Curage lomboaortique rétropéritonéal cœlioscopique de stadification pour les cancers du col de l’utérus

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DOSSIER
Curage lomboaortique
rétropéritonéal cœlioscopique
de stadification pour les
cancers du col de l’utérus
localement avancés :
morbidité et impact sur
les délais de prise en charge
Morbidity and impact on the delay of the chemoradiation
therapy of para-aortic laparoscopic nodal surgery in locally
advanced cervical cancer
A. Souadka1, C. Uzan1, 2, S. Gouy1, T. Debaere3, J. Duclos4, J. Lumbroso5, C. Haie-Meder6,
P. Morice1, 2, 7
A
ctuellement, le traitement standard du
cancer du col localement avancé (CCLA),
supérieur au stade IB2 de la classification
FIGO (1) est la radio-chimiothérapie concomitante (RCC), combinant une radiothérapie externe
pelvienne à une curiethérapie intracavitaire.
En cas d’envahissement des ganglions lomboaortiques, l’irradiation pelvienne est étendue à
l’étage lomboaortique (3, 4). L’envahissement
ganglionnaire est corrélé à la taille de la tumeur
et le stade clinique (2) et seules 15 à 30 % des
patientes avec CCLA ont des métastases ganglionnaires lombo-aortiques (1, 5).
La sensibilité de l’imagerie conventionnelle (tomodensitométrie [TDM] et imagerie par résonance magnétique [IRM]) dans la détection des métastases
ganglionnaires de moins de 1 cm est faible (6). Le
PET scan reste le meilleur moyen de détection de cet
envahissement (7, 8), mais avec un taux de faux négatifs non négligeable (8 à 13 %) [9, 10]. L’imagerie n’est
donc pas suffisamment performante pour remplacer
une stadification chirurgicale à l’heure actuelle.
Au-delà de la capacité à définir au mieux les champs
d’irradiation, cette chirurgie permet de détecter, par
un premier temps transpéritonéal, la présence de
carcinose péritonéale, et ainsi de modifier l’attitude
thérapeutique dans un certain nombre de cas (6).
Le but de notre étude était d’évaluer la morbidité
du CCLA de stadification, de déterminer l’impact de
cette morbidité sur la prise en charge thérapeutique
et de confirmer le taux de faux négatif au PET scan.
Matériels et méthodes
Il s’agit d’une étude rétrospective incluant, de janvier
2007 à juin 2010, toutes les patientes ayant un
CCLA, âgée de moins de 70 ans, avec un stade IB2
à IV selon la classification de FIGO 2009 (11) sans
atteinte extrapelvienne ni à l’imagerie conventionnelle ni au PET scan, et ayant eu un curage lomboaortique laparoscopique (CLAL) de stadification par
voie trans- ou rétropéritonéale.
Concernant la technique chirurgicale, le premier
temps d’exploration était réalisé par un abord transpéritonéal permettant la recherche d’une éventuelle
1. Département de chirurgie, institut
Gustave-Roussy, Villejuif.
2. Unité Inserm U1030, institut
Gustave-Roussy, Villejuif.
3. Département de radiologie,
Institut Gustave-Roussy, Villejuif.
4. Département de pathologie,
institut Gustave-Roussy, Villejuif.
5. Département de médecine
nucléaire, institut Gustave-Roussy,
Villejuif.
6. Département de radiothérapie,
institut Gustave-Roussy, Villejuif.
7. Université Paris-Sud, Le KremlinBicêtre.
La Lettre du Gynécologue • n°364 - septembre 2011 | 21
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Mots-clés
Points forts
Cancer du col
localement avancé
Curage
lomboaortique
laparoscopique
»» La lympadénectomie de stadification lomboaortique reste le moyen le plus fiable pour évaluer le
statut ganglionnaire dans les cancers du col utérin localement avancés.
»» Le taux de faux négatifs du PET scan pour évaluer les ganglions lomboaortiques était de 8,4 %.
