exiger ce type de formation, car l’intuition seule
ne suffit pas, même dans une relation très proche
avec un malade. Ne serait-ce que pour maîtriser
leur propre charge émotionnelle et éviter les
“burn-out”.
Les patients ont évolué ; ils font reconnaître
leurs droits et se plaignent de la façon
dont ils sont traités à l’hôpital...
Ils ont hélas parfois raison. Quand on parle de
patient client, le mot client n’est pas du tout pé-
joratif et devrait tous nous interpeller. On res-
pecte un client, on l’informe, on lui reconnaît le
droit de poser des questions. On doit être à son
service. Ce qui ne veut pas dire faire tout ce qu’il
désire et accepter en retour le non-respect. C’est
se dire au contraire que, si le client fait appel à
nous, c’est qu’il a besoin de conseils éclairés et
qu’il va faire confiance à nos compétences. Cette
relation de confiance ne peut donc s’établir que
par la communication. Chacun y trouve sa
propre satisfaction. Pour l’un, celle d’avoir soigné
le mieux possible et, pour l’autre, celle d’avoir été
bien soigné.
Ce n’est pas toujours facile, car il y a des manques
évidents. Notamment un personnel insuffisant.
Les personnes atteintes de maladies graves ont
besoin d’être accueillies, et sont angoissées de
suivre un cursus compliqué, avec un personnel
toujours débordé. Idéalement, la prise en charge
doit reposer sur une organisation qui tient
compte du respect des moments d’attente, du
temps nécessaire pour parler et envisager avec
le malade des projets thérapeutiques. Il y a
d’ailleurs une réflexion, dans les organismes de
tutelle, sur l’uniformisation des informations
dans les dossiers, uniformisation qui est loin
d’exister aujourd’hui. Rendre cohérent l’accès
aux informations médicales devient urgent et fe-
rait gagner en efficacité.
Toujours à propos de la qualité de vie,
une enquête signale encore
que 30 % des patients se plaignent
de douleur et de fatigue
Cette enquête revient souvent, mais elle est diver-
sement commentée selon qu’elle l’est par le soi-
gnant ou par le malade. La douleur comme la fa-
tigue étant des symptômes subjectifs, il n’est pas
toujours facile de les appréhender. L’existence des
centres antidouleurs permet de diriger les malades
vers des spécialistes qui instaurent un dialogue
très positif dans le soulagement de la douleur.
La fatigue est, il est vrai, moins bien prise en
compte. Certaines équipes infirmières expli-
quent les “trucs” pour gérer cette fatigue et ils suf-
fisent parfois à la soulager. Toutefois, la fatigue
est multifactorielle : il y a la maladie, les traite-
ments, mais aussi l’anémie. Et les traitements
contre la fatigue, comme ceux contre la douleur,
ont des contre-indications chez certains malades.
Il y a aujourd’hui une réelle prise de conscience,
toujours pour préserver la qualité de vie. Il y
aura bientôt des produits moins contraignants,
car il ne s’agit pas de remplacer une contrainte
par une autre.
Quelles sont les principales motivations
pour venir travailler
dans un service d’oncologie ?
L’ oncologie est un univers passionnant. En peu
de temps, on est passé d’une impuissance quasi
totale, d’une résignation, à des objectifs de sur-
vie, à des espoirs de guérison. Ce passage au
XXIesiècle est, d’une certaine façon, symbolique.
Au siècle dernier, hier, on identifiait les méca-
nismes et, grâce à la pharmacologie et la radio-
thérapie, on a vécu des progrès très significatifs.
Ce premier congrès ASCO, du nouveau siècle,
nous donne des perspectives de soins dont nous
ne saisissons encore que certains axes. Nous avons
l’espoir d’avoir des réponses adaptées individua-
lisées. Nous savions que l’on ne soignait pas “un”
mais “des” cancers. Demain, on soignera un can-
cer chez un individu qui a ses propres caractéris-
tiques biologiques, lesquelles participeront même
à l’élaboration des traitements. Nous sommes
seulement au début d’une réflexion réaliste et de
solutions pleines d’avenir. N’est-ce pas un élément
de motivation important pour un soignant ?
Propos recueillis par
Andrée-Lucie Pissondes
Les mécanismes du cancer
On sait identifier les mécanismes du cancer. Ils sont
trois, essentiels : l’immortalité, c’est-à-dire la capa-
cité indéfinie de prolifération, l’autonomisation de
la division cellulaire et l’infiltration-migration.
Une cellule normale peut, si on lui fournit les élé-
ments dont elle a besoin, se multiplier indéfiniment,
mais le nombre possible de divisions étant limité, elle
perd ses capacités de prolifération et meurt. Une
cellule cancéreuse ne reconnaît plus ces limites et
s’immortalise par une activité de télomérase.
Parfois, les molécules chargées de stimuler ou d’in-
hiber la prolifération cellulaire sont absentes ou peu
fonctionnelles et donnent naissance à des tumeurs.
Quand il n’y a plus de communications entre elles,
des cellules saines deviennent des cellules trans-
formées, responsables de l’oncogenèse.