Liberté, astrologie et fatalité: Marsile Ficin et le De fato de Plotin*

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Liberté, astrologie et fatalité: Marsile Ficin et le De fato de Plotin*
Maude Vanhaelen
L’exégèse ficinienne du traité plotinien Sur le Destin,1 publiée dans l’édition florentine
de 1492,2 vise à défendre la liberté humaine contre le déterminisme astral, tout en accordant
une place de choix à l’astrologie divinatoire. Elle nous éclaire sur la position, non dépourvue
d’ambiguïté, de Ficin en matière d’astrologie et de magie. Comme l’ont montré les études
conduites par Garin, Vasoli et d’autres,3 dans la Disputatio contra iudicium astrologorum,
composée vers 1477 (deux ans après la querelle louvaniste des futurs contingents),4 Ficin
compile une série d’arguments anciens contre l’astrologie judiciaire et le déterminisme astral.
Douze ans plus tard, en 1489, dans le troisième livre du De Vita, Ficin présente l’astrologie
dans un sens positif, en s’appuyant sur des sources néoplatoniciennes et hermétiques, mais
aussi sur un traité de nécromancie arabe, connu dans sa traduction latine sous le titre de
* Une première version de cet article fut présentée au colloque « Hasard et Providence » commémorant le
cinquantième anniversaire du Centre d’Études Supérieures de la Renaissance de Tours (3-6 juillet 2006). Toute
ma gratitude va à Stéphane Toussaint pour sa relecture et ses suggestions.
1 Pour la notion de providence chez Plotin, voir V. SCHUBERT, Pronoia’ und ‘Logos’. Die Rechtfertigung der
Welt ordnung bei Plotin, nchen-Salzburg 1968; Chr. PARMA, Pronoia’ und ‘Providentia’. Der
Vorsehungsbegriff Plotins und Augustins, Leiden 1971; D. O’ BRIEN, Le volontaire et la nécessité: réflexions sur
la descente de l’âme dans la philosophie de Plotin, «Revue philosophique de la France et de l’Etrange157
(1977), p. 401-422; IDEM, Théodicée plotinienne, théodicée gnostique, Leiden-New York-Cologne 1993; P.
BOOT, Plotinus on Providence (Ennead III 2-3): Three Interpretations, «Mnemosyne» 36 (1983), p. 311-315;
Ch. RUSSI, Provvidenza. !"#$%&connettivo e !"#$% produttivo. Le tre funzioni dell’anima in Enn. III 3 [48],
4.6-13, in Studi sull’anima in Plotino, a cura di R. CHIARADONNA, Napoli 2005, p. 59-78. Sur la notion chez
Ficin, voir M. HEITZMAN, La libertà et il fato nella filosofia di Marsilio Ficino, «Rivista di filosofia neo-
scolastica» 28 (1936), p. 350-371 et 29 (1937), p. 59-82.
2 Il s’agit de l’édition imprimée par Miscomini à Florence le 7 mai 1492. Le manuscrit en deux tomes offert à
Laurent de Médicis (Biblioteca Medicea Laurenziana, Laurentianus 82. 10 et 11) conserve la version ‘officielle’
de la traduction et du commentaire, avec la dédicace de Ficin. Une ébauche de la traduction ficinienne des
Ennéades, annotée par Pic, est transmise dans le Coventi Soppressi E.I.2462: Marsilio Ficino e il ritorno di
Platone. Manoscritti stampe e documenti (17 maggio-16 giugno 1984), a cura di S. GENTILE, S. NICCOLI, P. VITI,
Firenze 1984, 114 et 115, p. 146-150 (GENTILE); A.M. WOLTERS, The First Draft of Ficino’s Translation of
Plotinus, in Marsilio Ficino e il ritorno di Platone. Studi e documenti, I, a cura di G. GARFAGNINI, Firenze 1986,
p. 305-329.
