DEA de Physique Quantique Théorie des Champs 2002-2003 Corrigé du problème 2 : Équation de Dirac en dimension 2 + 1 et théorème Aharonov Casher. 1. Considérons une transformation infinitésimale Λµν ' δ µν + ω µν où ω µν 1. L’invariance de la métrique sous une telle transformation nécessite que ωµν = −ωνµ . Le tenseur ω µν est donc paramétré par 3 paramètres, deux affectés aux transformations spéciales et un aux rotations. Le groupe L↑+ possède donc 3 générateurs dans l’espace de Minkowski de dimension d = 2 + 1. 2. Matrices de Dirac. a) Trois matrices γ 0 , γ 1 et γ 2 satisfaisant l’algèbre {γ µ , γ ν } = 2g µν sont trois matrices qui anticommutent et de carré ±1. On peut choisir des matrices 2 × 2 comme les trois matrices de Pauli : γ 0 = σz , γ 1 = iσx et γ 2 = iσy . L’équation de Dirac en dimension 2 + 1 fait donc intervenir des spineurs à deux composantes. b) La matrice γ 5 = 3!i µνρ γ µ γ ν γ ρ = iγ 0 γ 1 γ 2 = 1. L’espace des matrices de Dirac est maintenant un espace de dimension 4 et toute matrice de cet espace peut se décomposer sur les trois matrices γ µ et l’identité. 3. L’équation de Dirac libre s’écrit (iγ µ ∂µ − m)ψ(x) = 0 (1) où ψ(x) est un spineur à deux composantes. Si Λ ∈ L↑+ on note S(Λ) la matrice correspondante dans la représentation engendrée par les spineurs. L’invariance de l’équation (1) sous le groupe L↑+ implique que S(Λ)−1 γ µ S(Λ) = Λµν γ ν . Si on écrit S(Λ) = exp(− 2i ω µν Σµν ), où ω µν paramétrise la transformation, les 3 générateurs sont ~ def Σµν = 4i [γµ , γν ]. On introduit la notation : K = (Σ01 , Σ02 ) pour les générateurs des transformadef tions spéciales et S = Σ12 pour le générateur des rotations (l’opérateur de spin par définition). ~ = i (σy , −σx ) et S = 1 σz . Une transformation de Lorentz dans le point de vue On a donc : K 2 2 actif peut donc s’écrire : ~ ~ S(Λ) = eiφ·K−iθS . (2) Transformations spéciales. La transformation spéciale de Lorentz donnant une rapidité φx dans le sens du vecteur unitaire ~ux est : φx φx − σy sh (3) Sx = eiφx Kx = ch 2 2 et dans le sens de ~uy : φy φy Sy = ch + σx sh . (4) 2 2 1 ~ on Afin de paramétrer ces transformations en fonction de l’impulsion p~ au lieu de la rapidité φ, 0 1 utilise p = m ch φx et p = m sh φx pour un boost dans le sens ~ux . Si p~ est dans une direction quelconque on obtient p /γ 0 + m 1 p0 + m ip1 + p2 S(Λp~ ) = p =p (5) 1 2 p0 + m 2m(p0 + m) 2m(p0 + m) −ip + p p où p0 = + p~2 + m2 . Rotation. La rotation d’angle θ est : i SR = e−iθS = ! e− 2 θ 0 0 e2θ (6) i 4. Une transformation Λµν ' δ µν + ω µν laissant invariant le vecteur pµ est telle ω µν pν = 0. On a donc ω µν = ηµνρ pρ où η est un paramètre réel. Dans la représentation engendrée par les spineurs, les transformations correspondantes s’écrivent Sη = exp − 2i ηµνρ pρ Σµν = e−iηW où W est le générateur de ce sous-groupe. On a W = 4i µνρ pρ γµ γν . En utilisant que γ 5 = 1, on vérifie que 2i ρµν γµ γν = γ ρ et finalement W = /p . 2 (7) 5. Ondes planes. (+) (−) p)e−ipx la solution d’énergie positive et d’impulsion p~ et ψ−~p (x) = v(~ p)eipx On note ψp~ (x) = u(~ la solution d’énergie négative et d’impulsion −~ p. a) Les spineurs u(~ p) et v(~ p) satisfont : (p / − m) u(~ p) = 0 (8) (p / + m) v(~ p) = 0 . (9) b) On a donc W u(~ p) = + m p) et W v(~ p) = − m p). 