REVUE DE PRESSE coordonnée par le Dr F. Beygui DOT-HF : le monitoring de l’impédance intrathoracique chez les insuffisants cardiaques ne diminue pas les événements cardiovasculaires et augmente le nombre d’hospitalisations pour insuffisance cardiaque Les sondes de défibrillateurs (défibrillateur automatique implantable [DAI]) ± avec resynchronisation (Cardiac Resynchronization Therapy with Defibrillator [CRT-D]) permettent de mesurer de nombreux paramètres hémodynamiques. L’impédance intrathoracique (système OptiVol®) mesurée chute avec l’augmentation de la précharge. Un index d’impédance supérieur à 60 Ω/j a été associé à la survenue de décompensations cardiaques dans les semaines qui ont suivi. Le bénéfice d’une intervention précoce fondée sur une alerte auditive à ce seuil n’a jamais été démontré. L’étude DOT-HF, financée par Medtronic, a inclus 335 patients au stade II-IV de la NYHA (fraction d’éjection du ventricule gauche [FEVG] inférieure à 35 %, exclusion des inscrits sur liste de transplantation), dans les 6 mois suivant l’implantation d’un DAI seul (18 %) ou d’un CRT-D (82 %), randomisés en ouvert entre le groupe alerte auditive (168 patients) et le bras contrôle sans alerte (167). Sur un suivi moyen de 14,9 ± 5,4 mois, l’objectif primaire (décès toutes causes confondues et hospitalisations pour insuffisance cardiaque) n’était pas différent entre le groupe alerte et le groupe contrôle (29 % versus 20 %, p = 0,063, HR = 1,52 [IC95 : 0,97-2,37]), sans différence dans les décès (19 versus 15, p = 0,54), avec plus d’hospitalisations dans le bras alerte (HR = 1,79 [IC95 : 1,08-2,95], p = 0,022). Les visites étaient plus nombreuses dans le groupe alerte (250 versus 84, p < 0,0001) avec moins de signes d’insuffisance cardiaque dans ce groupe. A. Bellemain-Appaix, institut de cardiologie, hôpital de la Pitié-Salpêtrière, AP-HP, Paris. ARMYDA-6 MI : angioplastie primaire des STEMI : la dose de charge de 600 mg de clopidogrel fait mieux que celle de 300 mg sur tous les plans L’hyperagrégation plaquettaire, l’inflammation et l’urgence de l’angioplastie primaire des infarctus du myocarde avec sus-décalage du segment ST (ST Elevation Myocardial Infarction [STEMI]) nécessitent une antiagrégation puissante et rapide. Les nouveaux inhibiteurs du P2Y12 représentent un traitement de choix, mais le clopidogrel conserve une place dans les situations à haut risque hémorragique. Si les études observationnelles suggèrent la supériorité d’une dose de charge de 600 mg versus 300 mg dans cette situation, aucune étude randomisée ne l’avait encore montré. ARMYDA-6 MI (Antiplatelet therapy for Reduction of MYocardial Damage during Angioplasty-Myocardial Infarction) est une étude randomisée multicentrique prospective, menée chez 201 patients admis pour une angioplastie primaire de STEMI inférieurs à H12, qui 8 | La Lettre du Cardiologue ̐ n° 450 - décembre 2011 Commentaire L’étude, qui devait inclure 2 400 patients, a été interrompue de façon prématurée (défaut d’inclusion) ; une analyse post hoc de futilité a montré qu’un résultat positif au terme de l’étude aurait été peu probable. L’idée est néanmoins bonne : prévenir les décompensations chez ces sujets fragiles, par des témoins de pression ou d’impédance intracorporels qui sont connus comme pronostiques. Le seuil d’index d’impédance semble ici trop bas (faible spécificité avec nombreuses alertes sans signes patents d’insuffisance cardiaque). Un télémonitorage pourrait être utile pour éviter des consultations inutiles. D’autres études sont en cours et apporteront des éléments d’orientation. À suivre. Référence bibliographique Van Veldhuisen DJ, Braunschweig F, Conraads V et al. Intrathoracic impedance monitoring, audible patient alerts, and outcome in patients with heart failure. Circulation 2011 (Epub ahead of print). REVUE DE PRESSE coordonnée par le Dr F. Beygui compare 600 mg versus 300 mg de dose de charge de clopidogrel avant une angioplastie (délai de prétraitement identique de 35 à 39 mn). Les patients recevaient 500 mg d’aspirine i.v., 70 UI/kg d’HNF ; anti-GpIIb/IIIa (48 % versus 58 %, p = NS) et thromboaspiration (19 % versus 14 %, p = NS) étaient optionnels ; 72 % des procédures étaient fémorales, 42 % des IDM étaient de localisation antérieure, 100 % des patients ont été dilatés, 99 % ont été stentés, 11 % versus 19 % avec stents actifs (p = NS). La bithérapie aspirine-clopidogrel 75 mg était poursuivie pendant une période supérieure ou égale à 1 an. La dose de charge de 600 mg était supérieure en tout point : ✓ objectif primaire de taille de l’IDM (aire sous la courbe de CPK [créatinine phosphokinase] et de troponine pendant 72 h : 2 070 [815-2 847] versus 3 049 [1 050-7 031] ng/ml, p = 0,0001 et 255 [130-461] versus 380 [134-1 406] ng/ml, p < 0,0001) ; ✓ objectifs secondaires de flux