porte aussi un risque plus élevé de cancer de l’endomètre et de
thromboses, mais avec une incidence plus faible, sans doute en
rapport avec l’âge de sa population, qui est plus jeune.
Un des intérêts majeurs du BCPT est en fait de suggérer que la
diminution du risque pourrait concerner les femmes ayant des
hyperplasies atypiques et des cancers lobulaires in situ (CLIS),
et donc porteuses de lésions précancéreuses : RR = 0,44 (IC :
0,16-1,06) si CLIS, contre 0,51 (IC : 0,39-0,68) sans CLIS, et
RR = 0,14 (IC : 0,03-0,47) pour les hyperplasies atypiques.
Cependant, ces essais laissent persister beaucoup de questions
concernant le rôle préventif des antiestrogènes.
Ces molécules n’ont-elles un effet préventif que sur les
tumeurs hormonodépendantes, qui sont celles de meilleur pro-
nostic ? Cela a été suggéré par les résultats du BCPT et par
ceux encore préliminaires obtenus avec le raloxifène. Le
raloxifène a été expérimenté dans des essais de prévention de
l’ostéoporose et des fractures ; ce produit est développé dans
cette indication, et les études ont été conduites avec comme
objectif primaire la prévention osseuse et non la prévention
mammaire, qui a été évaluée secondairement, ce qui retire un
peu de valeur aux résultats. Ces essais, d’une durée encore
relativement courte, rapportent un effet favorable sur l’inci-
dence des nouveaux cancers du sein chez des femmes recevant
le traitement par rapport à un groupe placebo (5, 6), pour une
médiane de suivi de 28,9 mois, RR = 0,24 (IC : 0,13-0,52), ce
qui suggère un effet suspensif sur l’émergence du nouveau
cancer. Cependant, la réduction du risque ne concerne que les
tumeurs ER+. La question posée est : peut-on créer des trans-
formations phénotypiques de tumeurs ER+ en ER- avec un
traitement prolongé par antiestrogènes, compte tenu de l’émer-
gence décrite de résistances au tamoxifène dans les tumeurs du
sein ?
Si l’on confirme les résultats optimistes du BCPT en matière
de nouveaux cas de cancer, il resterait à prouver qu’on amé-
liore le taux de mortalité par cancer du sein, l’effet du traite-
ment pouvant n’être que suspensif et ne faire que retarder
l’émergence de la maladie et/ou, comme nous venons de le
dire, que transformer le phénotype de la tumeur.
Ainsi, compte tenu de l’absence de consensus sur les résultats
des trois cohortes et du nombre non négligeable d’effets secon-
daires, il est impossible à l’heure actuelle de conseiller
l’emploi du tamoxifène en prévention primaire du cancer
du sein, et la position de la Société française de sénologie
(SFS) est restée inchangée (7). Il est possible qu’une autre
voie d’administration puisse offrir un intérêt particulier dans
cette indication. Ainsi, afin de pallier les effets systémiques de
l’administration de tamoxifène, une forme percutanée du
dérivé actif est actuellement développée, le 4OH-tamoxifène
(8). L’administration sur l’aire mammaire de ce gel permet
d’obtenir des concentrations intramammaires de 4OH-tamoxi-
fène très supérieures à ce qui est retrouvé dans le plasma. Des
essais cliniques démarrent avec ce produit, dont les indications
pourraient s’étendre à la prévention du cancer du sein.
Il est enfin certainement utile, comme le proposait la SFS, de
disposer d’essais complémentaires chez les femmes à très haut
risque, comme celles porteuses de lésions précancéreuses. ■
RÉFÉRENCES BIBLIOGRAPHIQUES
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4
La Lettre du Gynécologue - n° 242 - mai 1999
ÉDITORIAL