Page 201 Mise au point clinique Comment la cardiomyopathie hypertrophique est devenue une maladie actuelle, accessible au traitement Barry J. Maron, MD ; Eugene Braunwald, MD bservation clinique n° 1 : Le patient est aujourd’hui âgé de 56 ans et présente une cardiomyopathie hypertrophique (CMH) non obstructive. Lorsqu’il avait 35 ans, son frère (alors âgé de 39 ans) est décédé brutalement, l’autopsie ayant révélé qu’il était atteint d’une CMH. Notre patient a donc fait l’objet d’explorations diagnostiques qui ont permis de déceler une CMH non obstructive avec, notamment, un septum interventriculaire d’une épaisseur de 31 mm. En raison de ses antécédents familiaux de mort subite (et de son importante hypertrophie myocardique), ce sujet a été équipé d’un défibrillateur automatique implantable (DAI) dans un but de prévention primaire de la mort subite. Cinq ans plus tard, alors que le patient dormait (à 1h00 du matin), son DAI a aboli un épisode de fibrillation ventriculaire (FV) et restauré le rythme sinusal (Figure 1). Neuf ans se sont écoulés sans nouvel incident, mais, à 50 ans, le patient a présenté, pendant son sommeil, un épisode de FV semblable au premier qui a de même été aboli par un choc électrique. Aujourd’hui, à 56 ans, cet homme demeure asymptomatique et actif. L’évolution clinique de sa CMH a seulement été ponctuée par ces deux épisodes imprévisibles d’arrêt cardiaque, efficacement jugulés par le DAI qui lui avait été posé à titre préventif en raison de son statut à haut risque. Observation clinique n° 2 : La patiente est une professeure des écoles âgée de 53 ans qui est atteinte de CMH obstructive. Elle a consulté à l’âge de 44 ans, alors qu’elle était asymptomatique O mais présentait de lourds antécédents familiaux de morts subites survenues secondairement à une CMH chez deux de ses frères (âgés de, respectivement, 20 et 34 ans). Un DAI lui a été implanté à titre préventif et, deux ans plus tard (la patiente étant âgée de 46 ans), celuici a aboli une FV apparue pendant le sommeil. Au cours des six années qui ont suivi, quatre autres interventions appropriées du DAI ont été nécessaires pour juguler des épisodes de tachycardie ventriculaire (TV) ou de FV. L’épaisseur du septum interventriculaire est de 21 mm ; il n’existe pas d’obstacle à l’éjection ventriculaire gauche au repos, mais une obstruction apparaît à l’effort (gradient de pression : 70 mmHg). A 51 ans, la dyspnée d’effort et l’incapacité fonctionnelle ont augmenté malgré une prise en charge médicale maximale, avec un handicap jugé de classe fonctionnelle III de la New York Heart Association. Une myectomie septale chirurgicale est pratiquée, qui abolit le gradient de pression et les symptômes d’insuffisance cardiaque de la patiente. A 53 ans, cette femme est redevenue asymptomatique et active après avoir fait l’expérience de deux processus morbides, à savoir le risque de mort subite et l’insuffisance cardiaque secondaire à l’obstacle à l’éjection ventriculaire gauche, qui ont tous deux pu être jugulés par la mise en œuvre de stratégies thérapeutiques efficaces. Introduction La médecine cardiovasculaire progresse rapidement, parfois même à la vitesse de l’éclair, pour fournir de nouveaux moyens thérapeutiques d’un apport majeur. La maladie coronaire est au cœur de la pratique cardiologique du fait de son caractère épidémique actuel et déjà au siècle dernier. Mais qu’en est-il des affections cardiaques héréditaires moins fréquentes, longtemps négligées et qui, parfois, semblent se perdre dans la masse des patients atteints de cardiopathies ischémiques ? La CMH est peut-être la plus fréquente des maladies cardiaques d’origine génétique.2,3 Nous allons voir ici comment cette affection, autrefois considérée comme aussi rare que singulière, mais néanmoins intéressante (et de sombre pronostic), est désormais reconnue comme une entité clinique relativement courante, actuelle et accessible au traitement, ayant