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a radiothérapie dans les cancers épithéliaux de
l’ovaire a été développée dans les années 1970 sous
l’impulsion de l’école canadienne (1). Elle n’a pas
su trouver sa place en France en raison de sa réputation
“d’inactivité”, malgré des résultats initiaux encourageants au
sein d’une population sélectionnée.
QUELLE RADIOTHÉRAPIE POUR QUELLES PATIENTES ?
La capacité des cancers épithéliaux de l’ovaire à disséminer
d’emblée à l’ensemble de la cavité péritonéale a fait proposer
des irradiations péritonéales totales (IPT) adjuvantes par
Dembo (2) : la comparaison entre IPT et irradiation pelvienne,
avec ou sans chimiothérapie adjuvante, a montré un avantage
modeste en termes de survie à 10 ans, en faveur de l’IPT (58%
versus 40%). Cependant, la chimiothérapie utilisée à l’époque
(chlorambucil) donnait des résultats très inférieurs aux stan-
dards actuels, qui associent taxanes et sels de platine, ce qui
n’est pas en faveur de la réintroduction de la radiothérapie
dans les protocoles actuels.
De plus, l’avantage observé ne concernait que les patientes
dont le résidu tumoral, après chirurgie, était minime ou nul. De
fait, même lorsque l’IPT avait les faveurs des thérapeutes, elle
ne pouvait s’adresser qu’à une faible proportion de patientes.
Dans une revue portant sur les stades II et III, les candidates
potentielles à une irradiation étaient celles sans résidu tumoral
macroscopique (3). Une autre revue des patientes traitées par
IPT, utilisée en adjuvant à la chirurgie, a montré une aggrava-
tion du pronostic et l’inutilité de l’IPT lorsque le résidu macro-
scopique était supérieur à 2 cm (4).
Dans le même esprit, l’équipe bordelaise a rapporté une série
de 167 patientes ayant reçu une IPT par quatre faisceaux.
Quand la radiothérapie était délivrée en adjuvant à la chirurgie
initiale, la survie globale à 5 ans était de 70% et 36% respecti-
vement en cas d’absence ou de présence d’une maladie périto-
néale résiduelle. Quand la radiothérapie était délivrée, après
six cycles de chimiothérapie et un second look, la survie glo-
bale était de 76 %, 66 % et 22% respectivement pour les
patientes sans maladie résiduelle, présentant une maladie rési-
duelle microscopique, ou une maladie résiduelle macrosco-
pique (5). Des effets secondaires ont entraîné l’arrêt de l’irra-
diation dans 9% des cas, et 5 % des patientes ont été opérées
secondairement pour un syndrome occlusif. D’autres études
rétrospectives ont insisté sur la nécessité d’une rémission
macroscopique après la chirurgie initiale (6, 7).
À QUEL MOMENT ?
Un total de sept essais randomisés a évalué l’intérêt d’une
radiothérapie après chirurgie d’un cancer limité de l’ovaire (2,
8-13). Aucun de ces essais n’est concluant, et les résultats sont
quasi identiques dans tous les bras traités. Ils permettent
cependant de tirer quelques enseignements. Après l’essai de
Dembo montrant que l’IPT était l’irradiation de choix en
termes de volume traité (2), deux essais n’ont pas retrouvé la
supériorité de l’IPT par rapport à l’irradiation pelvienne seule.
Ces deux essais ne permettent cependant pas de répondre stric-
tement à cette question, car les bras ne contenant qu’une irra-
diation pelvienne étaient associés soit à une chimiothérapie,
soit à du phosphore 32 intrapéritonéal. Finalement, un seul
essai a comparé IPT à une polychimiothérapie “moderne”
comportant des sels de platine. Il s’agit de l’essai de Chiara
(13) qui comporte malheureusement de nombreux biais (obser-
vance médiocre, puissance statistique faible, toxicité très éle-
vée de l’irradiation, un tiers des patientes irradiées également
traitées par chimiothérapie). Cet essai a été interrompu préma-
turément alors que la survie était en faveur de la chimiothéra-
pie, et que les toxicités digestives de grade 3-4 étaient de 30%
dans le bras irradié.
Trois essais randomisés ont comparé l’IPT à la chimiothérapie
en traitement de consolidation après chirurgie de second look,
pour des patientes sans résidu tumoral, ou avec des résidus
inférieurs à 2 cm (14-16). Aucun de ces essais n’est en faveur
de la radiothérapie et un seul montre un avantage pour la pour-
suite de la chimiothérapie (14).
