La Lettre du Psychiatre - Suppl. Les Actualités au vol. II - n° 3 - juin 2006
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Coordonnées par E. Bacon
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of Psychiatry
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Journal of Psychiatric Research
REVUE
de presse
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ACTUALITÉS
sciences
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nue. Les souris qui n’avaient pas été sou-
mises à ce traitement préalable passaient
la plupart de leur temps à interagir socia-
lement avec la nouvelle souris. Les souris
traumatisées, quant à elles, présentaient
des signes d’aversion intense et d’évite-
ment. Cette différence de comportement
était observée uniquement en présence
d’une cible de nature sociale, et non en
présence d’un objet nouveau inanimé
dans la cage. Lorsque l’on testait les sou-
ris traumatisées quatre semaines plus
tard, elles présentaient toujours des
signes dramatiques d’évitement social.
Pour tester l’hypothèse selon laquelle
cette modification de longue durée du
comportement social peut être rappro-
chée des situations humaines liées au
stress qui se caractérisent par un isole-
ment social, les auteurs ont étudié l’effet
des antidépresseurs sur leur modèle. Ces
études ultérieures ont montré que les
souris traumatisées et craintives présen-
tent des altérations du système dopami-
nergique mésolimbique, une voie céré-
brale plutôt connue pour ses effets
renforçateurs des comportements d’ad-
diction par l’intermédiaire de la libération
de dopamine. Un facteur neurotrophique,
le BDNF (brain-derived neurotrophic fac-
tor), est un régulateur qui joue un rôle
clé dans la voie dopaminergique méso-
limbique. Les auteurs ont montré que ce
facteur est impliqué dans la médiation à
long terme et la plasticité neuronale des
processus de réponse à des expériences
sociales aversives. En outre, le traitement
chronique, mais non aigu, par la fluoxé-
tine ou l’imipramine améliorait les inter-
actions sociales des animaux “vaincus”.
Cet effet n’était pas obtenu avec le trai-
tement aigu ou chronique par une benzo-
diazépine à usage anxiolytique, le chlor-
diazépoxide.
Commentaire
Cette étude est la première à établir le
rôle important du BDNF dans un circuit
neuronal qui est clairement impliqué
dans tout un ensemble de troubles
neuropsychiatriques dévastateurs. Dans
l’hippocampe, le BDNF est associé à
l’apprentissage et à la mémoire. Avec
cette nouvelle étude, la molécule se
voit à présent également impliquée
dans un circuit nerveux différent, qui
joue un rôle dans un autre type de
mémoire, l’apprentissage social à long
terme. Cette étude met aussi l’accent
sur le fait que les circuits de récom-
pense ont été peut-être trop long-
temps négligés, alors qu’ils sont sus-
ceptibles de jouer un rôle critique dans
la régulation de l’humeur. Enfin, le cir-
cuit de récompense semble pouvoir
constituer une cible nouvelle pour les
médicaments destinés à traiter les pro-
blèmes de l’humeur chez l’homme.
Cette étude sur la souris suggère donc
que le stress de l’anxiété chronique
pourrait être traité par des antidépres-
seurs. Il sera intéressant de voir si l’on
peut reproduire chez l’homme l’obser-
vation qu’une benzodiazépine, qui nor-
malement soulage l’anxiété aiguë, n’a
pas d’effet sur les souris traumatisées,
alors que la fluoxétine est efficace.
E.B.
>
Beron O, McClung A, DiLeone R et al. Essen-
tial role of BDNF in the mesolimbic dopamine
pathway in social defeat stress. Science
2006;311:864-8.
tant pour l’individu que pour la société.
Les corrélats neuronaux de la manière
dont les valeurs morales se mettent en
place et sont exercées par les individus
ne font que depuis peu l’objet d’investi-
gations par les chercheurs en neuro-
sciences cognitives. Des études récentes
de neuro-imagerie ont identifié un réseau
de régions cérébrales impliquées dans le
traitement des valeurs morales, qui com-
prend le cortex préfrontal médian, le sul-
cus temporal supérieur et, de manière
moins marquée, la zone cingulaire pré-
frontale. Toutefois, différents types de
stimuli émotionnels sont susceptibles de
recruter des processus de régulation dif-
férents, et des régions cérébrales diffé-
rentes. C. Harenski et S. Hamann ont
comparé la régulation émotionnelle pour
deux types de stimuli émotionnels : ceux
impliquant une violation morale (dénom-
més stimuli moraux) et ceux n’en impli-
quant pas (dénommés stimuli non
moraux). En outre, ils ont cherché à
savoir si l’activation du cortex préfrontal
médian, une région jusqu’alors considé-
rée comme spécifiquement impliquée
dans le traitement des valeurs morales,
ne pourrait pas plutôt refléter les conte-
nus sociaux et émotionnels. Dix jeunes
femmes (âgées de 18 à 29 ans) ont passé
des scanners d’IRM fonctionnelle pen-
dant qu’elles visualisaient des images
“morales” ou “non morales” dont le
contenu social et émotionnel avait été
égalisé. Toutes les images “morales”
représentaient des scènes sociales désa-
gréables décrivant une violation morale
spécifique. Les images “non morales”
représentaient des scènes sociales désa-
gréables, mais sans contenu moral. Les
instructions étaient soit de regarder pas-
sivement les images, soit d’essayer de
diminuer les réactions émotionnelles sus-
citées par la présentation des images.
L’observation passive des deux types
d’images entraînait des activations simi-
laires des zones reliées au traitement des
Corrélats neuronaux
de la régulation des émotions
négatives relatives
à des violations morales
>
■
Atlanta (États-Unis)
La capacité à faire la distinction entre
des actions considérées comme
appropriées ou comme inappropriées est
basée sur un système de valeurs morales
et est d’une importance considérable