congrès RÉUNION coordonné par le Pr G. Steg ESC 2008. Présentation des études BEAUTIFUL et SYNTAX O. Brevet* Munich, 30 août-3 septembre 2008 Intérêt de l’ivabradine dans la prise en charge de la maladie coronaire : résultats de l’étude BEAUTIFUL * Paris. Principales causes de mortalité à travers le monde, les maladies cardiovasculaires représentent un problème de santé publique majeur. Parmi celles-ci, les affections coronariennes sont responsables d’un décès toutes les minutes. La mise en application de mesures hygiéno-diététiques comme l’arrêt du tabagisme, la pratique d’une activité physique ou une alimentation plus saine est une étape indispensable dans la prise en charge de l’angor stable, au même titre que le contrôle des pathologies associées tels le diabète, l’hypertension artérielle ou les dyslipidémies. De nombreux traitements pharmacologiques sont disponibles pour prévenir l’apparition de symptômes, l’ivabradine (Procoralan®) étant l’un des plus récents. L’ivabradine agit en réduisant uniquement la fréquence cardiaque, par inhibition sélective et spécifique du courant pacemaker If qui contrôle la dépolarisation diastolique spontanée au niveau du nœud sinusal et régule la fréquence cardiaque. Cette dernière est un déterminant bien connu d’ischémie myocardique, une fréquence cardiaque élevée représentant un facteur de risque cardiovasculaire identifié. Malgré la prescription importante de bêtabloquants, une forte proportion de patients atteints d’angor présente une fréquence cardiaque supérieure à 70 bpm. Utilisée en deuxième intention en cas d’intolérance ou de contre-indication aux bêtabloquants, l’ivabradine a démontré ses propriétés anti-angineuses et anti-ischémiques dans différentes études, ainsi qu’une bonne tolérance chez un large panel de patients avec ou sans comorbidité, et avec ou sans traitement associé. 28 | La Lettre du Cardiologue Risque Cardiovasculaire • n° 419 - novembre 2008 Aussi, l’étude BEAUTIFUL (morBidity-mortality EvAlUaTion of the I[f] inhibitor ivabradine in patients with coronary disease and left ventricULar dysfunction) s’est intéressée au rôle potentiel de l’ivabradine dans la prévention des complications cardiovasculaires et des décès liés à l’angor stable. Cette étude multicentrique randomisée s’est attachée à mettre en évidence la supériorité de l’ivabradine par rapport à un placebo. Concernant près de dix mille sujets atteints d’angor stable, l’étude incluait des patients âgés de 55 ans et plus s’ils n’étaient pas diabétiques, et des patients diabétiques à partir de 18 ans. Le critère d’évaluation principal regroupait un ensemble d’événements cardiovasculaires tels que mortalité cardiovasculaire, hospitalisation à la suite d’un infarctus du myocarde, apparition ou aggravation d’une insuffisance cardiaque. À l’issue d’un suivi de plus de 18 mois, une différence significative en faveur de l’ivabradine a été observée sur le taux d’hospitalisation pour infarctus du myocarde (IDM) et le taux de prise en charge par revascularisation. L’ivabradine est le premier traitement anti-angineux à entraîner une réduction des IDM, des revascularisations chez les patients présentant une fréquence cardiaque supérieure à 70 bpm souffrant d’angor stable, et confirme donc son intérêt dans la prise en charge de cette pathologie. Angioplastie coronaire percutanée ou pontage aortocoronarien : résultats de l’étude SYNTAX La sténose d’une ou de plusieurs artères coronaires est une affection cardiaque qui nécessite une prise en charge d’urgence afin de revasculariser le cœur. congrès RÉUNION Parmi les traitements disponibles, l’option chirurgicale consistant à réaliser un pontage aorto-coronarien (coronary artery bypass grafting surgery [CABG]) est considérée comme la plus efficace dans les cas de mauvais pronostic. En parallèle, les progrès réalisés dans le domaine de l’angioplastie coronaire (percutaneous coronary intervention [PCI]) sont considérables, à tel point que celle-ci constitue aujourd’hui une alternative intéressante au pontage. Toutefois, il est à noter que la chirurgie de pontage a également fortement évolué, grâce à une meilleure prise en charge périopératoire et à des techniques moins invasives. Dans l’intention de mieux définir la stratégie à adopter face à un syndrome coronaire aigu, l’étude SYNTAX (SYNergy between PCI with TAXUS drugeluting stent and cardiac surgery) est une étude prospective randomisée et