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Dirigée par le Pr P. Amarenco
La Lettre du Neurologue - Vol. XI - n° 3 - mars 2007
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Risque d’hémorragie cérébrale
et consommation
de phénylpropalamine dans
les traitements contre le rhume
L
La phénylpropalamine (PPA) est un
agent sympathomimétique vasocons-
tricteur indiqué pour ses effets déconges-
tionnants” sur les voies aériennes supérieures,
et dont les propriétés ont aussi été exploitées
comme coupe-faim (retirés du marché). Il a été
mont que la PPA est un facteur indépendant
d’accident vasculaire cérébral hémorragique
chez la femme jeune et d’âge moyen lorsqu’il
est utilisé comme anorexigène (Lake CR et al.
Am J Med 1990; Kikta DG et al. Stroke 1985;
Johnson DA et al. Lancet 1983; Kase CS et al.
Neurology 1987). Léquipe coréenne, qui a mené
ce travail, a cherché à déterminer si les prépa-
rations contre le rhume, contenant de la PPA
à des posologies plus faibles, augmentaient
également le risque d’hémorragie cérébrale. Il
s’agit d’une étude cas-témoins multicentrique
dans laquelle 920 patients coréens hospitalisés
pour une hémorragie intraparenchymateuse
ou sous-arachnoïdienne ont été inclus. Les
sujets ont été soumis à un questionnaire afin
de déterminer les traitements qu’ils ont pris
ainsi que leur posologie. Le délai de survenue
de l’hémorragie brale aps la prise de PPA
a également été noté. Les résultats tendent à
montrer que la prise de spécialités médica-
menteuses décongestionnantes contenant de la
PPA est associée à une augmentation du risque
d’accident vasculaire hémorragique. Chez la
femme, ce risque augmente en cas d’exposi-
tion récente, mais également en fonction de
la dose de PPA consommée et de la durée du
traitement. Alors que le taux d’exposition à la
PPA est identique (bien que faible) entre les
deux sexes, les résultats ne sont pas significatifs
chez l’homme.
Commentaire. Cette étude aboutit aux
mêmes conclusions que les travaux précédents
sur la PPA, en particulier chez la femme, avec
un risque accru d’hémorragie cérébrale. Ainsi,
les substances qui contiennent de la PPA à une
posologie inférieure à celle contenue dans les
traitements utilisés comme coupe-faim, sont
également pourvoyeuses d’effets secondaires
nongligeables. Néanmoins, plusieurs points
restent discutables. En effet, le risque dexposi-
tion dans la population étudiée est très faible et
les données sont parfois à la limite de la signifi-
cativité. Cliniquement, seuls les sujets pouvant
»
répondre au questionnaire ont été inclus, ce
qui implique que les personnes présentant des
troubles neurologiques importants nont pas é
comptabilisées. De plus, les patients recrutés
sont tous coréens et il ne faut pas méconnaître
la variabilité de l’hémorragie cérébrale au sein
des populations d’ethnies différentes.
Ces données suggèrent, en pratique clinique,
de limiter la prescription de ces traitements
pour des indications bien précises, au cas
par cas, en recherchant scrupuleusement les
contre-indications.
C. Guidaux, hôpital Bichat, Paris.
Yoo KM and for the Acute Brain Bleeding Analysis (ABBA) Study
Investigators. Phenylpropanolamine contained in cold remedies
and risk of hemorrhagic stroke. Neurology 2007; 68:146-9.
Sœur Anne,
ne voyez-vous rien venir ?
L
Les auteurs se sont intéressés à la faculté
quauraient certains patients épileptiques
de prédire la survenue de leurs crises dans les
24 heures précédant la crise effective. Pour
ce faire, ils ont recruté 71 patients souffrant
d’une épilepsie partielle déjà enrôlés dans une
autre étude observationnelle, et ils leur ont
demandé de tenir un calendrier de leurs crises,
en notifiant chaque jour de façon prospective la
sensation prémonitoire de survenue de crises
dans les 24 heures suivantes (survenue très
probable, probable, peu probable, improbable).
Sur les 71 patients, tous âgés de plus de 18 ans,
32 souffraient d’une épilepsie temporale,
6 d’une épilepsie frontale, 10 d’une épilepsie
extratemporale non frontale et 23 d’une
épilepsie dont le foyer n’était pas locali.
Quinze mille six cent trente-cinq journées
de recueil de crises ont été analysées au total.
Cinquante-sept patients (80 %) ont notifié
au moins à une reprise une prémonition très
probable ou probable de survenue de crise, sans
relation avec la localisation de l’épilepsie. Sur les
1 488 crises notées dans les calendriers, 475 ont
été prédites correctement (sensibilité : 31,9 %).
À l’inverse, 2 303 prémonitions très probables
ou probables de survenue de crises nont pas été
suivies de réelle crise (spécificité : 83,2 %) sur les
13 691 journées sans crises. Parmi les patients
prédisant leurs crises, on pouvait identifier
des sujets meilleurs prédicteurs que d’autres,
12 patients notamment (21 %) ont démontré
une capacité à prédire la survenue de leurs
crises statistiquement significative avec une
sensibilité de 57 % et une spécificité de 88 %.
»
Commentaire. La plupart des patients
épileptiques rapportent des sensations prémo-
nitoires de crises (à distinguer des auras qui
font déjà partie de la crise) dans les heures,
voire les jours précédant la ou les crises. Ces
sensations, rarement prises en compte par les
médecins, pourraient, si elles étaient fiables,
constituer un symptôme d’alerte précieux
pour les patients et diminuer le côté aléa-
toire, contraignant et imprévisible des crises
d’épilepsie. Létude semble confirmer que
certains patients épileptiques sont capables
de prédire avec uneabilité variable, mais réelle
pour certains, la survenue de leurs crises. Bien
entendu, cette étude possède des limites inhé-
rentes à sa méthodologie de self-reporting : les
crises notifiées sont-elles réelles ? Combien de
crises nont pas été notifiées, car non perçues
par les patients ? Les calendriers ont-ils été bien
remplis prospectivement comme demandé ?