donné lieu à des recommandations et des préconisations fondées sur un consensus (Figures 1 à 3).4–7 Cette évolution est pleine d’enseignements tant pour les médecins que pour leurs patients atteints de CMH. Histoire de la CMH La CMH est aujourd’hui reconnue comme la première cause de mort subite chez le sujet jeune (y compris l’athlète entraîné) ; elle est présente chez au moins un individu sur 500 au sein de la population générale et affecterait quelque 750 000 Américains.8 Toutefois, avant de parvenir à son actuel degré de reconnaissance, la CMH a parfois connu un parcours erratique et imprévisible au cours de ses cinquante premières années.9,10 Ce cheminement a été ponctué par une myriade d’obstacles, liés, entre autre, à Centre de prise en charge des cardiomyopathies hypertrophiques, Fondation de l’Institut cardiologique de Minneapolis, Minneapolis, Minnesota, Etats-Unis (B.J.M.) ; et groupe d’étude TIMI, Brigham and Women’s Hospital, Boston, Massachusetts, Etats-Unis (E.B.). Correspondance : Barry J. Maron, MD, Hypertrophic Cardiomyopathy Center, Minneapolis Heart Institute Foundation, 920 East 28th St, Suite 620, Minneapolis, MN 55407, Etats-Unis. E-mail : [email protected] (Traduit de l’anglais : Evolution of Hypertrophic Cardiomyopathy to a Contemporary Treatable Disease. Circulation. 2012;126:1640–1644.) © 2012 American Heart Association, Inc. Circulation est disponible sur le site http://circ.ahajournals.org 201 12:48:15:04:13 Page 201 Page 202 202 Circulation Mai 2013 Figure 1. Prévention primaire de la mort subite par un DAI ayant aboli un épisode de TV-FV à 41 ans (choc approprié n° 1). A, après 4 battements sinusaux, apparition brutale d’une TV à 200 battements/min ; B, le défibrillateur détecte la TV et entame sa mise en charge d’une durée de 8 secondes. C, la TV se dégrade en FV. D, le défibrillateur délivre un choc approprié de 20 J (barre) et rétablit le rythme sinusal en un battement. MS : mort subite ; DAI : défibrillateur automatique implantable ; TV : tachycardie ventriculaire ; FV : fibrillation ventriculaire. Adapté et reproduit de Maron et al,1 avec l’autorisation de l’éditeur. Copyright © 2007, American Medical Association. aboutissait au décès dans la plupart des cas. Le fait que cette conception erronée continue à se perpétuer de nos jours s’explique peut-être par les décès, extrêmement rares mais néanmoins très médiatisés, dont ont été victimes, en pleine action, de jeunes athlètes dont la CMH était jusqu’alors méconnue.16 Les affections telles que la CMH prêtent aux idées fausses. Les jugements anciens imprègnent les consciences et s’y enracinent, d’où la difficulté de les faire disparaître même en apportant des preuves contraires. Les pathologies relativement rares en pratique clinique, telle la CMH, constituent des défis pour les cardiologues, qui ont à cœur de servir au mieux leurs patients, car elles leur imposent d’acquérir suffisamment d’expérience et de pratique pour être en mesure d’apprécier pleinement les nuances de leur expression clinique polymorphe et de leur prise en charge. de fausses conceptions et à de mauvais débats auxquels est venue s’ajouter une littérature souvent confuse et contradictoire. Certains soutenaient même au début (conceptions à présent obsolètes) que la CMH ne constituait pas une entité clinique spécifique ou qu’il n’existait pas de réel obstacle mécanique à l’éjection ventriculaire gauche.9,10 Dans la littérature, une litanie déconcertante de termes (75 au total) était utilisée pour décrire la même affection, dont ceux de rétrécissement sous-aortique hypertrophique idiopathique et de cardiomyopathie obstructive hypertrophique, désormais remplacés par un seul, celui de CMH.11 Au cours des premières années (1960–1965), l’entité clinique jusqu’alors non reconnue que constituait la CMH a fait l’objet de descriptions cliniques aussi habiles qu’innovantes, qui, pour une large part, ont d’abord émané du centre clinique