A Valeur pronostique à long terme de l’échocardiographie sous dobutamine

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Valeur pronostique à long terme de l’échocardiographie sous dobutamine
Le but de cette étude effectuée dans un seul centre (Thoraxcenter à Rotterdam) est d’apprécier la valeur pronostique à long terme (36 mois en moyenne) de l’échocardiographie dobutamine réalisée chez un grand nombre de patients
coronariens avérés ou suspectés.
À partir de plus de 1 730 sujets explorés de 1989 à 1997,
1 659 participent à cette évaluation (ont été exclus les patients
revascularisés au cours des trois premiers mois). Les anomalies
de cinétique ventriculaire gauche observées au repos ainsi que la
présence et l’étendue des anomalies diagnostiquées en cours de
test ont fait l’objet de scores pour chaque sujet.
Quatre cent vingt-huit événements cardiaques concernant
366 patients sont survenus pendant le suivi : 108 décès cardiaques,
128 infarctus du myocarde non létaux et 192 revascularisations
myocardiques. L’incidence des décès cardiaques et des infarctus
du myocarde documentés augmente avec la présence d’ischémie
induite par le stress (hazard ratio = 3,3) et l’étendue des anomalies de cinétique segmentaire observées au repos (hazard ratio =
1,9). Le nombre des segments ischémiques constitue un facteur prédictif des complications cardiaques pendant le suivi.
Une ischémie sur un seul segment se traduit par un risque moindre
que lorsque deux segments sont intéressés (hazard ratio passant
de 2,9 à 4 ; p = 0,001). Une échocardiographie-dobutamine normale s’accompagne d’un bon pronostic (taux annuel de survenue
de complications cardiaques = 1,3 % sur une période de 5 ans).
Conclusion. Ainsi que cela avait été constaté lors de travaux déjà
publiés, la dysfonction ventriculaire gauche de repos, dont
l’étendue des troubles de la cinétique segmentaire au repos est le
reflet, et l’existence et l’étendue de l’ischémie myocardique
déclenchée par le stress sont des facteurs pronostiques péjoratifs
associés à la mortalité cardiaque, à la survenue d’infarctus du
myocarde et à l’éventualité d’une revascularisation myocardique.
À l’inverse (et même lorsque l’examen a été effectué sous bêtabloquants ou chez un patient diabétique), une échocardiographie-dobutamine normale est un facteur de bon pronostic.
L’échocardiographie-dobutamine s’avère ici un examen performant pour prédire le devenir cardiaque à long terme d’un important groupe de patients coronariens ou suspects de l’être.
Dr C. Adams, PH, service de cardiologie, CH Argenteuil
Long-term prognostic value of dobutamine-atropine stress
echocardiography in 1 737 patients with known or suspected coronary artery disease ; a single-center experience.
Poldermans D., Fioretti P.M., Boersma E., Bax J.J., Thomson
I.R., Roelandt J.R.T.C., Simoons M.L. ● Circulation 1999 ; 99 :
757-62.
Prévalence et signification des gradients intraventriculaires gauches survenant
lors de l’écho-dobutamine
Point du sujet. Une obstruction dynamique du ventricule
gauche peut apparaître lors de l’écho-dobutamine et pourrait s’associer à la survenue d’une hypotension artérielle.
But. Le but de cette étude était de préciser la prévalence et la signification clinique des gradients intraventriculaires gauches apparaissant sous dobutamine.
Patients et méthodes. L’étude a porté sur 394 patients ayant eu
un écho-dobutamine à forte dose. Un gradient intraventriculaire
gauche 36 mmHg a été considéré comme significatif. Une hypotension a été définie par une chute de la pression artérielle systolique 20 mmHg. Quinze patients avec obstruction intraventriculaire ont eu aussi un écho-doppler à l’effort.