TIMI (Thrombolysis in Myocardial Infarction) inférieur à 3 post-PCI (Percutaneous Coronary Intervention [intervention coronarienne percutanée]) moins fréquent (5,8 % versus 16,3 %, p = 0,031), FEVG (fraction d’éjection du ventricule gauche) à la sortie supérieure par échographie (52,1 ± 9,5 % versus 48,8 ± 11,3 %, p = 0,026), MACE (Major Acute Coronary Events) à 30 jours (décès, nouvel infarctus, accident vasculaire cérébral [AVC], revascularisation urgente du vaisseau cible : 5,8 % versus 15 %, p = 0,049) ; ✓ sans surcroît d’hémorragies majeures (1,9 % versus 2 %) et mineures (7,8 % versus 6,1 %) selon les critères TIMI à 30 jours. ABA Commentaire Le clopidogrel conserve une place dans la prise en charge des STEMI à haut risque hémorragique, alors que le prasugrel et le ticagrelor doivent être évités. Si les recommandations de l’ESC (Société européenne de cardiologie [European Society of Cardiology]) donnent à la dose de charge de 600 mg de clopidogrel une place respectable (classe I), elles s’appuyaient sur un faible niveau de preuve (C : études observationnelles). La lacune est désormais comblée avec une étude randomisée qui confirme les pratiques actuelles : dans le STEMI, si le clopidogrel doit être employé en amont d’une angioplastie primaire, il faut donner 600 mg et non 300 mg de dose de charge. Référence bibliographique Patti G, Barczi G, Orlic D et al. Outcome comparison of 600- and 300-mg loading doses of clopidogrel in patients undergoing primary percutaneous coronary intervention for ST-Segment Elevation Myocardial Infarction : Results From the ARMYDA-6 MI. J Am Coll Cardiol 2011;58:1592-9. Fréquence cardiaque en récupération : prédicteur de décès, modifiable par l’exercice physique Une baisse de fréquence cardiaque trop faible après récupération (fréquence cardiaque au repos [FCR] : fréquence max-fréquence à 1 mn de récupération inférieure à 12 bpm) est prédictive de décès ; seules de petites études ont montré qu’une réadaptation cardiaque (RC) améliorait la FCR, aucune n’a cherché à démontrer un impact sur la survie. Cette étude rétrospective monocentrique a inclus 1 070 patients consécutifs admis pour un programme de RC de phase 2, avec test d’effort d’entrée (réalisé moins de 3 mois avant la RC) et de sortie (réalisé moins de 1 mois après la fin du programme), et mesure de la FCR (exclusion des porteurs de pacemaker, des patients souffrant de fibrillation atriale et des transplantés). Le programme était étalé sur 12 semaines à raison de 3 séances/sem (10 à 15 mn d’échauffement, 30 à 50 mn d’effort à 50 à 80 % de la réserve de FC, 15 à 20 mn de récupération). Les coronariens et les postopératoires (valves, pontages) représentaient 95 % des patients. Les tests étaient faits sur tapis selon les protocoles de Cornell ou de Naughton, menés jusqu’aux symptômes ou atteinte de 85 % de la fréquence maximale théorique (FMT). Soixante-sept pour cent des patients étaient sous bêtabloquants. L’amélioration de la FCR et la mortalité étaient les critères primaires d’évaluation. Les patients ont été suivis en moyenne pendant 8,1 ans. Sur les 544 patients (51 %) qui avaient une FCR inférieure à 12 bpm à l’entrée (groupe FCR anormale), 223 (41 %) l’ont normalisée après la RC. Dix-huit pour cent des patients sont décédés (13 % des patients avec FCR normale à l’entrée, 24 % avec FCR anormale, p < 0,001). La RC améliorait les FCR des 2 groupes (20,1 ± 6,2 à 21,9 ± 8,9 bpm pour le groupe FCR normale et 6,5 ± 4,1 à 11,5 ± 6,8 bpm pour le groupe FCR anormale, p < 0,001). L’absence d’amélioration de la FCR était prédictive de mortalité (p < 0,001). Une FCR anormale à la sortie était prédictive de décès quels qu’aient été les groupes (HR = 2, 15 [IC95 : 1,43-3,25]) après analyse multivariée (incluant : âge avancé, artériopathie oblitérante des membres inférieurs [AOMI], insuffisance Commentaire L’étude a des limites (rétrospective, monocentrique, absence de contrôle sans RC, mais les études ont montré que lui seul peut améliorer la FCR). C’est néanmoins la seule qui objective que la FCR, témoin du tonus vagal, encore une fois démontrée comme prédictive de mortalité quand elle est trop faible (HR > 2), est modifiable et normalisée dans plus de 50 % des cas par un nouvel entraînement physique, et que cela normalise la survie de ces patients. Les bêtabloquants ne modifient en rien les résultats. Un appui supplémentaire pour les 30 mn d’exercice physique 3 fois par semaine… cardiaque, incapacité d’effort). Les patients qui normalisaient leur FCR après la RC avaient un Référence bibliographique taux de survie identique à celui des patients à FCR normale à l’entrée et à la sortie (p = 0,143). Jolly MA, Brennan DM, Cho L. Impact of exercise on heart rate recovery. Circulation 2011;124:1520-6. ABA 10 | La Lettre du Cardiologue ̐ n° 450 - décembre 2011