des National Institutes of Health (NIH) des EtatsUnis. Au départ, les possibilités de traitement étaient quasi inexistantes.2 D’ailleurs, dans l’un des tout premiers articles publiés sur cette affection à Le profil clinique de la CMH et l’arsenal des moyens de traitement ont considérablement évolué. En premier lieu, on s’accorde désormais pour considérer que la plupart des individus atteints d’une forme génétique de la maladie ne font probablement l’objet d’aucun diagnostic clinique, nombre d’entre eux parvenant jusqu’à l’âge de soixante-dix, quatre-vingts, voire quatre-vingt-dix ans, sans éprouver de handicap ni avoir eu à subir des interventions thérapeutiques majeures.4–7,17 En effet, du fait, principalement, de la tendance accrue à suspecter la maladie qui découle en partie de la dissémination des techniques d’imagerie de pointe, chez les patients dont la CMH est asymptomatique, le diagnostic fortuit de l’affection est plus souvent fait à un âge relativement avancé. En outre, le risque de complications liées à la CMH (dont celui de mort subite) est paradoxalement faible chez les patients âgés de plus de 60 ans.18 Pour autant, aujourd’hui encore, la plupart des patients chez lesquels une CMH vient d’être découverte semblent surpris (et rassurés) d’apprendre cet 12:48:15:04:13 l’instigation des NIH, décrivant l’obstacle dynamique à l’éjection ventriculaire gauche, toute tentative de traitement était présentée comme illusoire :12 « nous sommes conscients qu’il n’existe à ce jour aucune méthode de prise en charge capable d’influer spécifiquement et favorablement sur l’évolution d’un patient atteint d’hypertrophie ventriculaire idiopathique. » Le constat était pleinement exact à l’époque (c’est-à-dire en 1959), pourtant, peu de temps après, sont apparus les bêtabloquants13,14 et la myectomie chirurgicale.15 Les cardiologues ont toutefois mis du temps à accepter ce traitement invasif de la CMH. C’est ainsi qu’au Royaume-Uni, après une première expérience de courte durée, la myectomie a été délaissée pendant trente ans. Un mythe désolant a pris corps, qui, étonnamment, persiste dans certains esprits, à savoir que la CMH était une maladie implacable à laquelle il ne pouvait être opposé aucune thérapeutique curative ou efficace. La CMH a, dès lors, acquis le statut d’affection dont l’évolution était imprévisible et Page 202 La CMH de nos jours Page 203 Maron et Braunwald La CMH est une maladie actuelle, accessible au traitement Figure 2. Retentissement clinique de l’obstacle à l’éjection VG dans la CMH. Graphique du haut, les patients qui présentent un tel processus obstructif au repos (gradient de pression ≥30 mmHg) encourent un plus grand risque d’insuffisance cardiaque progressive sévère ou de décès par insuffisance cardiaque ou accident vasculaire cérébral que ceux dont la maladie n’entraîne pas d’obstacle à l’éjection. CMH : cardiomyopathie hypertrophique ; VG : ventriculaire gauche ; NYHA : New York Heart Association ; RR : risque relatif. Reproduit avec l’autorisation de Maron et al.19 Graphique du bas, la myectomie septale chirurgicale, qui a pour effet d’abolir le gradient de pression VG, assure aux patients une espérance de vie à long terme comparable à celle dont est créditée la population générale des Etats-Unis et qui excède celle des individus atteints de CMH obstructive symptomatique n’ayant pas été opérés. Reproduit d’Ommen et al20 avec l’autorisation de l’éditeur. Copyright © 2005, New England Journal of Medicine. important principe de l’effet du vieillissement sur la maladie, cela en raison du message généralement défavorable qui leur a été délivré concernant leur état. Par ailleurs, nombre de patients qui consultent dans un hôpital ou un centre de soins présentent (ou encourent) des complications inhérentes à leur CMH1,4–7,19–21 (Figure 3). L’évolution clinique de la maladie peut se faire dans plus d’une direction défavorable, conduisant alors à employer des moyens thérapeutiques habituellement réservés aux patients atteints d’autres pathologies cardiaques (Figure 3). Ces complications imposent des stratégies de prise en charge spécifiques ; en 12:48:15:04:13 principe, il ne saurait être proposé de traitement unique à tous les patients, tant la maladie est hétérogène. 