V
ancouver a récemment accueilli la dixième édi-
tion du Congrès mondial sur le cancer broncho-
pulmonaire, organisé par N. Murray, sous l’égide
de l’IASLC (International Association for the Study of Lung
Cancer). Il s’est agi de la plus importante réunion d’experts
du cancer bronchique de l’histoire, avec 3 300 participants
venus de 77 pays et 1 100 abstracts, dont 300 ont été présen-
tés en séance et 600 par affichage.
Compte tenu des chiffres inquiétants de la mortalité liée au
tabagisme déjà cités dans ces colonnes (cent millions de
décès au XX
e
siècle), il était légitime que ce congrès s’ouvre
sur une étude approfondie de la pandémie tabagique.
L’attention s’est particulièrement portée sur les nouvelles
cigarettes dites “légères”. Selon N. Murray, “ces cigarettes
modifiées par les industriels du tabac ne s’avèrent pas plus
sûres que les autres et sont malgré tout porteuses de risques
élevés d’addiction”. Elles comporteraient, entre autres effets,
un risque de “réintégrer” dans le tabagisme d’éventuels can-
didats au sevrage rassurés par leur dénomination apaisante,
phénomène d’autant plus gênant que le sevrage apparaît par-
ticulièrement difficile chez l’adulte. En effet, sur 48 millions
d’Américains fumeurs, si 70 % souhaitent arrêter et 17 mil-
lions essaient, seuls 3 % de ces derniers y parviennent.
E. Gritz insiste donc sur la nécessité de proposer des guide-
lines comportementales et pharmacologiques afin d’optimi-
ser ce sevrage.
La sensibilité particulière de la femme au tabagisme a été
une nouvelle fois soulignée. La constatation d’une mauvaise
compréhension de ce phénomène et de l’insuffisance des tra-
vaux s’y rattachant a conduit à la création d’un nouveau
groupe : le WALC (Women Against Lung Cancer Group).
Ces efforts tendant à réduire le tabagisme et à mieux com-
prendre les autres facteurs de risque sont d’autant plus
importants que le dépistage et la chimioprévention de ce type
de cancer demeurent balbutiants.
Les progrès thérapeutiques concernent avant tout la chimio-
thérapie adjuvante. Longtemps controversée, elle démontre
maintenant son efficacité chez les patients opérés, grâce aux
efforts de T. Le Chevalier et des investigateurs de l’essai
IALT. Dans cette étude randomisée portant sur
1867 patients, avec un suivi médian de 56 mois, elle apporte
en effet un gain de survie de 5 % à 5 ans, comparable à celui
qui est observé avec ce type de traitements dans les cancers
du sein ou du côlon. Elle pourrait aussi avoir, selon H. Choy
et P. Colin, un intérêt chez les patients inopérables traités par
chimioradiothérapie.
Cette chimioradiothérapie confirme son impact sur la survie
(4 à 5 %) à 2 ans dans plusieurs méta-analyses.
Dans les formes métastatiques, l’usage quotidien privilégie la
chimiothérapie face aux nouvelles thérapeutiques ciblées.
Les combinaisons doubles semblent supérieures à la mono-
thérapie ou aux combinaisons triples selon la méta-analyse
de Socinski. Le platine reste une valeur sûre, toutefois
contestée par le profil de tolérance de certaines combinaisons
sans sels de platine et associant des cytostatiques plus récents
(taxanes, gemcitabine, vinorelbine).
Pour Gridelli, ce type d’agent pourrait être particulièrement
adapté aux sujets âgés. Les différentes études présentées
démontrent en effet que l’âge per se ne constitue pas une
contre-indication formelle à la réalisation d’une chimiothéra-
pie, voire, pour Langer, d’un traitement combiné.
Comme on le voit, le traitement médical du cancer bron-
chique progresse lentement (trop lentement), mais avec cou-
rage, en attendant la concrétisation de deux espoirs : l’adap-
tation thérapeutique individuelle au travers de la signature
génétique des tumeurs et l’amélioration du profil thérapeu-
tique des molécules ciblées. ■
ÉDITORIAL
Congrès mondial sur le cancer du poumon :
leniter ac fortiter
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J.F. Morère*
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La Lettre du Cancérologue - Volume XII - no4 - juillet-août 2003
* Hôpital Avicenne, Bobigny.