La Lettre du Rhumatologue - n° 298 - janvier 2004
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MALADIES SYSTÉMIQUES
LE LUPUS
Les autoanticorps du lupus apparaissent avant
les signes cliniques. Le premier signe clinique
est souvent une polyarthrite
Une des grandes nouveautés de l’ACR 2002 avait été la
démonstration de l’apparition fréquente des anticorps anti-
CCP ou des facteurs rhumatoïdes avant les premiers signes
cliniques de polyarthrite rhumatoïde (dans environ 50 % des
cas). Cette année, McClain et al. (McClain, 1510) ont
Maladies systémiques
Connective tissue diseases
X. Mariette
Dans plus de 80 % des cas, les autoanticorps
antinucléaires apparaissent avant le premier
signe clinique de lupus. Dans 40 % des cas,
ce premier signe est une arthrite.
Le mycophénolate mofétil à la dose de 3 g
par jour par voie orale est plus efficace que
le cyclophosphamide dans la gloméruloné-
phrite lupique sévère, et provoque moins
d’effets indésirables infectieux.
L’hydroxychloroquine pourrait prévenir la
survenue de thromboses dans le lupus, même
en l’absence de syndrome des antiphospholi-
pides associés.
Chez les femmes lupiques ménopausées
dont la maladie est quiescente ou peu active,
le traitement hormonal substitutif n’aug-
mente pas le risque de poussées sévères du
lupus. En revanche, il augmente légèrement
la possibilité de voir apparaître une poussée
modérée.
La première étude contrôlée randomisée ver-
sus placebo des anti-TNF dans le syndrome
de Gougerot-Sjögren ne démontre pas d’effi-
cacité de l’infliximab.
Une méta-analyse des cinq essais contrôlés
ayant évalué l’efficacité des agonistes choli-
nergiques (la pilocarpine et la céviméline)
dans le syndrome de Gougerot-Sjögren
confirme l’efficacité de ces drogues dans le
traitement du syndrome sec buccal.
La prévalence de la sclérodermie peut être
estimée à 160 par million d’habitants adultes
en France.
Points forts
Le NT-pro-BNP sérique pourrait être un nou-
veau marqueur de l’hypertension artérielle pul-
monaire survenant au cours de la sclérodermie.
La place du méthotrexate dans le traitement
des vascularites augmente : il est aussi effi-
cace que l’azathioprine dans le traitement
d’entretien des maladies de Wegener
sévères, et aussi efficace que le cyclophos-
phamide dans le traitement d’attaque des
maladies de Wegener peu graves.
L’importance de BLyS (BAFF) dans les mala-
dies auto-immunes où les lymphocytes B
jouent un rôle se confirme. Dans le lupus, le
taux de BLyS est corrélé à la présence d’anti-
corps anti-ADN double brin et, surtout, il est
le meilleur marqueur prédictif de l’activité de
la maladie. Le taux de BLyS sérique est égale-
ment élevé dans la maladie de Wegener.
Les premiers essais dans le lupus chez l’hom-
me d’un anticorps monoclonal humanisé anti-
BLyS démontrent une excellente tolérance et,
pour les patients traités à plus forte dose,
une diminution des lymphocytes B circulants
et du taux d’anticorps anti-ADN double brin.
.../...
.../...
démontré que les autoanticorps du lupus sont présents avant
les premiers signes cliniques de la maladie dans plus de 80 %
des cas. Pour cela, ils ont effectué un suivi clinique et bio-
logique de 5 millions de militaires américains. Parmi ceux-
ci, 130 ont développé un lupus selon les critères de l’ACR
et ont été suivis en moyenne 5 ans. Le premier signe clinique
de la maladie lupique précédait le diagnostic selon les cri-
tères de l’ACR de 2 ans en moyenne. Ce premier signe cli-
nique était une arthrite dans 40 % des cas. Les anticorps anti-
nucléaires (AAN) étaient présents avant le premier signe
clinique de lupus dans 82 % des cas. La fréquence de chaque
sous-type d’anticorps antinucléaires détectés avant le dia-
gnostic ou avant le premier signe clinique de la maladie
parmi les malades chez qui cet anticorps a été détecté dans
le suivi est indiquée dans les figures 1 A et B.
