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M
A L A D I E S
S Y S T É M I Q U E S
Maladies systémiques
Connective tissue diseases
● X. Mariette
P o i n t s
f o r t s
✔ Dans plus de 80 % des cas, les autoanticorps
antinucléaires apparaissent avant le premier
signe clinique de lupus. Dans 40 % des cas,
ce premier signe est une arthrite.
✔ Le mycophénolate mofétil à la dose de 3 g
par jour par voie orale est plus efficace que
le cyclophosphamide dans la glomérulonéphrite lupique sévère, et provoque moins
d’effets indésirables infectieux.
✔ L’hydroxychloroquine pourrait prévenir la
survenue de thromboses dans le lupus, même
en l’absence de syndrome des antiphospholipides associés.
✔ Chez les femmes lupiques ménopausées
dont la maladie est quiescente ou peu active,
le traitement hormonal substitutif n’augmente pas le risque de poussées sévères du
lupus. En revanche, il augmente légèrement
la possibilité de voir apparaître une poussée
modérée.
✔ La première étude contrôlée randomisée ver-
.../...
✔ Le NT-pro-BNP sérique pourrait être un nou-
veau marqueur de l’hypertension artérielle pulmonaire survenant au cours de la sclérodermie.
✔ La place du méthotrexate dans le traitement
des vascularites augmente : il est aussi efficace que l’azathioprine dans le traitement
d’entretien des maladies de Wegener
sévères, et aussi efficace que le cyclophosphamide dans le traitement d’attaque des
maladies de Wegener peu graves.
✔ L’importance de BLyS (BAFF) dans les mala-
dies auto-immunes où les lymphocytes B
jouent un rôle se confirme. Dans le lupus, le
taux de BLyS est corrélé à la présence d’anticorps anti-ADN double brin et, surtout, il est
le meilleur marqueur prédictif de l’activité de
la maladie. Le taux de BLyS sérique est également élevé dans la maladie de Wegener.
✔ Les premiers essais dans le lupus chez l’hom-
me d’un anticorps monoclonal humanisé antiBLyS démontrent une excellente tolérance et,
pour les patients traités à plus forte dose,
une diminution des lymphocytes B circulants
et du taux d’anticorps anti-ADN double brin.
sus placebo des anti-TNF dans le syndrome
de Gougerot-Sjögren ne démontre pas d’efficacité de l’infliximab.
✔ Une méta-analyse des cinq essais contrôlés
ayant évalué l’efficacité des agonistes cholinergiques (la pilocarpine et la céviméline)
dans le syndrome de Gougerot-Sjögren
confirme l’efficacité de ces drogues dans le
traitement du syndrome sec buccal.
✔ La prévalence de la sclérodermie peut être
estimée à 160 par million d’habitants adultes
en France.
.../...
La Lettre du Rhumatologue - n° 298 - janvier 2004
LE LUPUS
Les autoanticorps du lupus apparaissent avant
les signes cliniques. Le premier signe clinique
est souvent une polyarthrite
Une des grandes nouveautés de l’ACR 2002 avait été la
démonstration de l’apparition fréquente des anticorps antiCCP ou des facteurs rhumatoïdes avant les premiers signes
cliniques de polyarthrite rhumatoïde (dans environ 50 % des
cas). Cette année, McClain et al. (McClain, 1510) ont
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démontré que les autoanticorps du lupus sont présents avant
les premiers signes cliniques de la maladie dans plus de 80 %
des cas. Pour cela, ils ont effectué un suivi clinique et biologique de 5 millions de militaires américains. Parmi ceuxci, 130 ont développé un lupus selon les critères de l’ACR
et ont été suivis en moyenne 5 ans. Le premier signe clinique
de la maladie lupique précédait le diagnostic selon les critères de l’ACR de 2 ans en moyenne. Ce premier signe clinique était une arthrite dans 40 % des cas. Les anticorps antinucléaires (AAN) étaient présents avant le premier signe
clinique de lupus dans 82 % des cas. La fréquence de chaque
sous-type d’anticorps antinucléaires détectés avant le diagnostic ou avant le premier signe clinique de la maladie
parmi les malades chez qui cet anticorps a été détecté dans
le suivi est indiquée dans les figures 1 A et B.
Deux types d’anticorps antinucléaires peuvent être distingués selon leur cinétique d’apparition. Les premiers : AAN
détectés par immunofluorescence, anticorps anti-SS-A (Ro),
Diagnostic
Proportion de patients positifs
A
1,0
0,8
0,6
0,4
0,2
0,0
-5
-4
-3
-2
-1 0
1
Années
2
3
4
5
Premier signe clinique de lupus
B
1,0
anticorps anti-SS-B (La) et anticorps anticardiolipine apparaissaient en moyenne 2,3 à 3 ans avant le premier signe clinique. Les anticorps anti-ADN double brin et les anticorps
anti-Sm apparaissaient un peu plus tard, en moyenne 0,5 à
1,2 an avant le premier signe clinique.
Ces résultats ont été publiés dans le New England Journal
of Medicine du 16 octobre 2003.