203 systématique s’est progressivement imposée au cours des dix dernières années, visant à protéger ces patients par la pose d’un DAI.1,21 Sa capacité à déceler et abolir automatiquement les TV et FV fait du DAI la seule approche thérapeutique aujourd’hui disponible pour prolonger de façon effective la vie des individus atteints de CMH, permettant, par là même, d’infléchir le cours naturel de la maladie chez de nombreux patients (Figure 1). Lorsque les DAI sont employés dans la CMH, y compris chez les patients à haut risque, leur taux annuel d’intervention à des fins de prévention primaire est de 4 %, tant chez l’adulte que chez l’enfant.1 Bien que le rôle salvateur du DAI soit pleinement établi dans la CMH, le problème demeure d’identifier de façon plus précise les patients susceptibles de tirer profit de ce traitement, notamment au sein du sous-groupe, restreint mais néanmoins important, formé par les individus chez lesquels les habituels marqueurs de risque n’ont pas de valeur prédictive, mais qui peuvent malgré tout être un jour victimes d’une mort subite.21 C’est pourquoi le dépistage d’un plus grand nombre de patients à risque par l’emploi de nouveaux marqueurs demeure un objectif important, dans le cadre duquel l’IRM cardiovasculaire de contraste avec recherche d’un rehaussement tardif du gadolinium (supposé témoigner de la présence d’une cicatrice myocardique) est appelée à jouer un rôle significatif.22 Abolition de l’insuffisance cardiaque Prévention de la mort subite La mort subite est la complication la plus spectaculaire et la plus terrible de la CMH, connue depuis la première description anatomopathologique publiée en 1958.3 Pour autant, la prévention de la mort subite est aujourd’hui devenue un objectif réaliste chez le jeune patient atteint de CMH.1,21 Si la mort subite de patients jeunes a longtemps marqué l’histoire de cette affection du fait de l’absence de traitement capable de prévenir ce risque, une stratégie de prévention Page 203 Dans la CMH, l’insuffisance cardiaque sévère et l’intolérance à l’effort imputables à l’obstacle à l’éjection ventriculaire gauche sont potentiellement réversibles20 (Figure 2). La myectomie septale chirurgicale, dont le pionnier a été Andrew Morrow des NIH23 (ensuite améliorée par d’autres, dont Bill Williams de Toronto, John Kirklin et maintenant Joseph Dearani, tous deux membres de la Mayo Clinic), est aujourd’hui devenue une intervention sûre, qui restaure ad integrum la qualité de vie des patients en Page 204 204 Circulation Mai 2013 Figure 3. Evénements susceptibles de compliquer la CMH. Chacune de ces complications de la maladie est accessible à au moins une option thérapeutique potentiellement efficace. AVC : accident vasculaire cérébral ; FA : fibrillation atriale ; DAI : défibrillateur automatique implantable ; CMH : cardiomyopathie hypertrophique ; ARF : ablation par radiofréquence. normalisant les pressions ventriculaires gauches. A l’origine, même pratiquée par les mains les plus expérimentées, la myectomie était grevée d’une mortalité opératoire comprise entre 5 et 8 %, ce qui contribuait incontestablement à tempérer l’attrait pour cette intervention. Aussi le nombre de myectomies réalisées demeurait relativement faible. Il a fallu attendre ces dix à quinze dernières années pour que soient pleinement reconnues la fréquence et l’importance du facteur obstructif dans le spectre clinique de la CMH19,24 (Figure 2). La myectomie septale chirurgicale est alors devenue une option séduisante et accessible, comme en témoigne l’augmentation spectaculaire du nombre d’interventions pratiquées annuellement dans