Kiosque K. Ramanan* La neurologie à travers la presse et les médias grand public Du venin (de SErPent ?)… contre la SEP Alzheimer, deuxième du hit-parade M V T ouvement d’espoir dans la presse après les résultats préliminaires de l’essai effectué par l’équipe toulousaine, dirigée par François Chollet, qui consistait à administrer des antidépresseurs dans les jours suivant un accident vasculaire cérébral. Deux inhibiteurs de la recapture de la sérotonine, le Prozac® et le Deroxat® ont été administrés en dose unique chez 8 personnes ayant eu un accident vasculaire cérébral à 15 jours de l’événement. Chez ces patients hémiplégiques, une amélioration significative des performances motrices, évaluées sur la fréquence et la force du tapotement des doigts a été constatée. Leur force et leur agilité manuelle auraient été améliorées de 10 à 20 %. L’étude par neuro-imagerie montrerait également une réactivation des zones corticales liées à cette activité manuelle. Il s’agit encore d’un stade expérimental sur un petit nombre de patients, nous précise-t-on, mais cette étude “ ouvre la voie à un traitement possible des hémiplégies consécutives à un AVC ” pour Réponse Santé d’avril 2002. Même son de cloche du Parisien du 30 janvier 2002, qui insiste sur l’amélioration des séquelles des AVC grâce au Prozac®, mais dresse le constat suivant : “ Il n’existe pas de médicament miracle pour lutter efficacement contre ces attaques ”… et la thrombolyse alors ? oilà une nouvelle piste dans le traitement de la sclérose en plaques… non, il ne s’agit pas du venin de serpent mais de celui de l’anémone de mer ! Comment piéger et étouffer cette sournoise maladie dans les tentacules de l’anémone de mer ? La SEP serait une proie idéale… le venin d’anémone de mer pourrait être utilisé dans son traitement en stoppant ou en faisant régresser l’évolution de la maladie. “ C’est un premier pas et un formidable espoir pour cette maladie ” pour France Dimanche du 4 janvier 2002 qui commente avec enthousiasme l’expérience menée par le laboratoire d’immunologie du Pr Dominique Bernard de l’université de Marseille. Une substance, le ShK – qui est en fait un peptide connu dans le venin de l’anémone de mer – bloquerait de façon sélective certains canaux potassiques des lymphocytes T activés chez des rats atteints d’encéphalomyélite auto-immune expérimentale. Même emballement, peut-être un peu démesuré, partagé par France Soir qui renchérit : “ Si des progrès considérables ont été menés dans la lutte contre le sida et certaines maladies génétiques, cette affection du système nerveux central ne connaît pour l’heure actuelle que des traitements d’appoint… quelques médicaments parviennent péniblement à réduire les poussées inflammatoires qui frappent la moelle épinière ”, ces résultats seraient “ une plate-forme solide vers la guérison de la sclérose en plaques ”. * Kanjhana Ramanan est résidente en médecine générale. Act. Méd. Int. - Neurologie (3) (4) n° 6, 1, juin janvier 2002 2002 hème récurrent dans la presse grand public, la maladie d’Alzheimer est une pathologie redoutée par les Français, dans un contexte de vieillissement croissant de la population. D’après un sondage SOFRES, publié dans Le Pèlerin magazine en janvier 2002 et réalisé auprès de 1 000 personnes de plus de 18 ans, la maladie d’Alzheimer vient en seconde position des affections les plus craintes par le grand public, elle se classe au second rang des préoccupations des Français, devançant l’infarctus du myocarde, la première position étant occupée pour 78 % des Français par le cancer. Diagnostic pré-mortem U n test de dépistage de la maladie d’Alzheimer chez la souris a été mis au point, annonce en grande pompe Le Figaro du 25 mars 2002, relayé par Le Parisien, France Soir et Paris match ! La presse se fonde sur l’étude publiée dans la revue Science du 22 mars 2002, coordonnée par le groupe de recherche sur la maladie d’Alzheimer de l’université de Washington, qui a cherché à identifier des marqueurs biologiques chez des individus à haut risque de cette maladie. Le dosage sanguin du peptide A-bêta n’est habituellement pas corrélé à la quantité de dépôts amyloïdes