Le mycophénolate mofétil (MMF) est plus efficace
que le cyclophosphamide (CYC) dans la néphropathie lupique grave
Le traitement classique de la néphropathie lupique sévère
repose sur l’utilisation du cyclophosphamide (CYC), comportant un bolus intraveineux par mois pendant 6 mois, puis
un espacement des doses. Ce médicament, lorsqu’il est administré de façon prolongée, expose aux risques de stérilité,
d’infections, de leucémie secondaire et de cancer de vessie.
Une grande étude multicentrique américaine (Ginzler, 1515,
1690) a inclus dans 19 centres 140 patients atteints de glomérulonéphrite lupique de classe 3, 4 ou 5. Ces patients ont
été randomisés entre un traitement classique par CYC
600 mg/m2 tous les mois pendant 4 semaines et un traitement par mycophénolate mofétil (MMF) à une dose de 3 g/j
par voie orale. Cette dose de 3 g était atteinte progressivement en 4 semaines. Le suivi a été de 24 semaines et le critère principal d’efficacité était l’obtention d’une rémission
complète définie par une créatininémie normale, une protéinurie inférieure à 500 mg/j et l’absence d’hématurie. Le
pourcentage de rémissions complètes était augmenté sous
MMF : 14/71 (23 %) versus 4/69 (6 %) dans le groupe CYC
(p = 0,01). Le pourcentage de rémission partielle n’était pas
statistiquement différent dans les deux groupes (21/71
[30 %] dans le groupe MMF et 14/69 [24 %] dans le groupe
CYC) (figure 2).
0,8
0,6
60
0,4
50
-4
-3
-2
-1 0
1
Années
2
3
4
5
Figures 1 A et B.
A : Fréquence de chaque type d’anticorps antinucléaires avant le diagnostic de lupus parmi les malades qui ont développé cet anticorps dans
le suivi après le diagnostic.
B : Fréquence de chaque type d’anticorps antinucléaires avant le premier
signe de lupus parmi les malades lupiques qui ont développé cet anticorps
dans le suivi après le diagnostic.
46
% de répondeurs
52
0,2
0,0
-5
p = 0,009
40
30
CYC
MMF
30
p = 0,005
30
24
23
20
10
0
6
RP + RC
RC
RP
Figure 2. Pourcentage de réponses complètes (RC) et de réponses partielles (RP) avec le MMF et le CYC dans la glomérulonéphrite lupique.
La Lettre du Rhumatologue - n° 298 - janvier 2004
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Les données de tolérance montraient que le taux d’infections sévères était plus élevé dans le groupe CYC (13/69)
que dans le groupe MMF (6/71), p = 0,03. Le principal effet
indésirable dans le groupe MMF était la survenue de diarrhée. Cependant, cet effet indésirable connu avec ce médicament n’est survenu que dans 15 % des cas, ce qui est peu
fréquent, à une dose de 3 g/j, en comparaison avec les données de la littérature. La dose moyenne tolérée de MMF dans
cette étude a été de 2,7 g/j et 64 % des patients inclus dans
le bras MMF ont effectivement reçu la dose de 3 g/j. L’augmentation progressive des doses explique sans doute la
bonne tolérance digestive du médicament malgré la forte
posologie utilisée.
Au total, ces données importantes nous confortent dans la
possibilité de traiter en première intention par le MMF les
atteintes rénales graves du lupus afin d’éviter ainsi les effets
indésirables du CYC. Toutefois, cette étude n’a été réalisée
que sur 24 semaines, et il sera très important d’avoir le suivi
à long terme pour adopter cette attitude.
L’hydroxychloroquine (HCQ) pourrait prévenir
les thromboses dans le lupus
Le groupe d’Alarcon a suivi pendant près de 3 ans une
cohorte de 384 malades lupiques ayant une durée d’évolution de la maladie depuis moins de 5 ans (Ho, 916). Il a été
observé dans le suivi 39 cas de thromboses veineuses ou
artérielles. Curieusement, la présence d’anticorps anticardiolipine, observée chez environ 35 % des patients, ne prédisposait pas à l’apparition d’une thrombose. Le seul facteur favorisant un tel événement était l’absence de traitement
par HCQ (tableau I).
Tableau I. Effet protecteur de l’apparition de thromboses de l’HCQ
dans un suivi de cohorte de 384 malades lupiques.
Analyse
univariée
Analyse
multivariée
Thrombose
Pas
(n = 36) de thrombose
(n = 348)
Âge
Anti-CL (%)
p
p
37,1 ± 13,3
36,4 ± 12,8
0,052
NS
37,2
34,4
0,742
NS
18,2 ± 18,3
0,063
NS
Durée de la maladie (ans) 13,2 ± 13,1
Corticostéroïdes (%)
26,7
13,3
0,109
NS
HCQ (%)
28,6
54,1
0,024
0,0202
Ainsi, il se confirme que l’HCQ pourrait avoir un rôle préventif des thromboses dans le lupus en dehors de toute association avec le syndrome des antiphospholipides. Cet effet
préventif de l’HCQ avait déjà été suggéré dans le syndrome
des antiphospholipides. Une autre communication (BeghLa Lettre du Rhumatologue - n° 298 - janvier 2004
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dadi, 328) a démontré, dans un modèle animal de syndrome
des antiphospholipides où les animaux étaient immunisés
avec de la bêta-2 GP1, que le traitement par HCQ réduisait
le titre des anticorps anti-bêta-2 GP1 apparaissant après
immunisation.
