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Le Courrier des addictions (5), n° 3, juillet-août-septembre 2003
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Les pratiques changent, les représentations
se modifient, et les mentalités évoluent très
certainement en Europe : la CLAT-2 en a
été le vivant et vibrant témoignage, parfois
touffu, dense, voire houleux (à l’énoncé de
tous les crédits menacés remettant en cause
l’existence d’associations, et des attentes
de la politique en France…). Ainsi, les pré-
sentations de Ruth Dreyfuss décrivant la
stratégie suisse, qui a consisté, avec l’aide
des médias, à faire évoluer les mentalités
du grand public face aux drogues. Résultat :
la drogue perçue comme le fléau numéro 1
en 1994 est maintenant classée par les habi-
tants à la huitième place, derrière le chô-
mage et le terrorisme… Bilan connu déjà
depuis quelque temps qui a suscité la créa-
tion, par les Espagnols, d’un site qui pro-
pose d’aider les médias à améliorer la qua-
lité et la pertinence des informations
concernant les drogues : www.drogome-
dia.com. Autre indice de ces changements :
cinquante pour cent des Français seraient
favorables à une prescription médicale
d’héroïne, dispensée dans un cadre médi-
cal. Et 70 % d’entre eux pensent que l’al-
cool est plus dangereux que les drogues illi-
cites (OFDT).
Questions de chiffres
Si le nombre de décès liés à l’usage des
drogues semble relativement stabilisé dans de
nombreux pays, la Grèce présente un bilan
alarmant. Mille décès en 2 000 versus 250 en
1993. En revanche, le Portugal, où l’on déplo-
rait environ 1 100 morts liées à la drogue en
1999, est repassé sous la barre des 1 000.
Il s’agit principalement d’hommes dans la
trentaine, injecteurs d’opiacés ne bénéfi-
ciant pas d’un traitement de substitution et
consommant également alcool et benzodia-
zépines. Pourtant, les réponses efficaces
sont connues : information et formation des
usagers, secours distincts des services de
police, délivrance de Narcan®et formation
à son utilisation, comme cela se pratique
dans plusieurs villes d’Italie, création de
salles d’injection et surtout large mise en
œuvre des traitements de substitution. En
Finlande, Irlande, Norvège, où les traite-
ments de substitution sont rares et très
contraignants, le nombre des overdoses est
en progression constante, alors que la
France peut témoigner du succès de sa poli-
tique en la matière : les overdoses ont baissé
de 80 % depuis 1996 avec la généralisation
des prescriptions de méthadone et surtout
de buprénorphine haut dosage (voir article :
Buprénorphine haut dosage, l’âge de rai-
son”).
Hépatites C : l’état du front
Concernant les maladies infectieuses, on
assiste à un renversement radical des ten-
dances : la France fait part de 800 décès liés
au VIH et 3 300 attribués à l’hépatite C. Une
étude pilote (Coquelicot), portant sur une
cohorte d’usagers de drogues marseillais de
moins de 30 ans, compte 43 % de per-
sonnes contaminées par le VHC et 0 % de
contaminations par le VIH. Par ailleurs,
30 % des usagers de drogues, persuadés
d’être négatifs, étaient en fait positifs pour
le VHC lors du dépistage. En projetant la
combinaison de ces données sur le plan
national, Julien Emmanuelli, responsable
de Coquelicot, estime que 9 % des 30 000
des injecteurs séronégatifs au VHC (soit un
tiers d’une population estimée à 100 000
personnes) se contamineront dans l’année.
Prévention et soins de l’hépatite C sont
donc devenus indiscutablement des priori-
tés absolues de santé publique pour aujour-
d’hui et les prochaines années.
Mis en cause : les filtres contenant des
résidus de drogues sont réutilisés, partagés,
stockés, ce qui en fait des vecteurs essen-
tiels dans la transmission du virus. Le nou-
veau filtre présenté par Apothicom, et
qu’on espère trouver bientôt dans le
Stéribox, sera un élément aussi important
que la seringue à usage unique. Mais, si
celle-ci est néanmoins réutilisable, le filtre,
unanimement apprécié par les injecteurs,
ne le sera pas.
