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La Lettre du Sénologue - n° 31 - janvier/février/mars 2006
CAS CLINIQUE
Dans la méta-analyse de l’EBCTCG (2) (Early Breast Cancer
Trialists’ Collaborative Group), quatre essais incluant l’étude
précédente comparent 5 ans de tamoxifène à 10 ans, la survie
sans récidive n’est pas modifiée par la prolongation de
tamoxifène (8000 malades, RR = 1 % ± 11%), ce qui indique
l’absence d’intérêt de poursuivre ce traitement de façon pro-
longée. Avec ces données, l’arrêt du tamoxifène à 5 ans a été
extrapolé aux malades avec des tumeurs N+. Cependant, cer-
taines études (ATTOM et ATLAS) testant la durée d’adminis-
tration de tamoxifène au-delà de 5 ans restent ouvertes (3, 4).
Risque de récidive après 5 ans de tamoxifène
Globalement, à l’issue de 5 ans de tamoxifène, la probabilité de
récidive est de 4,3% par an jusqu’à la deuxième année, cela pour
une population ménopausée et non ménopausée ayant éventuelle-
ment reçu une chimiothérapie (5). Le risque du sous-groupe de
malades initialement N+, comme cette patiente, est nettement
supérieur comme on peut le constater dans le tableau II où la sur-
vie sans récidive des N+ à 10 ans est de 82,6% et la survie glo-
bale spécifique de 89,6% et, pour les T2 auquel on doit assimiler
la malade, ces chiffres sont encore moindres.
Intérêt du Fémara®
L’étude MA 17 (stratifiée selon le statut ganglionnaire) montre
que le relais du tamoxifène par létrozole réduit de 42% le risque
de récidive pour la totalité de la population (94,7 versus
89,8 % (p = 0,00004) ; la survie globale est significativement
améliorée pour les tumeurs N+ (RR : 0,61 ; IC 95 % : 0,38-0,98).
Durée d’administration du létrozole
Pendant les quatre premières années de traitement dans l’étude
MA 17, le bénéfice du létrozole augmente chaque année, cela
de façon significative (p = 0,00004), cette constatation rend
licite la prescription de létrozole pendant au moins quatre ans,
l’étude a été interrompue après un suivi médian de 2,5 ans
lors de la première analyse intermédiaire (6).
Par ailleurs, pour les malades volontaires restées dans l’essai,
une randomisation de 5 ans supplémentaires de létrozole en
double aveugle a été réalisée, ce qui répondra, dans les pro-
chaines années, à la question de la durée de l’hormonothérapie
qui pourrait ainsi atteindre 15 ans de traitement endocrinien.
Tolérance
Globalement, la tolérance du létrozole est acceptable : le létro-
zole a été arrêté chez 5% des malades pour effets secondaires
contre 4% sous placebo (p = 0,02), il entraîne plus de bouffées
de chaleur (58 versus 54%, p = 0,003), d’atteintes articulaires
(25 versus 21%, p < 0,0001), de myalgies (15 versus 12%, p =
0,04) et d’ostéoporose (8 versus 6 %, p = 0,003) que le pla-
cebo, moins de saignements vaginaux (6 versus 8 %, p =
0,005), et on n’observe pas de différence en ce qui concerne
l’hypercholestérolémie (16 versus 16 %) et les événements
cardiovasculaires (6 versus 6%) (6).
Dans le sous-protocole étudiant précisément l’état osseux chez
226 patientes supplémentées en calcium et vitamine D, après
une médiane de suivi de 1,6 ans, l’analyse intermédiaire
montre une diminution significative de la densitométrie
osseuse aussi bien au niveau du rachis que du col fémoral, une
augmentation des N-télopeptides et un taux du T-score infé-
rieur à la valeur de - 2,5 définissant l’ostéoporose chez 3,3%
contre 0 % sous placebo (p = 0,13) (6). Des études sont en
cours pour étudier la protection osseuse par des bisphospho-
nates dont on connaît l’effet bénéfique sur la prévention des
fractures osseuses dans l’ostéoporose commune.
■
RÉFÉRENCES BIBLIOGRAPHIQUES
1. Fisher B et al. Five versus more than five years of tamoxifen for lymph node-
negative breast cancer: updated findings from the national surgical adjuvant
breast and bowel project B-14 randomized trial. Journal of the National Cancer
Institute 2001;93(9):684-90.
2. EBCTCG (Early Breast Cancer Trialists’ Collaborative Group). Tamoxifen
for early breast cancer: an overview of the randomised trials. Lancet 1998;
351:1451-67.
3. Gray R, Milligan K, Padmore L, Study-Group. Tamoxifen: assessment of the
balance of benefits and risks of long-term treatment. Br J Cancer 1997;76
(suppl 1):24(Abstr. 031). Joint Meeting of the British Oncologic Association
(BOA), Association of Cancer Physicians (ACP) and Royal College of Radiolo-
gists, St Andrews, 5-8 jul 1997.
4. Davies C, Monaghan H, Peto R. Early breast cancer: How long should
tamoxifen continue? Eur J Cancer 1998;61(Suppl 5):S43(Abstr. 177). Abstracts
from the 1st European Breast Cancer Conference. Florence, 29 sept-3 oct 1998.
5. Saphner T et al. Annual Hazard Rates of Recurrence for Breast Cancer After
Primary Therapy. J Clin Oncol 1996;14(10):2739-46.
6. Adapté de Goss E. ASCO 2004.
Tamoxifène 5 ans Tamoxifène 10 ans p
Survie sans maladie 82 % 78 % 0,003
Survie globale 94 % 91 % 0,07
Tableau I. Résultats de l’étude NSABP B-14.
N SSR 10 ans p SGS 10 ans p
(%) (%)
T0,1-2,0 cm 611 88,0 0,0002 95,0 < 0,0001
T2,1-5,0 cm 433 79,9 87,0
N = 0 460 89,6 96,3
N = 1-3 413 84,1 < 0,0001 90,1 < 0,0001
N = 4-9 125 67,9 78,3
Grade 1 107 93,9 0,003 97,2
Grade 2 572 85,9 92 0,03
Grade 3 306 80,6 89,1
N- 472 87,4 0,02 94,3
N+ 535 82,6 89,6 0,005
T1 N0 Gr 1 31 96,4 100
Tableau II. Kennecke H, Speers C, Chia S et al. British Columbia
Cancer Agency (BCCA), BC, Canada: 10 years event-free survival
(EFS) in postmenopausal women with early stage breast cancer during
the second five years after adjuvant tamoxifen. San Antonio Breast
Cancer Symposium, abstract 1049, 2004.