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EXPOSÉ DES MOTIFS
Mesdames, Messieurs,
La nécessité de prendre des mesures fortes face à l’urgence écologique
s’impose plus que jamais dans nos politiques publiques. La France
consomme actuellement 50 % de ressources naturelles de plus qu’il y a 30
ans et la production de déchets n’a jamais été aussi élevée. C’est plus de
500 kg de déchets qui sont jetés par personne et par an, sans compter les
déchets indirects, issus du processus de production.
Le phénomène qualif« d’obsolescence programmée » des produits,
théorisé par Bernard London ou encore Brooks Stevens, a donné lieu à une
prise de conscience générale des médias, des économistes, des
consommateurs, des associations environnementales et des États, comme la
Belgique qui a adopune résolution au Sénat le 2 février 2012 en vue de
lutter contre l’obsolescence programmée des produits.
Bien que la plupart des entreprises cherche à proposer des produits de
plus en plus fiables et innovants, différentes stratégies sont parfois mises en
place pour accélérer artificiellement l’obsolescence des produits, afin de
favoriser leur renouvellement. Cela peut passer par une innovation
technologique ou esthétique, mais également par des procédés techniques
visant à concevoir un produit en raccourcissant délibérément sa durée de
vie potentielle. C’est sur ce dernier point que porte la présente loi. Selon la
définition de l’ADEME, « la notion d’obsolescence programmée dénonce
un stratagème par lequel un bien verrait sa durée normative sciemment
réduite dès sa conception, limitant ainsi sa durée d’usage pour des raisons
de modèle économique ». Ces techniques peuvent notamment inclure
l’introduction volontaire d’une défectuosité, d’une fragilité, d’un arrêt
programmé, d’une limitation technique, d’une impossibilité de réparer ou
d’une non-compatibilité logicielle.
Le renouvellement accéléré des biens contribue fortement à la
surexploitation des ressources non renouvelables et nous mène à une
impasse écologique, sociale et économique. L’abondance de déchets,
notamment ceux d’équipements électriques et électroniques, se caractérise
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par des impacts environnementaux dramatiques. Les populations des pays
du Sud (Afrique et Asie surtout), devenus de véritables pays « décharges »,
sont soumises à de graves problèmes sanitaires en raison de la toxicité des
déchets qui arrivent à leurs frontières par containers entiers en provenance
des pays industrialisés. Les consommateurs, quant à eux, contraints de
renouveler l’achat d’un bien sans aucun bénéfice pour eux (esthétique ou
technologique) subissent une diminution de leur pouvoir d’achat. Par
ailleurs, la concurrence internationale et les délocalisations invalident les
arguments économiques justifiant les stratégies d’obsolescence
programmée. L’augmentation de la durée de vie des produits peut même
constituer un avantage concurrentiel pour les entreprises exemplaires mais
également favoriser la création d’emplois dans le domaine de la réparation
en France. La finitude des ressources et les défis énergétiques auxquels
nous sommes confrontés, nous imposent de repenser notre modèle
économique et nos modes de consommation.
L’objectif de cette loi est de rendre accessible au plus grand nombre
les produits ayant une plus longue durée de vie, conformément à l’objectif
du Grenelle de l’environnement et à une vision plus globale de
développement soutenable.
Elle vise à définir un cadre juridique afin de sanctionner ces pratiques
et d’offrir un recours aux consommateurs lésés (article 1
er
).
L’article 2 étend la durée légale de conformité à cinq ans au lieu de
deux ans. L’objectif serait à terme d’aller jusqu’à une durée de dix ans. Le
fabricant aura ainsi intérêt à produire des biens plus durables, tandis que le
consommateur n’aura pas intérêt à renouveler l’achat avant la date
d’expiration de la garantie. La plupart des produits sont fiables pendant au
moins cinq ans, les fabricants ne devraient donc pas être particulièrement
pénalisés par cette mesure. L’allongement de la durée de garantie peut
même constituer un avantage concurrentiel. Conscient des impacts sur le
modèle économique des entreprises d’une telle mesure, la loi prévoit une
extension de la garantie progressive dans le temps.
L’article 3 permet une meilleure lisibilité de la garantie légale de
conformité et une meilleure protection du consommateur, ainsi qu’un
allongement de la durée de vie des produits. Actuellement, les défauts de
conformité qui apparaissent dans un délai de six mois à partir de la
délivrance du bien sont présumés exister au moment de la délivrance, sauf
preuve contraire. Le vendeur peut combattre cette présomption si celle-ci
n’est pas compatible avec la nature du bien ou le défaut de conformité
invoqué. En allongeant cette période de six mois à deux ans, le
consommateur bénéficie d’un véritable système de garantie encadré par la
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loi et le fabricant a intérêt à produire des biens plus fiables puisque la
charge de la preuve du défaut de conformité lui appartient.
L’augmentation de la durée de vie des produits passe également par la
réparation, source d’emplois non délocalisables. Ce secteur est encouragé
dans l’article 4, par la mise à disposition de pièces détachées, essentielles
au fonctionnement des produits, dans un délai d’un mois, pendant une
période de dix ans. L’utilisation de pièces détachées d’occasion sera
naturellement possible pour tous réparateurs et tous produits. De manière
générale, il est important que les utilisateurs de produits d’équipements
électriques et électroniques soient mieux informés, dans la notice
d’utilisation par exemple, quant au réemploi, au recyclage et toutes autres
formes de valorisation de ces produits. Les éco-organismes doivent être,
par ailleurs, incités à prélever des pièces détachées sur les équipements
usagés collectés lorsque la réparation n’est pas possible, en vue de la
réparation d’autres produits de me type. Ceci permettrait de constituer
des stocks de pièces détachées d’occasion.
L’article 5 propose de moduler l’éco-contribution en fonction de
critères permettant un allongement de la durée de vie du produit.
L’article 6 vise à renforcer l’obligation d’information du
consommateur d’équipements électriques et électroniques quant au
réemploi, au recyclage et les autres formes de valorisation de ces déchets.
Ces dispositions relevant du domaine réglementaire, elles seront définies et
précisées par décret.
Enfin, la proposition de loi demande à l’article 7 un rapport au
Gouvernement sur le développement et les perspectives de l’économie de
fonctionnalité en France. En remplaçant la vente du bien par la vente de
l’usage de celui-ci, les entreprises sont incitées à concevoir des produits
ayant une plus longue durée de vie, sous peine de subir des frais de
réparation importants. Dans le même temps, les coûts de production
diminuent gce à une économie dans l’utilisation des matières premières
(entre 30 et 50 % selon les prévisions). Les entreprises peuvent ainsi
profiter de cette baisse pour créer des emplois, baisser les prix et gagner en
compétitivité.
Par ailleurs, afin de rendre accessible au plus grand nombre les
produits ayant une plus longue durée de vie, il est essentiel que les
directives européennes soient appliquées, notamment la transposition de la
directive 2006/66/CE, en ce qui concerne la facilité d’extraction des piles et
accumulateurs, par l’article R543-176 du code de l’environnement. Le
chargeur universel pour téléphone portable, à l’instar de la normalisation
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européenne CEN-CENELEC et ETSI dont il a fait l’objet, mérite
également d’être généralisé.
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