2 u(~ 2 v(~ c) En dimension 2 + 1 le “spin” est donc relié au signe de l’énergie. Si on introduit l’opérateur 1 W (±) 1 (±) 2 W/m, alors ( W ~ (x) = ± 2 ψp ~ (x). m ) = 4 et m ψp Remarque : Hormis dans le référentiel du centre de masse, le spin S (générateur des rotations) n’est pas un bon nombre quantique car il ne commute pas avec Kx et Ky . C’est pourquoi on est amené à introduire l’opérateur W/m qui commute bien avec l’Hamiltonien de Dirac libre. d) Pour construire explicitement les spineurs u(~ p) et v(~ p), le plus simple est de faire agir une transformation spéciale donnant une impulsion p~ sur les solutions obtenues dans le référentiel du centre de masse : 1 p0 + m 1 u(~ p) = S(Λp~ ) =p (10) 1 2 0 2m(p0 + m) −ip + p et u(~ p) = S(Λp~ ) 0 1 1 =p 2m(p0 + m) 2 ip1 + p2 p0 + m . (11) 6. Moment cinétique. a) L’opérateur de moment cinétique total est J = L + S, où L = −i(x∂y − y∂x ) est le moment orbital (générateur des rotations dans la représentation de L↑+ engendrée par les fonctions scalaires) et S l’opérateur de spin. En coordonnées polaires (r, θ) le moment orbital s’écrit L = −i∂θ et finalement : 1 J = σz − i∂θ . (12) 2 b) États propres de J . ΨJ (θ) = ei(J−1/2)θ ei(J+1/2)θ . (13) c) Si ΨJ (θ) est univaluée (i.e. ΨJ (θ + 2π) = ΨJ (θ)) alors le moment cinétique est quantifié : J =`+ 1 2 où ` ∈ Z . (14) 7. Théorème Aharonov-Casher. ~ 2 −~σ · B ~ pour (Phys. Rev. A 19 (1979) p.2461). Considérons un hamiltonien de Pauli H = (~ p − A) des fermions de spin 1/2 non relativistes en dimension 2 et pour une configuration quelconque de champ magnétique (les unités sont telles que 2m = e = ~ = 1). Le facteur gyromagnétique est choisi égal à 2 (conséquence du choix du couplage minimal et de l’invariance sous le groupe de Galilée). Alors le nombre N0 d’états d’énergieh nulle i est égal au flux magnétique traversant le |Φ| système en unité de quantum de flux : N0 = E φ0 (le quantum de flux est φ0 = h/e et E [x] désigne la partie entière de x). Nous allons étendre le théorème au cas de l’hamiltonien de Dirac pour un champ magnétique statique quelconque ~ − iA) ~ + βm . H = −i~ α · (∇ (15) Rappelons que β = γ 0 , αx = γ 0 γ 1 et αy = γ 0 γ 2 . Nous emploierons des notations complexes pour repérer les coordonnées d’espace : z = x + iy def ∂ def et noterons ∂ = ∂z et ∂¯ = ∂∂z̄ . On a donc z z̄ = 1 i 1 −i x y et ∂ ∂¯ 1 = 2 1 −i 1 i ∂x ∂y . (16) a) Potentiel vecteur et champ magnétique. ~ = 0, il est toujours possible d’écrire le potentiel vecteur sous la forme Ai = ij0 ∂j φ Si divA def où φ est une fonction scalaire des coordonnées d’espace. On introduit A = Ax + iAy , alors ¯ A = −(A1 + iA2 ) = −∂2 φ + i∂1 φ = 2i∂φ. ¯ = ∆φ. Le champ magnétique est B = −∂1 A2 + ∂2 A1 = −i(∂A − ∂¯Ā) = 4∂ ∂φ Considérons deux exemples : Exemple 1 : champ magnétique uniforme. φ(z, z̄) = B4 z z̄ et A = i B2 z. Φ Exemple 2 : solénoı̈de infiniment fin portant un flux Φ. Dans ce cas φ(z, z̄) = 4π ln(z z̄) et Φ 1 (2) A = i 2πz̄ . On retrouve un champ magnétique B(~r) = Φ δ (~r) en se rappelant que 2π ln(r) est la fonction de Green du Laplacien bidimensionnel. b) Moment cinétique. 