Le mécanisme d’action de l’héparine dans le syndrome des antiphospholipides pourrait passer par
une inhibition du complément
Dans un modèle animal où une injection d’anticorps anticardiolipine chez la souris pendant la grossesse entraîne des
avortements spontanés, Girardi et al. (324) ont démontré
que l’effet protecteur de l’héparine sur ces avortements à
répétition s’exerçait par un effet anticomplément. En effet,
les auteurs ont démontré l’inhibition de l’activation du complément par l’héparine et l’absence d’efficacité d’un autre
anticoagulant n’ayant pas d’activité anticomplément : l’hirudine. De plus, Pierangeli et al. (325) ont observé que,
chez des souris déficitaires en complément, il était impossible d’entraîner des thrombus vasculaires en injectant des
anticorps anticardiolipine, contrairement à ce qui était
observé chez les souris sauvages.
Le traitement hormonal substitutif (TSH) peut-il
être prescrit en cas de lupus ?
Il est bien connu qu’une augmentation des estrogènes peut
aggraver l’évolution du lupus, en particulier le traitement
contraceptif estroprogestatif et la grossesse. Cependant, il
est possible que le traitement hormonal substitutif (THS)
après la ménopause, qui ne vise qu’à rétablir la concentration normale d’estrogène, ne soit pas délétère dans le lupus.
C’est ce que laissait déjà évoquer une première étude contrôlée mexicaine rapportée à l’ACR 2002, mais qui n’avait
inclus qu’un nombre limité de femmes.
Les résultats de l’étude SELENA, qui a randomisé
351 femmes lupiques d’âge moyen 50 ans ayant un lupus
inactif (72 %) ou stable (18 %) entre un traitement par estrogène oral 0,625 mg/j plus médroxyprogestérone 5 mg/j de
J1 à J12 de chaque mois et un placebo, étaient très attendus
(Buyon, LB10). Le suivi de l’étude a été en moyenne de
12 mois. Les auteurs ont étudié la survenue de poussées dans
les deux groupes. Une poussée modérée était définie par une
augmentation de l’indice d’activité SLEDAI supérieur à 3
ou par toute augmentation du traitement corticoïde si celuici était donné à une dose inférieure à 0,5 mg/kg. Une poussée sévère était définie soit par une augmentation du SLEDAI de plus de 12 points, soit par un doublement de la
corticothérapie, soit par la nécessité d’une corticothérapie
supérieure à 0,5 mg/kg.
Le nombre de nouvelles poussées a été faible dans les deux
groupes, mais il était très discrètement supérieur dans le
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groupe THS par rapport au groupe placebo : 1,20 versus
0,89, RR =1,35 [IC 1,09-1,67], p = 0,007 (tableau II). En
fait, cette discrète augmentation des poussées était due à une
augmentation des poussées modérées, le nombre de nouvelles poussées sévères n’étant pas statistiquement différent
dans les deux groupes (0,08 dans le groupe THS et 0,05 dans
le groupe placebo, p = 0,21).
Tableau II. Discrète augmentation du nombre de poussées modérées
sous THS donné en post-ménopausique dans le lupus.
THS
Placebo
Nombre
de nouvelles poussées
(patients-années)
1,20
0,89
1,35 (1,09-1,67) 0,007
Nombre
de poussées sévères
(patients-années)
0,08
0,05
1,75 (0,73-4,22)
Nombre
de poussées modérées
(patients-années)
1,09
0,82
Risque relatif
1,34 (1,07-1,68)
p
0,21
0,01
LE SYNDROME DE GOUGEROT-SJÖGREN
(SGS)
Les résultats négatifs de l’étude TRIPSS
À la suite des résultats positifs d’une étude ouverte publiée
en 2001 concernant 16 malades atteints de SGS traités par
infliximab, beaucoup d’espoir avait été mis dans la possibilité d’une amélioration des signes cliniques de cette maladie induite par les anti-TNF. Mariette et al. (589) ont rapporté les résultats de la première étude contrôlée, randomisée
contre placebo, de l’infliximab dans le SGS primitif. Cette
étude a inclus 103 patients ayant un SGS défini selon les critères du groupe de consensus européano-américain et ayant
deux des trois échelles visuelles analogiques évaluant la
sécheresse, la douleur et la fatigue supérieures à 50/100 mm.
Les malades ont été traités par infliximab 5 mg/kg ou par
placebo à S0, S2 et S6. Le critère principal d’activité était
une diminution d’au moins 30 % de deux des trois échelles
visuelles analogiques à S10. Compte tenu du fait qu’il
n’existe aucun critère d’activité et aucun critère de rémission dans cette maladie, les auteurs ont privilégié une
approche pragmatique en choisissant ces critères d’inclusion et d’efficacité fondés sur ce qui est ressenti par le patient.
