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Traitement chirurgical par voie abdominale
du prolapsus rectal exteriorise
●
P.A. Lehur, G. Meurette*
Points
forts
Points
Points forts
forts
Recommandations actuelles ; malgré les incertitudes, on peut retenir comme notions actuellement
reconnues sur la base d’un consensus d’experts, les données suivantes (2) :
! La dissection du rectum souspéritonéal en arrière du fascia recti
permettant sa mobilisation postérolatérale complète sans risque de
léser les nerfs à destinée génitourinaire, la dissection latérale
limitée pour préserver l’innervation rectale et la dissection antérieure dans la gaine rectale avec
les mêmes objectifs.
! La fixation du rectum sans tension, quelle que soit la modalité
retenue en sachant que la fixation
postérieure directe au fil et les
fixations antérieure ou postérieure
par bandelette ont des résultats peu
différents en termes de récidive.
! L’importance pour le chirurgien
de réaliser la technique qui lui est
familière pour obtenir le résultat
optimal. La rectopexie au promontoire type Orr-Loygue représente
l’intervention de référence en
France.
! La possibilité d’associer une
résection colique à la rectopexie
chez les patients normo-continents,
avec constipation de transit de
sévérité moyenne (TTC entre 60 et
90 heures). La colectomie recommandée emporte habituellement le
sigmoïde redondant, en respectant
la jonction recto-sigmoïdienne et
en alignant le côlon gauche sur le
rectum,
! L’abstention d’une résection
colique associée à la rectopexie en
cas d’incontinence anale ou d’hypotonie sphinctérienne marquée sur les
données du TR et de la manométrie
anorectale.
! La discussion d’une colectomie
étendue, voire totale, associée à une
rectopexie en cas de constipation
sévère (TTC > 90-100 heures) ou
d’inertie colique prouvée, associée
à une fonction sphinctérienne anale
normale.
Tous ces gestes ne sont discutés
que chez des patients physiquement aptes à les supporter et sont
mis en balance avec une intervention par voie périnéale. Les conséquences fonctionnelles de la chirurgie doivent être exposées en
détail au patient et à sa famille, sans
cacher les difficultés qu’il y a à les
prédire de façon précise.
* Clinique chirurgicale 2, pôle digestif, Hôtel-Dieu,
CHU de Nantes.
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Mots Prolapsus rectal extériorisé clés Traitement - Chirurgie - Rectopexie - Résection colique Résultats - Complications.
D
ANS un éditorial récent, nous nous
demandions ce que nous savions
exactement du prolapsus rectal et de
sa prise en charge (1). En effet, s’il est
un domaine de la chirurgie digestive
où tout semble avoir été dit, c’est bien
celui du prolapsus rectal. Mais est-ce
si vrai que le sujet soit “épuisé” ?
L’analyse de la littérature et l’étude des
pratiques en France et dans le monde
montrent que nous sommes bien loin
d’une médecine factuelle dans ce
domaine et que nos décisions thérapeutiques conservent un caractère largement empirique (2-5).
Dans ce travail, nous analyserons les
aspects de la prise en charge chirurgicale par voie abdominale (voie haute)
du prolapsus rectal extériorisé (PRE),
en tentant d’identifier les points sur
lesquels le consensus est établi et ceux
sur lesquels, au contraire, des désaccords persistent. Ils doivent faire l’objet d’essais cliniques de grande échelle
dont certains sont en cours.
OBJECTIFS THÉRAPEUTIQUES
Les objectifs thérapeutiques sont
doubles dans la chirurgie fonctionnelle
qu’est celle du PRE :
– assurer la correction durable des
anomalies anatomiques à l’origine du
prolapsus rectal, en limitant au maximum le risque de récidive ;
Le Courrier de colo-proctologie (IV) - n° 4 - oct.-nov.-déc. 2003
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– restaurer une fonction anorectale
(continence et défécation) la plus
proche possible de la normale. Ce
second objectif, lié à la prise en
compte du confort et de la qualité de
vie du patient, est devenu prioritaire.
