Professions Santé Infirmier Infirmière N° 63 • mai 2005
Les toxi-infections d’origine
alimentaire résultent de l’in-
gestion d’aliments contami-
nés par un micro-organisme patho-
gène ou une toxine. Il s’agit le plus
souvent de diarrhées infectieuses
avec déshydratation, parfois asso-
ciées à des complications secon-
daires telles que des arthrites post-
infectieuses ou des neuropathies
périphériques (syndrome de
Guillain-Barré avec des paralysies
des membres). On estime, à par-
tir
d’un réseau sentinelle, que
3 600 000 patients environ consul-
tent chaque année un médecin
pour une diarrhée probablement
infectieuse.
Les nouveaux risques
Les nouveaux risques alimentaires
sont apparus au cours de ces der-
nières années, liés à l’industrialisa-
tion et à la commercialisation de
produits d’origine animale à grande
échelle et à la rapide circulation des
denrées alimentaires à travers le
monde. Aussi le risque d’épidémies
peut-il toucher un grand nombre de
personnes à partir d’une seule
source contaminée. On a aussi
assisté à l’émergence de micro-
organismes capables de croître à
basse température et de survivre
dans des conditions hostiles, voire
de développer une multirésistance
aux antibiotiques. Le risque d’infec-
tion d’origine alimentaire est accru
aussi du fait de changements dans
les habitudes alimentaires, notam-
ment la tendance à consommer
des produits frais crus ou faiblement
cuits. De surcroît, une tranche de
plus en plus importante de la popu-
lation consommatrice paraît plus
sensible aux infections (personnes
âgées, sujets immunodéprimés,
diabétiques, patients ayant une
maladie chronique sous-jacente).
Les salmonelles sont les bactéries
les plus souvent identifiées au cours
des toxi-infections alimentaires col-
lectives (définies par au moins deux
cas groupés d’une symptomatologie
similaire dont on peut rapporter la
cause à une même origine alimen-
taire), c’est-à-dire dans 80 % des
cas. Parmi plus de 2 000 sérotypes
connus de Salmonella enterica,
seuls quelques-uns sont à l’origine
des infections alimentaires en
France. Salmonella enteridis, un
nouveau pathogène émergeant
depuis 1985, est devenu actuelle-
ment prédominant dans les épi-
sodes épidémiques. Rapportons une
épidémie en 1994 qui a atteint plus
de 200 000 personnes aux États-
Unis après consommation de glaces
contaminés. La contamination
humaine se fait par l’intermédiaire
des carcasses de volailles ou d’œufs
contaminés, mais aussi par un fro-
mage cru à la suite d’une contamina-
tion d’origine bovine. Au Royaume-
Uni, on observe que des souches de
Salmonella typhimurium (qui ont
émergé à partir de 1990) sont deve-
nues une cause majeure de salmo-
nelloses humaines dans ce pays.
Le rôle des antibiotiques
Or il s’agit de souches multirésis-
tanes aux antibiotiques : près de
90 % des souches sont résistantes à
l’ampicilline, à la streptomycine, aux
sulfamides et aux tétracyclines, et
30 % le sont également à la cipro-
floxacine. On admet que cela résulte
de l’utilisation massive d’antibio-
tiques chez les animaux. Inconnue
avant 1982, la bactérie Escherichia
coli 0157H7, un commensal de la
flore digestive des bovins, est actuel-
lement responsable de diarrhée
hémorragique parfois associée à un
syndrome hémolytique urémique,
l’étiologie la plus fréquente d’insuffi-
sance rénale aiguë chez l’enfant.
Cette bactérie qui entraîne la conta-
mination de certains aliments d’ori-
gine animale et végétale est résis-
tante à l’acidité gastrique et à des
températures de près de 60 °C. Les
épidémies dues à la consommation
d’hamburgers mal cuits ont été
décrites. D’autres entérobactéries
comme Shigella ou Yersinia sont les
causes de cas sporadiques de diar-
rhée. En ce qui concerne le Cam-
pylocter jejuni, qui est un germe
répandu parmi de nombreux ani-
maux d’élevage et responsable de
zoonoses, les souches survivent bien
dans l’environnement mais sont
sensibles à la chaleur (et donc
détruites rapidement par la cuisson)
et à la plupart des antibiotiques ;
toutefois des résistances ont été rap-
portées à l’érythromycine et aux fluo-
roquinolones. Les aliments contami-
nés à l’origine d’épidémies sont le
lait cru non pasteurisé, la viande de
bœuf et la chair de volailles mal
cuites, les œufs, les glaces, certains
végétaux et les fruits de mer.
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>> DOSSIER
Certes, dans les pays industrialisés, d’importants moyens ont été mis en œuvre pour le
contrôle et la prévention des infections d’origine alimentaire. Cependant, de nouveaux
micro-organismes pathogènes ont émergé du fait de leur capacité d’adaptation à des envi-
ronnements nouveaux et aux mutations de l’industrie alimentaire.
Toxi-infections
Rééduquer à l’hygiène des aliments
NUTRITION 21
© Burger/Phanie
La bactérie largement répandue
dans la nature, Listeria monocyto-
genes, est une cause majeure de
méningo-encéphalites et d’infec-
tions materno-fœtales, entraînant
une mortalité globale de 25 à
30 % et des séquelles neurolo-
giques dans 40 % des cas. Cette
bactérie peut être transmise par les
fromages au lait cru, la charcuterie,
le saumon fumé, les salades ou
certains plats cuisinés.