3 E. GARIN, Lo zodiaco della vita. La polemica sull’astrologia dal Trecento al Cinquecento, Bari 1976, p. 61-92;
C. VASOLI, Le débat sur l’astrologie à Florence: Ficin, Pic de la Mirandole, Savonarole, in Divination et
controverses religieuses en France au XVIe siècle, Paris 1987, p. 19-33; IDEM, Marsilio Ficino e l’astrologia, in
L’astrologia e la sua influenza nella filosofia, nella letteratura e nell’arte dall’età classica al Rinascimento,
Milano 1992, p. 159-186. Voir aussi la synthèse de S. GENTILE, Il ritorno di Platone, dei platonici et del
« corpus » ermetico. Filosofia, teologia e astrologia nell’ opera di Marsilio Ficino, in C. VASOLI, Le filosofie del
Rinascimento, a cura du P. C. PISSAVINO, Milano 2002, p. 193-229: 214-218.
4 Sur cette querelle, voir L. BAUDRY, La querelle des futurs contingents (Louvain, 1465-1475). Textes inédits,
Paris 1950; Chr. SCHABEL, Peter de Rivo and the Quarrel over Future Contingents at Louvain: New Evidence
and New Perspectives, «Documenti e Studi sulla tradizione filosofica medievale» 6 (1995), p. 363-473 and 7
(1996), p. 369-435; C.VASOLI, Le dottrine teologiche e i primi inizi della crisi religiosa, in Le filosofie del
Rinascimento, p. 154-174, part. p. 163.
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Picatrix.5 Or les deux ouvrages, la Disputatio et le troisième livre du De Vita, entretiennent un
lien étroit avec les Ennéades. Ficin reprend presque littéralement plusieurs passages de la
Disputatio dans son commentaire à Plotin,6 et le troisième livre du De Vita était lui-même
destiné à être un commentaire du chapitre 11 du traité 27 (IV, 3, Des Difficultés relatives à
l’âme I), dans lequel Plotin parle de l’animation des statues, de la sympathie du cosmos, de
magie, des démons.7
Le commentaire du De fato permet de mieux saisir la cohérence entre ces œuvres
apparemment contradictoires. Plus précisément, il vient éclairer le lien entre la critique de
l’astrologie dans la Disputatio et l’usage dans le De Vita de techniques astrologiques et
magiques. Ficin reprend en effet dans son commentaire deux passages de la Disputatio, réunis
en appendice sous le titre de Summa Marsiliana et dédiés à Laurent de Médicis. Ficin y
présente les lieux communs de la polémique anti-astrologique traditionnelle, paraphrasant le
sixième livre de la Préparation Evangélique d’Eusèbe de Césarée (VI, 7-11): la réfutation du
cynique Oenomaüs, les attaques de l’épicurien Diogénien contre Chrysippe, le De fato
d’Alexandre d’Aphrodisias, les opinions du syrien Bardesane et celles d’Origène.8
Mais le De fato de Ficin porte aussi la trace d’un intérêt de plus en plus marqué pour la
théurgie néoplatonicienne, l’astrologie, la démonologie, la divination par les songes, déjà
présent dans la Théologie Platonicienne, et que l’on retrouvera dans le De Vita. En outre, au
moment il commente le traité Sur le Destin, au printemps 1487, Ficin a déjà établi la
5 Le lien entre le De Vita et le Picatrix est bien documenpar une lettre de Michele Acciari à Filippo Valori
publiée par D. DELCORNO BRANCA, Un discepolo del Poliziano: Michele Acciari, «Lettere Italiane» 38 (1976),
p. 470 sq. Cf. Marsilio Ficino e il ritorno di Platone, n°105, p. 137-138 (GENTILE).
6 On retrouve aussi des extraits de la Disputatio dans la Théologie Platonicienne, le Compendium theologiae
platonicae, l’une des Praedicationes, et dans la fameuse Stella magorum adressée à Frédéric de Montefeltre in
Marsilii FICINI Florentini, […] Opera & quae hactenus extitere & quae in lucem nunc primum prodiere omnia
[…] in duos tomos digesta […] una cum gnomologia […], Basileae, Henricpetri 1576, en réimpression
numérique, suivie et préfacée par S. TOUSSAINT, Paris 2000 (désormais = Op.), p. 849-854.
