents
Ils peuvent être marqués par un traumatisme périnéal
récent, un rétrécissement urétral connu, une pathologie
proctologique chronique (fissure anale, morroïde
externe), des lésions dermatologiques... Des affections
systémiques chroniques, diabète fréquemment, sont
retrouvées.
Parfois l’interrogatoire même minutieux ne retrouve
aucun antécédent.
Circonstances de découverte
Le début brutal typique de la maladie chez l’adulte
jeune en bonne santé demeure. Mais de plus en plus, on
observe des cas d’installation moins brutale, insidieuse,
surtout chez des sujets âgés [51, 60, 82]. La symptoma-
tologie classique est précédée dans ces cas par des pro-
dromes divers qui durent le plus souvent 1 ou 2 jours;
mais parfois plusieurs jours à quelques semaines. Il
peut s’agir de troubles digestifs, de douleurs lombaires,
de malaise, d’état subfébrile, d’irritabilité ou de simple
inconfort scrotal [10, 51, 88, 99].
Stades évolutifs
La maladie évolue en 3 phases marquées par des signes
locaux et généraux:
Phase de début
Le point de départ est souvent scrotal, rarement pénien
ou pénoscrotal [31]. Il peut être périneal lorsque l’étio-
logie de la gangrène est anorectale [55]. L’oedème ini-
tialement localisé se généralise rapidement à l’en-
semble des OGE. Une sensation de brûlure et de stric-
tion, avec parfois prurit l’accompagne. Cette sensation
se transforme très rapidement en douleur vive sponta-
née.
Les signes généraux précèdent ou suivent les signes
locaux. Ils réalisent au maximum un tableau de toxi-
infection avec: hyperthermie dans la majorité des cas,
parfois hypothermie, frissons, sudation, instabilité
hémodynamique et, dans certains cas, altération de la
conscience. L’intensité de ces signes est variable,
allant des perturbations modérées à l’état de choc. La
phase de début est en règle de courte durée, inférieure
à 48 heures [11, 52]; mais elle peut être longue de 2 à
10 jours [10,99].
Phase d’état
Deux états successifs caractérisent cette phase:
L’état prégangréneux
C’est le prolongement de la phase de début dont les
signes s’aggravent.
- Localement, l’oedème augmente. Le scrotum, tendu,
devient luisant érythémateux ou, signant une infection
à germes gram négatifs, «bronzé». La douleur atteint
son intensité maximale. L’inflammation reste limitée à
la sphère urogénitale (35 à 50% des cas) ou s’étend au-
delà de celle-ci gagnant le périnée, la paroi abdomina-
le, le thorax et les creux axillaires [11, 22]. La palpation
provoque une crépitation neigeuse (30 à 66% des cas),
témoins d’un emphysème sous-cutané ou, à une phase
plus tardive, retrouve une fluctuation en rapport avec
une collection purulente [11, 20].
- Sur le plan général, aux troubles thermiques et hémo-
dynamiques et à l’altération de la conscience (avec sou-
vent un état de prostration et de délire) peuvent s’ajou-
ter des défaillances fonctionnnelles diverses, notam-
ment rénales et respiratoires [30].
A ce stade la symptomatologie peut régresser sous un
traitement efficace et révéler une gangrène secondaire.
Mais souvent, elle évolue vers l’état suivant.
• Etat de gangrène
Au cours de cette période, à la gravité des lésions
locales s’oppose une amélioration progressive de l’état
général:
- Localement, la peau se couvre de phlyctènes, puis de
plages de sphacèle qui en quelques heures peuvent
s’étendre à toute la surface inflammatoire. La peau gan-
grénée forme des croûtes qui se durcissent puis tombent
en 2 à 3 jours. Les sécrétions, purulentes, et les tissus
mortifiés sont fétides. Il existe une démarcation entre la
peau saine et la peau gangrénée selon un découpage
irrégulier. En profondeur, la gangrène respecte les tes-
ticules et leurs annexes qui restent appendus aux cor-
dons spermatiques. Au niveau du pénis, les corps érec-
tiles sont respectés. La gangrène s’accompagne d’une
diminution des douleurs [10, 30, 74].