Au total, l’ensemble de la littérature permet de conclure que la
DOSSIER
Radiothérapie externe des cancers de l’ovaire
L
Didier Cowen*
La Lettre du Gynécologue - n° 289 - février 2004
Radiotherapy in ovarian cancer
* Service de radiothérapie, hôpital de la Timone-Adultes, 264, rue Saint-Pierre,
13005 Marseille.
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radiothérapie abdomino-pelvienne ne peut concerner que les
stades précoces de la maladie et qu’elle comporte un risque
toxique important. De plus, elle n’est supérieure aux bras
témoins que dans un essai sur sept en adjuvant immédiat à la
chirurgie, et dans aucun des quatre essais randomisés en
consolidation après chimiothérapie et second look.
TECHNIQUE DE L’IRRADIATION
Depuis l’avènement des très hautes énergies en radiothérapie,
et avec la possibilité de dimensions de champs plus impor-
tantes, les techniques initiales de moving strip (bande mou-
vante) ont laissé la place aux champs uniques, plus homogènes
avec protection des organes critiques (foie et reins). Dans les
cancers épithéliaux, le volume cible comprend l’abdomen en
totalité : les limites sont les coupoles diaphragmatiques en
haut, les parois abdominales latéralement et le pelvis en tota-
lité jusqu’à l’extrémité inférieure des trous obturateurs en bas.
La dose habituellement délivrée est de 30 Gy en vingt frac-
tions de 1,5 Gy par un faisceau antérieur et un faisceau posté-
rieur avec protections rénales après une dose 15 Gy et hépa-
tiques après une dose de 20 Gy. Quelques cas de boost de 10 à
15 Gy ont été décrits, soit sur la maladie résiduelle, soit sur les
aires ganglionnaires quand les ganglions étaient envahis. Ce
surdosage ne semble apporter qu’un risque toxique supplé-
mentaire.
TOXICITÉ
Les effets immédiats sont dominés par la toxicité digestive
avec des nausées et vomissements quasi constants lors des pre-
mières séances. On note aussi une thrombopénie dont l’inten-
sité dépend des traitements antérieurs (chimiothérapie). Ces
effets secondaires sont responsables des arrêts prématurés des
traitements, qui peuvent concerner jusqu’à 30% des malades.
Les toxicités tardives sont dominées par la toxicité digestive,
qui concerne 5 à 15 % des patientes. Ce risque de “grêle
radique” est d’autant plus important que la patiente compte
davantage d’interventions chirurgicales à son actif et qu’elle a
bénéficié d’une surimpression.
UN CAS À PART : LES DYSGERMINOMES
À l’inverse des tumeurs épithéliales, les dysgerminomes de
l’ovaire sont des tumeurs très radiosensibles, touchant souvent
des femmes jeunes (dans 20 % des cas dans le post-partum
immédiat ou lors de la grossesse). Dans 90 % des cas, ces
tumeurs sont découvertes à un stade précoce (I ou II), et sont
plus fréquemment bilatérales que les tumeurs épithéliales. De
plus, leur lymphophilie est reconnue, avec environ 25 %
d’atteinte ganglionnaire lors du diagnostic.
La radiothérapie, bien que très efficace dans ces formes parti-
culières, laisse souvent la place à la chimiothérapie, tout aussi
efficace mais qui ne comporte pas de risque de castration
radique de l’ovaire opposé, castration qui doit bien entendu
être évitée pour ces femmes jeunes. Une dose de 25 Gy en
fractions de 1,8 Gy est habituellement délivrée sur un hémi-
pelvis associé aux ganglions lombo-aortiques jusqu’à la jonc-
tion D10-D11. Cette radiothérapie adjuvante à la chirurgie per-
met des taux de survie à 5 ans proches de 100%.
CONCLUSION
En dehors des rares cas de dysgerminomes, la radiothérapie
n’a que peu d’intérêt dans la prise en charge des cancers de
l’ovaire. Elle ne peut concerner qu’une faible proportion de
patientes aux stades initiaux de la maladie, et nécessite une
technique et des indications rigoureuses, au risque d’être res-
ponsable de nombreuses complications, essentiellement diges-
tives.
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DOSSIER
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