Cependant, les critères secondaires d’activité étaient beaucoup plus objectifs : le test de Schirmer, le flux salivaire,
l’histologie salivaire, le nombre d’articulations gonflées et
douloureuses, les paramètres biologiques de l’inflammation
et de l’immunité.
Malheureusement, le pourcentage de patients répondeurs sur
le critère principal était identique dans le groupe placebo
(26,5 %) et dans le groupe infliximab (27,8 %, p = 0,89)
48
(figure 3). Par ailleurs, il n’existait aucune différence entre
les deux groupes concernant l’évolution des différents critères secondaires d’efficacité.
p = 0,89
30
% de patients répondeurs
M
25
27,8 %
26,5 %
20
15
10
5
0
INF
Placebo
Figure 3. Absence de différence significative entre l’infliximab et le placebo sur le pourcentage de répondeurs dans l’étude TRIPSS.
Le seul traitement de la sécheresse du SGS reste
donc les agonistes cholinergiques
Deux médicaments agonistes cholinergiques ont fait la
preuve de leur efficacité sur la sécheresse buccale du SGS :
la pilocarpine (Salagen®), qui vient d’obtenir une autorisation de mise sur le marché en France et qui sera sans doute
disponible en 2004, et la céviméline, disponible aux ÉtatsUnis mais pas en Europe. Sheyn et al. (1469) ont présenté
une méta-analyse des trois études randomisées concernant
la céviméline et des deux études concernant la pilocarpine.
Cette méta-analyse confirme l’efficacité du traitement par
les agonistes cholinergiques sur la sécheresse buccale dans
le SGS primitif. L’odds-ratio total en faveur de l’efficacité
était de 2,5 (IC : 1,8-3,5). Cette méta-analyse permet de
conclure que globalement, compte tenu des malades qui ne
répondent pas ou qui ne tolèrent pas ce type de médicament,
il faut traiter 4 malades pendant 3 mois pour obtenir une
amélioration du syndrome sec buccal chez l’un d’entre eux.
La bêta-2-microglobuline : un nouveau marqueur
d’activité du SGS
L’étude TRIPSS a démontré la nécessité de disposer de marqueurs d’activité de la maladie qui puissent évoluer avec
d’éventuels traitements efficaces. Gottenberg et al. (1462)
ont étudié de façon transversale l’intérêt du dosage sérique
de la bêta-2-microglobuline. La bêta-2-microglobuline est
augmentée dans différents états d’activation lymphocytaire
(myélome, lymphome, maladie VIH...). Les auteurs ont
confirmé qu’il existait une augmentation de la bêta-2-microglobuline chez un tiers des patients atteints de SGS primiLa Lettre du Rhumatologue - n° 298 - janvier 2004
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tif, et que cette augmentation était corrélée à de nombreux
marqueurs biologiques (taux des immunoglobulines, présence d’autoanticorps) ou cliniques (signes extraglandulaires) de la maladie.
LA SCLÉRODERMIE
Prévalence
Tout le monde sait que la sclérodermie est une maladie rare,
mais sa prévalence n’avait jamais été déterminée de façon
précise à l’échelle d’une large population. Le Guern et al.
(963) ont déterminé l’incidence de la sclérodermie dans le
département de Seine-Saint-Denis, qui compte 1 100 000 adultes.
Ils ont utilisé une technique dite de capture et de recapture
visant à contrôler les cas recueillis en recoupant quatre sources
différentes d’information. Grâce à cette technique, on peut
estimer que le recueil a été à peu près exhaustif sans doublon.
La prévalence de la sclérodermie est de 160 par million
d’adultes dans le département de Seine-Saint-Denis, 118 par
million d’adultes pour les formes limitées, et 42 par million
d’adultes pour les formes diffuses. Si on extrapole ces chiffres
sur la France, qui compte environ 45 millions d’adultes, le
nombre total de sclérodermies dans notre pays serait d’environ 7 500. Il est intéressant de noter que la prévalence en
Seine-Saint-Denis était plus forte chez les sujets d’origine
non européenne, qui représentaient 31 % des sclérodermies,
alors qu’ils ne représentaient que 26 % des habitants adultes.