les grands centres.25,26 Ce regain d’intérêt pour la myectomie est dû à l’abaissement considérable de la mortalité opératoire à 1 % ou moins, rendu possible par les techniques modernes de préservation myocardique, le gain d’expérience des chirurgiens et les innovations apportées à cette technique opératoire.25,26 C’est ainsi qu’a été développée l’approche désignée sous le nom de myectomie étendue, pour prendre en compte le rôle important joué par les structures sousmitrales dans l’obstacle à l’éjection 12:48:15:04:13 ventriculaire gauche.4–7,27 Surtout, en plus de lever cet obstacle et d’améliorer par là même la qualité de vie des patients, la myectomie chirurgicale augmente également l’espérance de vie de ces derniers, la ramenant au niveau de celle de la population générale et audelà de celle des patients atteints d’une CMH obstructive symptomatique qui n’ont pas été opérés20 (Figure 2). Un mode d’intervention par voie percutanée, l’ablation septale par alcoolisation, constitue un important substitut à la myectomie,5–7,28 toutefois réservé aux patients trop âgés et/ou considérés comme de moins bons candidats à l’approche chirurgicale en raison de comorbidités ou de leur forte aversion pour la chirurgie.4–7 Si l’alcoolisation septale est reconnue quant à son efficacité à réduire le gradient de pression et les symptômes, elle provoque toutefois un infarctus myocardique transmural lié à l’action de l’alcool et qui est potentiellement arythmogène, ce qui la distingue notablement de la myectomie. Pour autant, l’enthousiasme avec lequel les cardiologues interventionnels ont adopté l’alcoolisation septale a renforcé la sensibilisation à l’égard de la CMH et a, paradoxalement, accentué l’intérêt porté à l’abolition de l’obstacle à l’éjection ventriculaire gauche par réalisation d’une myectomie.25,26,28,29 Page 204 Les rares patients à présenter une insuffisance cardiaque très évoluée, réfractaire au traitement médicamenteux et à caractère irréversible, généralement liée à l’existence d’une dysfonction systolique et d’un remodelage ventriculaire gauche délétère, eux-mêmes secondaires à une ischémie microvasculaire et à une cicatrice diffuse (stade terminal), relèvent d’une greffe cardiaque, seule option thérapeutique efficace dans leur cas.30 Chez ces patients atteints de CMH, la survie après transplantation est du même ordre que celle des individus opérés pour d’autres affections cardiaques : elle est de 85 % à 1 an, de 75 % à 5 ans et de 61 % à 10 ans, contre, respectivement, 82, 70 et 49 % pour les transplantés non opérés pour une CMH.31 Fibrillation atriale et accident vasculaire cérébral La fibrillation atriale (FA) est le plus fréquent des troubles du rythme soutenus associés à la CMH, survenant chez environ 20 % des patients (ce qui est quatre fois supérieur au taux observé dans la population générale).32 Chez certains patients, la FA peut être cause d’une insuffisance cardiaque progressive ou d’un accident vasculaire cérébral d’origine embolique (mais n’a toutefois pas d’incidence sur le risque de mort subite inattendue). Les stratégies de prise en charge de la FA sont les mêmes chez les patients atteints de CMH que chez les autres individus et font preuve d’une efficacité comparable. Les thérapeutiques pharmacologiques conventionnelles sont administrées selon des protocoles agressifs avec pour objectifs de diminuer la fréquence des épisodes paroxystiques, de maintenir le rythme sinusal, de normaliser la fréquence ventriculaire et de prévenir les accidents vasculaires cérébraux d’origine embolique par l’instauration d’une anticoagulation à visée préventive. Certains patients dont la FA se montre réfractaire au traitement médicamenteux peuvent se voir proposer une ablation par courant de radiofréquence destinée à abolir le foyer de FA, Page 205 Maron et Braunwald intervention qui, lorsqu’elle est pratiquée précocement, permet de restaurer le rythme sinusal et d’améliorer la