Conclusion Dossier thématique D ossier thématique Y a-t-il une vie pour un nouveau médicament après les deux anti-TNF ? Is there a life for a novel drug after anti-TNF therapy? # Marc-André Bigard* L es refus d’enregistrement par l’Agence européenne du médicament de deux molécules proposées dans le traitement de la maladie de Crohn nous invitent à réfléchir sur les nouvelles obligations qui pèsent sur les laboratoires pour obtenir une autorisation de mise sur le marché. Il est clair que depuis quelques années, essentiellement depuis l’affaire Vioxx, les agences du médicament, FDA pour les ÉtatsUnis et EMEA pour 29 pays européens, ont durci leurs critères d’enregistrement aussi bien pour la démonstration d’efficacité que pour les preuves de la sécurité d’emploi. Les MICI ne font pas exception, même si le rapport bénéficerisque d’un traitement sera apprécié d’un œil différent dans ce domaine par rapport au traitement du syndrome de l’intestin irritable. Le natalizumab a obtenu une AMM pour la sclérose en plaques avec des indications très restreintes et des précautions d’emploi drastiques. Dans cette maladie, les ressources thérapeutiques sont peu nombreuses et l’effet du natalizumab est certain, ce qui a entraîné l’autorisation du médicament en monothérapie pour des maladies sévères en impasse thérapeutique. Dans la maladie de Crohn, le bénéfice du natalizumab apparaît réel mais uniquement pour le traitement d’entretien, donc au long cours. Le risque de leucoencéphalite multifocale progressive chez des malades souvent immunodéprimés en raison des traitements * Service d’hépato-gastroentérologie, CHU Nancy. reçus précédemment a fait pencher le rapport bénéfice-risque de façon défavorable, et l’extension d’indication du natalizumab pour la maladie de Crohn a été refusée en Europe. Le certolizumab est le 3e anti-TNFα étudié de façon importante dans la maladie de Crohn. À la différence de l’infliximab et de l’adalimumab, le laboratoire a soumis à l’avis de l’EMEA une première demande pour ce médicament avec la maladie de Crohn comme indication, alors que pour les deux autres antiTNF, une autorisation avait été obtenue tout d’abord pour la polyarthrite rhumatoïde avec une extension d’indication ultérieure dans la maladie de Crohn (variation de type II). Le certolizumab n’a pas obtenu d’AMM en procédure d’appel en raison d’une démonstration peu convaincante de l’efficacité du médicament pour l’indication d’une rémission et d’études au long cours de 6 mois seulement, alors que les guidelines de développement requièrent des essais sur 12 mois en double aveugle. Le natalizumab a donc été refusé essentiellement pour des raisons de sécurité d’emploi, tandis que le certolizumab l’a été pour une démonstration non convaincante d’efficacité. On voit donc les difficultés actuelles d’enregistrement de nouvelles molécules dans les MICI avec la nécessité d’une démonstration convaincante d’efficacité à court et à long termes, mais également du besoin absolu de preuve d’un risque “raisonnable” pour le malade dans un domaine pathologique où la chirurgie représente une option thérapeutique réelle. Parmi les nombreuses molécules en cours d’élaboration, on a du mal à discerner une candidate à un enregistrement dans les 3 à 5 ans à venir ! N Prochain dossier thématique à paraître en septembre 2008 Sport et maladies digestives Coordination : Dr Jérôme Watelet (Nancy) 98 La Lettre de l’Hépato-gastroentérologue - Vol. XI - n° 3 - mai-juin 2008