Résultats. La prévalence de l’obstruction intraventriculaire était
de 17,5 % (69 patients sur 394), et les valeurs de gradient allaient
de 36 à 175 mmHg (moyenne 75 mmHg). En comparaison des
patients sans gradient intraventriculaire, les patients ayant un gradient étaient plus souvent de sexe féminin (68 % versus 55 % ;
p < 0,05), étaient plus souvent adressés en raison de douleurs thoraciques ou de dyspnée (75 % versus 55 % ; p < 0,002), avaient
plus souvent une hypertrophie septale asymétrique (33 % versus
17 % ; p < 0,002), et avaient plus souvent reçu une dose maximale
de dobutamine (88 % versus 57 % ; p < 0,0001). Ce gradient ne
s’associait que dans 13 % des cas à un mouvement systolique anté20
rieur mitral. La survenue d’une douleur ou d’une dyspnée durant
l’examen était équivalente chez les patients avec obstruction ou
sans. Une hypotension était plus fréquente en cas d’obstruction
intraventriculaire qu’en son absence (12 % versus 1,5 %). Parmi
les 15 patients ayant une obstruction intraventriculaire sous dobutamine et ayant eu un écho-doppler d’effort, aucun n’a développé
d’obstruction à l’effort.
Conclusion. La prévalence de l’obstruction intraventriculaire
gauche sous dobutamine était de 17,5 % dans cette étude. Une
hypotension lors du test était plus fréquente en présence d’une
obstruction qu’en son absence, mais sa survenue n’était pas corrélée à l’importance du gradient. L’écho d’effort ne déclenchait
pas d’obstruction intraventriculaire chez les patients ayant un
gradient sous dobutamine, ce qui plaiderait contre la signification
clinique de cette obstruction et contre la nécessité d’un éventuel
traitement.
Dr B. Gallet, PH, service de cardiologie, CH Argenteuil
Prevalence and significance of left ventricular outflow gradient during dobutamine echocardiography.
Luria D., Klutstein M.W., Rosenmann D., Shaheen J., Sergey
S., Tzivoni D. ● Eur Heart J 1999 ; 20 : 386-92.
La Lettre du Cardiologue - n° 313 - mai 1999
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Alcool : un peu, ça va bien
Il est bien établi que l’alcool a un effet protecteur contre le
risque coronarien : il réduit l’incidence des coronaropathies
liées à l’artériosclérose et diminue la mortalité cardiovasculaire.
Cela a été établi sur plus de dix études épidémiologiques longitudinales non contrôlées. Cette prévention primaire (diminution
du premier accident coronarien chez des sujets sans antécédents
cardiovasculaires) est-elle associée à un rôle de l’alcool en prévention secondaire, c’est-à-dire lorsqu’un premier accident coronarien a eu lieu ?
C’est l’hypothèse qu’ont explorée J. Muntwyler et coll. aux ÉtatsUnis. Ils ont utilisé les données de la Physicians’ Health Study.
Il s’agit d’une étude contrôlée, avec tirage au sort et double insu,
visant à comparer aux effets du placebo ceux de 325 mg d’aspirine sur la mortalité cardiovasculaire et ceux de 50 mg/j de bêtacarotène sur la mortalité par cancer chez 90 150 hommes d’âge
moyen. Les auteurs ont étudié le devenir de 5 358 hommes de
cette cohorte, d’âge moyen 62-65 ans, pendant les 5 ans qui ont
suivi leur infarctus du myocarde. Les malades étaient classés,
selon leur consommation d’alcool, en 5 groupes : “jamais d’alcool”, “1 à 4 fois par mois”, “2 à 6 fois par semaine”, “1 fois par
jour”, “2 ou plus de 2 fois par jour”.
%
100
90
80
70
p < 0,05
60
p < 0,01
D. Rigaud,
Service de gastroentérologie et nutrition, CHU Bichat, Paris
50
0
1-4/mois
1/j
2-6/sem.
qui avaient une consommation modérée d’alcool (“2 à 6 fois par
semaine”, “1 fois par jour”) avaient un tabagisme ainsi qu’une
fréquence d’HTA et d’hypercholestérolémie plutôt un peu plus
élevés que ceux qui ne buvaient jamais. Et pourtant...
