Abstracts A bstracts Insuffisance cardiaque aiguë : valeur diagnostique du Doppler tissulaire ■ Reconnaître une insuffisance cardiaque aiguë peut être difficile, et la précision diagnostique du dosage des peptides natriurétiques de type B (BNP) est insuffisante pour les patients ayant une valeur en “zone grise”. Une estimation des pressions de remplissage du ventricule gauche est possible par échocardiographie Doppler, en calculant le rapport E/Ea (rapport entre la vitesse protodiastolique E du flux transmitral et la vitesse de déplacement protodiastolique Ea de l’anneau mitral en Doppler tissulaire). L’objectif de cet essai était d’évaluer prospectivement la précision diagnostique du Doppler tissulaire en cas d’insuffisance cardiaque aiguë. L’étude a porté sur 104 patients admis pour une dyspnée en service d’urgences où a été réalisée une échocardiographie Doppler. Le rapport E/Ea a été calculé en utilisant la moyenne des valeurs de Ea mesurées à la partie septale et à la partie latérale de l’anneau mitral. Un dosage des BNP n’a été réalisé que chez 43 patients. Le diagnostic d’insuffisance cardiaque a été retenu ou écarté en se fondant sur un consensus d’experts disposant de l’ensemble des données cliniques et paracliniques, à l’exception du Doppler tissulaire et du dosage de BNP. La valeur optimale du rapport E/Ea permettant de conclure à une insuffisance cardiaque a été déterminée par courbes ROC. L’échocardiogramme était de qualité insuffisante chez 11,5 % des patients (12 patients sur 104). L’analyse a donc porté sur 92 patients, dont 51 ont été classés comme ayant une insuffisance cardiaque aiguë, et 41 comme en étant indemnes. La valeur optimale du rapport E/Ea pour affirmer une insuffisance cardiaque était de 11 chez les patients ayant une fraction d’éjection d’au moins 50 %, alors qu’elle était de 16 en cas de fraction d’éjection inférieure à 50 % (précision diagnostique de 85 et 77 % respectivement). En analyse multidimensionnelle, le rapport E/Ea était le principal facteur permettant de prédire l’existence ou non d’une insuffisance cardiaque, alors que le taux de BNP n’était pas un facteur prédictif indépendant. Chez les patients ayant une valeur de BNP en “zone grise” comprise entre 100 et 500 pg/ml, le rapport E/Ea permettait un diagnostic correct dans 91 % des cas, en utilisant les valeurs seuils précédemment définies. >>> Conclusion. La valeur du rapport E/Ea permettant de conclure à une insuffisance cardiaque chez des patients hospitalisés pour une dyspnée aiguë dépend de la fonction systolique du ventricule gauche. Un rapport E/Ea supérieur à 16 en cas de dysfonction systolique et un rapport E/Ea supérieur à 11 en cas de fonction systolique préservée évoquent le diagnostic d’insuffisance cardiaque. Ce résultat va dans le même sens que trois études récentes ayant montré que la valeur seuil du rapport E/Ea permettant de conclure à une élévation des pressions de remplissage était de l’ordre de 10 en cas de fraction d’éjection normale, et de l’ordre de 15 en cas de fraction d’éjection abaissée (Rivas-Gotz C et al. Impact of left ventricular ejection fraction on estimation of left ventricular filling pressures using tissue Doppler and flow propagation velocity. Am J Cardiol 2003;91(6):780-4; Dokainish H et al. Optimal non-invasive assessment of left ventricular filling pressures: a comparison of tissue Doppler echocardiography and B-type natriuretic peptide in patients with pulmonary artery catheters. Circulation 2004;109(20):24329; Bruch C et al. Uselfulness of tissue Doppler imaging for estimation of left ventricular filling pressures in patients with systolic and diastolic heart failure. Am J Cardiol 2005;95(7):892-5). B. Gallet, service de cardiologie, CH Argenteuil >>> Huang CH, Tsai MS, Hsieh CC et al. Diagnostic accuracy of tissue Doppler echocardiography for patients with acute heart failure. Heart 2006;92:1790-4. Échocardiographie d’effort dans la cardiomyopathie hypertrophique ■ La présence d’un gradient intraventriculaire gauche au repos a une valeur pronostique péjorative en cas de cardiomyopathie hypertrophique. Cette étude avait pour objectif de définir la prévalence et la signification d’une obstruction intraventriculaire gauche au repos et à l’effort dans une série importante de patients atteints de cardiomyopathie hypertrophique. L’échocardiogramme d’effort a été récusé chez 128 des 448 patients présentant une cardiomyopathie hypertrophique et inclus dans trois centres, et ce pour diverses raisons, notamment en cas d’antécédent de tachycardie ventriculaire ou de syncope à l’effort, de sorte que l’étude a finalement enrôlé 320 patients. L’échocardio-gramme de repos a permis la mesure du gradient intraventriculaire à l’état basal et après manœuvre de Valsalva, un soin particulier ayant été mis à distinguer un flux d’obstruction d’un flux d’insuffisance mitrale. L’échocardiogramme d’effort n’a été effectué que lorsque le gradient de repos était inférieur à 50 mmHg (201 patients sur 320), après arrêt du traitement (sauf chez 20 patients pour lesquels sa poursuite a été jugée indispensable) et en réalisant l’échocardiogramme au décours immédiat de l’épreuve d’effort. Le gradient est passé de 4 ± 5 mmHg au repos à 45 ± 49 mmHg à l’effort chez les 201 patients ayant eu un échocardiogramme d’effort. Ont été mis en évidence un gradient d’au moins 50 mmHg dans 38 % des cas (76 patients sur 201), un gradient de 30 à 50 mmHg dans 15 % des cas (30 patients sur 201), et une absence d’obstruction intraventriculaire significative (gradient inférieur à 30 mmHg) dans 47 % des cas (95 patients sur 201). L’insuffisance mitrale a augmenté de façon significative chez 18 % des patients développant un gradient supérieur à 50 mmHg à l’effort, mais elle ne s’est majorée chez aucun des patients sans obstruction provoquée. Le seul facteur permettant de prédire l’apparition d’une obstruction à l’effort était la présence d’un gradient supérieur à 50 mmHg lors de la manœuvre de Valsalva. La spécificité de ce signe était de 100 %, mais sa sensibilité n’était que de 40 %. Le gradient lors de la manœuvre de Valsalva sous-estimait significativement l’importance de l’obstruction constatée lors de l’effort. >>> Conclusion. Environ 70 % des patients de cette série avaient une obstruction intraventriculaire au repos (119 patients sur 320) ou à l’effort (106 patients sur 320). Tous les patients atteints de cardiomyopathie hypertrophique sans obstruction intraventriculaire significative au repos devraient avoir un échocardiogramme d’effort. Les patients symptomatiques sous traitement et ayant un gradient intraventriculaire supérieur à 50 mmHg à l’effort pourraient être des candidats à une alcoolisation septale ou à une myectomie. B. Gallet, service de cardiologie, CH Argenteuil >>> Maron MS, Olivotto I, Zenovich AG et al. Hypertrophic cardiomyopathy is predominantly a disease of left ventricular outflow tract obstruction. Circulation 2006;114:2232-9. La Lettre du Cardiologue - n° 402 - février 2007