16 | La Lettre du Gynécologue 352 - mai 2010
Hémorragie de la délivrance (1re partie)
DOSSIER
Conduite médicale à tenir
en cas dhémorragie
du post-partum
Medical management of postpartum haemorrhage
M. Dreyfus*, P. Lefevre*
* Gynécologie obstétrique et méde-
cine de la reproduction, CHRU de
Caen, avenue de la Côte-de-Nacre,
14033 Caen Cedex 9.
U
ne fois le diagnostic d’hémorragie du
post-partum (HPP) posé, quelles sont les
premières mesures à prendre ? Les recom-
mandations pour la pratique clinique publiées par le
CNGOF en 2004 (1), notre référence ici, comportent
la description des différentes étapes : diagnostic,
appréciation de la gravité, communication entre les
acteurs, gestes immédiats et premières thérapeu-
tiques (2), en esquissant les grands principes de la
prise en charge anesthésique de première ligne (3).
Puis, nous aborderons la question du traitement
médical de seconde ligne (4) en laissant de côté
l’embolisation et la chirurgie, qui font l’objet de
développements spécifiques.
L’hémorragie du post-partum peut survenir de
façon inopinée et mettre en jeu le pronostic vital.
La prise en charge repose sur un diagnostic le plus
précoce possible et sur une bonne collaboration
entre obstétriciens, sages-femmes, anesthésistes et
équipe paramédicale entraînés. L'absence de médecin
anesthésiste sur place ainsi qu’un nombre annuel
d'accouchements inférieur à 500 constituent deux
facteurs indépendants associés à une prise en charge
insuffisante (5).
Diagnostic et premiers gestes
(figure 1) [2]
Le diagnostic
La qualité de la prise en charge dépend de la précocité
du diagnostic et de la rapidité d’action des différents
intervenants entre lesquels la communication est
fondamentale. Cette action combinée des obstétri-
ciens, sages-femmes et anesthésistes nest optimale
qu’avec l’existence de protocoles connus et régulière-
ment réactualisés (6). Si la définition classique d’une
HPP correspond à des pertes sanguines supérieures
à 500 ml, de nombreux auteurs ont montré que le
retentissement sur l’état maternel n’était réel que
pour une hémorragie supérieure à 1 000 ml. Lors
d’une césarienne, l’hémorragie est dite significative
si les pertes dépassent 1 000 ml.
En fait, ces définitions très livresques ne correspon-
dent pas à la réalité. La définition “pratique” corres-
pond plutôt à la reconnaissance et au diagnostic
réel d’HPP. Classiquement, ce diagnostic est posé
de façon subjective lorsque la personne ayant en
Figure 1. Prise en charge initiale d’une hémorragie du post-partum immédiat (2).
Diagnostic
de l’hémorragie
Prévenir tous les intervenants potentiels
sans délai (annuaire téléphonique
spécifique disponible)
Prise en charge conjointe et simultanée
Délivrance
eectuée
Délivrance
non eectuée
Mise en place du monitorage
(pouls, PA, SpO2)
Bonne voie dabord veineuse
Remplissage (cristalloïdes)
Vérifier le groupe sanguin (et RAI < 3 jours)
Délivrance artificielle
sous anesthésie
Révision utérine
sous anesthésie
Ocytocine 5 à 10 UI i.v. lente
puis 20 UI en perfusion pendant 2 heures
Sondage vésical, massage utérin
Examen du col et du vagin si doute
Antibioprophylaxie
Si l’hémorragie persiste plus
de 15 à 30 mn malgré cette prise en
charge initiale, voir la gure 2
18 | La Lettre du Gynécologue 352 - mai 2010
Résumé
charge la surveillance de l’accouchée dans les instants
qui suivent la naissance, habituellement la sage-femme,
constate des pertes sanguines plus abondantes que
la normale. Cette appréciation visuelle sous-estime
ralement les pertes (7). Un autre travail prospectif
a comparé l’estimation visuelle des pertes avec leur
quantification biologique. Lestimation visuelle sures-
timait les pertes inférieures à 100 ml et sous-estimait
les pertes surieures à 300 ml. Seule une des 9 HPP (>
500 ml) avait été diagnostiquée visuellement (8).
