10 | La Lettre d’ORL et de chirurgie cervico-faciale • n° 324 - janvier-février-mars 2011
CONGRÈS
RÉUNION
surdité de transmission fluctuante et enfin en cas
de neuropathie auditive. Il faut appareiller au plus
vite car la fonction crée l’organe : les zones tempo-
rales dévolues vont être utilisées pour la vue si elles
restent trop longtemps non utilisées pour l’audition.
Les surdités unilatérales
Elles sont aussi fréquentes chez les garçons que
chez les filles. Leur prévalence est de 0,5 à 9 ‰.
Les surdités unilatérales sont prénatales dans deux
tiers des cas, postnatales dans un tiers des cas.
Elles sont souvent méconnues et négligées. L’âge
moyen du diagnostic est de 7 ans. Or, une étude
faite sur plus de 7 000 collégiens a montré que
la surdité unilatérale est un facteur de risque de
troubles du comportement (20 % versus 4,4 %), de
redoublement (30 % versus 15%) et de difficultés
d’apprentissage scolaire. Une prothèse augmentera
l’intelligibilité – dans le calme, mais aussi et surtout
en milieu bruyant. Elle est à conseiller à l’école
primaire et au collège, les adolescents abandonnant
en général leur prothèse ensuite.
Le suivi des enfants sourds appareillés
Le rôle de l’ORL ne s’arrête pas au diagnostic initial
de la surdité. Il faut aussi faire un bilan étiologique
(anamnèse, évolutivité, examen crânio-facial,
examen neuropédiatrique, ophtalmologique,
imagerie, consultation génétique) et proposer un
suivi (état des téguments et du conduit auditif
externe, mais aussi évolution de la perte auditive, du
port des prothèses, suivi orthophonique et scolaire).
Retard de langage sans surdité
Atelier animé par le Pr Naïma Deggouj (Bruxelles)
avec les Dr Geneviève Lina-Granade (Lyon)
et Evelyne Veuillet (Lyon)
Devant tout retard de langage, il importe de
vérifier en premier lieu que l’audition est normale.
Si l’enfant n’a pas d’hypoacousie, il peut s’agir d’un
retard simple du langage, d’une dysphasie, d’un
trouble central de l’audition, d’un retard mental
ou d’un trouble envahissant du développement, pour
lesquels la prise en charge est bien différente de celle
d’une hypoacousie.
Pour parler, il faut avoir quelque chose à dire,
avoir envie de le dire et savoir comment le dire.
Comprendre la parole et parler mettent en jeu
beaucoup d’aires cérébrales et nécessitent de faire
la synthèse de diverses perceptions (l’audition mais
aussi la vision et la proprioception). De bonnes
stimulations auditives et langagières sont néces-
saires pour obtenir l’émergence, puis le renfor-
cement du langage, mais il faut aussi de bonnes
appétences à la communication, de bons organes
sensoriels, avec, en particulier mais pas seulement,
de bonnes capacités auditives et l’intégrité des aires
corticales cérébrales impliquées dans le traitement
des mouvements, des informations sensorielles et
du langage. La production du langage, quant à elle,
requiert une bonne perception auditive, mais aussi
le développement des circuits du langage, un bon
contrôle moteur et proprioceptif de l’articulation
(mouvements et aussi séquence des mouvements
articulatoires) et de bons effecteurs (larynx, voile
du palais, langue, lèvres).
La cause la plus fréquente de retard de langage
sans hypoacousie est le retard simple du langage.
Il touche 5 à 10 % des enfants. Mais ce diagnostic
ne peut être porté qu’après avoir éliminé les autres
causes. Il est en particulier à distinguer d’une
dysphasie développementale, trouble structurel
de l’élaboration du langage sans déficit sensoriel
ou mental, qui touche 1 % des enfants, un peu
plus les garçons que les filles (sex-ratio : 1,5). Ce
diagnostic doit être évoqué si 3 des critères suivants
sont présents : dissociation automatico-volontaire,
troubles de l’évocation lexicale, trouble d’encodage
syntaxique, hypospontanéité, trouble de la compré-
hension verbale. Ces enfants doivent être pris en
charge de manière multidisciplinaire, avec une
recherche de lésions cérébrales (épilepsie, dilatation
ventriculaire, etc.) et d’anomalies génétiques.
Les troubles centraux de l’audition touchent 2 à 3 %
des enfants. Ces enfants sont adressés en consul-
tation pour des difficultés scolaires. Les parents
rapportent des difficultés d’audition mais l’audio-
métrie tonale et l’intelligence sont normales. Tout
se passe comme si le système nerveux central
avait du mal à utiliser l’information auditive. Ces
enfants ont des difficultés à comprendre, surtout
s’il y a plusieurs locuteurs ou un fond sonore. Ils
donnent des réponses inappropriées, sont lents dans
leurs réponses, jamais sûrs d’eux (“hein”, “quoi”,
“comment”, etc.), et sont facilement distraits par
l’environnement. Ces enfants ont beaucoup de
mal à suivre les consignes orales et obtiennent
donc de mauvais résultats scolaires. Il existe chez
eux un grand nombre de comorbidités : 25 % sont
dyslexiques et 50 % ont un trouble du langage. ■