Après 5 ans de suivi, 17 % de ces malades étaient morts, dont
13 % de maladies cardiovasculaires et 5,5 % d’infarctus du myocarde. Le risque relatif (RR) de décès était le plus bas dans les
groupes “2 à 6 fois par semaine” et “1 fois par jour” (0,72 et 0,79).
Le risque relatif de décès par maladies cardiovasculaires était également le plus bas dans les groupes “2 à 6 fois par semaine” et
“1 fois par jour” (0,76 et 0,83). Cela n’était pas contrebalancé,
au contraire, par un accroissement du risque relatif de décès de
cause non cardiovasculaire (RR = 0,61 et 0,66). Ces résultats
valaient tant pour les malades âgés de moins de 65 ans que pour
les malades plus âgés.
Il n’y a pas de doute : un verre, ça va bien. C’est un atout pour le
cœur, mais pas seulement. La présente étude confirme donc le
rôle préventif de l’alcool sur les maladies cardiaques liées à l’artériosclérose. Elle étend les conclusions à la mortalité globale et
à la mortalité cardiovasculaire en prévention secondaire : les
malades ayant fait un infarctus en bénéficient.
Restent trois questions : quelle boisson alcoolique ? Cette étude
ne le dit pas : la polémique reste donc ouverte entre tenants du
vin (et du vin rouge en particulier) et tenants de la dose d’alcool
pur (peu importe le type de boisson alcoolique). Qu’en est-il du
risque chez les hommes ayant fait un infarctus, mais plus jeunes
que ceux de cette étude ? Les malades ont ici un âge moyen de
62-65 ans, c’est-à-dire qu’ils ont un risque moyen de décès nettement plus élevé que des hommes de 40 ans ! Dernière question : qu’en est-il du risque chez les femmes ayant fait un infarctus ? On sait qu’une consommation modérée d’alcool exerce chez
elles un rôle préventif, mais moindre.
> 2/j
Consommation d'alcool
Mortalité globale
Mortalité CV
Mortalité non CV
Ces malades avaient les facteurs de risque habituels d’infarctus
du myocarde : 14 % étaient fumeurs, 22 % avaient une hypercholestérolémie, 38 % une HTA, 13 % un diabète. Les hommes
Mortality and light to moderate alcohol consumption after
myocardial infarction.
Muntwyler J., Hennekens C.H., Buring J.E., Gaziano J.M. ●
Lancet 1998 ; 352 : 1882-5.
ANNONCEURS
BAYER PHARMA (Staltor), p. 27 ; GLAXO WELLCOME, p. 7 ;
Laboratoires RHÔNE-POULENC RORER (Nisisco), p. 32 ;
MSD-CHIBRET (Zocor), p. 31 ; PFIZER, p. 14 ;
SERVIER (Fludex, Preterax), p. 13 et p. 2 ; SCN SECIL (Palais des Congrès), p. 8.
La Lettre du Cardiologue - n° 313 - mai 1999
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Bisoprolol et insuffisance cardiaque : l’étude CIBIS II
Plusieurs études ont montré l’intérêt des bêtabloquants dans
l’insuffisance cardiaque. Néanmoins, aucune étude de mortalité n’était encore disponible avec cette classe de médicaments.
But. Étudier les effets du bisoprolol sur la morbi-mortalité dans
l’insuffisance cardiaque.
Patients. 2 647 patients en classes III et IV de la NYHA, avec
une fraction d’éjection < 35 %, recevant un traitement comportant un inhibiteur de l’enzyme de conversion et un diurétique.