3 ¯ Une fonction invariante par rotation est L’opérateur de moment orbital s’écrit L = z∂ − z̄ ∂. une fonction de z z̄ ; en effet Lf (z z̄) = 0. Les états propres de L sont de la forme z ` ou z̄ −` , par conséquent on peut écrire un état propre du moment cinétique J sous la forme : J−1/2 −J+1/2 z ϕ(z z̄) z̄ ϕ(z z̄) ψJ (z, z̄) = ou ψJ (z, z̄) = (17) z J+1/2 χ(z z̄) z̄ −J−1/2 χ(z z̄) où ϕ(t) et χ(t) sont deux fonctions quelconques. c) L’hamiltonien de Dirac est : H = iσy ∂x − iσx ∂y + σy Ax − σx Ay + σz m = ou encore H= m 2∂ − iĀ −2∂¯ + iA −m m 2∂ − 2∂φ ¯ −2∂¯ − 2∂φ −m (18) . (19) Les composantes du spineur ψ(z, z̄) = f (z, z̄) g(z, z̄) , (20) état propre de H, satisfont donc les deux équations : ( 2(∂ − ∂φ) g = (E − m) f ¯ f = (E + m) g −2(∂¯ + ∂φ) (21) d) États d’énergie E = +m. ¯ Pour une solution d’énergie E = +m on a (∂¯ + ∂φ)f = 0 et g = 0. En écrivant f (z, z̄) = −φ(z,z̄) ¯ h(z, z̄) e , on constate que la fonction h obéit à ∂h(z, z̄) = 0, c’est-à-dire que h doit être une fonction de z seulement. Les états d’énergie E = +m sont donc de la forme 1 (22) ψ(z, z̄) = h(z) e−φ(z,z̄) 0 où h(z) est une fonction analytique quelconque. e) Faisons deux hypothèses sur la fonction φ : ¯ • lorsque z → 0 on suppose que φ(z, z̄) ∝ z z̄. Cela signifie que le champ magnétique B = 4∂ ∂φ est fini à l’origine. • Si on écrit φ(z, z̄) = F (z,z̄) 4π ln(z z̄), la fonction F tend vers une constante Φ lorsque |z| → ∞. Le champ magnétique est donc nul à l’infini. D’autre part, le potentiel vecteur se comporte comme ~ ' Φ ~uθ . La circulation de A ~ sur un circuit fermé tournant autour de l’origine à distance A 2π r H ~ ~ r → ∞ est dl · A = Φ, ce qui montre que Φ est le flux magnétique total traversant le système. f) On considère maintenant les états ψJ (z, z̄) = z J−1/2 −φ(z,z̄) e 1 0 qui ne sont des états propres de J que si φ n’est fonction que du produit z z̄. On suppose que Φ > 0 4 (23) On étudie à quelles conditions la fonction d’onde (23) est normalisable. • À l’origine Z Z dr r ψJ† ψJ ' dr r2J < ∞ si J > −1/2 • À l’infini Z Z ∞ † dr r ψJ ψJ ' ∞ (24) 0 0 Φ 2J −2 2π ln(r) dr r e Z = ∞ Φ dr r2J− π < ∞ si J < Φ − 1/2 . 2π (25) La normalisabilité de la fonction d’onde impose donc que J est borné inférieurement et Φ supérieurement : 0 < J + 21 < 2π , c’est-à-dire que le nombre d’états (23) est Φ , (26) N0 = E φ0 où φ0 = h/e = 2π est le quantum de flux, ce qui démontre le théorème. Remarques : • Si le flux total est négatif, on doit considérer les états d’énergie E = −m 0 −J−1/2 +φ(z,z̄) ψJ (z, z̄) = z̄ e 1 dont le nombre est E h |Φ| φ0 i (27) . • Si le champ magnétique n’est pas régulier à l’origine, comme c’est le cas pour le solénoı̈de Φ infiniment fin évoqué ci-dessus (φ = 2π ln(r)), le théorème doit être modifié : cf. Moroz, Phys. Lett. B 358 (1995) p.305. • Notons que le théorème Aharonov-Casher est un cas particulier du théorème de l’index d’Atiyah-Singer (cf. M. Nakahara, Geometry, Topology and Physics, IoP publishing). 5