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Act. Méd. Int. - Gastroentérologie (17), n°1 - janvier-février 2003
RétroSPECTIVE
PerSPECTIVE
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contrôle correct de l’acidité gastrique
durant la période nocturne. Il est en
effet très fréquent d’observer durant
la nuit, sous IPP simple, voire double
dose, la survenue de périodes d’acidi-
fication gastrique (pH < 4) pendant
plus d’une heure. La fréquence de ces
épisodes aussi appelés nocturnal acid
breakthrough (NAB) est comprise
entre 35 et 90% selon les études et la
pathologie concernée. Bien que leur
implication dans la persistance des
symptômes de RGO soit loin d’être
établie, l’addition d’une prise de rani-
tidine le soir au coucher était recom-
mandée plutôt qu’une troisième prise
d’IPP. Peghini et al. avaient en effet
montré que l’addition réduisait la fré-
quence des NAB d’environ 25 à 40%
selon les doses. Le travail de Fackler
et al (6) montrait qu’en pratique cet
effet bénéfique s’estompait dès la qua-
trième semaine en raison d’un phéno-
mène probable de tolérance.
Endobrachyœsophage
L’utilité de la surveillance des EBO
toujours au cœur du débat ?
Les études publiées ces deux dernières
années n’auront pas fait beaucoup
avancer le débat sur l’utilité de la sur-
veillance du Barrett. Tout le monde est
d’accord pour reconnaître que la sur-
veillance permet de dépister un adéno-
carcinome à un stade plus précoce (7)
et donc avec une espérance de vie plus
prolongée comme l’a encore démontré
l’étude de Corley et al. (8), mais per-
sonne n’est d’accord pour admettre son
utilité et sa faisabilité au sein d’une
population d’autant que le bénéfice en
termes d’espérance de vie pour les
patients qui ont un âge moyen de 70 ans
au moment du diagnostic de cancer n’a
jamais pu être démontré (9). Eckardt et
al. (10) ont publié les résultats de la sur-
veillance à 9 ans en moyenne, et ont
montré qu’il n’y avait pas de bénéfice
en termes de mortalité, que 11 malades
sur 60 suivis pour un EBO de plus de
3 cm de haut décédés au cours de la sur-
veillance l’étaient d’une cause autre
qu’un cancer de l’œsophage, et qu’au
terme de leur étude, seuls 42 % des
malades étaient toujours compliants
pour la surveillance. En fait, cette étude
illustre une fois de plus la difficulté de
démontrer un bénéfice en termes de
survie, car celui-ci, s’il existe, ne peut-
être que très faible. Pour Shaheen NJ
(11), et d’autres (7-9), on ne peut tou-
jours pas avec un niveau de preuve suf-
fisant, affirmer que la surveillance est
utile et que, par conséquent, il ne serait
pas contraire à l’éthique de comparer
deux populations: l’une que l’on sur-
veille et l’autre pas. Eckardt répondait
à Shaheen qu’il n’est peut-être pas
éthique, eu égard au coût d’une telle
étude par rapport au bénéfice attendu,
de l’entreprendre à un moment où l’ar-
gent pourrait être dépensé autrement.
Le débat risque donc d’être encore
ouvert longtemps à moins que la chi-
mioprévention vienne nous démontrer
qu’il n’y a plus de problème ! En atten-
dant peut-être faut-il tenter de mieux
définir une sous-population qui trou-
verait dans la surveillance un bénéfice
beaucoup plus grand, plutôt que de
continuer à affirmer que 0,5 % de la
population devrait avoir une endosco-
pie haute tous les 3 ans.
La chirurgie antireflux peut-elle
prétendre mettre les EBO à l’abri
de la dégénérescence ?
Même si sa prévalence est encore
dixfois plus faible que le cancer de
l’estomac, l’adénocarcinome sur œso-
phage de Barrett est en augmentation
de plus de 35% depuis 3 ans aux États-
Unis. Si on estime que 10 à 15% des
patients reflueurs, qui représentent
environ 20 % de la population, sont
porteurs d’un EBO, on peut considé-
rer que 1 à 2% de la population a un
EBO. Seule la chirurgie antireflux est
aujourd’hui susceptible de supprimer
les reflux acides mais aussi bilio-pan-
créatiques qui jouent un rôle syner-
gique dans la physioptahologie du Bar-
rett. Leur rôle dans la différenciation
et la prolifération cellulaire de la
muqueuse de Barrett tend à être
confirmé par les travaux de Ouatu Las-
car et al. (12) qui démontraient qu’un
traitement IPP permettait de réduire la
prolifération cellulaire et de normali-
ser la différenciation. Toutefois, Carl-
son et al. montraient que le traitement
antisécrétoire était incapable de modi-
fier les altérations génétiques cellu-
laires acquises avant le traitement (13).
La plupart des études publiées sur l’ef-
fet de la chirurgie antireflux sur l’in-
cidence des dysplasies, voire des adé-
nocarcinomes étaient de portée
limitée, compte tenu du faible nombre
de patients suivis et surtout de la durée
relativement courte de la surveillance
postopératoire. Toutes, cependant,
notaient que le risque ne pouvait être
éliminé. La dernière étude publiée (14)
essaie de pallier ces biais. Ye et al. ont
repris rétrospectivement tous les
patients opérés en Suède durant les
32dernières années. Après avoir exclu
les malades qui présentaient un cancer
durant la première année de suivie, ils
estimaient que l’incidence de l’adéno-
carcinome chez les patients traités
médicalement pour un RGO était
sixfois plus élevée que celle observée
dans la population générale et qu’après
chirurgie antireflux, l’incidence était
quatorze fois supérieure. Attention
donc à l’optimisme! Dans tous les cas,
et comme le rappelle Richter dans un
éditorial (15), la prévention du risque
d’adénocarcinome ne peut prétendre
constituer la seule motivation d’une
intervention chirurgicale chez les
patients qui ont un Barrett et que la sur-
veillance ne doit pas être relâchée sous
prétexte que le malade a été opéré. Il
rappelle, en outre, que la mortalité opé-
ratoire de 0,2 %, et qui peut aller jus-
qu’à 20% dans la série de Corley (8),
dépasse largement l’incidence du can-
cer sur Barrett qui est de 0,07% par an.
Prévention de l’adénocarcinome
sur Barrett : peut-être un espoir
du côté des anti-COX-2 ?
Le rôle, dans la genèse du cancer sur
Barrett, des facteurs inflammatoires
médiés par les COX-2 a aussi été sou-
levé et la chimioprévention s’est avé-