symptomatologie à court terme chez plus de 50 % des patients.33 Conclusions et perspectives La CMH est sortie d’une période de profonde incompréhension, de rejet et de pessimisme pour devenir une affection cardiovasculaire actuelle dont chacune des morbidités et des complications peut être prise en charge par des stratégies largement répandues et efficaces. Ces moyens thérapeutiques majeurs dont les patients atteints de CMH sont à même de bénéficier ont la capacité de modifier le cours naturel de la maladie, notamment en prévenant le risque de mort subite (par la pose d’un DAI) et en faisant régresser l’insuffisance cardiaque, avec pour corollaires la restauration de la qualité de vie et l’allongement de l’espérance de vie (grâce à la myectomie chirurgicale). Il convient de souligner que les stratégies matures de prise en charge de la CMH dont il a été traité ici constituent les applications directes de principes et de travaux de recherche purement cliniques et ne doivent rien aux importants progrès accomplis dans le domaine la biologie moléculaire. En effet, si ces derniers ont effectivement permis d’identifier les mutations génétiques codant pour les protéines sarcomériques responsables de CMH, identification dont l’impact clinique se limite pour l’essentiel au dépistage familial,34 ils n’ont, jusqu’à présent, joué aucun rôle dans le traitement et l’évaluation pronostique des CMH ayant une expression clinique. Beaucoup de travail reste à faire sur cette affection génétique complexe, notamment sur le plan de la stratification du risque. Pour autant, l’objectif final, à savoir permettre aux patients atteints d’une CMH de bénéficier d’une espérance de vie normale et d’une qualité de vie satisfaisante, est aujourd’hui devenu une aspiration réaliste grâce aux importants efforts déployés par de nombreux médecins et investigateurs cliniques depuis la 12:48:15:04:13 La CMH est une maladie actuelle, accessible au traitement reconnaissance initiale de cette maladie il y a plus d’un demi-siècle. Déclarations Le Dr Maron est consultant auprès de GeneDx et bénéficie d’une bourse de recherche de Medtronic. Le Dr Braunwald n’a aucun conflit d’intérêts à signaler. 7. Références 1. Maron BJ, Spirito P, Shen W-K, Haas TS, Formisano F, Link MS, Epstein AE, Almquist AK, Daubert JP, Lawrenz T, Boriani G, Estes NAM 3rd, Favale S, Piccininno M, Winters SL, Santini M, Betocchi S, Arribas F, Sherrid MV, Buja G, Semsarian C, Bruzzi P. Implantable cardioverterdefibrillators and prevention of sudden cardiac death in hypertrophic cardiomyopathy. JAMA. 2007;298:405–412. 2. Braunwald E, Lambrew CT, Rockoff SD, Ross J Jr, Morrow AG. Idiopathic hypertrophic subaortic stenosis. I. A description of the disease based upon an analysis of 64 patients. Circulation. 1964;30:3–119. 3. Teare D. Asymmetrical hypertrophy of the heart in young adults. Br Heart J. 1958;20: 1–8. 4. Maron BJ, McKenna WJ, Danielson GK, Kappenberger LJ, Kuhn HJ, Seidman CE, Shah PM, Spencer WH, Spirito P, ten Cate FJ, Wigle ED. American College of Cardiology/European Society of Cardiology Clinical Expert Consensus Document on Hypertrophic Cardiomyopathy. J Am Coll Cardiol. 2003;42:1687–1713. 5. Gersh BJ, Maron BJ, Bonow RO, Dearani JA, Fifer MA, Link MS, Naidu SS, Nishimura RA, Ommen SR, Rawkowski H, Seidman CE, Towbin JA, Udelson JE, Yancy CW; American College of Cardiology Foundation/American Heart Association Task Force on Practice Guidelines; American Association for Thoracic Surgery; American Society of Echocardiography; American Society of Nuclear Cardiology; Heart Failure Society of America; Heart Rhythm Society; Society for Cardiovascular Angiography and Interventions; Society of Thoracic Surgeons. 2011 ACCF/AHA guidelines for the diagnosis and treatment of hypertrophic cardiomyopathy: a report of the American College of Cardiology Foundation/American Heart Association Task Force on Practice Guidelines. Circulation. 2011;124:e783–e831. 