Un nouveau marqueur sérique de l’ hypertension
artérielle pulmonaire
Une des complications graves de la sclérodermie, qu’elle soit
diffuse ou limitée, est l’apparition d’une hypertension artérielle
pulmonaire (HTAP). Il existe maintenant un traitement efficace
de l’HTAP : le bosentan, médicament qui a été présenté dans
cette indication à l’ACR 2002. Il est donc très important de
diagnostiquer l’HTAP de façon précoce. On ne dispose jusqu’à
maintenant d’aucun marqueur sérique pour cet objectif. Allanore et al. (1139) ont étudié le rôle d’un peptide de clivage du
pro-BNP, le NT-pro-BNP. Ce produit de clivage du pro-BNP
est différent du BNP, ce dernier étant un marqueur très spécifique de l’insuffisance cardiaque. Les auteurs ont mesuré le taux
sérique du NT-pro-BNP dans le sérum de 40 patients ayant une
sclérodermie, dont 10 avaient une HTAP associée. L’HTAP était
définie uniquement sur des critères échographiques : pression
artérielle pulmonaire systolique supérieure à 40 mmHg. Ce
point est important, car la spécificité de la définition de l’HTAP
par cette valeur échographique n’est pas excellente, le gold standard restant la réalisation d’un cathétérisme pour définir cette
complication. Quoi qu’il en soit, 13 malades sur 40 avaient une
augmentation du NT-pro-BNP, 4 sur 30 avec une pression artérielle pulmonaire normale en échographie et 9 sur 10 avec une
pression artérielle pulmonaire supérieure à 40 mmHg en échographie (p = 0,008).
La Lettre du Rhumatologue - n° 298 - janvier 2004
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Ce marqueur paraît donc intéressant pour dépister l’HTAP.
Il pourrait également permettre d’en suivre l’évolution. En
effet, après un traitement de trois jours par inhibiteur calcique, le nombre de patients ayant une augmentation du NTpro-BNP diminuait, passant de 13/40 à 3/40. Les 10 patients
ayant une HTAP ont été traités au long cours par inhibiteur
calcique. Après un délai de 6 à 9 mois, le taux de NT-proBNP, qui était anormal chez 9 patients sur 10 au départ,
n’était retrouvé élevé que chez 4 sur 10 (tableau III).
Tableau III. Proportion de patients avec augmentation du NT-pro-BNP dans la
sclérodermie et dans la sclérodermie compliquée d’HTAP. Dans ce dernier groupe,
évolution du taux de NT-pro-BNP sous inhibiteurs calciques à 3 jours (T1) et à 69 mois (T2).
Effet aigu des inhibiteurs calciques à 3 jours (T1)
T0 (n = 40)
Taux de NT-pro-BNP (pg/ml)
T1 (n = 40) T1 versus T0
146 ± 107
82 ± 65
p < 0,0001
13/40
3/40
p = 0,004
Proportion de patients avec ➚ de NT-pro-BNP
Effet à long terme des inhibiteurs calciques à 6-9 mois (T2)
NT-pro-BNP (pg/ml)
Sclérodermie avec HTAP (n = 10)
Proportion de patients avec ➚ de NT-pro-BNP
T0
T1
T0/T1
T2
T2/T0
267 ± 125 118 ± 90 p = 0,005 178 ± 92 p = 0,06
9/10
2/10
2/10
4/10
Le bosentan, traitement de l’HTAP, peut également
diminuer la récidive des ulcères digitaux
dans la sclérodermie
Le bosentan, inhibiteur du récepteur de l’endothéline, a montré son efficacité dans l’HTAP. Une étude contrôlée randomisée versus placebo incluant 122 patients sclérodermiques
ayant des ulcères cutanés a évalué l’intérêt du bosentan dans
la prévention des récidives de ces ulcères (Black, 1137).
Soixante-dix-neuf patients ont été traités par bosentan à la
dose de 125 mg deux fois par jour et 43 par placebo pendant
16 semaines. Le nombre d’ulcères digitaux a augmenté de
0,4 ± 0,4 dans le groupe placebo et diminué de 0,5 ± 0,2 dans
le groupe bosentan (p = 0,03). Cette amélioration, bien que
statistiquement significative, est modeste pour un médicament aussi onéreux, et n’est retrouvée que dans le sous-groupe
des patients ayant 4 ulcères et plus. Les auteurs retrouvaient
également une amélioration statistiquement significative sous
bosentan d’un indice fonctionnel de la main.
LES VASCULARITES
La place du méthotrexate augmente
dans le traitement des vascularites
L’objectif du traitement des vascularites est toujours de
réduire la toxicité à la fois du traitement d’entretien et du
traitement d’attaque.
49
p = 0,06
M
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AZA 2 mg/kg
Encore sous induction
(n = 60)
(n = 11)
Induction : CYC i.v.
RC
(n = 161)
(n = 121)
Échec
MTX 0,3 mg/kg
(n = 29)
(n = 61)
18 morts sur 29 (18 %)
Attaque : 10 cures de CYC en moyenne
Entretien : 12 mois
Figure 4. Schéma de traitement dans l’étude WEGENT.
Pagnoux et al. (1725), du Groupe français des vascularites, ont présenté les premiers résultats de l’étude
WEGENT, qui portait sur le meilleur traitement d’entretien des formes graves de maladie de Wegener et de vascularite à ANCA après obtention de la rémission par cyclophosphamide (CYC). Le schéma de l’étude est indiqué
figure 4.
Une rémission a pu être obtenue avec en moyenne 10 cures
intraveineuses de CYC chez 121 patients. Soixante d’entre
eux ont été randomisés dans le bras azathioprine (AZA) et
61 dans le bras méthotrexate (MTX). Ces malades avaient
dans la plupart des cas une forme grave de maladie de
Wegener avec un indice d’activité BIVAS élevé à 22 ± 7.
