La Lettre du Rhumatologue - n° 251 - avril 1999
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ISE AU POINT
Sur ces radiographies, on apprécie le type et le siège des lésions
dystrophiques. On mesure, par la technique de l’angle de Cobb,
sur les vertèbres les plus inclinées sur l’horizontale, les cour-
bures sagittales : lordose, cyphose globale et cyphose localisée
de la région dystrophique, et les paramètres pelviens : pente
sacrée, incidence, version pelvienne (figure 4 et figure 10). On
mesure également les courbures scoliotiques.
Le diagnostic différentiel radiologique est celui de bloc vertébral
antérieur à révélation tardive tant que les vertèbres ne sont pas
soudées en avant.
ÉVOLUTION À L’ADOLESCENCE
En l’absence de traitement, les cyphoses évoluent. Ainsi, Brad-
ford (13) a montré que, sur 168 cyphoses thoraciques dues à la
maladie de Scheuermann, 96 évoluaient avant la mise en place
du traitement.
PHYSIOPATHOLOGIE
Il existe une altération de la substance fondamentale du cartilage,
avec une diminution du rapport collagène sur protéoglycanes : ce
rapport peut être congénitalement faible, en raison d’un facteur
héréditaire, mais sa diminution peut être secondaire à un trauma-
tisme, notamment de type mécanique, comme le suggère l’étude
de Swärd (4). L’existence d’un facteur mécanique est probable en
raison de lésions dystrophiques vertébrales chez les personnes fai-
sant des travaux pénibles ou pratiquant certains sports, chez les
obèses, et en raison de la réversibilité possible de la cunéiformi-
sation vertébrale avec le port du corset. Cette faiblesse du carti-
lage du plateau vertébral entraîne un prolapsus discal intraosseux
qui inhibe l’ossification endochondrale, aboutissant à un arrêt de
la croissance antérieure du corps vertébral. De plus, la cyphose
crée elle-même une hyperpression sur les plateaux vertébraux et
favorise la cunéiformisation. La dégénérescence discale est-elle
la manifestation d’un défaut intrinsèque du cartilage comme les
autres anomalies ou est-elle en fait une manifestation primitive ?
TRAITEMENT
Le but du traitement est de stopper l’évolution et si possible de
corriger les troubles de la statique vertébrale en permettant la
réparation des vertèbres.
Méthode
La kinésithérapie permet :
– Un travail d’auto-agrandissement devant un miroir, en positions
assise et debout, avec correction des anomalies posturales.
– Des étirements des muscles pectoraux, des fléchisseurs de
hanches et des ischio-jambiers.
– Une rééducation respiratoire.
– Un travail d’extension des spinaux en corrigeant la cyphose.
– Des exercices d’assouplissement de la cyphose dorsale (figure 8).
– Un travail lordosant de la région lombaire haute en cas de
Scheuermann lombaire.
– Des tractions dynamiques sur table de Cotrel.
Des règles d’hygiène de vie sont conseillées : plan de travail sur-
élevé ou incliné, siège adapté, postures de redressement de la
cyphose à faire chez soi. La maladie de Scheuermann contre-
indique le port de charges lourdes et la pratique de sports com-
portant une réception brutale sur le sol. Les sports de compéti-
tion peuvent être nocifs (gymnastique, football...).
Le traitement orthopédique comprend différents types de cor-
sets : le but est d’essayer de réduire la cyphose, mais aussi de
stopper l’évolution pendant l’adolescence.
– Le corset plâtré : avec ou sans têtière (figure 11) selon le niveau
de la cyphose. Il est réalisé en décubitus dans un cadre dérivé du
cadre d’Abott, avec correction de la cyphose à l’aide d’une bande
en U, placé en dessous de son sommet. Il faut veiller à conserver
une lordose lombaire correcte et une antéversion correcte du bassin,
avec projection du segment supérieur du corps en arrière des têtes
fémorales, et parfois correction d’une hyperlordose. Ce corset est
renouvelé régulièrement pour permettre une correction progressive.
– Le corset de Milwaukee (figure 12) : orthèse dynamique per-
mettant l’extension progressive du rachis et la correction de la
cyphose grâce à la têtière et à deux tampons placés en dessous
du sommet de la cyphose. On y associe des appuis pré-huméraux
ou des sangles d’épaules. Il faut également veiller à corriger la
lordose lombaire et la version pelvienne.
Figure 11. Corset plâtré anticyphose.