Introduction
nviron deux millénaires ou plus séparent la psychologie des anciens sages grecs de la
psychologie actuelle. Dans cet intervalle, l’homme s’est vu transiter de l’art
d’empreindre des graphies sur de tablettes d’argiles à la manipulation d’écrans
tactiles. Dans cette longue histoire, la psychologie scientifique n’occupe qu’un temps
très record, un peu moins d’un millénaire. Considérer l’homme, dans le temps, n’était pas chose
facile, donc il a fallu vaincre les barrières religieuses comme pour toutes les sciences pour y
arriver. Aussi accordait-on du temps supplémentaire nécessaire afin de réaliser l’objectif c’est-à-
dire d’appréhender soi-même comme un objet de recherche ou un animal d’étude. Il a fallu des
génies à la forte personnalité, comme Darwin, Freud, Watson, Maslow pour imposer contre
l’opinion courante un regard objectif sur l’esprit humain et pour appliquer à cette étude les
méthodes scientifiques de la chimie et de la physiologie.
La révolution de pointe de l’informatique a, plus récemment, transformé profondément
notre façon de considérer le psychisme humain comme, au temps de Descartes, la mécanique
avait suggéré l’automate comme modèle de la machine humaine. Le cerveau, siège de l’esprit et
de la mémoire, moteur des comportements, est vu dorénavant comme un ordinateur. Certes, il
n’est pas fabriqué de composants électroniques à proprement parlé, mais l’ordinateur a beaucoup
évolué lui-même en passant des diodes aux microprocesseurs. Avec ses deux cents milliards de
neurones1, le cerveau humain capte l’information et l’interprète (perception), code l’information
venue de l’extérieur et fait de la synthèse d’objets mentaux (mots et images), stocke des
informations (apprentissage, mémoire) pour profiter des expériences passées et les recombine
pour apporter des solutions nouvelles (intelligence). Ces grandes fonctions mentales sont
regroupées sous le terme de « cognition » ou « processus cognitifs » du latin cognitio :
connaissance ; action d’apprendre2. Ces termes ont été réintroduits par l’américain Edward
Chace Tolman, pour désigner les mécanismes de représentations mentales, plan, intention, etc.,
1Le cerveau proprement dit contient cent milliards de neurones mais le cervelet en contient lui aussi cent milliards
2Gaffiot, Dictionnaire abrégé latin-français, Hachette, 1936