- Sur le plan général, interviennent progressivement la
défervescence thermique, la stabilité hémodynamique
et l’amélioration des fonctions vitales.
Phase de restauration
Dans cette phase, des lambeaux de peau nécrotiques
s’éliminent. Un tissu de granulation apparaît.
Progressivement la plaie se contracte et une épithéliali-
sation centripète s’engage. La cicatrisation spontanée
est obtenue en 2 à 3 mois. Le scrotum guéri est de petit
volume [10, 30].
ETIOLOGIE
On considère actuellement que la gangrène des OGE a
presque toujours une cause [17, 31, 74]. Mais malgré
l’efficacité des moyens d’exploration, la maladie reste
sans explication dans 5 à 35% des cas [11, 34, 36, 67,
86, 90, 99].
On reconnaît à la gangrène secondaire un grand
nombre de facteurs étiologiques ou prédisposants loco-
régionaux ou généraux. Dans l’analyse qui suit, la fré-
quence respective de ces facteurs est établie sur un
regroupement de 198 cas issus de travaux divers [4, 7,
9, 12, 14, 19, 22, 26, 28, 31, 34, 41, 43, 47, 50, 59, 64,
72, 75, 76, 80, 83, 84, 85, 86, 93, 99].
Les facteurs locorégionaux (98%)
Il s’agit des foyers infectieux localisés dans les organes
génitaux ou dans leur voisinage, proche ou éloigné.
Facteurs cutanés (15%)
C’est d’abord un ensemble de lésions relevant de la
pathologie dermatologique: en particulier, folliculite,
hydrosadénite, maladies éruptives, ulcères vénériens,
piqûre ou morsure d’insectes ou d’animaux. Ce sont
aussi des lésions relevant de la pathologie chirurgicale:
posthite, paraphimosis, circoncision, vasectomie,
usage chronique du condom, traumatisme du coït, cure
d’hypospadias, injection intracaverneuse, notamment.
Facteurs urogénitaux (33%)
Ils sont représentés par les atteintes des structures pro-
fondes des OGE et par les lésions des organes génitaux
internes. Sont rapportés au niveau des OGE: les infec-
tions et les migrations de prothèses péniennes, les
rétrécissements urétraux complexes, les fausses routes
urétrales traumatiques, la nécrose urétrale sur ballonnet
de sonde mal positionnée, les abcès épididymaires ou
testiculaires et la cure d’hydrocèle. Au niveau de la
prostate, on cite la prostatite et la biopsie transrectale.
Lésions anorectales (42%)
Sont fréquemment rapportés les hémorroïdes, le cancer
rectal, et les fissures anales infectées ainsi que les abcès
ischiorectaux et périanaux.
Autres facteurs (7%)
On regroupe dans cette catégorie diverses affections
abdominales, pariétales et intra-abdominales: compli-
913
cations de cure de hernie inguinale, appendicite aiguë,
pancréatite, ulcère gastroduodénal perforé, diverticuli-
te sigmoïdienne, cancer colique, infection rétropérito-
néale, infarctus intestinal, laparotomie pour péritonite
[24, 40, 53, 55].
Les facteurs généraux (63%)
Le diabète représente 42% des affections générales
impliquées dans la gangrène des OGE. Les autres
causes sont l’éthylisme et les immunodéficiences de
toutes natures (Tableau 1).
BACTERIOLOGIE
Historique
FOURNIER avait dans son second mémoire en 1884 (in
74) émis l’hypothèse que la gangrène des OGE était en
relation avec une infection streptococcique. En 1920,
RANDALL [78] rapportait des cas associés à une infec-
tion mono-microbienne à Streptocoque non hémolyti-
tique ou au B. aérogènes. MELENEY en 1924, dans sa
description des FN [94], imputait celles-ci également à
une infection monomicrobienne au Streptocoque ß-
hémolytique. La conception de gangrène des OGE
monomicrobienne à Streptocoque se confortait.
Mais en 1952, WILSON [94], repris ultérieurement par
REA et al. [79], montra que dans les FN l’infection
n’était pas liée à un seul germe spécifique mais à une
grande variété d’agents infectieux.