Certaines bactéries produisent
dans les aliments les toxines qui
sont responsables de signes cli-
niques de toxi-infections. Ainsi les
staphylocoques (Staphylococcus
aureus) produisent les entéro-
toxines qui entraînent le vomisse-
ment, les crampes abdominales et
la sévère diarrhée dans les heures
qui suivent l’absorption de l’aliment
contaminé (pâtisseries, mayon-
naise, etc.). Autre germe produi-
sant des entérotoxines, le Bacillus
cereus, est retrouvé surtout dans
les plats cuisinés et il est incriminé
dans 1 à 2 % des foyers de toxi-
infections alimentaires dans les
pays occidentaux. Citons aussi
Clostridium perfringens produisant
une toxine dans l’intestin 8 à
24 heures après la contamination
par le biais des viandes en bouillon
ou des sauces et Clostridium botu-
linum responsable du botulisme,
une grave atteinte du système ner-
veux central. Il faut aussi savoir que
de très nombreux épisodes diar-
rhéiques sont dus à des virus
contaminant les aliments et l’eau
de boisson, tels que rotavirus, cali-
civirus, entérovirus, virus de
Norwalk ou astrovirus. Enfin cer-
tains parasites protozoaires peu-
vent être à l’origine d’épidémies de
toxi-infections alimentaires.
On comprend qu’il n’est jamais
superflu de rappeler les mesures
d’hygiène de base : le lavage des
mains avant de se mettre à table ou
de cuisiner, la conservation des ali-
ments à basse température (véri-
fiée au besoin par le thermomètre)
et la cuisson adéquate des aliments.
LC
18es Journées de nutrition pratique
Dietécom 2005
L
a survie des probiotiques
pendant le transit gastro-
intestinal reste à être prou-
vée et des études cliniques contrô-
lées doivent être faites. Un large
champ d’application se dessine,
non seulement dans le rétablisse-
ment de l’équilibre de la flore et de
la fonction barrière de l’intestin, et
donc dans le traitement des affec-
tions gastro-intestinales, mais aussi
dans la stimulation des réponses
immunes et la prévention des
pathologies atopiques.
Présents dans l’alimentation
Les probiotiques sont présents
dans l’alimentation humaine
depuis que l’on consomme du lait
fermenté, mais ce n’est qu’au
début du XX
e
siècle que
Metchnikoff a découvert que le
yaourt traditionnel provient de la
fermentation du lait sous action
de deux bactéries, Streptococcus
thermophilus et Lactobacillus bul-
garicus ou L. acidophilus.
Aujourd’hui, certains aliments et
divers compléments alimentaires
contiennent des probiotiques tels
que lactobacilles, bifidobactéries,
Streptococcus thermophilus, En-
terococcus ou Saccharomyces
boulardii. Ces micro-organismes
ne présentent pas de danger pour
le consommateur, aucun incident
imputable à l’ingestion de probio-
tiques chez les individus en bonne
santé n’a été décrit. Dans la défini-
tion de l’OMS, il est souligné que
les probiotiques sont les micro-
organismes ingérés vivants et
capables d’exercer des effets béné-
fiques sur la santé. Ce qui sous-
entend que ces micro-organismes
sont capables de survivre dans le
tract digestif pour pouvoir agir. À
Professions Santé Infirmier Infirmière N° 63 • mai 2005
noter que les produits dits “prébio-
tiques” sont les ingrédients alimen-
taires non digestibles (fructanes et
oligosides de galactose) qui stimu-
lent de façon sélective certaines
souches bactériennes de la flore
résidente de l’intestin. Pour com-
prendre les vertus des probio-
tiques en termes de santé, il
convient tout d’abord de rappeler
les fonctions de la flore intestinale
qui est composée de plusieurs
centaines d’espèces de bactéries.
À sa naissance le tube digestif du
nouveau-né est stérile, mais dès
les premières heures il est colonisé
par les bactéries provenant de la
filière maternelle : on s’est aperçu
récemment de l’importance d’un
accouchement naturel pour une
acquisition rapide d’une flore intes-
tinale normale chez les nouveau-
nés.
Une flore bactérienne utile
À partir de deux ans environ,
chaque individu va conserver
une flore bactérienne qui lui est
propre et qui est stable dans le
temps, en dehors de déséqui-
libres pathologiques. A côté de la
fonction de digestion-absorption
des nutriments non digestibles et
de la production de vitamines
(acide folique, vitamines K), les
bactéries de la flore dominante
sont capables de s’opposer par
antagonisme bactérien à l’im-
plantation de bactéries exogènes
pathogènes (tout en produisant
des substances antimicro-
biennes), et par là de renforcer
ou de reconstituer l’effet barrière
de l’intestin. D’autres fonctions
de la flore font l’objet de
recherche, notamment leur rôle
dans la maturation du système
Infos ...
Conduite à tenir
En cas de doute
sur la nourriture
ingérée et surtout si
deux personnes ou
plus présentent les
mêmes symptômes,
il faut consulter un
médecin.
Les toxi-infections
alimentaires
collectives doivent
être déclarées
obligatoirement
aux directions
départementales de
l'action sanitaire et
sociale (DDASS).
Les services
vétérinaires
et ceux de la
Concurrence,
Consommation
et Répression
des Fraudes seront
également sollicités.
DOSSIER
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>> DOSSIER
Depuis quelques années l’intérêt pour les produits pro-
biotiques s’accroît au fur et à mesure des avancées de la
recherche dans ce domaine. Pour les experts européens
certains prérequis sont indispensables.
Les probiotiques
Un avenir prometteur
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