Un travail français a démontré la valeur du sac de
recueil sous-fessier en tant que moyen de diagnostic
des hémorragies de la délivrance en salle d’accouche-
ment (9). Les auteurs ont étudié de façon prospective
253 patientes accouchant par les voies naturelles
après 37 semaines d’aménorrhée. Ils ont comparé les
taux d’hémoglobine et d’hématocrite à l’admission
en salle de travail avec ceux mesurés au troisième
jour du post-partum. La médiane des pertes était
de 190 ml. La chute du taux d’hématocrite était en
moyenne de 2,7 ± 4 g/dl et celle du taux d’hémoglo-
bine de 1,2 ± 1,4 g/dl. Les auteurs concluaient que
les sacs gradués installés immédiatement après la
naissance permettaient une quantification précise
et efficace des pertes sanguines (9).
Une communication immédiate
Le premier intervenant, le plus souvent la sage-
femme, doit impérativement s’assurer de l’arrivée
la plus rapide possible de l’obstétricien et de l’équipe
d’anesthésie. Une information aussi rapide que
claire doit être apportée à la patiente et/ou à son
conjoint, selon la situation clinique. L’évaluation
de l’état clinique de la patiente (pouls, pression
artérielle) est conduite parallèlement à la mise en
route des premières mesures de réanimation. Dès
le début de la prise en charge, il est fondamental de
noter l’horaire du diagnostic de l’hémorragie (T0),
car les actions entreprises sont chronophages et
les délais de réponse aux différents traitements
peuvent influer sur les stratégies thérapeutiques.
Une feuille de surveillance simple comportant les
différentes phases de la prise en charge et le recueil
des constantes sera débutée et complétée ultérieure-
ment. La phase initiale de la prise en charge des HPP
ne devrait pas dépasser 30 minutes à partir de T0.
Des mesures immédiates
Avant d’agir sur l’utérus, il faut éliminer une cause
évidente de saignement, l’épisiotomie, parfois
négligée et responsable de pertes importantes après
l’accouchement (hémostase rapide par une pince
avant la suture). Lobservation des pertes (absence
de caillots) évoque un trouble sévère de la coagu-
lation.
Une délivrance naturelle exige la normalité des
quatre mécanismes suivants : la coagulation, l’inser-
tion placentaire, la dynamique utérine et la vacuité
utérine. Les rétentions placentaires et les atonies
utérines étant les principales causes d’HPP, la prise
en charge initiale doit traiter les anomalies ayant
trait à ces deux facteurs.
Si la délivrance n’a pas eu lieu, une délivrance
artificielle doit être réalisée le plus rapidement
possible. Parfois, il nexiste aucun plan de clivage : le
diagnostic de placenta accreta sera alors évoqué. La
délivrance sera menée selon les règles de l’art, avec
une parfaite asepsie et après vidange vésicale. Le
plus souvent, le geste est effectué par l’obstétricien,
averti par la sage-femme dès le diagnostic. Toutefois,
en cas d’urgence vitale, la sage-femme procédera
elle-même directement ; à défaut, l’abstention pour-
rait être interprétée comme une non-assistance à
personne en danger. Ce geste se fait sous anesthésie
locorégionale si ce mode d’analgésie est utilisé ou
sous anesthésie générale dans le cas contraire. En
l’absence d’anesthésiste, l’urgence vitale prime et le
geste pourra être effectué exceptionnellement sans
anesthésie, d’autant plus facilement qu’il intervient
rapidement après l’accouchement.
Si l’hémorragie survient alors que la délivrance
a déjà eu lieu, une révision utérine doit toujours
être effectuée pour s’assurer de la vacuité utérine,
de l’absence de rétention placentaire méconnue et
de l’intégrité de la cavité utérine pour exclure une
rupture utérine, diagnostic d’autant plus évoqué
si la patiente avait un utérus cicatriciel. Si ce geste
endo-utérin doit toujours être effectué pour faciliter
la contraction utérine, sa répétition éventuelle ne doit
pas retarder la prise en charge adaptée à la gravité
de la situation. Le plus souvent, une seule révision
utérine suffit à s’assurer de la vacuité utérine. Dans
le même temps, un massage intense et constant du
La prise en charge adéquate d’une hémorragie du post-partum (HPP) nécessite la connaissance parfaite d’un protocole
régulièrement réactualisé et accessible à tout moment, ainsi qu’une dotation suffisante en équipement adapté et en
personnel. Le temps initial comporte la détection rapide de l’hémorragie, facilitée par la mise en place de sacs de recueil
placés après l’expulsion fœtale. Dès le diagnostic, sa communication doit être immédiate à tous les intervenants potentiels
(obstétriciens, sages-femmes, anesthésistes), la prise en charge optimale étant multidisciplinaire. La cause des saigne-
ments doit être recherchée sans délai. La palpation abdominale détecte l’atonie utérine, cause la plus fréquente d’HPP.