Dans leurs travaux plus récents, MENDA et de GIULANO
[13] établirent qu’à côté des FN extragénitales exclusi-
vement streptococciques dues au Streptocoque A, il en
existait d’autres dues à d’autres germes. Ces autres
espèces bactériennes étaient généralement trouvées en
association et agissaient en synergie pour acquérir le
pouvoir pathogène responsable de FN.
La culture typique
Il est exceptionnel que la culture des sécrétions de la
gangrène ne mette en évidence qu’une seule espèce
bactérienne comme certains l’ont rapporté [31]. La cul-
ture typique montre une infection polymicrobienne,
avec une moyenne de 4 espèces bactériennes [74, 87] et
un maximun connu de 9 [7]. La grande fréquence de E.
Coli, isolé ou associé, mérite d’être soulignée. On trou-
ve en association des germes aérobies et anaérobies, ce
qui est en faveur de la facilitation (Tableau 2).
L’existence d’une synergie bactérienne a été initiale-
ment démontrée entre le Staphylocoque doré et le
Streptocoque aérophile [35]. Dautres coopérations
interbactériennes ont été décrites par la suite.
Nous ne pouvons en donner ici que quelques exemples
[13, 35 ,51, 65, 74]:
• Les bactéries aérobies facultatives facilitent la crois-
sance des anérobies strictes en consommant l’oxygène
ou en diminuant le potentiel d’oxydoréduction des tis-
sus, ou encore en mettant à la disposition des derniers
de la catalase.
• Certaines bactéries protègent les espèces démunies de
défense. Le Bactéroïde, à titre d’exemple, inhibe la pha-
gocytose de nombreuse bactéries aérobies.
Le Staphylocoque crète la coagulase, qui rend possible
la coagulation du plasma citraté et oxalaté, et entraîne une
formation de fibrine. Les bactéries se couvrent de cette
substance pour se soustraire à la phagocytose.
• Une bactérie peut synthétiser des substances nutritives
utiles aux espèces déficientes.
La streptodornase du Streptocoque dépolymérise
l’ADN. Puisque la viscosité du pus résulte des desoxy-
ribonucléoprotéines, la streptodornase liquéfie le pus,
favorisant l’infection.
- De nombreuses sécrétions bactérienne, enzymes ou
toxines, interviennent dans le développement de la
nécrose. Celle-ci constitue le milieu nécessaire à la pul-
lulation des anaérobies.
914
Tableau 1. Affections pouvant être associées à la gangrène des
OGE.
Diabète Vascularite allergique
Ethylisme Cirrhose hépatique
Immunodéficience par : Leucémie
- Stéroïdes Insuffisance rénale
- Cancers divers
- Chimiothérapie
- Infection VIH
Tableau 2. Espèces bactériennes les plus fréquemment isolées
sur 342 cas [7, 22, 34, 47, 74, 99].
Espèces Fréquence
Aérobies
Bacilles gram - E. coli 53%
Pseudomonas 25%
Proteus 23%
autres 24%
Cocci gram + Streptocoques 42%
Staphylocoques 29%
Anaérobies
Bacille gram + sporulé
Bacille gram - Clostridium (Perfrigens) 10%
Cocci gram + Bactéroïdes (fragilis-
fragilis) 46%
Peptostreptococus 24%
Autres de tous groupes -4%
ANATOMIE PATHOLOGIQUE
Les stigmates histopathologiques ont été étudiés à la
fois dans le cadre général des FN [89] et dans celui,
restreint, de la gangrène de OGE [18, 51]. On peut les
synthétiser de la manière suivante en fonction du stade
évolutif de la maladie :
Stades précoces (phase de début et état pré-gan-
gréneux)
M a c r o s c o p i q u e m e n t, la chirurgie ou la nécropsie
montrent un oedème important intéressant l’ensemble
de la peau et le fascia superficiel. Des zones de nécro-
se et de collection purulente dans le tissu sous-cutané
et les plans aponévrotiques accompagnent cet oedè-
me. Ils épargnent le derme et l’épiderme [51, 89].