7 Dans le proemium au troisième livre du De Vita (10 juillet 1489 = Op., p. 529) dédà Mathias Corvin, Ficin
écrit en effet: «Cum igitur inter Plotini libros magno Laurentio Medici destinatos in librum Plotini de favore
coelitus hauriendo tractantem, nuper commentarium composuissem, inter caetera in eum nostra commentaria
numeratum. Id quidem seligere nunc Laurentio quidem ipso probante atque maiestati tuae potissimum dedicare
decrevi», in M. FICINO, Three Books on Life, A Critical Edition and Translation with Introduction and Notes by
C.V. KASKE AND J.R. CLARK, (Medieval and Renaissance Texts and Studies, 57), Binghamton 1989, p. 238
[reprint 2002].
8 Cf. Op., p. 1679: «Quoniam vero desideras, Laurenti seorsum quid de his Marsilius Ficinus sentiat intelligere
[…] ». La Summa se trouve dans Op., p. 1679-1684, et reprend certains passages de la Disputatio mentionnés
dans P.O. KRISTELLER, Supplementum Ficinianum, II, Firenze 1937, p. 16-21 (= Op., p. 1679-1681) et p. 51-52
(= Op., p. 1682). Ficin ajoute dans la Summa les témoignages, cités par Eusèbe, d’Oenomaus, de Diogénien et de
Ptolémée (Op., p. 1682, section finale du chapitre II) et celui de Bardesan (Op., p. 1682-1684, Chap. III),
mention dans la Disputatio (Supplementum Ficinianum I, p. 21: «hic subde quomodo genesis perpendi non
potest neque conceptio rerum neque quid ex cunctis stellis resultet hic aut ibi, in hoc vel illo propter diversitatem
loci, materiae, usum, legum, rerum, hic ex Origene, Bardesane, Clemente, Phavorino, libello hoc tuo»).
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traduction latine des Ennéades, en se fondant sur deux manuscrits que lui fournit Côme de
Médicis.9 Ceci explique que Ficin, qui suit la classification établie par Porphyre, plutôt que la
chronologie des traités, lise le De fato en marge de certaines doctrines développées dans les
traités plus tardifs, et notamment le traité 52 (II, 3), Sur l’influence des astres, dans lequel
Plotin cherche à concilier la pratique de l’astrologie divinatoire avec l’unité du monde.
Surtout, au moment il commente le De fato, et juste avant d’aborder le traité Sur le
Démon qui nous a reçu en partage,10 Ficin s’intéresse à des questions théologiques bien
précises concernant l’usage de techniques astrologiques et magiques permettant à l’âme
d’exercer son pouvoir sur le corps et sur les astres. En effet, d’après le témoignage de
certaines lettres, l’on sait qu’en juin 1487, Ficin a commenté un peu moins de la moitié des
Ennéades (jusqu’au traité 47 (III, 2), Sur la Providence)11 et qu’à cette date il décide
d’interrompre son explication des Ennéades pour traduire d’autres textes néoplatoniciens
susceptibles de l’éclairer sur certains points abordés par Plotin—la remontée de l’âme vers
l’intelligible, la divination par les songes, la théurgie et les démons.12 Il s’agit des traités Sur
les Démons de Michel Psellus et Sur les Songes de Synésios, de quelques extraits du De
abstinentia de Porphyre et du De Mysteriis de Jamblique, de l’exégèse de Priscien le Lydien à
Théophraste, et de certains passages de l’œuvre de Proclus dont Ficin ne précise pas le titre,
vraisemblablement tirés du commentaire de Proclus au Premier Alcibiade et du De sacrificio
et magia.13 Ces textes, rassemblés en un unique opuscule dans l’édition aldine de 1497,14
9 Il s’agit des manuscrits Laurentianus 87.3 et Parisinus graecus 1816. Voir P. HENRY, Études plotiniennes. II.
Les manuscrits des Ennéades, Bruxelles-Paris 1941, p. 16-36 et 45-62; Marsilio Ficino e il ritorno di Platone,
n°23, p. 31-32 (GENTILE).