Méthode. Étude randomisée, en double insu, contrôlée, avec un
suivi moyen de 1,3 an. Le bisoprolol était débuté à 1,25 mg/j jusqu’à un maximum de 10 mg/j. L’objectif principal était la mortalité toutes causes confondues. Les objectifs secondaires étaient
les suivants : hospitalisations toutes causes confondues, mortalité cardiovasculaire, admissions cardiovasculaires et arrêts de
traitement.
Résultats. Les principales caractéristiques des patients sont indiquées dans le tableau I. Aucune différence significative n’était
notée entre les deux groupes. Les posologies de bisoprolol utilisées étaient les suivantes : 564 patients à 10 mg/j, 152 à 7,5 mg/j,
176 à 5 mg/j. L’étude a été arrêtée prématurément en raison d’une
diminution significative de la mortalité globale dans le groupe
bisoprolol (11,8 % versus 17,3 %, p < 0,0001, tableau I). La mortalité annuelle estimée dans le groupe bisoprolol est de 8,8 %, et
de 13,2 % dans le groupe placebo (odds-ratio de 0,66, IC à 95 %
0,54-0,81). Les objectifs secondaires sont présentés dans le
tableau II.
Tableau I. Principales caractéristiques des patients.
Age moyen (années)
Sexe masculin
Classe NYHA III/IV
Étiologie ischémique
FE moyenne
DTD (cm)
Traitement médical concomitant
Diurétique
IEC
Nitrés
Digoxine
Anticoagulants
Antiagrégants plaquettaires
Amiodarone
Placebo
(n = 1 320)
Bisoprolol
(n = 1 327)
61 (22-80)
80 %
83/17
50 %
27,6 (5,5)
6,7 (0,9)
61 (26-80)
81 %
83/17
50 %
27,5 (6,0)
6,7 (0,9)
99 %
96 %
58 %
51 %
31 %
42 %
16 %
98 %
96 %
58 %
53 %
30 %
40 %
14 %
Tableau II. Principaux résultats.
Objectif principal :
mortalité globale
Objectifs secondaires
hospitalisations
toutes causes confondues
décès cardiovasculaires
critères combinés
arrêt permanent
du traitement
Placebo
(n = 1 320)
Bisoprolol
(n = 1 327)
Odds-ratio
(IC 95 %)
p
17 %
12 %
0,66 (0,54-0,81)
< 0,0001
39 %
12 %
35 %
33 %
9%
29 %
0,80 (0,71-0,90)
0,71 (0,56-0,90)
0,79 (9,69-0,90)
0,0006
0,0049
0,0004
15 %
15 %
1,00 (0,82-1,22)
0,98
Conclusion. Le bisoprolol entraîne une réduction de 32 % de la
mortalité globale et des hospitalisations pour insuffisance cardiaque. Cette réduction semble être liée principalement à une
réduction de la mort subite (diminution de 42 %). La tolérance
du traitement était excellente, avec un taux d’arrêts de traitement
comparable dans les deux groupes et une posologie maximale du
bisoprolol atteinte dans la majorité des cas. Un blocage des récepteurs ß1 et ß2 serait, en théorie, plus bénéfique en raison d’une
protection plus importante contre les catécholamines. Mais le
bisoprolol, qui est hypersélectif ß1, montre que l’effet bénéfique
est observé même avec les bêtabloquants hypersélectifs. Les
études avec d’autres bêtabloquants fourniront des éléments de
réponse sur ce point, notamment l’étude COMET, qui compare
le métoprolol et le carvédilol.
Cette étude démontre pour la première fois la réduction de la
morbi-mortalité avec un bêtabloquant. Le bisoprolol vient enrichir la pharmacopée disponible pour les cardiologues dans le traitement de l’insuffisance cardiaque.
Dr Ph. Duc, service de cardiologie, hôpital Bichat, Paris
The Cardiac Insufficiency BIsoprolol Study II (CIBIS II) : a randomised trial ● Lancet 1999 ; 353 : 9-13.
FE : fraction d’éjection ; DTD : diamètre télédiastolique.
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