Deux types d’anticorps antinucléaires peuvent être distin-
gués selon leur cinétique d’apparition. Les premiers : AAN
détectés par immunofluorescence, anticorps anti-SS-A(Ro),
anticorps anti-SS-B (La) et anticorps anticardiolipine appa-
raissaient en moyenne 2,3 à 3 ans avant le premier signe cli-
nique. Les anticorps anti-ADN double brin et les anticorps
anti-Sm apparaissaient un peu plus tard, en moyenne 0,5 à
1,2 an avant le premier signe clinique.
Ces résultats ont été publiés dans le New England Journal
of Medicine du 16 octobre 2003.
Le mycophénolate mofétil (MMF) est plus efficace
que le cyclophosphamide (CYC) dans la néphropa-
thie lupique grave
Le traitement classique de la néphropathie lupique sévère
repose sur l’utilisation du cyclophosphamide (CYC), com-
portant un bolus intraveineux par mois pendant 6 mois, puis
un espacement des doses. Ce médicament, lorsqu’il est admi-
nistré de façon prolongée, expose aux risques de stérilité,
d’infections, de leucémie secondaire et de cancer de vessie.
Une grande étude multicentrique américaine (Ginzler, 1515,
1690) a inclus dans 19 centres 140 patients atteints de glo-
mérulonéphrite lupique de classe 3, 4 ou 5. Ces patients ont
été randomisés entre un traitement classique par CYC
600 mg/m
2
tous les mois pendant 4 semaines et un traite-
ment par mycophénolate mofétil (MMF) à une dose de 3 g/j
par voie orale. Cette dose de 3 g était atteinte progressive-
ment en 4 semaines. Le suivi a été de 24 semaines et le cri-
tère principal d’efficacité était l’obtention d’une rémission
complète définie par une créatininémie normale, une pro-
téinurie inférieure à 500 mg/j et l’absence d’hématurie. Le
pourcentage de rémissions complètes était augmenté sous
MMF : 14/71 (23 %) versus 4/69 (6 %) dans le groupe CYC
(p = 0,01). Le pourcentage de rémission partielle n’était pas
statistiquement différent dans les deux groupes (21/71
[30 %] dans le groupe MMF et 14/69 [24 %] dans le groupe
CYC) (figure 2).
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MALADIES SYSTÉMIQUES
5
Proportion de patients positifs
Années
- 5 - 4 - 3 - 2 - 1 0 1 2 3 4
0,0
1,0
0,8
0,6
0,4
0,2
Diagnostic
0,0
1,0
0,8
0,6
0,4
0,2
Années
- 5 - 4 - 3 - 2 - 1 0 1 2 3 4 5
Premier signe clinique de lupus
Figures 1 A et B.
: Fréquence de chaque type d’anticorps antinucléaires avant le dia-
gnostic de lupus parmi les malades qui ont développé cet anticorps dans
le suivi après le diagnostic.
: Fréquence de chaque type d’anticorps antinucléaires avant le premier
signe de lupus parmi les malades lupiques qui ont développé cet anticorps
dans le suivi après le diagnostic.
A
B
A
B
52
23
3030
6
24
0
10
20
30
40
50
60
RP + RC RC RP
% de répondeurs
p = 0,009
p = 0,005
MMF CYC
Figure 2. Pourcentage de réponses complètes (RC) et de réponses par-
tielles (RP) avec le MMF et le CYC dans la glomérulonéphrite lupique.
La Lettre du Rhumatologue - n° 298 - janvier 2004
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Les données de tolérance montraient que le taux d’infec-
tions sévères était plus élevé dans le groupe CYC (13/69)
que dans le groupe MMF (6/71), p = 0,03. Le principal effet
indésirable dans le groupe MMF était la survenue de diar-
rhée. Cependant, cet effet indésirable connu avec ce médi-
cament n’est survenu que dans 15 % des cas, ce qui est peu
fréquent, à une dose de 3 g/j, en comparaison avec les don-
nées de la littérature. La dose moyenne tolérée de MMF dans
cette étude a été de 2,7 g/j et 64 % des patients inclus dans
le bras MMF ont effectivement reçu la dose de 3 g/j. L’aug-
mentation progressive des doses explique sans doute la
bonne tolérance digestive du médicament malgré la forte
posologie utilisée.