cérébraux. Mais, chez la souris, l’injection d’un anticorps monoclonal dirigé contre le peptide A-bêta entraîne une augmentation rapide du taux plasmatique du peptide A-bêta, corrélée à la quantité de substance amyloïde cérébrale localisée au niveau de l’hippocampe et du cortex. Selon France soir : “ Pour la première fois depuis la découverte de la maladie d’Alzheimer, des chercheurs américains 137 Kiosque Kiosque “ Attaque cérébrale ” : Prozac® à l’attaque ont réussi à détecter la pathologie avant l’apparition des symptômes ” ; ce nouveau test de dépistage chez la souris incite également à l’optimisme Le Parisien qui rajoute : “ Pour l’instant, cette maladie incurable… n’est diagnostiquée qu’après la mort grâce à un examen du cerveau !” TesTAUstérone… T ribune santé de mars-avril 2002 consacre un article au lien entre hormones et maladie d’Alzheimer en partant du constat suivant : les femmes sont deux fois plus atteintes que les hommes du même âge, mais le traitement substitutif en estrogènes à la ménopause ne ralentit pas l’apparition de la maladie, ce qui met en cause l’intérêt thérapeutique des estrogènes. Et la testostérone ? L’article fait allusion aux résultats expérimentaux d’une étude menée par l’équipe de Papasozomenos de l’université de Texas-Houston qui montrent, chez des rats transgéniques que la testostérone empêcherait l’hyperphosphorylation de la protéine Tau, ce qui suggérerait que la testostérone puisse prévenir ou retarder l’apparition de la maladie d’Alzheimer. Bébé guéri de l’Alzheimer M aman magazine d’avril 2002 s’émeut dans sa rubrique “ insolite ” de cette “ première ” mondiale : on a “ filtré ” génétiquement un embryon pour lui éviter de développer une forme précoce de maladie d’Alzheimer ! Cette communication préliminaire, dans le JAMA du 27 février 2002, par l’équipe de Yuri Verlinsky de l’institut de génétique de la reproduction de Chicago a fait grand bruit dans la presse. En effet, il s’agit d’un cas de diagnostic génétique préimplantatoire chez une patiente (généticienne !) de 30 ans qui avait, dans sa famille, plusieurs cas de forme précoce de maladie d’Alzheimer liée à la mutation V717L du gène de l’APP (Amyloid Precursor Protein). La femme porteuse de cette mutation – qui risque donc de développer cette maladie dans une dizaine d’années – a opté pour la technique de diagnostic préimplantatoire pour mettre au monde une petite fille indemne de cette mutation. Cette affaire a suscité un vif émoi et des interrogations éthiques dans toute la presse, concernant les limites du diagnostic préimplantatoire. Doit-on faire naître un enfant sain dont la mère ne pourra assurer l’éducation ? Cette affaire met en lumière les dérives potentielles du diagnostic préimplantatoire avec le risque que soient concernés, un jour, certains “ traits génétiques indésirables ”. “ Qui posera une barrière ? Est-ce que ce sera la gravité des maladies à éviter ou leur fréquence ? ” s’interroge Jacques Testart, l’un des concepteurs d’Amandine, dans Le Figaro du 2 mars 2002. Un parkinsonien guéri par des cellules du cerveau E ncore une première mondiale qui fait couler beaucoup d’encre et enrichit le débat ainsi que le vivier d’articles dans la presse traitant des cellules souches et de la thérapie cellulaire ! Le Figaro, Le Parisien et Libération du 10 avril 2002, Le Monde du 11 avril 2002 ainsi que L’Express du 18 avril 2002 font écho de l’annonce faite au congrès de l’American Association of Neurological Surgeons de Chicago par le groupe canado-américain Theratechnologies : l’équipe dirigée par le Pr Michel Lévesque, du centre médical Cedars-Sinai de Los Angeles, a réalisé, chez un patient d’une quarantaine d’années atteint de la maladie de Parkinson, le prélèvement de cellules souches adultes dans une région corticale, puis la mise en culture, et enfin la greffe dans les noyaux gris de ce malade. La symptomatologie clinique aurait quasiment disparu deux ans après cette intervention avec une réduction de 80 % environ de l’intensité des symptômes (tremblement, rigidité). La Food and Drug Administration, au vu de ces résultats, a autorisé la réalisation d’un essai clinique de phase II chez plusieurs