! ! Le misoprostol pour le traitement de l’hémorragie post-partum dans les milieux à ressources restreintes Déclaration commune Confédération internationale des sages-femmes (ICM) Fédération internationale de gynécologie et d’obstétrique (FIGO) March 2014 La Confédération internationale des sages-femmes (ICM) et la Fédération internationale de gynécologie et obstétrique (FIGO) ont un engagement commun établi de longue date afin de faire respecter le droit fondamental des femmes à la santé, de réduire l'incidence globale de la mortalité et morbidité maternelles et d'utiliser, pour ce faire, des interventions fondées sur des données probantes. Cette déclaration tient compte des dernières données (2012) concernant l'utilisation du misoprostol dans le traitement de l'hémorragie post-partum (HPP) dans les milieux à ressources restreintes où il n'existe pas d'ocytocine par voie intraveineuse, la référence en matière de traitement de l'HPP. Contexte L'hémorragie post-partum est la cause principale de morbidité et de mortalité maternelles, mais dans la plupart des cas de HPP, il est possible de prévenir et de traiter efficacement l’HPP, à peu près partout où une femme peut devoir accoucher. Investir dans une formation améliorée des sages-femmes et des services obstétriques reste indispensable afin de réduire la mortalité et la morbidité maternelles. Pour répondre aux besoins des populations les plus défavorisées, l'accès aux interventions vitales au sein des communautés doit être une priorité. La prise en charge active de la troisième phase du travail, en administrant un utérotonique, peut réduire les pertes de sang et réduire l'incidence de HPP. Néanmoins, 6 à 16 % des femmes auxquelles on administre un utérotonique en prophylaxie1 risquent de tout de même développer une hémorragie post-partum, nécessitant une intervention rapide. En cas de HPP, s’il n’est pas possible d’administrer 40 UI en IV d'ocytocine, la référence en matière de traitement de l'HPP (par exemple : du fait du manque de personnel qualifié ou de mode de réfrigération), 800 μg de misoprostol en sublingual, un médicament sûr et efficace présentant peu de contre-indications ou d'effets secondaires, peut être utilisé pour contrôler la perte de sang. La FIGO et l’ICM se sont engagées à favoriser l’accès au misoprostol pour faire de la prise en charge de l'hémorragie du post-partum une réalité, en particulier dans les milieux à ressources restreintes où l'injection d’ocytocine par intraveineuse reste très largement indisponible ou inaccessible. Les avantages du misoprostol dans le traitement de l'hémorragie post-partum dans les milieux à ressources restreintes - Sûr, efficace, facile à administrer, effets secondaires transitoires, rentable, largement disponible et stable à température ambiante - Fournit une option sûre et efficace pour le traitement de l'HPP lorsque l'ocytocine par voie intraveineuse n'est pas disponible ou possible. 1 Carroli G, Cuesta C, Abalos E, Gulmezoglu AM. Epidemiology of postpartum haemorrhage: a systematic review. Best Practice & Research Clinical Obstetrics and Gynaecology 2008; 22:999-1012. March 2014 1 Recommandations pour le traitement de l’HPP lorsqu’il n’est pas possible d’administrer 40 UI d’ocytocine par voie intraveineuse immédiatement2 Posologie Une dose unique de 800 µg de misoprostol par voie sublinguale est indiquée pour le traitement de l'HPP lorsqu’il n’est pas possible d’administrer 40 UI d'ocytocine par IV immédiatement (indépendamment des mesures de prophylaxie). Mode de traitement Une fois que l’HPP est diagnostiquée, le traitement doit immédiatement être administré. Doses répétées ou consécutives Étant donné que les effets secondaires connus du misoprostol semblent être liés à la dose, les doses répétées ou consécutives de misoprostol peuvent augmenter l’incidence des effets secondaires. Si l'ocytocine est déjà administrée pour le traitement de l'HPP, tout porte à croire que l’administration d’une dose complémentaire (simultanée) de misoprostol ne présente aucun bénéfice supplémentaire. Aucune étude ne donne suffisamment d'informations sur l'effet de deux ou plusieurs doses consécutives de misoprostol pour le traitement de l'HPP. En l'absence de telles informations, les doses répétées de misoprostol pour le traitement de l'HPP ne sont pas recommandées. Les autres possibilités de traitement, telles que la compression bimanuelle ou la compression de l'aorte, sont à envisager si une dose n'a pas eu les effets escomptés. Contre-indications Antécédents d’allergie au misoprostol ou à tout autre prostaglandine Précautions 1. Il est conseillé de faire preuve de prudence dans les cas où la femme pourrait avoir déjà reçu du misoprostol en prophylaxie afin de prévenir l'HPP, si une dose initiale de misoprostol a été associée à la pyrexie ou un grelottement accentué. 