»» La morbidité chirurgicale de cette chirurgie de stadification est acceptable et de traitement simple.
– Classification based on
lomboaortic lympadenectomy
is still the most reliable method
of evaluating lymphatic status
in locally advanced cancers of
the uterine cervix.
– The rate of false negative PET
scan results in the evaluation
of lomboaortic lymph nodes
was 8,4 %.
– Surgical morbidity following
this classification surgery is
acceptable and easily treated.
carcinose et de vérifier l’état des annexes (métastase
ovarienne ?). Le second temps a été transpéritonéal
au début de notre expérience puis exclusivement
rétropéritonéal. Ce curage s’étendait jusqu’à la veine
rénale gauche et portait principalement sur l’espace
latéroaortique où se situe la majortité des métastases
lomboaortique de CCLA (2). L’intervention s’achevait
par une marsupialisation (ouverture du péritoine le
long du côlon gauche par voie transpéritonéale pour
éviter le cloisonnement d’une lymphocèle), non réalisée
systématiquement au début de notre expérience.
La morbidité chirurgicale a été rapportée selon la
classification de Dindo (12) du grade 1 (ne nécessitant aucun traitement spécifique) au grade 5 (décès).
Keywords
Résultats
Highlights
Locally advanced cervix
cancer
Laparoscopic ways of paraaortic lymphadenectomy
De novembre 2007 à juin 2010, 96 patientes avec
CCLA ont eu un curage lomboaortique cœlioscopique
(CLAC) à l’institut Gustave-Roussy. En moyenne,
l’âge était de 45 ans (21-65) et l’indice de masse
corporelle (IMC) de 23 kg/m2 (14,4-42,7). Seule
1 patiente n’a pu avoir de PET scan (celui-ci était
programmé mais la patiente ne s’est pas présentée).
Il n’y a pas eu de morbidité peropératoire, en particulier il n’y a eu ni plaie vasculaire, ni plaie digestive, ni
laparoconversion. Huit patientes ont développé des
complications postopératoires dont une insuffisance
rénale sévère (morbidité de grade 4) nécessitant
un séjour aux soins intensifs. Sept patientes ont
développé une lymphocèle symptomatique nécessitant une ponction écho-guidée, et pour 3 d’entre
elles, une réintervention par cœlioscopie pour une
marsupialisation a été nécessaire. Aucun des facteurs
testés statistiquement (âge, IMC, marsupialisation,
durée opératoire, nombre de ganglions retirés ou
envahissement ganglionnaire) n’est apparu comme
facteur de risque significatif de survenue de lymphocèle symptomatique.
Le délai médian entre le CLAL et le début de la RCC ou
la fin de la RCC était respectivement de 18 jours (3-49)
et de 71 jours (49-133). Ce délai n’était pas modifié
par la survenue ou non d’une complication, sauf pour
la patiente ayant eu une insuffisance rénale sévère.
L’examen anatomopathologique du curage a révélé
que 8 patientes étaient métastatiques en lomboaortique, ce qui représente un taux de faux négatifs
du PET scan de 8,4 % (8/95) dans notre série. Six de
ces patientes avaient une fixation pelvienne suspecte
au PET scan. Cinq patientes avaient un envahissement ganglionnaire supérieur à 5mm à l’histologie.
Conclusion
Le CLAL reste le meilleur procédé de stadification
pour les patientes atteintes d’un CCLA par rapport
à tous les moyens d’imagerie. Dans notre étude, le
taux de faux négatifs du PET scan était de 8,4 %, ce
qui correspond aux données les plus récentes de la
littérature (13, 14). Le risque d’atteinte lomboaortique est d’autant plus important qu’il existe une
fixation pelvienne suspecte au PET scan (13).
La morbidité chirurgicale est acceptable et de traitement simple. La survenue de complication ne
retarde pas en général le début de la RCC, qui est
le traitement standard de ces patientes.
■
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