Après un suivi d’environ 16 mois, le taux de rechute était
identique dans le groupe AZA et dans le groupe MTX
(tableau IVA). En revanche, la tolérance du MTX pourrait
être un peu moins bonne que celle de l’AZA (tableau IVB).
À noter qu’un mort est à déplorer sous traitement d’entretien dans le bras MTX. Cependant, il semble que ce
patient ait transformé la dose hebdomadaire de MTX en
dose quotidienne...
Si le MTX a donc un intérêt dans le traitement d’entretien
des formes sévères de maladie de Wegener et de vascularite
à ANCA, il pourrait également en avoir un dans le traitement d’induction des formes peu sévères de ces mêmes
maladies. L’étude NORAM (De Groot, 1726) a comparé
chez 100 malades un traitement par CYC par voie orale à la
posologie de 2 mg/kg au MTX à la dose de 15 à 25 mg par
semaine par voie orale pendant 12 mois. Il faut noter que,
globalement, le CYC par voie orale est aussi efficace que le
CYC par voie i.v. dans le traitement d’attaque de la maladie
de Wegener, la forme orale entraînant plus de complications
secondaires infectieuses, mais la forme i.v. entraînant souvent plus de rechutes. Les équipes françaises préfèrent la
voie intraveineuse, en rapprochant les perfusions à trois
semaines. Les équipes américaines préfèrent encore souvent
la voie orale.
50
Tableau IV. Étude WEGENT : efficacité identique du MTX et de
l’AZA dans le traitement d’entretien du Wegener et effets indésirables
sévères.
A
Suivi, rechute et mort
AZA (n = 60)
MTX (n = 61)
p
Délai après
le diagnostic
(mois)
23,2 ± 14,4
24,4 ± 18,1
0,8
Délai après
la randomisation
(mois)
16,3 ± 13,6
15,8 ± 12,3
0,65
12 (20)
(11 WG/1MPA)
9 (14,7)
(9 WG)
0,35
0
1
–
Rechutes, n (%)
Morts, n (%)
B
Effets indésirables sévères
AZA (n = 6)
MTX (n = 10)
Hépatites
3
1
Pneumonie interstitielle
–
2
Toxicité gastro-intestinale
3
3
Leucopénie
–
2
Allergie
–
1
Autres effets indésirables
–
1
Les résultats intéressants de cette étude sont une équivalence
de pourcentage de rémission à 6 mois dans les deux bras
(supérieur à 90 %) (figure 5A). De plus, la tolérance du MTX
était meilleure que celle du CYC, avec un taux de leucopénie diminué (figure 5B). Les auteurs notaient cependant
après l’arrêt du traitement à 12 mois un taux de rechute très
élevé dans les deux bras, légèrement supérieur dans le bras
MTX (figure 5C). Cela n’est pas étonnant, car il est bien
connu que le traitement d’entretien de la granulomatose de
Wegener doit être prolongé pendant plusieurs années, le
risque de rechute étant très important dans cette maladie.
La Lettre du Rhumatologue - n° 298 - janvier 2004
M
A L A D I E S
Le traitement du syndrome de Churg et Strauss
avec au moins un facteur pronostique péjoratif :
12 perfusions de CYC supérieur à 6
Rémission
A
p = 0,39
% de patients en rémission
100
93,5
89,8
Le groupe de L. Guillevin avait déjà montré que le traitement optimal de la périartérite noueuse avec au moins un
facteur pronostique péjoratif consistait en une perfusion
mensuelle de CYC pendant 12 mois. Dans cette étude
(Pagnoux, 1727), les auteurs ont inclus 41 malades avec
syndrome de Churg et Strauss sévère et les ont randomisés
en un bras CYC 6 cures et un autre bras CYC 12 cures. Le
nombre de rechutes était plus élevé dans le bras CYC 6 cures :
15/16 versus 7/17 dans le bras CYC 12 cures (p = 0,005).
80
60
40
20
Conclusion : le traitement optimal des vascularites
primitives en 2004
0
CYC
MTX
Effets indésirables
B
Sévères
MTX
CYC
Nombre total
38
46
9/7
Leucopénie
4
14*
1/0
0
6
-
Infection
9
10
4/5
H épatite
7
1*
-
Leucopénies
multiples
MTX/CYC
* p < 0,05
Rechutes
C
Arrêt du traitement
1,0
Survie sans rechute
0,8
0,6
MTX
BLyS (BAFF) : une nouvelle cytokine impliquée
dans les maladies auto-immunes
20
BLyS (appelée aussi BAFF) est une cytokine de la famille
du TNF. Cette cytokine est présente à la membrane des
monocytes et des cellules dendritiques et peut être sécrétée
(figure 6). Elle se fixe sur trois récepteurs présents sur le
lymphocyte B appelés BCMA, TACI et BAFF-R. Ce dernier est le plus important, et la fixation de BLyS (BAFF) sur
BAFF-R va entraîner une activation des lymphocytes B. Une
0,0
4
8
12
16
Maladie de Wegener, polyangéite microscopique et vascularite à ANCA :
✓ sans atteinte rénale et sans hémorragie alvéolaire : le
MTX en induction peut remplacer le CYC ;
✓ avec atteinte sévère : CYC jusqu’à l’obtention de la rémission complète plus 3 cures (au minimum 6 cures) ;
✓ dans tous les cas, traitement d’entretien indispensable :
MTX = AZA.