Au total, ces données importantes nous confortent dans la
possibilité de traiter en première intention par le MMF les
atteintes rénales graves du lupus afin d’éviter ainsi les effets
indésirables du CYC. Toutefois, cette étude n’a été réalisée
que sur 24 semaines, et il sera très important d’avoir le suivi
à long terme pour adopter cette attitude.
L’hydroxychloroquine (HCQ) pourrait prévenir
les thromboses dans le lupus
Le groupe d’Alarcon a suivi pendant près de 3 ans une
cohorte de 384 malades lupiques ayant une durée d’évolu-
tion de la maladie depuis moins de 5 ans (Ho, 916). Il a été
observé dans le suivi 39 cas de thromboses veineuses ou
artérielles. Curieusement, la présence d’anticorps anticar-
diolipine, observée chez environ 35 % des patients, ne pré-
disposait pas à l’apparition d’une thrombose. Le seul fac-
teur favorisant un tel événement était l’absence de traitement
par HCQ (tableau I).
Ainsi, il se confirme que l’HCQ pourrait avoir un rôle pré-
ventif des thromboses dans le lupus en dehors de toute asso-
ciation avec le syndrome des antiphospholipides. Cet effet
préventif de l’HCQ avait déjà été suggéré dans le syndrome
des antiphospholipides. Une autre communication (Begh-
dadi, 328) a démontré, dans un modèle animal de syndrome
des antiphospholipides où les animaux étaient immunisés
avec de la bêta-2 GP1, que le traitement par HCQ réduisait
le titre des anticorps anti-bêta-2 GP1 apparaissant après
immunisation.
Le mécanisme d’action de l’héparine dans le syn-
drome des antiphospholipides pourrait passer par
une inhibition du complément
Dans un modèle animal où une injection d’anticorps anti-
cardiolipine chez la souris pendant la grossesse entraîne des
avortements spontanés, Girardi et al. (324) ont démontré
que l’effet protecteur de l’héparine sur ces avortements à
répétition s’exerçait par un effet anticomplément. En effet,
les auteurs ont démontré l’inhibition de l’activation du com-
plément par l’héparine et l’absence d’efficacité d’un autre
anticoagulant n’ayant pas d’activité anticomplément : l’hi-
rudine. De plus, Pierangeli et al. (325) ont observé que,
chez des souris déficitaires en complément, il était impos-
sible d’entraîner des thrombus vasculaires en injectant des
anticorps anticardiolipine, contrairement à ce qui était
observé chez les souris sauvages.
Le traitement hormonal substitutif (TSH) peut-il
être prescrit en cas de lupus ?
Il est bien connu qu’une augmentation des estrogènes peut
aggraver l’évolution du lupus, en particulier le traitement
contraceptif estroprogestatif et la grossesse. Cependant, il
est possible que le traitement hormonal substitutif (THS)
après la ménopause, qui ne vise qu’à rétablir la concentra-
tion normale d’estrogène, ne soit pas délétère dans le lupus.
C’est ce que laissait déjà évoquer une première étude contrô-
lée mexicaine rapportée à l’ACR 2002, mais qui n’avait
inclus qu’un nombre limité de femmes.
Les résultats de l’étude SELENA, qui a randomisé
351 femmes lupiques d’âge moyen 50 ans ayant un lupus
inactif (72 %) ou stable (18 %) entre un traitement par estro-
gène oral 0,625 mg/j plus médroxyprogestérone 5 mg/j de
J1 à J12 de chaque mois et un placebo, étaient très attendus
(Buyon, LB10). Le suivi de l’étude a été en moyenne de
12 mois. Les auteurs ont étudié la survenue de poussées dans
les deux groupes. Une poussée modérée était définie par une
augmentation de l’indice d’activité SLEDAI supérieur à 3
ou par toute augmentation du traitement corticoïde si celui-
ci était donné à une dose inférieure à 0,5 mg/kg. Une pous-
sée sévère était définie soit par une augmentation du SLE-
DAI de plus de 12 points, soit par un doublement de la
corticothérapie, soit par la nécessité d’une corticothérapie
supérieure à 0,5 mg/kg.