Autre initiative prometteuse : l’échange
de seringues en pharmacie qui se développe
dans treize départements français. Ce sys-
Deuxième Conférence latine de réduction
des risques liés aux usages de drogues
(Perpignan : 22 au 24 mai 2003)
Jimmy Kempfer*
Cent soixante et une communications espagnoles, italiennes, portu-
gaises, suisses, françaises ont permis à 961 participants de prendre
le pouls de la réduction des risques et de pressentir les grandes
tendances européennes. La CLAT a pleinement joué son rôle en
permettant à de nombreux acteurs de terrain de confronter leurs
expériences et pratiques dans le cadre d’une culture commune : la
culture latine. Après la CLAT-1, qui s’est tenue à Barcelone, l’édition
numéro deux de Perpignan a indéniablement gagné ses galons
de conférence internationale.
* Responsable de l’équipe mobile Sud 92.
Association Liberté, 10, rue de la Liberté, 92220
Bagneux.
Où en sont les programmes
d’héroïne médicalisée ?
Outre la Suisse, qui était le seul pays au
monde où des programmes médicalisés
dispensent de l’héroïne injectable à plus
de 1 400 usagers réfractaires au traite-
ment à la méthadone, l’Allemagne vient
de créer des programmes d’héroïne in-
jectable. Quant aux Pays-bas, ils ont per-
mis aux usagers de bénéficier de la dis-
pensation d’héroïne fumable. L’Espagne
a annoncé, pour sa part, le démarrage
d’un programme d’héroïne très prochai-
nement. Quant à la France, le président
de la MILDT affirme qu’un tel projet est
dans les tiroirs depuis un certain temps.
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tème, bien rôdé dans les Pyrénées orien-
tales, permet de récupérer plus de 80 % des
seringues dans les pharmacies de Perpignan.
Ces actions, efficaces et peu coûteuses,
s’appuient sur l’expérience anglaise, dont
une étude menée sur six ans constate un
taux de retour de 86 % des seringues déli-
vrées ainsi qu’une participation croissante
des pharmaciens et des usagers.
Salles d’injection et
de consommation :
surtout en Suisse
Sur les 60 lieux de consommation existant
en Europe, la majorité se trouve en Suisse.
Leur efficacité, finement évaluée, est réelle
mais seulement lorsque l’institution s’est
donné les moyens de ses ambitions. Ces
salles sont également des lieux d’accueil
favorisant l’accès à diverses services médico-
sociaux.
Permettant d’injecter dans de bonnes
conditions d’hygiène et de sécurité, d’évi-
ter la transmission de maladies infec-
tieuses, de limiter les risques d’abcès… et
d’overdoses : 419 en 1992 versus 197 en
2001.
À Lausanne, des ateliers proposent de for-
mer les usagers aux mesures d’hygiène,
techniques d’injection, connaissance du
réseau veineux…
Plusieurs villes ont ouvert des salles d’in-
halation où il est possible de fumer l’héroïne
ou la cocaïne sous forme de crack. Le pro-
jet Cactus, à Bienne, se qualifiant de “local
de consommation à moindre risque”, projet
d’intérêt public et d’économie privée, offre
de favoriser l’intégration sociale des
consommateurs tout en contribuant à la
sécurité et à l’ordre public.
À Rotterdam, la municipalité propose un
lieu de consommation fonctionnant “à la
bonne franquette”, l’église Saint-Paulus
qui permet, depuis 1994, à des centaines
d’usagers d’injecter, sniffer, fumer selon
des règles précises dictées par le bon sens.
Pas de cocaïne, de crack ou d’autres stimu-
lants le soir, par exemple. Trois dealers
“patentés” approvisionnent les 1 385 usa-
gers fréquentant le lieu avec des drogues
vendues à un prix raisonnable, dont la qua-
lité est régulièrement contrôlée par un labo-
ratoire municipal. Au-delà des aspects sani-
taires, l’objectif est aussi la préservation de
l’ordre public. Ainsi, pour la petite histoire :
un des dealers est enregistré comme tra-
vailleur social et paye des impôts !