La place des nouveaux traitements (MMF, anti-TNF, rituximab) est encore à définir. De nombreuses autres études restent donc à faire...
BLyS ET MALADIES AUTO-IMMUNES
Log rank = 0,016
0
Les nombreux travaux récents permettent de résumer le
traitement optimal des vascularites primitives en 2004.
PAN et syndrome de Churg et Strauss :
✓ avec five factors score (FFS) = 0 : corticoïdes seuls ;
✓ avec FFS ≥ 1 (c’est-à-dire atteinte neurologique centrale,
ou cardiaque, ou digestive, ou créatininémie > 150 µmol/l
ou protéinurie > 500 mg/24 h) : CYC 12 cures ;
✓ pas de traitement d’entretien après un an dans la PAN, à
discuter dans le Churg et Strauss (souvent nécessité d’une
faible corticothérapie pour l’asthme).
CYC
0,4
0,2
S Y S T É M I Q U E S
Mois
Figures 5 A, B, C. Étude NORAM.
A : Efficacité identique du MTX et du CYC. B : Diminution du nombre
d’épisodes de leucopénie sous MTX versus CYC. C : Fréquence des
rechutes dans les deux groupes après arrêt du traitement à 12 mois.
51
A L A D I E S
S Y S T É M I Q U E S
deuxième cytokine très proche de BLyS, APRIL, se fixe sur
BCMA et TACI, mais pas sur BAFF-R. La fixation de BLyS
(BAFF) sur BAFF-R va activer essentiellement les lymphocytes B autoréactifs, car les souris transgéniques pour
BLyS (BAFF) présentent des signes évoquant à la fois une
PR, un lupus et un Sjögren. Elles présentent d’abord des
arthrites et une glomérulonéphrite, puis, en vieillissant, une
infiltration lymphoïde des glandes salivaires et une diminution du flux salivaire. Chez l’homme, BLyS (BAFF) est augmenté dans le sérum de patients atteints de lupus et de syndrome de Sjögren avec, dans cette dernière maladie, une
corrélation entre le taux de BLyS (BAFF) et celui des autoanticorps (facteur rhumatoïde et anticorps anti-SS-A). Enfin,
dans deux modèles murins de maladies auto-immunes, les
souris NZB/W et l’arthrite au collagène, il existe une diminution importante des signes cliniques avec un traitement
par un inhibiteur de BLyS (BAFF) : le récepteur soluble
TACI combiné à un fragment Fc d’immunoglobuline. Des
nouvelles données importantes ont été rapportées pour suspecter un rôle important de BLyS dans l’origine des maladies auto-immunes où le rôle des lymphocytes B et des
autoanticorps est important.
Mais l’élément le plus intéressant était les résultats de
l’analyse multivariée permettant de prédire le changement
de l’activité de la maladie entre deux visites, appréciée
par l’indice SLEDAI. Les trois facteurs indépendants prédictifs d’un changement de l’activité étaient le taux de
BLyS à la dernière visite, la variation du taux de BLyS
entre les deux visites et le changement de dose de prednisone (tableau V). Le dosage sérique de BLyS pourrait
donc être un élément important pour suivre l’activité du
lupus.
Anti-ADN db positif
Anti-ADN db négatif
BLyS sérique (mg/ml)
80
% de patients
M
60
40
20
0
IFN γ IL-10
Monocyte
C dendritique
ou BAFF
BAFF-R
BCR
BCMA
<5
(n = 642)
5-10
(n = 436)
> 10
(n = 88)
APRIL
Figure 7. BLyS et lupus. Augmentation du pourcentage de patients avec
anticorps anti-ADN db chez les patients ayant un taux sérique de BLyS
élevé.
TACI
Tableau V. BLyS et lupus : analyse multivariée des facteurs indépendants prédictifs de la variation de l’activité de la maladie.
Lymphocyte B
Survie
Sécrétion d’auto-AC
CD40
Variables indépendantes
p
Taux de BLyS à la précédente visite
0,0017
Évolution du taux de BLyS/précédente visite
0,0154
Changement de la dose de PDN
0,0201
Figure 6. L’action de BLyS (BAFF) sur le lymphocyte B.
BLyS et lupus
BLyS et Wegener
Une grande étude américaine (Petri, 1712) a mesuré de
façon séquentielle le taux sérique de BLyS dans le sérum de
244 patients lupiques pendant 18 mois. Le taux des anticorps
anti-ADN double brin et l’activité de la maladie évaluée par
le SLEDAI ont également été étudiés en même temps que
chaque dosage de BLyS. Il existait à l’état basal une très
nette corrélation entre le taux de BLyS sérique et la prévalence des anticorps anti-ADN double brin, celle-ci étant
beaucoup plus fréquente quand le taux sérique de BLyS était
supérieur à 10 ng/ml (figure 7).