Dès le diagnostic, deux attitudes sont possibles : délivrance artificielle ou révision utérine. D’autres origines évidentes
peuvent être exclues : épisiotomie ou plaie de la filière génitale, trouble de la coagulation et thrombus vulvovaginal.
Parallèlement, l’emploi d’utérotoniques est indispensable. Les ocytociques en intraveineux direct sont les plus utilisés.
En parallèle à cette prise en charge obstétricale immédiate, les premiers gestes de réanimation doivent être effectués.
Trente minutes après le diagnostic d’HPP, si les premières mesures thérapeutiques se sont révélées inefficaces, il faut
débuter sans retard une perfusion de sulprostone. Néanmoins, après 30 mn de perfusion sans amélioration ou si la situa-
tion s’aggrave, il faut envisager d’autres stratégies thérapeutiques (embolisation, chirurgie). L’utilisation du misoprostol
en intrarectal n’est pas validée en curatif.
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Mots-clés
Ocytociques
Prostaglandines
Évaluation
Keywords
Ocytocin
Prostaglandins
Assessment
La Lettre du Gynécologue 352 - mai 2010 | 19
DOSSIER
fond utérin doit être effectué par la main abdomi-
nale de l’opérateur. Ce massage permet d’obtenir
une rétraction utérine et un globe de sécurité. Il ne
doit en aucun cas être interrompu précocement. De
façon concomitante, une injection d’utérotoniques
doit être effectuée. Dans certains cas, une compres-
sion bimanuelle peut être efficace : la main vaginale
refoule le corps utérin contre la main abdominale qui
empaume le fond utérin, permettant de plaquer une
paroi utérine contre l’autre.
Parmi les complications des gestes endo-utérins,
la principale est l’endométrite. Une étude rétrospec-
tive de 14 années portant sur 25 687 femmes ayant
accouché comparait 1 052 délivrances artificielles à
1 085 contrôles. Lodds-ratio (OR) était de 2,9 (IC
95
:
1,7-4,9) après ajustement. Dans le sous-groupe des
délivrances artificielles effectuées pour hémorragie
(n = 71), la fréquence dendométrite était de 5,6 %
contre 1,8 % dans le groupe contle (OR = 3,2 ; IC95 :
0,9-9, NS) [10]. Dans une série plus récente, le taux
d’endométrite était de 3,5 % après livrance artificielle
(n = 114) versus 0,9 % pour les contrôles (n = 113),
difrence non significative. Les auteurs constataient
que la majorité des femmes délivrées artificiellement
avait pourtant néficd’une antibiothérapie (11). Si
la littérature n’apporte pas de ponse sur la cessité
de couvrir un geste endo-urin pendant une délivrance
artificielle, la conclusion de cette étude montre que
l’association à une anémie accroît le risque infectieux
et qu’il semble logique d’envisager systématiquement
une antibioprophylaxie à large spectre.
Persistance des saignements
Après s’être assuré de la vacuité utérine (surveillance
de la hauteur utérine) et de l’absence de rupture
utérine, l’examen de la filière génitale doit être
effectué au moindre doute à l’aide de valves, sous
anesthésie et avec l’aide d’un assistant. Pour certains,
cet examen est systématique. Pour d’autres, il sera
exécuté si l’accouchement a été traumatique (avec
ou sans extraction instrumentale), s’il a été particu-
lièrement rapide, s’il s’agissait de l’accouchement
d’un macrosome ou si la suture de lépisiotomie était
difficile. L’inspection de la filière génitale permet de
diagnostiquer jusqu’à 9 % des causes d’HPP (6) et
de proposer le traitement chirurgical des déchirures
vaginales et/ou cervicales à l’origine de saignements
abondants méconnus lors de la révision utérine. Ces
déchirures sont responsables de 20 % des transfusions
(12). À ce stade, l’existence d’un thrombus vulvo-va-
ginal peut être découverte. Son traitement doit être
immédiat (embolisation et/ou chirurgie).
Les utérotoniques
Aucune étude rigoureuse, randomisée ou non, n’a
permis de déterminer quel était l’utérotonique de
choix, sa dose et sa durée d’utilisation optimale. En
France, l’ocytocine est la molécule la plus utilisée
en première intention.