Le nombre de nouvelles poussées a été faible dans les deux
groupes, mais il était très discrètement supérieur dans le
MALADIES SYSTÉMIQUES
Analyse Analyse
univariée multivariée
Thrombose Pas
(n = 36) de thrombose p p
(n = 348)
Âge 37,1 ± 13,3 36,4 ± 12,8 0,052 NS
Anti-CL (%) 37,2 34,4 0,742 NS
Durée de la maladie (ans)
13,2 ± 13,1 18,2 ± 18,3 0,063 NS
Corticostéroïdes (%) 26,7 13,3 0,109 NS
HCQ (%) 28,6 54,1 0,024 0,0202
Tableau I. Effet protecteur de l’apparition de thromboses de l’HCQ
dans un suivi de cohorte de 384 malades lupiques.
La Lettre du Rhumatologue - n° 298 - janvier 2004
48
groupe THS par rapport au groupe placebo : 1,20 versus
0,89, RR =1,35 [IC 1,09-1,67], p = 0,007 (tableau II). En
fait, cette discrète augmentation des poussées était due à une
augmentation des poussées modérées, le nombre de nou-
velles poussées sévères n’étant pas statistiquement différent
dans les deux groupes (0,08 dans le groupe THS et 0,05 dans
le groupe placebo, p = 0,21).
LE SYNDROME DE GOUGEROT-SJÖGREN
(SGS)
Les résultats négatifs de l’étude TRIPSS
À la suite des résultats positifs d’une étude ouverte publiée
en 2001 concernant 16 malades atteints de SGS traités par
infliximab, beaucoup d’espoir avait été mis dans la possibi-
lité d’une amélioration des signes cliniques de cette mala-
die induite par les anti-TNF. Mariette et al. (589) ont rap-
porté les résultats de la première étude contrôlée, randomisée
contre placebo, de l’infliximab dans le SGS primitif. Cette
étude a inclus 103 patients ayant un SGS défini selon les cri-
tères du groupe de consensus européano-américain et ayant
deux des trois échelles visuelles analogiques évaluant la
sécheresse, la douleur et la fatigue supérieures à 50/100 mm.
Les malades ont été traités par infliximab 5 mg/kg ou par
placebo à S0, S2 et S6. Le critère principal d’activité était
une diminution d’au moins 30 % de deux des trois échelles
visuelles analogiques à S10. Compte tenu du fait qu’il
n’existe aucun critère d’activité et aucun critère de rémis-
sion dans cette maladie, les auteurs ont privilégié une
approche pragmatique en choisissant ces critères d’inclu-
sion et d’efficacité fondés sur ce qui est ressenti par le patient.
Cependant, les critères secondaires d’activité étaient beau-
coup plus objectifs : le test de Schirmer, le flux salivaire,
l’histologie salivaire, le nombre d’articulations gonflées et
douloureuses, les paramètres biologiques de l’inflammation
et de l’immunité.
Malheureusement, le pourcentage de patients répondeurs sur
le critère principal était identique dans le groupe placebo
(26,5 %) et dans le groupe infliximab (27,8 %, p = 0,89)
(figure 3). Par ailleurs, il n’existait aucune différence entre
les deux groupes concernant l’évolution des différents cri-
tères secondaires d’efficacité.
Le seul traitement de la sécheresse du SGS reste
donc les agonistes cholinergiques
Deux médicaments agonistes cholinergiques ont fait la
preuve de leur efficacité sur la sécheresse buccale du SGS :
la pilocarpine (Salagen
®
), qui vient d’obtenir une autorisa-
tion de mise sur le marché en France et qui sera sans doute
disponible en 2004, et la céviméline, disponible aux États-
Unis mais pas en Europe. Sheyn et al. (1469) ont présenté
une méta-analyse des trois études randomisées concernant
la céviméline et des deux études concernant la pilocarpine.