Il s’attache à rétablir une continence
fécale normale si elle était perturbée
en préopératoire et à traiter une constipation si elle s’associait au prolapsus rectal. Il implique aussi de prendre
toutes les mesures pour éviter ou limiter le risque de séquelle opératoire –
digestive en évitant l’apparition d’une
constipation ou d’une incontinence
postopératoire, – et sexuelle lors de
l’abord abdominal du rectum notamment (mais probablement pas uniquement) chez l’homme.
Les traitements actuels s’attachent également à limiter le risque opératoire
en adaptant la technique chirurgicale
au contexte médical du patient. L’abord
cœlioscopique limite l’agressivité et
le retentissement postopératoire des
interventions par voie abdominale.
TECHNIQUES OPÉRATOIRES
Seules, les interventions réalisées de
façon régulière aujourd’hui sont étudiées ici. Plutôt que de décrire de façon
successive les modalités des trois grands
types d’intervention (tableau I), nous
rapportons les aspects techniques des
temps opératoires plus ou moins asso-
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ciés pour corriger, selon les objectifs
fixés, un PRE.
L’abord chirurgical
Les interventions pour PRE sont maintenant réalisées de façon indifférente
par voie ouverte ou cœlioscopique.
Lorsque la chirurgie se fait à ventre
ouvert, l’incision est une tranverse suspubienne (Pfannenstiel) avec ou sans
section musculaire en fonction des
difficultés prévisibles d’abord du rectum
(corpulence du patient, chirurgie antérieure, etc.). La faisabilité de la cure
du PRE par voie cœlioscopique, quelles
qu’en soient ses modalités, est également démontrée et les techniques proposées reproduisent, pour l’essentiel,
les techniques réalisées par laparotomie.
La rectopexie cœlioscopique est considérée, toutefois, comme techniquement
difficile alors qu’aucun “surrisque”
n’est acceptable dans cette chirurgie
fonctionnelle. L’évaluation de l’abord
cœlioscopique est en cours sans que l’on
puisse encore démontrer la supériorité
sur la voie ouverte de façon formelle
et objective (6).
La mobilisation rectale
La mobilisation du rectum prolabé est
un temps incontournable de la prise en
charge d’un trouble de la statique rectale. Dans le PRE, le rectum souspéritonéal est mobilisé complètement
en arrière et en avant. La dissection déli-
mite des “ailerons” latéraux qui sont
respectés. Le plan de dissection choisi
est celui de la gaine rectale (fascia recti)
en arrière, comme en chirurgie carcinologique (7). Il permet de mobiliser
complètement le rectum et d’épargner
les nerfs à destinée pelvienne. Leur
repérage au promontoire est essentiel
pour éviter de les léser lors de la fixation
des bandelettes de suspension. Ce temps
peut être difficile dans l’abord cœlioscopique. En avant, le rectum est mobilisé dans sa gaine en ouvrant la cloison
rectovaginale chez la femme et en restant en arrière de l’aponévrose prostatopéritonéale chez l’homme.
La rectopexie
La rectopexie est le temps de fixation
aux structures fixes, ostéo-fibreuses
postérieures, qui succède à la mobilisation rectale. Les procédés de fixation du rectum relèvent de deux modalités selon que la fixation est faite de
façon directe ou par l’intermédiaire
d’une prothèse.
Les rectopexies directes utilisent des
points de fil fin, non résorbable, passés
dans la gaine rectale et le surtout fibreux
présacré et noués. Des précautions sont
à prendre pour ne pas léser les veines
présacrées. C’est par l’intermédiaire du
mésorectum que le rectum est fixé dans
la concavité sacrée.
Dans la rectopexie indirecte, la fixation
du rectum est assurée par un matériel
Tableau I. Les différentes techniques actuelles utilisées pour la cure par voie abdominale du PRE.
Intervention type
Rectopexie
Directe (au fil sur le sacrum)
Indirecte (par prothèse interposée)
Résection colorectale
Antérieure (Orr-Loygue)
Postérieure (Ripstein ou Wells)
Résection antérieure du rectum (Mayo Clinic)
Résection colique + rectopexie*
Sigmoïdienne
Colique gauche
Totale avec anastomose iléo-rectale
* Tout type, mais le plus souvent directe au fil.