Les ocytociques
Locytocine, analogue synthétique de l’ocytocine
post-hypophysaire, agit sur des récepteurs utérins
spécifiques. Son action est quasi immédiate et dure
près d’une heure. Ce médicament n’a pas de contre-
indications. Pour des doses supérieures à 80 UI, non
utilisées en clinique, il peut avoir un effet antidiuré-
tique et une saturation des récepteurs peut survenir,
à l’origine d’une atonie secondaire.
Il est totalement impossible et illusoire de vouloir
décrire tous les modes d’administration de ces
molécules (intraveineuse lente de 5 UI ou de 5
à 10 UI) [13]. Certains auteurs contre-indiquent
l’utilisation des ocytociques par voie intraveineuse
directe en raison du risque hypotenseur potentiel
(14). Ce risque d’hypotension ou de choc est décrit
depuis de longues années (15). Pour ces auteurs,
seule l’utilisation en perfusion doit être préconisée
(10 à 20 UI dans 500 ml de Ringer ou de sérum
glucosé ou dans 1 000 ml de Ringer) [14], ce qui
éviterait l’effet hypotenseur. Aucune de ces études
n’est randomisée : il s’agit uniquement de conduites
personnelles rapportées par les investigateurs. Les
doses maximales ne doivent pas dépasser 30 à
40 UI. L’intérêt d’une perfusion d’entretien n’a pas
été démontré, bien que la plupart des publications
décrivent cette pratique. L’injection intramyomé-
triale n’est pas conseillée et retarde l’utilisation en
seconde intention de thérapeutiques plus appro-
priées telles que les prostaglandines. Quelle que soit
la voie d’utilisation, après 15 à 30 mn d’inefficacité
de cette thérapeutique, les traitements de seconde
intention doivent être envisagés.
Les dérivés de l’ergot de seigle
Ils ne devraient plus être utilisés car ils ne sont pas plus
efficaces que l’ocytocine et retardent l’utilisation des
traitements de seconde intention. Ils agissent sur les
récepteurs alpha-adrénergiques du myomètre ; leur
action commence entre 2 et 5 mn et se poursuit pendant
4 à 6 heures (13). Ces thérapeutiques sont contre-in-
diquées chez les patientes hypertendues, chez celles
prsentant une pathologie cardiaque ou coronarienne,
ou en association avec des macrolides. Leur utilisation
ne doit se concevoir qu’en intramusculaire.
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20 | La Lettre du Gynécologue 352 - mai 2010
Hémorragie de la délivrance (1re partie)
DOSSIER
Les prostaglandines
Il s’agit de décrire ici leur utilisation, exceptionnelle,
en traitement curatif de première intention en alter-
native à l’ocytocine (15), et non en préventif ou en
traitement de seconde intention dans les hémor-
ragies persistantes. Ces molécules ont l’avantage
d’agir sur le myomètre de façon plus précoce et plus
rapide que les autres utérotoniques. Le misoprostol,
analogue de synthèse des prostaglandines E1, a
montré des avantages sur les autres prostaglandines
du fait de l’absence de contre-indications et de ses
voies d’administration plus aisées (orale ou rectale).
La première étude randomisée sur le sujet a comparé
l’utilisation de Syntométrine® en intramusculaire
suivie d’une perfusion de 10 UI d’ocytocine dans
500 ml de sérum salé, à l’utilisation de 800 µg de
misoprostol administrés par voie intrarectale (16).
Cette étude sud-africaine a inclus 32 patientes dans
chaque groupe. Les auteurs ont montré une réduc-
tion de 28 % des HPP dans le groupe misoprostol
(p = 0,01). Le biais majeur concernant cette étude de
très faible puissance est qu’elle n’a pas été réalisée
en double aveugle, les obstétriciens connaissant
les drogues utilisées. Un autre biais correspond aux
critères de jugement, puisque les pertes nétaient pas
quantifiées et que les taux d’hémoglobine nétaient
pas connus. En janvier 2010, le Lancet publiait une
étude randomisée comparant le misoprostol per os
et les ocytociques (étude réalisée dans les pays en
développement). Bien que les résultats restent en
faveur de l’ocytocine pour traiter l’HPP, les auteurs
concluent qu’en l’absence de cette molécule, on
obtient des résultats peu différents avec le miso-
prostol (différence de 6 %) en première intention
(critères de jugement : durée et pertes > 300 ml
après diagnostic) [17].