Cette méta-analyse confirme l’efficacité du traitement par
les agonistes cholinergiques sur la sécheresse buccale dans
le SGS primitif. L’odds-ratio total en faveur de l’efficacité
était de 2,5 (IC : 1,8-3,5). Cette méta-analyse permet de
conclure que globalement, compte tenu des malades qui ne
répondent pas ou qui ne tolèrent pas ce type de médicament,
il faut traiter 4 malades pendant 3 mois pour obtenir une
amélioration du syndrome sec buccal chez l’un d’entre eux.
La bêta-2-microglobuline : un nouveau marqueur
d’activité du SGS
L’étude TRIPSS a démontré la nécessité de disposer de mar-
queurs d’activité de la maladie qui puissent évoluer avec
d’éventuels traitements efficaces. Gottenberg et al. (1462)
ont étudié de façon transversale l’intérêt du dosage sérique
de la bêta-2-microglobuline. La bêta-2-microglobuline est
augmentée dans différents états d’activation lymphocytaire
(myélome, lymphome, maladie VIH...). Les auteurs ont
confirmé qu’il existait une augmentation de la bêta-2-micro-
globuline chez un tiers des patients atteints de SGS primi-
MALADIES SYSTÉMIQUES
THS Placebo Risque relatif p
Nombre
de nouvelles poussées 1,20 0,89 1,35 (1,09-1,67) 0,007
(patients-années)
Nombre
de poussées sévères 0,08 0,05 1,75 (0,73-4,22) 0,21
(patients-années)
Nombre
de poussées modérées 1,09 0,82 1,34 (1,07-1,68)
0,01
(patients-années)
Tableau II. Discrète augmentation du nombre de poussées modérées
sous THS donné en post-ménopausique dans le lupus.
0
5
10
15
20
25
30
INF Placebo
p = 0,89
% de patients répondeurs
27,8 % 26,5 %
Figure 3. Absence de différence significative entre l’infliximab et le pla-
cebo sur le pourcentage de répondeurs dans l’étude TRIPSS.
La Lettre du Rhumatologue - n° 298 - janvier 2004
49
tif, et que cette augmentation était corrélée à de nombreux
marqueurs biologiques (taux des immunoglobulines, pré-
sence d’autoanticorps) ou cliniques (signes extraglandu-
laires) de la maladie.
LA SCLÉRODERMIE
Prévalence
Tout le monde sait que la sclérodermie est une maladie rare,
mais sa prévalence n’avait jamais été déterminée de façon
précise à l’échelle d’une large population. Le Guern et al.
(963) ont déterminé l’incidence de la sclérodermie dans le
département de Seine-Saint-Denis, qui compte 1 100 000 adultes.
Ils ont utilisé une technique dite de capture et de recapture
visant à contrôler les cas recueillis en recoupant quatre sources
différentes d’information. Grâce à cette technique, on peut
estimer que le recueil a été à peu près exhaustif sans doublon.
La prévalence de la sclérodermie est de 160 par million
d’adultes dans le département de Seine-Saint-Denis, 118 par
million d’adultes pour les formes limitées, et 42 par million
d’adultes pour les formes diffuses. Si on extrapole ces chiffres
sur la France, qui compte environ 45 millions d’adultes, le
nombre total de sclérodermies dans notre pays serait d’envi-
ron 7 500. Il est intéressant de noter que la prévalence en
Seine-Saint-Denis était plus forte chez les sujets d’origine
non européenne, qui représentaient 31 % des sclérodermies,
alors qu’ils ne représentaient que 26 % des habitants adultes.