Signalons également les programmes
d’échange de seringues dans deux prisons
suisses et une prison espagnole qui n’ont
provoqué à ce jour aucun incident.
Analyses de drogues,
testing en milieu festi f
Outre les opérations de testing lancées en
Suisse par Quai 9, la dynamique associa-
tion Sida de Genève, dans un souci de pré-
vention et de réduction des risques, principe
repris en France par Médecins du Monde, la
CLAT-2 a été l’occasion de “se compter”
sur ce front de la harm reduction, en milieu
festif aussi : ainsi, une trentaine d’orga-
nismes dans de nombreux autres pays (en
Angleterre, Portugal et Espagne notamment)
font le même travail. Au Pays basque, c’est
l’association Ai Laket, fonctionnant comme
association d’auto-support (le mouvement
des associations d’auto-support sur ce terrain
d’actions s’est montré particulièrement
dynamique), qui sillonne les discothèques et
autres lieux festifs. Dans le minibus acheté à
l’équipe du Tour de France, les animateurs,
pharmaciens, médecins, chimistes, tra-
vailleurs sociaux… tous eux-mêmes consom-
mateurs ou ex-consommateurs, procèdent au
contrôle rapide des produits et sensibilisent
et responsabilisent les usagers. Un accord
informel avec la police leur garantit de pou-
voir tester ecstasy et drogues diverses sans se
faire interpeller. Leur action, financée par le
gouvernement basque, a permis d’identifier
rapidement l’apparition de nouvelles drogues
telles la kétamine et “d’accompagner” l’ex-
plosion de la consommation de la cocaïne et
des drogues de synthèse dans le milieu festif
en tentant d’envisager une prévention consé-
quente.
Contamination par le VHC : dépistage
et prévention insuffisants
À l’issue des deux premières années de surveillance épidémiologique de
l’hépatite C, l’Institut national de veille sanitaire constate de nettes amé-
liorations dans le “rendement” du dépistage et des traitements institués
mais qui restent insuffisants : ainsi, l’activité de dépistage des laboratoires
d’analyse de biologie médicale (LABM) publics et privés a augmenté de
10 % entre 2000 et 2001, mais le ratio entre les tests confirmés positifs
et ceux qui ont été trouvés négatifs a beaucoup baissé, ce qui tend à
prouver que les campagnes de promotion de ce dépistage ont beaucoup
plus “atteint” les sujets peu ou pas “à risque” de contamination. Quant à
la prise en charge des patients, elle a été plus précoce au cours de la
même période dans 26 des 30 pôles de référence
de l’hépatite C, puisque 10 % seulement des
patients avaient une forme évoluée de la maladie
versus 21 % entre 1993 et 1995. Reste que 31 à
41 % des patients nouvellement traités avaient été dépistés, pour ainsi
dire de façon fortuite, parce qu’ils avaient un facteur de risque :parmi ces
facteurs, l’injection de drogues par voie intraveineuse était prééminente,
seuls 10 à 14 % des patients n’en n’ayant apparemment aucun.
Actuellement, avec 73 % de sujets atteints, la prévalence de cette mala-
die reste très élevée parmi les usagers de drogues,alors que celle du VIH
est toujours quasi nulle. Cela tend à prouver que la prévention du sida a
été mieux suivie et plus efficace que celle de l’hépatite C.
Desenclos JC. (InVS, Saint-Maurice). Bulletin Epidémiologique Hebdo-
madaire 2003 ; n° 16-7.
F.A.R.
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Attention à tous les accessoires
de l’injection !
Est-il besoin de démonter à quel point il
convient d’insister sur l’utilisation unique
et personnelle du matériel d’injection ? Un
cas, présenté à la CLAT-2 par le Dr Xavier
Aknine, médecin généraliste, respon-
sable du centre Gainville à Aulnay en
Seine-Saint-Denis, illustre parfaitement cette
urgence : un patient atteint du VHC et traité
avec succès, a contracté à nouveau la mala-
die quelques mois plus tard : le virus était
d’une souche différente. Le patient s’était
recontaminé en manipulant du matériel
souillé, probablement des filtres.
Le Courrier des addictions 2002 ; n° 2,
vol 4 : 73.
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