pement et la réparation des vaisseaux sanguins. Douze nouvelles
mutations de ce gène ont été décrites par la suite (6).
L’hétérogénéité génétique de la maladie de ROW pourrait expli-
quer certaines différences phénotypiques. Ainsi, la mutation
HHT 1 serait associée à une plus grande fréquence de fistules
artério-veineuses pulmonaires dans les familles (7). L’expression
de ces gènes est très variable d’une famille à l’autre, mais éga-
lement dans une même famille, et peut parfois faire croire à un
saut de génération, donc à une pénétrance incomplète qui serait
en fait proche de 100 %. Les cas sporadiques par mutation spon-
tanée ont une fréquence théorique évaluée à 2, voire 3.10
-6
. Il
n’existe actuellement pas de méthode fondée sur l’étude de
l’ADN pour le diagnostic de cette affection.
En cas de maladie de ROW familiale, le couple désirant un enfant
doit être informé de l’histoire naturelle de l’affection. D’après
les lois de Mendel, si l’un des parents est hétérozygote, le risque
d’héritage est de 1 sur 2. Si les deux géniteurs sont touchés,
l’enfant homozygote peut décéder dans les premières semaines
ou années de vie, mais il a déjà été rapporté un sujet homozygote
survivant, bien que sévèrement atteint, et même père de
13 enfants, tous atteints. Le conseil génétique s’impose donc, sur-
tout pour les familles à risque de FAVP et de complications neu-
rologiques.
MANIFESTATIONS EXTRAPULMONAIRES
(3, 5, 8-9)
L’histoire naturelle de la maladie de ROW se décompose classi-
quement en quatre étapes. Après une phase de latence complète
d’une à plusieurs années surviennent les épistaxis, généralement
entre 15 ans et 40 ans. Les télangiectasies cutanéo-muqueuses
apparaissent le plus souvent avant la troisième décade, alors que
les atteintes viscérales, parfois hémorragiques, apparaissent plus
tardivement et touchent moins d’un quart de la population. Les
malformations vasculaires sont pulmonaires et cérébrales chez
les plus jeunes, gastro-intestinales et hépatiques chez les plus
âgés. Enfin, une anémie chronique hypochrome et hyposidéré-
mique, conséquence d’hémorragies répétées, nasales, digestives
ou bronchiques, peut conduire au diagnostic.
Les épistaxis sont observées dans 96 % des cas au cours de
l’évolution de la maladie de ROW, une fois sur deux avant
20 ans. Elles sont spontanées ou secondaires à de minimes trau-
matismes, d’évolution capricieuse, avec des périodes d’accalmie
de plusieurs mois ou années, surtout entre 50 et 70 ans. Il n’existe
pas de corrélation entre la durée et la sévérité des épistaxis. Obser-
vées parfois dès l’enfance et même avant l’apparition de lésions
muqueuses décelables, leur sévérité est modérée une fois sur trois,
importante une fois sur trois. L’examen minutieux de la muqueuse
nasale, palatine, linguale ou jugale permet parfois de visualiser
les télangiectasies responsables du saignement. Ces épistaxis
requièrent parfois des supplémentations ferriques et/ou foliques
et des transfusions qu’il faut faire précéder d’une vaccination
contre l’hépatite B. Les modificateurs de l’hémostase sont évi-
demment contre-indiqués. Les traitements locaux s’avèrent vite
inefficaces et risquent de détruire la cloison nasale : vasocons-
tricteurs, acide aminocaproïque, cryochirurgie, cautérisations chi-
miques ou électriques, injections de colles biologiques. Ces tech-
niques réduisent les chances d’un futur contrôle par estrogéno-
thérapie ou plastie chirurgicale. L’embolisation radiologique est
possible, mais non dénuée de risques.
Les télangiectasies cutanéo-muqueuses apparaissent dans
74 % des cas, et une fois sur deux avant 30 ans. Il s’agit de lésions
caractéristiques, maculaires et punctiformes, de 1 à 3 mm de dia-
mètre, bien délimitées, de couleur rubis, non pulsatiles et ne
s’effaçant pas à la vitropression. Elles vont croître en nombre et
en taille avec l’âge pour toucher, par ordre de fréquence, la face,
les lèvres, les ailes du nez, la langue, les oreilles, les mains, la
poitrine, les pieds. Elles surviennent habituellement 10 à 30 ans
après les épistaxis, ne régressent jamais, mais peuvent s’aggra-
ver par poussées, notamment durant la grossesse. Le diagnostic
différentiel à évoquer devant ces télangiectasies est celui d’une
sclérodermie ou d’un CREST syndrome, affection exceptionnel-
lement familiale, dont les manifestations hémorragiques restent
cependant au second plan.
Les manifestations gastro-intestinales (10) sont très
variables, et surviennent plutôt après 40 ans.
– Les saignements gastro-intestinaux concernent 10 à 30 % des
patients atteints de ROW. Leur présentation clinique couvre le
spectre entier des hémorragies gastro-intestinales, de l’hématé-
mèse à la rectorragie. Certaines formes asymptomatiques ne sont
révélées que par une anémie ferriprive dont la cause réelle peut
être masquée en raison d’épistaxis associées. Les patients ont le
plus souvent un saignement chronique modéré avec méléna inter-
mittent, mais peuvent voir leur saignement s’aggraver brutale-
ment. L’endoscopie permet parfois de visualiser des télangiec-
tasies, muqueuses ou sous-muqueuses, susceptibles d’intéresser
tous les segments digestifs, de la langue au rectum, avec une pré-
dominance pour l’estomac, où elles peuvent atteindre 1 cm de
diamètre, et le duodénum, où elles sont plus petites et diffuses.
Parfois, ce sont de minuscules lésions en tête d’épingle pourpre,
ou encore des malformations artério-veineuses à type d’ané-
vrysme, varices, fistules cœliaques ou mésentériques visibles en
angiographie. Les formes symptomatiques font donc l’objet
d’explorations endoscopiques hautes ou basses, en respectant les
mesures prophylactiques de greffe oslérienne en cas de FAVP
connue, et nécessitent parfois une étude angiographique. Les sai-
gnements accessibles peuvent faire l’objet de coagulations endo-
scopiques ou d’une chirurgie, alors que les estrogènes n’ont pas
d’effet démontré.
– L’atteinte hépatique (8 %) est souvent peu documentée, s’expri-
mant par une hépatomégalie, une cirrhose, un angiome, une ascite,
un souffle auscultatoire, voire un thrill. Un shunt droite-gauche
hépatique peut être à l’origine d’une défaillance cardiaque à haut
débit, tandis que les fistules artère hépatique-veines portales peu-
vent occasionner une hypertension portale et se compliquer de
varices œsophagiennes. Les lésions vasculaires hépatiques sont
facilement détectées par écho-doppler couleur.
Les manifestations neurologiques émaillent l’évolution de la
maladie dans 4 à 12 % des cas, avec souvent des antécédents
familiaux d’atteinte neurologique, ce chiffre atteignant 41 % en
cas de FAVP associée. C’est après 30 ou 40 ans que peuvent sur-
venir des céphalées, des épisodes de diplopie, de dysarthrie, de
crises d’épilepsie partielle ou généralisée, de confusion ou
MISE AU POINT
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La Lettre du Pneumologue - Volume III - no2 - avril 2000