2. Après l’administration d'utérotoniques, il faut envisager les autres mesures possibles pour faire cesser le saignement et analyser d'autres causes possibles pour l’HPP et non plus seulement l'atonie utérine. 3. Des traces de misoprostol ou de son métabolite actif peuvent se retrouver dans le lait maternel, mais aucun effet secondaire en cas d'allaitement du nourrisson n'a été signalé. Effets et effets secon- Les effets et effets secondaires prolongés ou sérieux sont rares. Les effets secondaires les plus courants identifiés en lien avec le misoprostol sont : daires Fièvre/Grelottement : des grelottements, frissons et/ou fièvre sont associés à l’utilisation du misoprostol. Les grelottements sont présents chez 37 à 47 % des femmes après une administration de 800 μg de misoprostol sublingual, la fièvre chez 22 à 44 % et l'hyperpyrexie (> 40 degrés Celsius) chez 1 à 14 %. Ces effets secondaires sont temporaires, ils ne mettent pas la vie de la patiente en danger et ils peuvent être gérés à l'aide d'antipyrétiques et d’un refroidissement physique. Effets gastro-intestinaux : les nausées sont observées chez 10 à 15 % des femmes après une administration de 800 µg de misoprostol sublingual et les vomissements chez environ 5 % des femmes. Ces deux effets secondaires doivent disparaître dans un délai de deux à six heures. Un antiémétique peut être administré si nécessaire, mais en règle générale, aucune action n'est requise si ce n’est de rassurer la femme et sa famille. Les diarrhées sont également un symptôme présent chez environ 1 % des femmes mais elles doivent disparaître en une journée. 2 FIGO Guidelines, Treatment of postpartum haemorrhage with misoprostol, International Journal of Gynecology and Obstetrics 119 (2012) 215 - 216 March 2014 2 Plan d’appel à l’action Compte tenu du rôle essentiel joué par les deux associations internationales des professionnels de santé, que sont l’ICM et la FIGO, ils doivent garantir aux femmes, surtout celles se trouvant le plus à risque face à la morbidité et la mortalité lors de l'accouchement en raison d'un manque de soignants qualifiés et d’un manque d'accès à l'ocytocine, l, accès au misoprostol. Les associations nationales d’obstétrique et de sages-femmes qui jouent un rôle de chef de file à cet égard, notamment dans les pays où l'accès universel à l'ocytocine est erratique, sont instamment priées d'entreprendre les actions essentielles suivantes : - Plaider pour l'intégration de ces recommandations internationales sur l'utilisation du misoprostol dans les milieux à ressources restreintes pour le traitement de l’HPP, au sein des directives cliniques nationales, améliorant ainsi les approches et les services de santé maternelle. - Completer les directives nationales en organisant des programmes de formation initiale et continue destinés aux fournisseurs de soins de santé à l’aide de simulations de traitement de l’HPP, lorsque cela s’avère possible. Les programmes doivent inclure une formation à la physiologie de la troisième phase de travail et à la prise en charge de l'HPP, en se basant sur des estimations visuelles de la perte de sang et des symptômes cliniques - Renforcer la capacité des fournisseurs de soins de santé afin qu’ils puissent avoir une meilleure compréhension de la physiologie du travail et d’un accouchement normal et qu’ils puissent pratiquer des procédures vitales supplémentaires telles que la compression bimanuelle de l'utérus et la compression de l'aorte si le saignement persiste après l'administration d'utérotoniques 3 - Collaborer avec les intervenants clés afin de plaider en faveur de plus de disponibilité, d’accessibilité physique et financière aux soins spécialisés et aux produits essentiels qui peuvent sauver des vies, comme les utérotoniques, pour toutes les femmes lors de l’accouchement - Promouvoir une approche de partage des tâches visant à améliorer les soins vitaux et à remettre en question les barrières réglementaires et politiques qui limitent l'accès à ces soins, en veillant bien à disposer d’un personnel de maternité dûment qualifié, capable d'administrer des médicaments utérotoniques et de travailler en partenariat avec d'autres professionnels de santé à travers toute la gamme des soins de maternité - Travailler avec les organisations de la société civile afin de sensibiliser les communautés sur l'importance de l'accès aux soins prénatals et de la présence de soignants qualifiés lors de chaque naissance 4 - Plaider en faveur d'une augmentation du nombre de sages-femmes et mobiliser les ressources afin d’identifier et de mettre en œuvre des stratégies novatrices permettant d’assurer un accouchement securitaire pour les femmes, en particulier les plus défavorisées. 3 FIGO Guidelines, Prevention and treatment of postpartum haemorrhage in low resource settings, FIGO Safe Motherhood and Newborn Health Committee, International Journal of Gynecology and Obstetrics 117 (2012) 108 – 118 4 Role of the Midwife in Physiological Third Stage of Labour, ICM Position statement (2011) March 2014 3