10 Pour la traduction de texte, voir M. GUYOT, Marsile Ficin, Commentaire du traité de Plotin sur «le démon qui
nous a reçu en partage», in Les dieux de Platon. Actes du colloque de l’Université de Caen-Basse Normandie
(24-26 janvier), éd. J. LAURENT, Caen 2003, p. 263-286.
11 Voir R. MARCEL, Marsile Ficin (1433-1499), Paris 1958 [réimpression 2006], p. 487-495. Vers le mois de
juin 1487 Ficin est parvenu au deuxième livre de la troisième Ennéade, ainsi qu’il l’écrit à cette date à Calderini
(Op., p. 883): «Aggressus iamdiu sum commentaria in Plotinum a nobis traductum, vigesimum nunc librum
explico, quattuor et tringinta sunt reliqui, per has occupationes mihi peregrinari non licet, alioquin iamdiu
Cardinalem patronum nostrum ori salutavissem
12 Voir la lettre que Ficin adresse à son ami Francesco Bandini et datée du 6 janvier 1489 (=Op., p. 895): «Nihil
iamdiu ad te scribo, charissime mi Bandine, quoniam interea et tibi et omnibus multa conscribo. Vtinam tam
multum bona sint quam multa. Plotini libros omnes iamdiu me fecisse Latinos intellexisti, atque in eos
commentaria scribere mox incoepisse, haec ad dimidium iam perduximus, et forsitan absolvissem, nisi inter
commentandum coactus fuissem traducere insuper in Latinum Psellum Platonicum de Daemonibus et Synesium
de Somniis atque ex parte Porphyrium de Abstinentia, ac etiam divinum Iamblicum de Aegyptiorum
Assyriorumque theologia et denique Priscianum Lydum Theophrasti mentem, de mente diligenter
interpretantem.»
13 Ficin cite Proclus, aux côtés de Théophraste et Jamblique, dans une lettre, sans date, adressée à Antonius
Favorinus (=Op., p. 900): «[...] nostra in Plotinum commentaria Theophrastus, Iamblichus, Proculus et alii
quidam, interpellarunt, affectantes et ipsi per nos e Graecia quandoque in Italiam proficisci. Sed redii nuper ad
Plotinum commentaria in eum prosecuturus assidue»; aux côtés de Jamblique, dans une lettre datée de 1489 et
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éclairent Ficin et son cercle d’amis et correspondants—les deux Valori, Braccio Martelli,
Filippo Carducci, Pierleone da Spoleto et Pic de la Mirandole—sur l’usage de certaines
techniques (théurgie, divination par les songes, démonologie, sacrifice et magie) permettant à
l’âme de communiquer avec les réalités supérieures et de se soustraire à l’emprise des corps.
Comme il l’explique dans une lettre à Braccio Martelli, la lecture de Porphyre permet de
dévoiler la doctrine démonique que Plotin a exprimée en un oracle très bref et très obscur :
Cum superioribus diebus apud Philippum et Nicolaum Valores in agro Maiano
versarer, et in quodam ibi secessu naturam daemonum indagarem, affluit repente
Plotinus divinumque oraculum de daemonibus nobis effudit verbis et brevissimis
et obscurissimis involutum. Visum itaque nobis operae pretium accire
adressée à Pier Leone da Spoleto (=Op., p. 895); et, aux côtés de Porphyre, dans une lettre de dédicace au
Cardinal Jean de Médicis intitulée Proemium in Proculum et Porphyrium (=Op., p. 898). Il s’agit
vraisemblablement du commentaire à l’Alcibiade et du De sacrificio et magia, seuls traités que Ficin a pu
traduire avant 1492 l’exception des Eléments de Physique et de Théologie perdus). La traduction des extraits
du commentaire à la République ne peut remonter avant 1492, date à laquelle le manuscrit grec de Ficin (l’actuel
Laurentianus 80.9) arrive à Florence par l’intermédiaire de Jean Lascaris, cf. A. RABASSINI, Il Bene e le ombre.
