La Lettre du Cancérologue - Suppl. Les Actualités au vol. XIV - n° 1 - mars 2005 11
par l’irinotécan. Enfin, il existe une
importante résistance croisée entre iri-
notécan et SN-38, ce qui permet de
minimiser le rôle de la carboxylesté-
rase 2 dans la résistance, alors qu’il
n’existe pas de résistance croisée entre
oxaliplatine et cisplatine, ce qui est en
faveur de l’originalité de l’oxaliplatine
par rapport aux composés classiques.
Par conséquent, une étude classique in
vitro qui n’apporte pas de révélations,
mais qui fournit d’intéressants modèles
d’étude des mécanismes de résistance
des cancers colo-rectaux à la chimio-
thérapie.
J. Robert
>
Boyer J et al. Clin Cancer Res
2004;10:2158-67.
D
epuis l’identification en 1996 d’un
second récepteur des estrogènes,
RE `, de nombreux travaux ont été
menés pour comprendre son rôle biolo-
gique, en particulier dans le cancer du
sein. À la différence du récepteur _,
dont on connaît la valeur pronostique
favorable et la valeur prédictive de
réponse à la suppression estrogénique,
la portée clinique de RE `reste
obscure. Esslimani-Sahla, de l’équipe
de Rochefort à Montpellier, a quantifié
par immunohistochimie l’expression
nucléaire de RE `et de l’isoforme
RE `cx (ou RE `
2
) dans 50 carcinomes
mammaires RE
+
, HER2neu
–
, chez des
patientes ayant reçu du tamoxifène
comme seul traitement adjuvant, et
suivies depuis 1992 au centre Val-
d’Aurelle. Les quatorze tumeurs ayant
rechuté au cours des cinq années de
traitement (“hormonorésistantes”) ont
L
e groupe de Johnston à Belfast
rapporte dans cet article le résultat
d’une approche classique des méca-
nismes de résistance sélectionnés, dans
une lignée tumorale humaine d’origine
colique, HCT115, par exposition aux
trois cytotoxiques majeurs utilisés dans
le traitement des cancers colo-rectaux,
le 5-fluoro-uracile (5-FU), l’oxaliplatine
et l’irinotécan. Un élément important
est apporté par l’utilisation d’une
lignée isogénique invalidée pour le
gène de la p53 et la comparaison des
mécanismes de résistance obtenus dans
la lignée p53
+/+
et la lignée p53
–/–
.
Les mécanismes de résistance au 5-FU
ainsi sélectionnés concernent principa-
lement la diminution de l’expression de
la thymidine phosphorylase impliquée
dans l’activation du 5-FU en 5-FdUMP.
La résistance à l’oxaliplatine fait inter-
venir une augmentation de l’expression
de ERCC1, impliqué dans la réparation
des lésions de l’ADN par les platines, et
une surexpression de la protéine ABC de
transport appelée Breast Cancer Resis-
tance Protein (ABCG2). La résistance à
l’irinotécan fait quant à elle intervenir
une diminution de l’expression de la
carboxylestérase 2, enzyme d’activation
de l’irinotécan en SN-38, et de la topo-
isomérase I, cible du SN-38, ainsi qu’une
surexpression de la protéine ABCG2.
Dans la lignée sauvage p53
–/–
, la cyto-
toxicité du 5-FU et de l’oxaliplatine est
environ 5 fois plus élevée que dans la
lignée correspondante p53
–/–
, alors que
la cytotoxicité de l’irinotécan est iden-
tique quel que soit le statut p53. Cela
témoigne du rôle de p53 dans la mort
cellulaire induite par le 5-FU et l’oxali-
platine, mais pas dans celle induite
été comparées aux tumeurs “hormono-
sensibles” pour leurs principales carac-
téristiques.
◗Aucune corrélation n’est observée
entre l’expression de RE `et les fac-
teurs pronostiques habituels que sont
l’âge, le grade SBR, la taille tumorale, le
statut ganglionnaire, le RE _, le RP ou
le facteur de prolifération mib-1. Une
corrélation positive est notée entre
l’expression de RE `et celle de l’iso-
forme RE `cx.
◗Un taux plus faible de RE `est
observé dans les tumeurs ayant rechuté
sous tamoxifène, et cette faible expres-
sion apparaît, en analyse multifac-
torielle, comme la variable la plus
significative pour le risque de rechute
(p = 0,001), devant le grade SBR III
(p = 0,08) et un index de prolifération
cellulaire élevé (p = 0,016) : ainsi, le
niveau d’expression RE `serait un
facteur prédictif puissant de résistance
au tamoxifène, plus important que le
récepteur a des estrogènes. L’analyse de
RE `cx n’apparaît pas informative.
Ces résultats, observés rétrospective-
ment sur un petit échantillon de tumeurs
mammaires RE
+
traitées par tamoxifène,
confirment l’impression générale non
encore validée selon laquelle l’expres-
sion du récepteur `des estrogènes
serait associée à un pronostic favorable.
On ne peut néanmoins pas conclure que
le récepteur `a une valeur pronostique
supérieure à celle du récepteur _, à
partir d’une population sélectionnée
pour l’expression de RE _. Soulignons
également que la démonstration de la
valeur prédictive d’un marqueur impose
l’analyse simultanée d’une population
de patientes non traitées avec le
médicament étudié, ce qui n’a pas été
effectué ici.
M. Debled
Institut Bergonié, Bordeaux
>
Esslimani-Sahla M et al. Clin Cancer Res
2004;10:5769-76.
Caractérisation
des mécanismes de résistance
à la chimiothérapie d’une lignée
tumorale d’origine colo-rectale
>
Le récepteur `
des estrogènes peut prédire
la résistance au tamoxifène
des cancers du sein
>