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prothétique. Le matériel utilisé et la
technique de fixation sont extrêmement
variables d’une étude à l’autre :
● Le matériel est habituellement non
résorbable : polypropylène (Marlex®,
Prolène®), nylon (Mercylène®, Mersuture®) ou polyester (Parietex®), fluoride
de polycarbone (Teflon®). Le matériel
à résorption lente à base d’acide polyglycolique (Vicryl®, Dexon®) est plus
rarement employé.
● La fixation, quel que soit son type,
doit être faite sans tension. La rectopexie indirecte la plus souvent réalisée en France est l’intervention d’OrrLoygue. Elle réalise une fixation du
rectum au promontoire par deux bandelettes prothétiques antéro-latérales.
La rectopexie selon Ripstein reste
l’intervention de référence aux ÉtatsUnis, la fixation portant sur la partie
haute du rectum par une bandelette en
U fixée au promontoire. La rectopexie
selon Wells qui est le standard en
Grande-Bretagne, fixe une bandelette
dans la concavité sacrée sur laquelle est
appliqué le rectum. Parmi les variantes
publiées, citons l’association d’une
rectopexie directe et d’une fixation par
une bandelette antéro-latérale unique.
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La résection intestinale
La résection antérieure du rectum a
longtemps été l’intervention de routine
à la Mayo Clinic. Elle est aujourd’hui
abandonnée en raison de ses risques et
de ses résultats fonctionnels médiocres.
Elle reste un geste “de rattrapage” dans
de rares circonstances : diverticulite
sévère de découverte peropératoire, ou
plaie rectale en cours de dissection. En
revanche, l’association d’une résection colique plus ou moins étendue à
une rectopexie est une option reconnue à l’heure actuelle, bien qu’âprement discutée (8). Sur le plan technique, la jonction rectosigmoïdienne
est conservée intacte. La vascularisation du rectum par l’artère rectale supérieure est respectée. L’étendue de la
résection intestinale varie : habituellement, l’anse sigmoïde est réséquée de
façon isolée, mais dans certains cas de
constipation de transit sévère, bien
documentée, une colectomie gauche,
voire une colectomie subtotale avec
anastomose iléosigmoïdienne distale
peut être indiquée. La rectopexie est
le plus souvent directe, au fil, pour éviter un risque septique sur du matériel
prothétique implanté.
Tableau II. Évaluation des résultats de la cure par voie abdominale du PRE.
Morbimortalité périopératoire
Saignement postopératoire
Lésion urétérale
Complications pariétales de la voie ouverte
Complications de la cœliochirurgie
Infection urinaire
Complications cardiorespiratoires
Phlébite – Embolie pulmonaire
Résultat anatomique
Récidive du prolapsus
Résultat fonctionnel
Normalisation de la continence
en cas d’incontinence préopératoire
Normalisation du transit intestinal
en cas de constipation préopératoire
Séquelles
Digestives : apparition d’une incontinence
ou d’une constipation postopératoire
Sexuelle : impuissance,
anéjaculation/dyspareunie
Qualité de vie
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La péritonisation
L’intervention est terminée par une
péritonisation soigneuse qui a pour but
à la fois d’isoler les bandelettes de la
cavité abdominale et d’effacer le culde-sac de Douglas au mieux par une
résection du péritoine en excès (douglassectomie).
RÉSULTATS
Le résultat opératoire se juge sur différents critères de succès ou d’échec
(tableau II).
Risque opératoire
Les interventions abdominales pour
prolapsus rectal n’engagent qu’exceptionnellement le pronostic vital avec
une mortalité proche de zéro. Malgré
tout, dans une enquête récente de
l’Association française de chirurgie,
on déplorait deux décès de cause médicale sur une série de 108 patients (2).
La morbidité postopératoire incluant les
complications générales non spécifiques varie de 3,5 à 12 % quelles que
soient les techniques adoptées (3, 5).
