l'entrée dans l'étude couraient plus de risques que les autres,
mais, après ajustement en ce qui concerne les autres variables, il
n'y a pas de différence entre celles qui prennent le tamoxifène et
celles prenant le placebo.
Ces résultats, obtenus dans un groupe à antécédents familiaux, sont
donc en contradiction avec les résultats de l’essai NSABP-P1, dont
les femmes n'étaient pas recrutées en fonction du risque génétique.
Pritchard K.I. Is tamoxifen effective in prevention of breast can-
cer ? Commentaire. Lancet 1998 ; 352 : 80.
Pourquoi tant de différences concernant les résultats entre l'étu-
de américaine et les essais anglais et italien ?
Ces deux derniers portent sur un plus petit nombre de sujets ;
l'étude de Veronesi comporte de nombreuses patientes perdues de
vue et les femmes enrôlées sont plus jeunes. L'étude de Powles
comprend également des femmes plus jeunes, ayant plus d'antécé-
dents familiaux, et le suivi est plus long : l'effet sur les cancers
encore occultes et à un stade précoce ne se révélerait donc pas,
contrairement à l'étude américaine dont le suivi est plus court.
Le niveau de risque des patientes enrôlées dans les trois études
n'est pas le même. Il faut donc poursuivre les essais avant de
conclure, d'autant plus qu'aucun des trois n'étudie la mortalité, qui
reste la seule chose intéressante.
Un quatrième essai coordonné en Grande-Bretagne est en cours :
“International Breast Cancer Intervention Study” (IBIS), qui a
inclus 4 000 femmes sur un échantillonnage de 7 000 (voir
l’article de J. Cuzick. Continuation of the International
Breast Cancer Intervention Study (IBIS). EJC 1998 ; 34 (11) :
1647-8), et qui est indépendant de l'essai américain.
❒Tamoxifène en adjuvant
Early Breast Cancer Trialists’ Collaborative Group. Tamoxifen
for early breast cancer : an overview of the randomised trials.
Lancet 1998 ; 351 : 1451.
Le tamoxifène a été proposé en adjuvant chez des femmes traitées
pour un cancer du sein apparemment curable. Cinquante-cinq
études ont été rassemblées, réunissant 37 000 femmes avec un
recul de 10 ans.
En résumé, les femmes ayant des récepteurs aux estrogènes posi-
tifs (RE+) ou un statut en RE inconnu ont une survie améliorée de
façon nette.
Il y a une diminution des rechutes, une réduction de la mortalité
et une réduction des cancers du sein controlatéraux.
Les traitements de 5 ans donnent des résultats supérieurs aux trai-
tements plus courts.
Ces données sont obtenues quels que soient l'âge et le statut gan-
glionnaire, même si une chimiothérapie y a été associée. En
revanche, les recherches doivent être poursuivies chez les femmes
qui ont des RE négatifs.
L'incidence des cancers de l'endomètre est augmentée de façon
significative (2,58). Elle augmente avec la durée d'utilisation mais
est indépendante de la dose : 20 mg, 30 mg ou 40 mg.
Dalberg K. et coll. A randomized trial of long term adjuvant
tamoxifen plus postoperative radiation therapy versus radiation
therapy alone for patients with early stage breast carcinoma
treated with breast-conserving surgery. Cancer 1998 ; 82 : 2204.
Essai suédois randomisé chez des patientes ménopausées atteintes
d'un cancer invasif N-T1 ou T2, traitées par chirurgie conservatri-
ce et radiothérapie. Les patientes traitées à la dose de 40 mg de
tamoxifène par jour pendant deux ou cinq ans ont une survie glo-
bale meilleure à dix ans. Les récidives dans le même sein et les
cancers de l'autre sein sont réduits. Le nombre de métastases et de
décès est également diminué. Les informations suggèrent l'intérêt
de l'utilisation du tamoxifène, même chez les patientes dont le
taux de survie à dix ans est de 90 %. Le taux de récidive locale est
divisé par 2 au moins, par rapport au groupe radiothérapie seule.
Kurtz J.M. Tamoxifen and breast conservation. Do we still need
radiotherapy ? Cancer 1998 ; 82 : 2090.
L'article précédent montre que l'adjonction de tamoxifène divise
par deux le risque de récidive locale dans ce groupe précis. Cela
peut susciter d'autres commentaires :
– les patientes préménopausées RE+, les patientes N+ ou ayant
des tumeurs, soit plus volumineuses, soit avec berges envahies
pourraient bénéficier de même du tamoxifène.
– Qu'en est-il des formes RE- ? Il n'y a pas assez de données pour
affirmer qu'il n'y aurait pas un bénéfice.
– Le tamoxifène peut-il éviter le recours à l'irradiation ?
Hortobagyi G.N. Progress in endocrine therapy for breast carci-
noma. Cancer 1998 ; 83 : 1.
Cet article fait le point sur : les données actuelles concernant les
récepteurs hormonaux, le pronostic et la réponse aux thérapeu-
tiques hormonales sur les cancers métastasés (qui, chronologique-
ment, étaient les premières formes étudiées) ; puis en thérapeu-
tique adjuvante.
Historique du développement des thérapeutiques hormonales :
– anti-estrogènes et tamoxifène,
– progestatifs,
– inhibiteurs de l'aromatase, aminoglutéthimide tout d'abord et
actuellement anastrozole et létrozole,
– analogues de la LHRH.
Les nouvelles thérapeutiques hormonales
Pour éviter les effets estrogéniques du tamoxifène et du torémi-
fène, deux nouveaux types d'anti-estrogènes ont été développés :
– anti-estrogènes purs, sans les effets agonistes ;
– modulateurs sélectifs des récepteurs aux estrogènes (SERM),
comme le raloxifène. À la différence du tamoxifène, ces compo-
sés exercent des effets sélectifs sur le RE en fonction du tissu
cible considéré : effets anti-estrogènes du tamoxifène sur le can-
cer du sein, effet agoniste des estrogènes sur l'os et les lipides san-
guins, mais privation des effets agonistes estrogéniques sur l'en-
domètre et peut-être sur d'autres tissus (absence de prolifération
endométriale). C'est le cas du premier SERM autorisé par la FDA
pour le traitement de l'ostéoporose, le raloxifène.
D'autres indications en cours de recherche sont le traitement des
cancers du sein métastatiques, le traitement adjuvant, le THS des
patientes ayant des antécédents de cancer du sein ou de cancer
gynécologique.
La combinaison de plusieurs hormonothérapies peut avoir un effet béné-
fique. C'est le cas du tamoxifène associé aux analogues de la LHRH.
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La Lettre du Sénologue - n° 3 - décembre 1998 - janvier 1999