6. Gersh BJ, Maron BJ, Bonow RO, Dearani JA, Fifer MA, Link MS, Naidu SS, Nishimura RA, Ommen SR, Rawkowski H, Seidman CE, Towbin JA, Udelson JE, Yancy CW; American College of Cardiology Foundation/American Heart Association Task Force on Practice Guidelines. 2011 ACCF/AHA Guidelines for the Diagnosis and Treatment of Hypertrophic Cardiomyopathy: a report of the American College of Cardiology Foundation/Ameri- Page 205 8. 9. 10. 11. 12. 13. 14. 205 can Heart Association Task Force on Practice Guidelines. Developed in collaboration with the American Association for Thoracic Surgery, American Society of Echocardiography, American Society of Nuclear Cardiology, Heart Failure Society of America, Heart Rhythm Society, Society for Cardiovascular Angiography and Interventions, and Society of Thoracic Surgeons. J Am Coll Cardiol. 2011;5:e212–e260. American College of Cardiology Foundation/American Heart Association Task Force on Practice; American Association for Thoracic Surgery; American Society of Echocardiography; American Society of Nuclear Cardiology; Heart Failure Society of America; Heart Rhythm Society; Society for Cardiovascular Angiography and Interventions; Society of Thoracic Surgeons, Gersh BJ, Maron BJ, Bonow RO, Dearani JA, Fifer MA, Link MS, Naidu SS, Nishimura RA, Ommen SR, Rakowski H, Seidman CE, Towbin JA, Udelson JE, Yancy CW. 2011 ACCF/AHA guidelines for the diagnosis and treatment of hypertrophic cardiomyopathy: a report of the American College of Cardiology Foundation/ American Heart Association Task Force on Practice Guidelines. J Thorac Cardiovasc Surg. 2011;142:e153–e203. Maron BJ, Gardin JM, Flack JM, Gidding SS, Bild D. Assessment of the prevalence of hypertrophic cardiomyopathy in a general population of young adults: Echocardiographic analysis of 4111 subjects in the CARDIA Study. Circulation. 1995;92: 785–789. Maron BJ, Maron MS, Wigle ED, Braunwald E. The 50-year history, controversy, and clinical implications of left ventricular outflow tract obstruction in hypertrophic cardiomyopathy: from idiopathic hypertrophic subaortic stenosis to hypertrophic cardiomyopathy. J Am Coll Cardiol. 2009; 54:191–200. Maron BJ, Braunwald E. Eugene Braunwald MD and the early years of hypertrophic cardiomyopathy: a conversation with Dr. Barry J. Maron. Am J Cardiol. 2012;109:1539–1547. Maron BJ, Seidman CE, Ackerman MJ, Towbin JA, Maron MS, Ommen SR, Nishimura RA, Gersh BJ. What’s in a name? Dilemmas in nomenclature characterizing hypertrophic cardiomyopathy and left ventricular hypertrophy. Circ Cardiovasc Genet. 2009;2:81–86. Morrow AG, Braunwald E. Functional aortic stenosis: a malformation characterized by resistance to left ventricular outflow without anatomic obstruction. Circulation. 1959;20:181–189. Harrison DC, Braunwald E, Glick G, Mason DT, Chidsey CA, Ross J Jr. Effects of betaadrenergic blockade on the circulation with particular reference to observations in patients with hypertrophic subaortic stenosis. Circulation. 1964;29:84–98. Cohen LS, Braunwald E. Amelioration of angina pectoris in idiopathic hypertrophic Page 206 206 15. 16. 17. 18. 19. 20. 21. 22. 12:48:15:04:13 Circulation Mai 2013 subaortic stenosis with beta-adrenergic blockade. Circulation. 1967;35:847–851. Morrow AG, Brockenbrough EC. Surgical treatment of idiopathic hypertrophic subaortic stenosis. Ann Surg. 1961;154: 181–189. Maron BJ. Sudden death in young athletes. N Engl J Med. 2003;349:1064–1075. Maron BJ, Casey SA, Haas TS, Kitner C, Garberich R. Hypertrophic cardiomyopathy with longevity to 90 years of older. Am J Cardiol. 2012;9:1341–1347. Maron MS, Rowin E, Casey S, Haas T, Appelbaum E, Garberich R, Maron BJ. Risk stratification and outcome of patients with hypertrophic cardiomyopathy over 60 years of age: does age count? Circulation. 