Risque de récidive
Le contrôle anatomique du prolapsus
rectal, assuré par les interventions abdominales, est élevé, avec un taux de récidive inférieur à 10 %, voire à 5 % à
5 ans dans toutes les séries de la littérature. La majorité des récidives apparaît dans les deux premières années
postopératoires, mais leur nombre
augmente avec la durée du suivi. Le
risque de récidive est toujours inférieur
à celui constaté après chirurgie par
voie périnéale, bien qu’aucune étude
contrôlée n’ait confirmé ce fait (4).
Aucune étude n’a non plus comparé
scientifiquement le risque de récidive
des différentes méthodes de rectopexie ou de résection-rectopexie et,
de ce fait, aucune ne peut être plus
particulièrement recommandée à ce
jour (2).
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Résultat fonctionnel
L’amélioration du résultat fonctionnel
et de la qualité de vie postopératoire
motive actuellement les recherches et
débats sur les choix thérapeutiques dans
le PRE.
Continence postopératoire
Toutes les séries publiées témoignent
d’une amélioration significative de la
continence post-opératoire après chirurgie par voie abdominale. Cette amélioration concerne plus de 50 % des
patients et s’observe dans un délai
variable, habituellement de 6 à 12 mois.
Elle restaure une continence normale
ou se limite à une incontinence aux gaz.
Le meilleur confort postopératoire après
rectopexie résulte également de la disparition des glaires et des suintements
du PRE. Le devenir de l’incontinence
associée au PRE après correction chirurgicale est difficile à prédire de façon
fiable, mais un certain nombre de facteurs sont informatifs (tableau III). La
rééducation postopératoire par biofeedback peut compléter l’effet bénéfique de
la chirurgie. La possibilité d’une nouvelle détérioration de la continence
dans le temps a été notée dans les études
à long terme. Sur le plan physiologique,
après rectopexie, une élévation des pressions anales spontanées et volontaires
est enregistrée. Elle reflète la récupération fonctionnelle des sphincters externe
et surtout interne, qui a été corrélée à
l’amélioration de la continence postopératoire. Toutefois, toutes les études
ne retrouvent pas cette amélioration
des performances sphinctériennes. Ces
discordances pourraient s’expliquer
par l’interaction d’une neuropathie
pudendale associée. Parmi les autres
mécanismes physiologiques intervenant dans la continence après rectopexie, on évoque une récupération de
la sensibilité du canal anal, une amélioration de la compliance rectale ainsi
qu’une modification du gradient de
pression au niveau du sigmoïde.
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Tableau III. Facteurs influençant négativement le retour à une continence normale après
cure par voie abdominale d’un PRE.
Facteur étudié
Caractère péjoratif
Âge
Supérieur à 40-70 ans
Sexe
Féminin
Parité
Accouchements multiples
Longueur du canal anal
Diminuée
Angle anorectal
Ouvert
Pressions anales de base
< 10 mmHg
Contractions volontaires
< 50 mmHg
Temps de latence distale du nerf pudendal
(neuropathie pudendale)
Allongement
Tableau IV. Facteurs influençant la survenue ou l’aggravation d’une constipation après
cure par voie abdominale d’un PRE.
Facteur étudié
Imputabilité
Anatomique
Bascule du sigmoïde redondant
Motricité colique et/ou rectale
Anomalies motrices apparues ou majorées
par l’intervention
Troubles de la motricité colique gauche
Technique de dissection rectale
Section des “ailerons” dénervant le rectum
Technique de fixation rectale
Fixation rectale sous tension
Encerclement prothétique du rectum
Complication postopératoire
Hématome périrectal modifiant
la compliance rectale
Constipation postopératoire
La cure de PRE par voie abdominale
peut induire ou aggraver une constipation, et ce risque concerne tous les
types de rectopexie. La prévalence
globale de la constipation postopératoire reste cependant d’évaluation difficile. Dans la littérature, elle varie de
17 à 71 %. Ces chiffres sont encore
plus imprécis lorsqu’on cherche à distinguer l’apparition, l’aggravation ou
la persistance de la constipation. Les
causes de la constipation postopératoire sont multiples mais discutées et
les preuves de leur responsabilité
encore mal démontrées (tableau IV).
Une résection colique associée à la
rectopexie peut être discutée pour
améliorer le résultat fonctionnel et la
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qualité du confort postopératoire vis-àvis du symptôme “constipation”, mais
ce sujet reste l’objet de controverses (8).