‘Experta’ ficiniani dal ‘Commento alla Repubblica’ di Proclo, «Accademia » I (1999), p. 49-65.
14 Nous possédons quatre manuscrits de ces textes: l’Ottobonianus lat. 1531, dédié à Pierre de dicis, contient
les versions latines du De somniis et du De daemonibus (KRISTELLER, Supplementum I, p. XLIV, CXXXV,
CXXXVIII, 104. Ce manuscrit est mentiondans une lettre de Ficin à Bernardo Michelozzi: Marsilio Ficino e
il ritorno di Platone, n°100, p. 130 (GENTILE); le Riccardianus 147 contient celle du commentaire de Priscien de
Lydie au De phantasia et intellectu de Théophraste (KRISTELLER, Supplementum I, p. XVIII; Marsilio Ficino e il
ritorno di Platone 97, p. 125-126 (GENTILE); le Laurentianus Strozzi 97, dédié au cardinal Jean de Médicis,
contient, outre le De raptu Pauli et la Stella Magorum, les versions latines du De mysteriis, de l’In Alcibiadem,
du De sacrificio et magia, du De occasionibus et du De abstinentia, (KRISTELLER, Supplementum I, p. CXXXIII;
Marsilio Ficino e il ritorno di Platone 98, p. 126-128 (GENTILE); enfin, le Laurentianus 82.15, présen à
Laurent le Magnifique en 1489-1490, réunit l’ensemble de ces textes néoplatoniciens (KRISTELLER,
Supplementum I, p. CXXXIII-CXXXV; Marsilio Ficino e il ritorno di Platone n° 99, p. 128-129 (GENTILE). Sur
l’histoire de l’édition aldine, voir P. O. KRISTELLER, Supplementum Ficinianum, I, p. LXIX-LXX; M. SICHERL,
Druckmanuscripte der Platoniker-Übersetzungen Marsilio Ficinos, «Italia medioevale e umanistica» 20 (1977),
p. 323-329; Marsilio Ficino e il ritorno di Platone, s 95-99, p. 122-129 (GENTILE), S. TOUSSAINT, Introduction
à la réimpression numérique de l’édition de IAMBLICHUS, De mysteriis Aegyptiorum […], Venise 1497. Sur la
version ficinienne de l’In Alcibiadem de Proclus, voir P. MEGNA, Per Ficino e Proclo, in Laurentia laurus.
Scritti offerti a Mario Martelli, a cura di F. BAUSI e V. FERA, Messina 2004, p. 313-362. Sur Ficin et le De
Sacrificio et magia, voir J. BIDEZ, Catalogue des manuscrits alchimiques grecs VI, Bruxelles 1928, p. 139-151
(editio princeps du texte grec aux p. 148-151); B. COPENHAVER, Hermes Trismegistus, Proclus, and a
Philosophy of Magic, in Hermeticism and the Renaissance. Intellectual History and the Occult in Early Modern
Europe, ed. by I. MERKEL et A. G. DEBUS, Washington-Londres and Toronto 1988, p. 79-110 (texte grec et
traduction latine reproduits aux p. 106-110). Sur Ficin et le De Somniis de Synésius, voir M.Y. PERRIN, Synésios
de Cyrène, le sommeil et les rêves dans l’antiquitardive, «Accademia» I (1999), p.141-151 ; A. RABASSINI,
Scheda. Il De somniis di Synesio tradotto da Ficino, «Accademia» I (1999), p. 153-169. Je n’ai pas pu consulter
l’article de H.D. SAFFREY ET A.-PH. SEGONDS, Ficin sur le De Mysteriis de Jamblique, «HvmanisticI, 1-2
(2006), pp. 117-124.
5
Porphyrium, tum Plotini discipulum, tum perscrutandis daemonibus deditissimum,
qui facile daemonicum sui praeceptoris involucrum nobis evolveret.15
De même, dans une lettre adressée à Pierre de Médicis, Ficin justifie sa traduction du
traité de Psellus par le fait que les anciens considéraient que les songes étaient envoyés par les
démons («adiunxi libro de somniis librum Michaelis Pselli Platonici de daemonibus, non
immerito quoniam a daemonibus somnia mitti veteres arbitrantur»).16
Cette littérature néoplatonicienne vient aussi renouveler le débat sur la fatalité et la
providence divine, en cherchant à concilier magie, démonologie, astrologie et liberté de
l’âme. Il suffit de lire les intitulés des passages sélectionnés par Ficin dans sa paraphrase.