2011;124:A14156. Abstract. Maron MS, Olivotto I, Betocchi S, Casey SA, Lesser JR, Losi MA, Cecchi F, Maron BJ. Effect of left ventricular outflow tract obstruction on clinical outcome in hypertrophic cardiomyopathy. N Engl J Med. 2003;348:295–303. Ommen SR, Maron BJ, Olivotto I, Maron MS, Cecchi F, Betocchi S, Gersh BJ, Ackerman MJ, McCully RB, Dearani JA, Schaff HV, Danielson GK, Tajik AJ, Nishimura RA. Long-term effects of surgical septal myectomy on survival in patients with obstructive hypertrophic cardiomyopathy. J Am Coll Cardiol. 2005;46: 470–476. Maron BJ. Contemporary insights and strategies for risk stratification and prevention of sudden death in hypertrophic cardiomyopathy. Circulation. 2010;121: 445–456. Chan RH, Maron B, Olivotta I, Assenza G, Hong MS, Lesser J, Haas T, Gruner C, Crean A, Rakowski H, Udelson J, Rowin E, Tomberli B, Spirito P, Formisano F, Biagini E, Rapezzi C, De Cecco CN, 23. 24. 25. 26. 27. 28. Autore C, Cook EF, Hauser T, Gibson CM, Manning W, Appelbaum E, Maron M. Prognostic utility of contrastenhanced cardiovascular magnetic resonance in hypertrophic cardiomyopathy: an international multicenter study. J Am Coll Cardiol. 2012;59(suppl A): A385. Abstract. Morrow AG, Fogarty TJ, Hannah H 3rd, Braunwald E. Operative treatment in idiopathic hypertrophic subacute stenosis. Techniques and the results of preoperative and postoperative clinical and hemodynamic assessments. Circulation. 1968;37: 589–596. Maron MS, Olivotto I, Zenovich AG, Link MS, Pandian NG, Kuvin JT, Nistri S, Cecchi F, Udelson JE, Maron BJ. Hypertrophic cardiomyopathy is predominantly a disease of left ventricular outflow tract obstruction. Circulation. 2006;114: 2232–2239. Maron BJ. Controversies in cardiovascular medicine. Surgical myectomy remains the primary treatment option for severely symptomatic patients with obstructive hypertrophic cardiomyopathy. Circulation. 2007;116:196–206. Maron BJ, Ommen SR, Nishimura RA, Dearani JA. Myths about surgical myectomy: rumors of its death have been greatly exaggerated. Am J Cardiol. 2008;101: 887–889. Maron BJ, Dearani JA, Ommen SR, Maron MS, Schaff HV, Gersh BJ, Nishimura RA. The case for surgery in obstructive hypertrophic cardiomyopathy. J Am Coll Cardiol. 2004;44:2044–2053. Nagueh SR, Groves BM, Schwartz L, Smith KM, Wang A. Bach RG, Nielsen C, Leya F, Buergler JM, Rowe SK, Woo A, Maldonado YM, Spencer WH 3rd. Alcohol septal ablation for the treatment of hypertrophic obstructive cardiomyopathy. Page 206 29. 30. 31. 32. 33. 34. A multicenter North American Registry. J Am Coll Cardiol. 2011;58:2322–2328. Iacovoni A, Spirito P, Simon C, Iascone M, Di Dedda G, De Filippo P, Pentiricci S, Boni L, Senni M, Gavazzi A, Ferrazzi P. A contemporary European experience with surgical septal myectomy in hypertrophic cardiomyopathy. Eur Heart J. 2012;33: 2080–2087. Harris KM, Spirito P, Maron MS, Zenovich AG, Formisano F, Lesser JR, Mackey-Bojack S, Manning WJ, Udelson JE, Maron BJ. Prevalence, clinical profile and significance of left ventricular remodeling in the end-stage phase of hypertrophic cardiomyopathy. Circulation. 2006;114:216–225. Maron MS, Kalsmith BM, Udelson JE, Li W, DeNofrio D. Survival after cardiac transplantation in patients with hypertrophic cardiomyopathy. Circ: Heart Fail. 2010;3:574–579. Olivotto I, Cecchi F, Casey SA, Dolara A, Traverse JH, Maron BJ. Impact of atrial fibrillation on the clinical course of hypertrophic cardiomyopathy. Circulation. 2001;104:2517–2524. Di Donna P, Olivotto I, Delcre‘ SDL, Caponi D, Scaglione M, Nault I, Montefusco A, Girolami F, Cecchi F, Haissaguerre M, Gaita F. Efficacy of catheter ablation for atrial fibrillation in hypertrophic cardiomyopathy: impact of age, atrial remodeling, and disease progression. Europace. 2010;12:347–355. Alcalai R, Seidman JG, Seidman CE. Genetic basis of hypertrophic cardiomyopathy: From bench to the clinics. J Cardiovasc Electrophysiol. 2008;19:104–110. MOTS CLES : génétique 䊏 cardiomyopathie hypertrophique 䊏 défibrillateurs automatiques implantables 䊏 mort subite 䊏 chirurgie 䊏 fibrillation atriale