En termes d’évidence, aucune preuve
définitive n’a été apportée en faveur
de la résection-rectopexie et les conséquences sur la continence sont toujours incertaines, la colectomie risquant
de diminuer les chances de récupération
en cas d’incontinence.
INDICATIONS
DE LA VOIE ABDOMINALE
DANS LE PRE
Les sujets ayant un “bon risque chirurgical”, l’âge physiologique important plus que l’âge chronologique dans
cette évaluation, sont à sélectionner
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pour une intervention par voie abdominale. La rectopexie est supposée donner moins de récidives qu’une intervention par voie périnéale, la preuve
scientifique étant cependant moins forte
que l’expérience clinique en l’absence
de données fiables (4). Pour ces patients
dont la condition générale autorise
tout type de chirurgie, seul un vaste
essai contrôlé permettrait d’affirmer
une réelle supériorité de la voie abdominale. C’est dire tout l’intérêt de l’essai prospectif qu’ont mis en place nos
collègues anglais sous l’impulsion de
Michael Keighley. Cet essai, dénommé
“Prosper” (PROlapse Surgery : Perineal
or Rectopexy), envisage de recruter
1 000 patients ayant un prolapsus
extériorisé du rectum sur une période
de 3 ans, avec un suivi moyen 3 ans. Le
plan de randomisation à deux niveaux
et quatre bras permettra de comparer
la voie abdominale à la voie périnéale,
et pour chaque voie d’abord respectivement, la rectopexie seule versus avec
sigmoïdectomie, et l’opération de
Delorme versus celle d’Altemeier, les
critères de jugement étant la récidive,
la continence fécale (score de Kamm)
et la qualité de vie (score EuroQoL).
Volontairement pragmatique et supporté par l’Association of Coloproctology of Great Britain and Ireland, cet
essai à l’échelle d’un pays, et possiblement de l’Europe, laisse espérer un certain nombre de réponses aux questions
que nous nous posons. Les résultats
ne seront cependant connus que dans
5 ans !
Si la supériorité de la voie abdominale
se trouve bien confirmée par un tel essai,
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aucune information n’existe encore sur
le type de rectopexie à retenir, en l’absence de toute comparaison. Aucune
étude n’a en effet jamais comparé de
façon correcte les différentes options
possibles : rectopexie directe versus
rectopexie indirecte, résection rectale
versus rectopexie, ou encore les différentes modalités de rectopexie indirecte
entre elles.
L’association d’une résection colique
à la rectopexie est l’objet d’un débat (8).
On admet que ce geste n’a aucun effet
sur la correction anatomique du prolapsus rectal. Sa capacité à améliorer
le résultat fonctionnel en diminuant
le risque et la sévérité de la constipation postopératoire est discutée. Plusieurs études randomisées et d’autres
études ouvertes supportent cette thèse,
mais d’autres résultats indiquent le
caractère imprévisible de la résection
colique sur le transit postopératoire et
le risque de détérioration ou de nonrécupération d’une continence satisfaisante après résection colique. Aucun
critère préopératoire ne permet de sélectionner les patients susceptibles de
bénéficier de l’association résection
colique/rectopexie, ni de définir la
longueur de la résection utile. Là encore,
un essai prospectif pourrait apporter
les éléments de réponse.
Comme dans d’autres domaines de la
chirurgie digestive, l’abord cœlioscopique a déjà pris une place importante
dans le traitement du prolapsus rectal.
Plusieurs études, malgré un petit
nombre de patients et une méthodologie
parfois critiquable, suggèrent la faisabilité de l’abord cœlioscopique dans
cette indication et un avantage pour la
période périopératoire (6). Elles ne
permettent pas de reconnaître avec
certitude un bénéfice pour les suites à
court et moyen termes par rapport à la
voie ouverte – tout en mettant en évidence le coût beaucoup plus élevé de
la voie cœlioscopique. Ce geste, considéré comme difficile, doit être réservé
à des équipes doublement entraînées à
la chirurgie colorectale, d’une part, et à
celle des troubles de la statique pelvienne, d’autre part.
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R
É F É R E N C E S
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