Microscopiquement,selon S
TAMENKOVIC
[88], la FN
se caractérise par 6 éléments, reconnaissables entre 0
et 4 jours d’évolution (moyenne 21 heures): 1) la
nécrose des fascia, 2) une infiltration leucocytaire de
la partie profonde du derme, 3) une thrombose fibri-
noïde des veinules et artérioles du tissu sous-cutané,
4) une nécrose fibrinoïde des parois vasculaires, 5)
une infitration microbienne des tissus atteints, et 6) la
préservation des plans musculaires. Nous précisons,
avec J
ONES
[51] et B
ERNARD
[13] qu’il existe une
infiltration oedémateuse, neutrophilique et même
lymphocytaire du tissu cellulaire sous-cutané. Une
séquestration érythrocytaire selon U
MBERT
[94] est
par ailleurs souvent présente.
Stades tardifs (état gangréneux)
M a c r o s c o p i q u e m e n t, la nécrose est massive et
concerne l’ensemble des plans tégumentaires y com-
pris les fascia. La supuration est importante.
Microscopiquement,le derme et l’épiderme sont le
siège d’une nécrose de coagulation. La nécrose hypo-
dermique et fasciale est extensive, concordant avec
l’aggravation des lésions vasculaires décrites dans les
stades précoces [51].
Lexamen anatomopathologique se réalise soit en
extemporané [89] soit selon la technique habituelle.
Les fragments tissulaires à examiner sont prélevés
chirurgicalement. Ils doivent comporter tous les plans
anatomiques de la peau et le fascia superficiel [89].
PHYSIOPATHOGENIE
Les théories
Elles sont multiples. Citons les 5 principales:
La théorie initiale [18, 44]. La gangrène résulterait
d’une infiltration urineuse des tissus sous-cutanés à
partir de lésions urétrales minimes. Cette théorie n’ex-
plique ni le début subit de la maladie, ni sa progression
rapide et moins encore la gangrène.
La théorie microbienne [78] résume la physiopatholo-
gie à une lymphangite «suraiguë, extensive et gangré-
neuse» secondaire à une lésion de voisinage souvent
méconnue. Cette théorie souffre des limites de la pré-
cédente.
La théorie vasculaire [37, 54, 69] ne reconnaît pas le
rôle primordial de l’infection. Elle propose une expli-
cation d’une part de la gangrène et de son caractère
subit, d’autre part de la topographie de la maladie, par
des lésions vasculaires, en particulier une thrombose
des artères scrotales. La théorie vasculaire n’explique
pas l’atteinte extensive des OGE puisque ceux-ci sont
richement vascularisés.
La théorie associant infection et lésion vasculaire[32,
51]. Elle considère l’infection comme cause primaire et
les sions vasculaires comme conséquences mais
déterminant l’extension de la maladie. L’atteinte vas-
culaire porterait non pas sur les artères distales mais sur
les réseaux capillaires locaux. Elle serait due au choc
septique, responsable de microthromboses et de coagu-
lopathie de consommation. Les vaisseaux concernés
seraient les branches de l’artère honteuse interne à des-
tinée scrotale, siège d’endartérite oblitérante.
La théorie basée sur la coagulation intravasculaire
[42], la CIV primitive ou secondaire serait la cause de la
maladie. Elle se compliquerait secondairement de surin-
fection bactérienne. Cette CIV primitive serait le fait des
troubles modynamiques locorégionaux, la CIV secon-
daire une complication d’infection extragénitale.
Cette théorie n’explique pas pourquoi la CIV est loca-
lisée aux OGE.
Essai actuel de physiopathogénie
On peut actuellement tenter une approche physiopatho-
logique fondée sur des données étiologiques, bactério-
logiques, cliniques, et anatomopathologiques confir-
mées.
L’infection [20, 22, 51, 86]. Il est maintenant admis
que le primum movens de la gangrène est l’infection du
tissu sous-cutané, compliquée de celle du plan fascial
sousjacent. L’analyse des facteurs étiologiques met en
évidence 4 modes d’inoculation de l’hypoderme:
• l’effraction cutanée en cas de lésion cutanée,
• l’effraction des plans aponévrotiques, particulière-
ment du fascia de Buck, des aponévroses scrotales
superficielle et profonde en cas de lésion uro-génitale.
• la diffusion de l’infection à travers un fascia fenêtré,
le fascia de Colles principalement, lorsque le point de
départ est péri-ano-rectal ou rétropéritonéal [74, 86].
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