multicentrique dont le but est de comparer deux techniques de revascularisation : la chirurgie cardiaque par greffe de pontage coronarien et l’angioplastie transluminale par stent imprégné de paclitaxel (TAXUS®). L’étude s’est intéressée aux patients présentant une sténose de novo du tronc commun de l’artère coronaire gauche (left main disease [LMD]), isolée ou associée à une sténose d’autres territoires coronaires, ainsi que les patients dont les trois principales artères coronaires (interventriculaire antérieure gauche, artère circonflexe et artère coronaire droite) étaient atteintes (Three Vessel Disease [3VD]). Dans chacun des 85 centres participants (62 en Europe et 23 aux États-Unis), l’évaluation des patients était menée par un cardiologue et un chirurgien, notamment pour déceler l’existence d’une contre-indication à l’une ou l’autre des techniques, mais également pour attribuer un score de complexité des lésions coronaires (score SYNTAX), prenant en compte des paramètres anatomiques et physiopathologiques. Les 1 800 patients éligibles pour les deux options ont été randomisés en deux groupes, l’un traité par chirurgie de pontage (N = 897), l’autre traité par angioplastie avec pose de stent imprégné de paclitaxel. Par ailleurs, 1 077 patients inéligibles pour l’angioplastie et 198 patients inéligibles pour le pontage ont constitué le second bras de l’étude. Le critère d’évaluation principal de ce travail était le taux de survenue à 12 mois d’événements car­diaques ou cérébrovasculaires majeurs, incluant les décès toutes causes confondues, les accidents vasculaires cérébraux, les infarctus du myocarde ou la pratique d’une nouvelle revascularisation par CABG et/ou PCI. Dans le bras randomisé de l’étude, les taux cumulés de décès, d’AVC et d’IDM après 12 mois de suivi étaient comparables : 7,7 % chez les patients traités par CABG et 7,6 % chez les patients traités par PCI. En revanche, une revascularisation a été plus fréquemment nécessaire chez les patients ayant subi une angioplastie (13,7 % versus 5,9 %) et, à l’inverse, la survenue d’AVC était plus rare chez ces patients (0,6 % versus 2,2 %). Globalement, la survenue d’événements majeurs était plus importante dans le groupe PCI que dans le groupe CABG (17,8 % versus 12,1 %). Les complications inhérentes à chaque procédure ont été observées à des fréquences similaires à 12 mois : occlusion de pontage dans 3,4 % des cas et thrombose de stent dans 3,3 % des cas. La non-infériorité de la PCI n’a donc pas pu être démontrée vis-àvis de la CABG. L’analyse des différents sous-groupes définis en fonction du nombre et de la localisation des territoires vasculaires sténosés n’a pas permis de mettre en évidence de différence significative concernant le critère d’évaluation principal ; cependant, on a pu noter une hausse significative de la proportion d’événements majeurs à 12 mois chez les patients diabétiques ayant subi une angioplastie. Les patients identifiés comme inopérables ou chez qui la réalisation d’une angioplastie était impossible ont été suivis au sein de deux bras “registres”. Chez les patients assignés au registre PCI, la présence de comorbidités était la principale cause d’inopérabilité (70,7 %), alors que, pour les patients assignés au registre CABG, ils étaient inéligibles à l’angioplastie le plus souvent en raison d’une anatomie trop complexe (70,9 %). Dans le registre PCI, le taux de survenue d’événements majeurs à 12 mois était de 20,4 %, avec 7,3 % de décès toutes causes confondues, aucun AVC, 4,2 % d’IDM et 12 % de patients nécessitant une autre revascularisation. Dans le registre CABG, on a observé un taux d’événements majeurs à 12 mois de 8,8 % (avec 2,5 % de décès de toutes causes, 2,2 % d’AVC, 2,5 % d’IDM) et 3 % des patients ont subi une nouvelle revascularisation. Toutefois, aucune étude statistique n’a comparé les deux registres, les bras registres et les bras randomisés. Bien que la non-infériorité du traitement par angioplastie n’ait pu être démontrée, l’étude SYNTAX a confirmé les progrès des deux techniques. Dans un tiers des cas de l’étude, le pontage aorto-coronarien constitue la seule option de traitement. Chez un patient inéligible à l’angioplastie, les résultats de la chirurgie de pontage sont particulièrement satisfaisants. Chez le patient inopérable, l’angioplastie représente une option viable. ■ La Lettre du Cardiologue Risque Cardiovasculaire • n° 419 - novembre 2008 | 29