Autres situations
Les césariennes
La fermeture rapide de l’hystérotomie et la répara-
tion des déchirures limitent les pertes sanguines. La
dose optimale d’ocytociques à injecter n’a pas été
définie, mais une étude comparant quatre doses de
bolus n’a pas montré de différence entre les taux
d’atonie utérine identifiée par l’échelle analogique :
5 UI pour la dose la plus faible et 10 à 20 UI pour les
doses supérieures (18). Le massage du fond utérin
associé à l’injection de 5 à 10 UI d’ocytocine par voie
intraveineuse lente arrête souvent les saignements
persistants. Si l’hémorragie se poursuit à ventre
ouvert ou reprend lorsque la paroi abdominale est
déjà suturée, le recours à une thérapeutique mieux
adaptée (médicamenteuse, radiologique ou chirur-
gicale) est nécessaire.
Les hémorragies incoercibles
La prise en charge doit être rapide et immédiate.
Elle doit être multidisciplinaire et le nombre d’in-
tervenants doit être suffisant. Un bilan biologique
de départ (numération, coagulation…) est indispen-
sable et les mesures de réanimation seront adaptées
à l’état maternel. Après un contrôle systématique
de la vacuité utérine et de la filière génitale, les
thérapeutiques seront choisies en fonction de la
sévérité de l’hémorragie. Si les ocytociques sont
insuffisants, les prostaglandines (sulprostone)
peuvent enrayer une atonie utérine. Devant l’échec
de ces traitements, qui seront instaurés bien avant
les 30 minutes théoriques et après avoir éliminé
une rupture ou un trouble primitif de la coagulation,
une radiologie interventionnelle ou une chirurgie
sera entreprise.
Prise en charge d’une
hémorragie persistante
ou grave d’emblée (figure 2) [4]
Avant d’envisager l’embolisation ou en attendant la
chirurgie, différentes thérapeutiques ont été propo-
sées pour traiter les situations d’HPP si l’hémorragie
persiste. Parmi elles, la perfusion de sulprostone
en i.v. est un traitement efficace, à condition de la
mettre en place à temps.
Les prostaglandines
La concentration en prostaglandines endogènes
présente un pic au moment de la délivrance, en
rapport avec le développement de la rétraction
utérine (19). Sur le plan clinique, leur action est
plus puissante et plus précoce que celle de l’ocyto-
cine (12). Trois molécules ont été proposées pour le
traitement de l’atonie utérine.
La PgF2α
Takagi et al. ont comparé l’effet d’injections intra-
myométriales de PgF2α à son administration par
voie systémique dans le traitement des HPP (20).
La voie intramyométriale paraissait plus efficace en
termes de rapidité d’obtention d’une contraction
utérine continue et de quantité de pertes de sang
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La Lettre du Gynécologue 352 - mai 2010 | 21
DOSSIER
après 2 heures. Mais cette molécule a une courte
durée d’action nécessitant la répétition des doses
et de nombreux effets indésirables.
La sulprostone
En France, la sulprostone (Nalador®) est la pros-
taglandine la plus utilisée pour le traitement des
HPP sévères (12). Les premières séries publiées
ont montré une très bonne efficacité avec très
peu d’effets indésirables, mais elles portaient sur
de faibles effectifs (21, 22). Par la suite, ces voies
d’administration ont été contre-indiquées du fait
d’arrêts cardiaques liés au pic plasmatique survenu
après injection intramusculaire ou intramyométriale
(23). À la lecture du Corporate Core Text, on apprend
que l’HPP par atonie utérine est une indication de la
sulprostone dans 18 des 23 pays elle est commer-
cialisée (24). Cela a participé à l’obtention de l’AMM
en France pour cette molécule dans le traitement
des HPP (24).
Goffinet et al. ont rapporté une série de 91 cas et
citent une étude de Gödicke et al. portant sur 87 cas
traités par voie i.v. (12). Ils décrivent une efficacité de
89 % ; dans 11 % des cas, une transfusion sanguine
et/ou une hystérectomie d’hémostase ont été néces-
saires. Dans 71 % des cas, 1 à 2 ampoules ont suffi.
Le débit moyen était de 2,1 à 2,9 µg/mn. Parmi les
effets indésirables, 11 % des patientes ont présenté
une hyperthermie à plus de 39° C. Dans 5,5 % des
cas, on a observé des diarrhées, des vomissements
ou des douleurs utérines. Parmi les 10 échecs, 6
patientes présentaient en plus de l’atonie une autre
cause d’hémorragie (prééclampsie, placenta praevia,
déchirure cervico-isthmique…). Le résultat majeur
était que le risque d’échec était accru lorsque le délai
de prescription de la sulprostone était supérieur à
30 mn (OR = 8,3 ; IC95 : 2,2-31,7). Pour être le plus
efficace possible et entraîner le moins d’effets indé-
sirables graves, ce traitement doit donc être initié
dans les 30 mn suivant le diagnostic (12).