dizaines de malades. Mais réaction mitigée du Pr Pierre Pollak, dans Le Parisien, qui souligne le danger de transformation en tumeurs cérébrales des cellules souches réimplantées, ainsi que le risque de lésions et de séquelles dans la zone opérée. Il évoque la technique du pacemaker cérébral, système de neurostimulation qui concerne actuellement 200 patients en France et qui permet de neutraliser les tremblements. “ Ce traitement ne guérit pas mais améliore fortement les symptômes ”, précise-t-il. Tu ne mentiras point ! L es détecteurs de mensonges sont à l’ordre du jour aux États-Unis dans le climat actuel de lutte antiterroriste. L’article qui y est consacré dans Le Monde du 20 mars 2002 s’intéresse aux nouveaux systèmes de détection des mensonges, ainsi qu’aux récentes méthodes d’inquisition mentale. Il n’existe, à l’heure actuelle, aucune technique fiable à 100 %. En effet, il n’est pas aisé de démasquer les menteurs qui n’ont pas le fameux handicap de… Pinocchio. Le polygraphe traditionnel, né dans les années 1920, est fondé sur l’enregistrement de la respiration, de la tension artérielle, du rythme cardiaque et de la transpiration, mais cette technique mesurerait aussi bien le mensonge que le stress. Les détecteurs du futur utilisent des techniques de neuro-imagerie pour remonter à la source, il ne s’agit plus seulement de mesurer les manifestations périphériques. Daniel Langlebon, de l’université de Pennsylvanie a mis en évidence, à l’IRM fonctionnelle, l’activation de certaines zones cérébrales, notamment le cortex cingulaire antérieur 138 Kiosque Kiosque lorsque le sujet dit un mensonge. Mais restons prudents, il n’existe pas d’aire du mensonge, les zones cérébrales activées ne sont pas spécifiques et il est impossible de pouvoir divulguer le contenu de la pensée. Par ailleurs, la qualité des images est liée à la collaboration des sujets. Une autre méthode évoquée dans l’article est celle de Larry Farewell qui mesure des “ empreintes cérébrales ” grâce à l’onde P300 qui est un signal émis 300 millisecondes après qu’un stimulus a été présenté au sujet, l’onde P300 dépend de la familiarité du sujet avec le stimulus ; cette méthode permettrait de repérer 80 % des menteurs. Son appareil nommé “ Mermer ” intéresserait déjà la CIA et le FBI ! Les mensonges qui guérissent L a Vie naturelle de septembre 2001 relate l’expérience menée par une équipe de l’université de Vancouver qui a consisté à donner un placebo à des parkinsoniens, et qui aurait abouti à une augmentation de la synthèse de la dopamine. Il n’y qu’un pas… facile à franchir pour cette revue, pour affirmer que “ la santé physique dépend avant tout du moral et que l’on pourrait souvent remplacer les médicaments chimiques par un placebo ”. Le placebo est décidément à la mode avec deux sujets qui lui sont dédiés dans L’Express et Femina de février 2002, suite à la sortie en librairie de deux ouvrages traitant du sujet : la Force de guérir d’Edouard Zarifian et le Mystère du placebo de Patrick Lemoine. L’Express reprend notamment l’étude publiée dans Science de mars 2002 par une équipe finno-suédoise du Karolinska institute et de l’université d’Helsinki. Elle a démontré que les zones cérébrales activées à la tomographie par émission de positons par les antalgiques opiacés et le placebo sont les mêmes, il s’agit du cortex cingulaire antérieur rostral et du tronc cérébral, ce qui suggère que les antalgiques opiacés et le placebo partagent le même “ réseau neuronal ”. Cette expérience conforte les connaissances déjà acquises sur l’effet antalgique du placebo grâce à la synthèse d’endorphines… e-journal, dans votre e-mail 12th Meeting of the European neurological Society Berlin, les 24, 25 et 26 juin 2002 chaque jour en direct de Berlin Vous recevrez en direct de Berlin les points forts sur les principaux thèmes de la neurologie, les temps forts sur les principaux thèmes de la neurologie Ils seront présentés sous forme de brèves et d’interviews d’experts Un message de bienvenue vous sera adressé pour confirmer votre enregistrement À bientôt sur le Net ! En partenariat avec Act. Méd. Int. - Neurologie (3) n° 6, juin 2002 139 Kiosque Kiosque