Ainsi, pour le traité Sur les Mystères de Jamblique, Ficin intitule deux chapitres
respectivement «du libre arbitre et de la manière dont nous échappons au destin» («De libero
arbitrio et quomodo solvemur a fato») et «des jugements des astrologues et du démon» («De
iudiciis astrologorum et daemone»);17 de même, pour les extraits tirés du commentaire sur
l’Alcibiade de Proclus, on lit, outre les passages consacrés aux démons, les titres: «la
providence parvient partout, même aux choses les plus infimes» («providentia percurrit per
singula usque ad minima et interim nullis addicta»); «la connaissance des futurs contingents
est certaine et nécessaire auprès des êtres supérieurs» («cognitio futurorum contingentium est
apud superos certa atque necessaria»); «par sa providence Dieu confirme notre libre arbitre»
(«Deus providentia sua nostrum confirmat arbitrium»).18
15 Marsilii FICINI Epistolarum liber VIII, 27 (=Op., p. 875). Pour une analyse de cette lettre (lue dans l’édition
non expurgée de Matteo Capcasa,Venise 1495), voir l’Introduction de S. TOUSSAINT à la réimpression
numérique de l’édition de IAMBLICHUS, De mysteriis Aegyptiorum […], Venise 1497, p. V-VIII.
16 Op., p. 898. Sur Ficin et la démonologie, voir D.P. WALKER, Spiritual and Demonic Magic. From Ficino to
Campanella, Londres 1958; R. KLEIN, La Forme et l’Intelligible, Paris 1970, p. 89-119; I. CULIANU, Eros et
Magie à la Renaissance, Paris 1984; M.J.B. ALLEN, Marsilio Ficino: Demonic Mathematics and the
Hypothenuses of the Spirit, in Natural Particulars: Nature and the Disciplines in Renaissance Europe, ed. by A.
GRAFTON and N. SIRAISI, Cambrigde (Mass.) 1999, p. 121-137; C. VASOLI, Ficino, la profezia e i sogni, tra gli
angeli e i demoni, «La parole del test3 (1999), p. 147-163; R. CATANI, The Danger of Demons: Astrology of
Marsilio Ficino, «Italian Studies» 55 (2000), p. 37-52; T. KATINIS, Daemonica machimenta tra Platone e
l’Umanesimo: a partire da un passo del commento al Sofista, in Arte e daimon, a cura di D. ANGELUCCI,
Macerata 2002, p. 83-96; S. TOUSSAINT, L’ars de Marsile Ficin, entre esthétique et magie, in L’art de la
Renaissance, entre science et magie, dir. Ph. MOREL, Paris 2006, p. 453-467 ; IDEM, Introduction à la
réimpression numérique de IAMBLICHUS De mysteriis Aegyptiorum […], Venise 1497. Sur la réception de
Psellus à la Renaissance, voir M. CORTESI et E.V. MALTESE, Per la fortuna della demonologia pselliana in
ambiente umanistico, in Dotti bizantini e libri greci nell’Italia del secolo XV. Atti del Convegno internazionale
Trento 22-23 ottobre 1990, a cura di M. CORTESI et E.V. MALTESE, Napoli 1992, p. 129-192 (avec l’édition de la
version ficinienne de Psellus fondée sur le Vallicellianus F 20, aux p. 151-164); D. HAYTON, Michael Psellus’
De Daemonibus in the Renaissance, in Reading Michael Psellus, ed. by Ch. BARBER and D. JENKINS, Leiden-
Boston 2006, p. 193-215.
17 Op., p. 1904-1905. Ces extraits sont tirés du De Mysteriis VIII, 7.
18 Op., p. 1911-1918.
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