En pratique, il faut diluer une ampoule de 500 µg de
sulprostone dans 50 ml derum physiologique pour
pouvoir l’administrer avec un pousse-seringue sans
poursuivre la perfusion d’ocytocine. Selon l’AMM,
la sulprostone doit être perfusée en i.v. stricte à la
seringue électrique, à un débit continu de 8,3 µg/mn
de façon à ne pas dépasser une ampoule en 1 heure.
Actuellement, il est recommande débuter la perfu-
sion plus prudemment, avec un débit de 1,7 µg/mn
(10 ml/heure), et de n’augmenter que si néces-
saire sans dépasser 8,3 µg/mn (50 ml/heure). En
règle générale, un débit de 20 ml/heure permet de
traiter la plupart des situations. Une fois l’hémor-
ragie contrôlée, le débit sera maintenu ou diminué
à 1,7 µg/mn jusqu’à la fin de l’ampoule. Habituel-
lement, une seule ampoule suffit. Au maximum, on
peut administrer 3 ampoules. Par la suite, un relais
sera systématiquement réalisé avec une perfusion
d’ocytocine (10-20 UI dans un sérum glucosé à 5 %
à passer en 6 heures). Il est impossible de donner un
délai pour l’efficacité de ce traitement, car il dépend
de l’importance de l’hémorragie, de l’état clinique
de la patiente et des moyens mis en œuvre pour la
réanimer. Cependant, en l’absence d’amélioration
après 30 mn de perfusion de sulprostone ou en cas
d’aggravation, il faut envisager d’autres solutions
(embolisation, chirurgie).
Les contre-indications les plus fréquentes sont
notamment l’asthme, la bronchite spastique, les
affections cardio-vasculaires (angine de poitrine,
maladie de Raynaud, troubles du rythme, insuffi-
sance cardiaque, HTA) et les antécédents thrombo-
emboliques. Toutefois, les HPP étant des urgences
vitales, il faut soigneusement évaluer le rapport
bénéfice/risque de ce traitement.
Entre 1982 et avril 2000, moins de 200 effets
indésirables ont été rapportés pour 1,4 million de
patientes traitées (24). Certains effets peu sévères
ont été décrits : nausées, vomissements, spasmes
abdominaux, diarrhées, plus rarement obnubilation
ou phalées et, dans des cas isolés ou chez les sujets
prédisposés, une bronchoconstriction (surveillance
accrue chez les grands fumeurs). Des accidents cardio-
vasculaires graves (arrêt cardiaque, angor) ont été
Références
bibliographiques
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partum hemorrhage with uterine
packing. Am J Obstet Gynecol
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Clinique SFAR 1997 : hypovolémie
au bloc opératoire. Ann Fr Anesth
Réanim 1997;16:8-14.
Figure 2. Prise en charge d’une HPP persistante au-delà de 15 à 30 mn (4).
Prévenir tous les intervenants sans délai
Prise en charge conjointe et simultanée
Pose d’une 2 voie veineuse
Prélèvement sanguin : NFS plaquettes,
TP, TCA, fibrinogène
Surveillance : scope, TA régulière,
oxymétrie de pouls,
sondage vésical à demeure
Remplissage (colloïdes), oxygénation
Prévenir le site transfusionnel et commander
si nécessaire des CG et PFC
Si hémodynamique instable :
traitement de choc
EMBOLISATION ARTÉRIELLE
Indication pférentielle dans
l'accouchement par voie basse
et la lésion cervico-vaginale
Non
Persistance de lhémorragie
plus de 30 mn sous sulprostone
Révision col/vagin si voie basse
et si non réalisée auparavant
Sulprostone : 100 à 500 µg/h par voie i.v.
+ relais par ocytocine 10 à 20 UI
en perfusion dans les 2 heures
Radiologie interventionnelle
accessible
État hémodynamique
stable
e
Échec
CHIRURGIE
Ligatures vasculaires ± hystérectomie
Indication pférentielle
au cours d’une césarienne
NFS : numération formule sanguine. TP : taux de prothrombine. TCA : temps de céphaline activé.
CG : culot globulaire. PFC : plasma frais congelé.
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