D
ans un document d’une cinquantaine de
pages (“La chirurgie française en 2003”,
ministère de la Santé), le Pr Jacques
Domergue (CHU de Montpellier) et le
PACA) ont une densité médicale double de celle
des régions sous-médicalisées (Centre, Picardie).
« La médecine en général et l’acte chirurgical en par-
ticulier tendent à devenir un produit consommable
que l’on souhaite se voir livré avec garantie et ser-
vice après vente », constatent les auteurs du rap-
port. Cependant, la seule attribution de moyens
supplémentaires ne saurait remplacer la nécessité
de stratégies nouvelles concernant l’offre de soins
mais aussi la formation des chirurgiens et des
équipes qui rendent le bloc opératoire sûr, per-
formant, en phase avec les besoins de la popula-
tion. Il est intéressant de constater que ce rapport
rejoint celui du Projet hôpital 2007, qui souligne
les dysfonctionnements majeurs responsables de
la crise morale, démographique, financière et
managériale qui secoue l’hôpital. Ce sont : les
textes, règlements et autres contraintes sécuri-
taires ; la bureaucratie et l’augmentation des
poursuites judiciaires ; le manque de personnel
soignant, l’insuffisance des investissements en
matériels et, plus généralement, une pénurie
qu’ils n’ont pas créée et qu’ils doivent gérer ; la
réglementation des trente-cinq heures qui n’a fait
qu’aggraver une situation déjà précaire ; l’ab-
sence de prise en compte de la pénibilité et de la
responsabilité dans les rémunérations ; les diffi-
cultés d’information rencontrées par les malades
et leur famille (délais d’attente aux urgences et
pauvreté des établissements de soins de suite et
de long séjour). Mais les crises sont nécessaires
et portent, elles, leur solution. Encore faut-il que
le noble art se pratiquant plus que jamais en
équipe sache faire taire les intérêts individuels,
secouer les habitudes et devenir un domaine
ouvert à un monde extrêmement mouvant.
Andrée-Lucie Pissondes
Pr Henri Guidicelli (CHU de Grenoble) appellent
les pouvoirs publics à réagir en urgence. Les rai-
sons de la crise en chirurgie sont complexes, no-
tamment parce qu’elles sont différentes selon les
secteurs d’activités chirurgicales et selon les spé-
cialités. Par exemple, certaines spécialisations
comme l’ophtalmologie pourraient atteindre
40 % d’augmentation de l’activité alors que cer-
taines interventions chirurgicales sont rempla-
cées par des gestes percutanés.
« Les chirurgiens voient leur fonction dévalorisée, ce
qui se traduit dans le concret par des revenus qui ne
sont plus proportionnés à la pénibilité des tâches,
par les charges qui ont augmenté (en dernière date,
les primes d’assurance). A cela est venue s’ajouter
la judiciarisation de la profession, le praticien pas-
sant insidieusement d’une obligation de moyen à une
obligation de résultat tant la pression des malades
est forte », expliquent les chirurgiens auteurs du
rapport. Mais la pénibilité du métier se mesure
surtout par le poids de la solitude profession-
nelle, de la pression psychologique, des adapta-
tions aux évolutions technologiques et de la crise
des cliniques.
Par ailleurs, des conflits entre pouvoirs médi-
caux et pouvoirs administratifs en raison des
contraintes de tous ordres sont de plus en plus
aigus. Quant à l’urgence médicale, elle se heurte
à différentes difficultés, dont la spécialisation de
plus en plus grande des praticiens (70 % des ur-
gences sont assurées par des chirurgiens contrac-
tuels) et la mauvaise répartition des effectifs sur
le territoire. Certaines régions (Île-de-France,
Bloc opératoire
Crise insurmontable
ou salutaire mutation ?
Un rapport sur l’état de la chirurgie en France
a été remis au mois de février au ministre de la Santé
Jean-François Mattei. Il montre la crise profonde
de la spécialité, marquée par des bouleversements
technologiques, mais surtout par un manque de vocations.
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Professions Santé Infirmier Infirmière - No48 - août-septembre 2003
Sommaire
• Chirurgie ambulatoire :
se poser les vraies questions
• Méthodes cœlioscopiques :
évaluation de la chirurgie digestive
• Infections du site opératoire :
des progrès sont enregistrés
• Hygiène : la préparation cutanée
• Circulations au bloc opératoire :
l’exemple de l’Hôpital américain
de Paris
• Douleur postopératoire :
désormais évitable
dans une intervention programmée
• Chirurgie de l’adulte : nutrition
artificielle selon les conférences
de consensus
• IADE et IBODE :
deux spécialisations pour le bloc
• Gaz anesthésiques : des risques
sous-estimés chez les soignants