Le taux sérique de BLyS a été également retrouvé élevé
dans la maladie de Wegener (Edberg, 1723). Les auteurs
ont comparé ce taux dans une population de 229 patients
atteints de maladie de Wegener avec un groupe témoin de
169 contrôles. BLyS était plus élevé dans le Wegener
(figures 8 A et B), et plus élevé encore dans les Wegener
sévères que dans les Wegener modérés. Il n’a pas encore
été effectué de recherche de corrélation avec le taux des
anticorps anticytoplasme des polynucléaires neutrophiles
ou des anticorps anti-protéinase 3.
52
La Lettre du Rhumatologue - n° 298 - janvier 2004
M
100
A
p < 0,0001
A
A L A D I E S
S Y S T É M I Q U E S
[ BLyS] :
3,1 ± 0,1 ng/ml
Taux de BLyS (Log)
[ BLyS] :
9,6 ± 0,6 ng/ml
10
1
Contrôles
(n = 315)
Patients
(n = 304)
Figure 9. BLyS et Gougerot-Sjögren : expression de BLyS par les lymphocytes T infiltrant les glandes salivaires accessoires.
100
B
p < 0,003
B
[ BLyS] :
10,4 ± 0,8 ng/ml
Taux de BLyS (Log)
[ BLyS] :
6,9 ± 0,6 ng/ml
10
1
Limitée
(n = 113)
Sévère
(n = 191)
Figures 8 A et B.
A : Augmentation du taux sérique de BLyS dans le Wegener.
B : Augmentation encore plus importante dans les formes sévères par
rapport aux formes limitées.
BLyS et Sjögren
L’origine de l’élévation du taux sérique de BLyS dans les
maladies auto-immunes reste inconnue. En physiologie, les
seules cellules capables de sécréter BLyS sont les monocytes et les cellules dendritiques. Dans les maladies autoimmunes, d’autres cellules pourraient jouer un rôle. Dans le
SGS primitif, Lavie et al. (1453) ont démontré, grâce à une
technique d’immunohistochimie confirmée par une technique de microscopie confocale, la présence de BLyS dans
les lymphocytes T infiltrant les glandes salivaires de patients
atteints de SGS primitifs (figure 9).
Un traitement par Ac monoclonal anti-BLyS
chez l’homme
Compte tenu du rôle de BLyS dans les maladies autoimmunes, où les lymphocytes B ont une place importante,
La Lettre du Rhumatologue - n° 298 - janvier 2004
l’inhibition de cette molécule représente un espoir thérapeutique. Les résultats de la première étude de phase 1 chez
l’homme avec un anticorps monoclonal anti-BLyS entièrement humanisé, le LymphoStat-B*, ont été présentés (Furie,
922). Cette phase 1 a inclus quatre groupes de patients traités par des doses différentes de LymphoStat-B* (57 patients
au total) et un groupe de 13 patients traités par placebo. Chez
la moitié de ces patients, deux injections à 21 jours d’intervalle ont été réalisées. La demi-vie de l’anticorps monoclonal était de 10 à 17 jours. La tolérance a été identique à celle
du placebo. En dehors de ces résultats de tolérance très rassurants, cette phase 1 laisse entrevoir des espoirs thérapeutiques. En effet, chez les patients traités par la dose la plus
forte, 20 mg, il existait une diminution d’environ 50 % du
taux de lymphocytes B circulants et une diminution d’environ 40 % du titre d’anticorps anti-ADN double brin. Ainsi,
il semble bien que l’inhibition de BLyS puisse entraîner une
diminution du nombre des lymphocytes B autoréactifs et du
titre des autoanticorps anti-ADN double brin dans le lupus.
BLyS ou APRIL ?
L’attention s’est jusqu’à maintenant focalisée sur BLyS dans
les maladies auto-immunes car BLyS est le seul ligand à se
fixer sur BAFF-R, récepteur du lymphocyte B le plus important pour favoriser sa survie et la production d’autoanticorps.
Cependant, le groupe de C. Weyand (Seyler, 1143) a étudié
l’expression de BLyS et d’APRIL dans la synoviale de patients
atteints de PR. Les auteurs ont différencié trois types d’infiltrations lymphoïdes synoviales : diffuses, par agrégats, et sous
la forme de centres germinatifs ressemblant à ceux des ganglions et composés essentiellement de cellules dendritiques et
de lymphocytes B. La molécule BLyS était présente dans les
trois types d’infiltrats synoviaux. En revanche, la molécule
APRIL n’a été retrouvée que dans les synoviales contenant
des centres germinatifs. Ainsi, pour les auteurs, au niveau de
la synoviale rhumatoïde, ce serait APRIL qui aurait un rôle
plus important pour activer les lymphocytes B autoréactifs en
favorisant la création de centres germinatifs ectopiques. ■
53
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