Un nouveau marqueur sérique de l’ hypertension
artérielle pulmonaire
Une des complications graves de la sclérodermie, qu’elle soit
diffuse ou limitée, est l’apparition d’une hypertension artérielle
pulmonaire (HTAP). Il existe maintenant un traitement efficace
de l’HTAP : le bosentan, médicament qui a été présenté dans
cette indication à l’ACR 2002. Il est donc très important de
diagnostiquer l’HTAP de façon précoce. On ne dispose jusqu’à
maintenant d’aucun marqueur sérique pour cet objectif. Alla-
nore et al. (1139) ont étudié le rôle d’un peptide de clivage du
pro-BNP, le NT-pro-BNP. Ce produit de clivage du pro-BNP
est différent du BNP, ce dernier étant un marqueur très spéci-
fique de l’insuffisance cardiaque. Les auteurs ont mesuré le taux
sérique du NT-pro-BNP dans le sérum de 40 patients ayant une
sclérodermie, dont 10 avaient une HTAP associée. L’HTAPétait
définie uniquement sur des critères échographiques : pression
artérielle pulmonaire systolique supérieure à 40 mmHg. Ce
point est important, car la spécificité de la définition de l’HTAP
par cette valeur échographique n’est pas excellente, le gold stan-
dard restant la réalisation d’un cathétérisme pour définir cette
complication. Quoi qu’il en soit, 13 malades sur 40 avaient une
augmentation du NT-pro-BNP, 4 sur 30 avec une pression arté-
rielle pulmonaire normale en échographie et 9 sur 10 avec une
pression artérielle pulmonaire supérieure à 40 mmHg en écho-
graphie (p = 0,008).
Ce marqueur paraît donc intéressant pour dépister l’HTAP.
Il pourrait également permettre d’en suivre l’évolution. En
effet, après un traitement de trois jours par inhibiteur cal-
cique, le nombre de patients ayant une augmentation du NT-
pro-BNPdiminuait, passant de 13/40 à 3/40. Les 10 patients
ayant une HTAP ont été traités au long cours par inhibiteur
calcique. Après un délai de 6 à 9 mois, le taux de NT-pro-
BNP, qui était anormal chez 9 patients sur 10 au départ,
n’était retrouvé élevé que chez 4 sur 10 (tableau III).
Le bosentan, traitement de l’HTAP, peut également
diminuer la récidive des ulcères digitaux
dans la sclérodermie
Le bosentan, inhibiteur du récepteur de l’endothéline, a mon-
tré son efficacité dans l’HTAP. Une étude contrôlée rando-
misée versus placebo incluant 122 patients sclérodermiques
ayant des ulcères cutanés a évalué l’intérêt du bosentan dans
la prévention des récidives de ces ulcères (Black, 1137).
Soixante-dix-neuf patients ont été traités par bosentan à la
dose de 125 mg deux fois par jour et 43 par placebo pendant
16 semaines. Le nombre d’ulcères digitaux a augmenté de
0,4 ± 0,4 dans le groupe placebo et diminué de 0,5 ± 0,2 dans
le groupe bosentan (p = 0,03). Cette amélioration, bien que
statistiquement significative, est modeste pour un médica-
ment aussi onéreux, et n’est retrouvée que dans le sous-groupe
des patients ayant 4 ulcères et plus. Les auteurs retrouvaient
également une amélioration statistiquement significative sous
bosentan d’un indice fonctionnel de la main.
LES VASCULARITES
La place du méthotrexate augmente
dans le traitement des vascularites
L’objectif du traitement des vascularites est toujours de
réduire la toxicité à la fois du traitement d’entretien et du
traitement d’attaque.
MALADIES SYSTÉMIQUES
T0 (n = 40) T1 (n = 40) T1 versus T0
Taux de NT-pro-BNP (pg/ml) 146 ± 107 82 ± 65 p < 0,0001
Proportion de patients avec de NT-pro-BNP 13/40 3/40 p = 0,004
Tableau III.
Proportion de patients avec augmentation du NT-pro-BNP dans la
sclérodermie et dans la sclérodermie compliquée d’HTAP. Dans ce dernier groupe,
évolution du taux de NT-pro-BNP sous inhibiteurs calciques à 3 jours (T1) et à 6-
9 mois (T2).
Effet aigu des inhibiteurs calciques à 3 jours (T1)
NT-pro-BNP (pg/ml) T0 T1 T0/T1 T2 T2/T0
Sclérodermie avec HTAP (n = 10) 267 ± 125 118 ± 90 p = 0,005 178 ± 92 p = 0,06
Proportion de patients avec de NT-pro-BNP 9/10 2/10 2/10 4/10 p = 0,06
Effet à long terme des inhibiteurs calciques à 6-9 mois (T2)
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