Cependant, il nen demeure pas moins que ces
phénomènes prémonitoires de crises sont un
constat passionnant tant sur un plan physio-
pathologique (interaction entre les réseaux
neuronaux physiologiques et les réseaux épilep-
tiques, transition progressive de l’état interictal
vers létat ictal) que thérapeutique.
S. Dupont, unité d’épileptologie,
hôpital de la Pitié-Salpêtrière, Paris.
Haut S, Hall C, LeValley A et al. Can patients with epilepsy
predict their seizures? Neurology 2007;68(4):262-6.
Sclérose latérale primitive :
quelles particularités cliniques ?
L
La sclérose latérale primitive (SLP) est
une enti rare appartenant au spectre des
maladies du motoneurone et qui se distingue de
la scrose larale amyotrophique (SLA) par une
atteinte isolée des motoneurones centraux. La
question de savoir s’il sagit d’une entiséparée
ou d’une simple variante de la SLA nest pas
tranchée. Cette étude rétrospective monocen-
trique avait pour objectif d’isoler des différences
cliniques permettant de distinguer ces deux
entités. Les auteurs ont ainsi compaune série
de 43 patients correspondant à un tableau de
SLP (critères de Pringle) à 661 patients ayant un
diagnostic de SLA (crires d’El Escorial). Quand
on consire les signes initiaux, l’hypertonie était
le seul symptôme différenciant les deux groupes
(47 % des SLP versus 4 % des SLA). Les fascicu-
lations, les crampes et le déficit moteur étaient
plus fréquents chez les patients SLA, mais sans
que cette différence atteigne la significativité.
»
»
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Au cours des trois premières années du suivi,
l’apparition d’une amyotrophie était rarement
observée chez les patients présentant une SLP
(2 % des cas), alors quelle était constante au cours
de la SLA (77 %). Cette étude confirme également
que la survie est significativement plus longue
dans la SLP (11,2 ans en moyenne contre 3,8 ans
dans la SLA). Les patients SLA présentant une
hypertonie dès le début de la maladie avaient
également une survie plus longue, mais sans
toutefois atteindre la significativité.
Commentaire. Cette étude confirme le fait
quil nexiste pas darguments cliniques formels
permettant de distinguer la SLA de la SLP. La
présence d’une hypertonie initiale et l’absence
d’amyotrophie dans les trois premières années
plaident en faveur d’une SLP. La faiblesse de
cette étude rétrospective reste l’absence de
suivi électromyographique systématique,
sachant qu’il s’agit bien sûr d’un examen clé
pour distinguer ces deux pathologies.
P.F. Pradat, Fédération des maladies du système nerveux,
hôpital de la Pitié-Salpêtrière, Paris.
Tartaglia MC, Rowe A, Findlater K, Orange JB, Grace G, Strong MJ.
Dierentiation between primary lateral sclerosis and amyotrophic
lateral sclerosis: examination of symptoms and signs at disease
onset and during follow-up. Arch Neurol 2007;64(2):232-6.
Chirurgie précoce
chez le parkinsonien jeune
L
La stimulation subthalamique est habi-
tuellement proposée chez des parkin-
soniens qui, après 15 ans de maladie, ont des
complications motrices sévères, une dégra-
dation de leur qualité de vie, une insertion
sociale et parfois même familiale menacée,
l’âge maximal étant de 70 ans.
Schüpbach et ses collègues de la Pitié-Salpê-
trière ont étud l’inrêt dune chirurgie précoce,
dès la 5
e
année de maladie, chez des patients
jeunes qui commencent à être gênés par les
complications motrices de la dopathérapie avec
une insertion socioprofessionnelle préservée.
Vingt patients âgés de moins de 55 ans,
porteurs d’une maladie de Parkinson évoluant
depuis 5 à 10 ans (6,8 ans ± 1,0 ans) avec des
signes moteurs légers à modérés (UPDRS
en off 29 ± 12) et une bonne réponse à la
L-dopa (UPDRS en on 3 ± 3) ont été inclus, et
appariés pour l’âge, la durée et la sévérité de
la maladie ainsi que pour le handicap socio-
professionnel à des parkinsoniens non traités
par la stimulation. Les patients étaient rando-
»
»
misés de façon prospective pour bénéficier soit
d’une stimulation dans les noyaux subthalami-
ques (n = 10), soit d’une adaptation optimale
du traitement médicamenteux (n = 10). Les
scores moteurs, la qualité de vie, la cognition
et la comorbidi psychiatrique ont été évals à
linclusion et à 6, 12 et 18 mois aps la randomi-
sation. Alors que la quali de vie (PDQ-39) était
inchangée dans le groupe non chirurgical, elle
était aliorée de 24 % dans le groupe chirurgical
(p < 0,05), avec une diminution des sous-scores
activités de la vie quotidienne, stigmatisation
et confort corporel. À 18 mois, la sévérité des
signes moteurs en phase off, les complications
motrices et la dose de L-dopa étaient diminuées
respectivement de 69 %, 83 % et 57 % chez les
malades opérés, mais augmentées de 29 %, 15 %,
et 12 % chez les malades sous traitement médica-
menteux seul (p < 0,001). Les effets indésirables
étaient légers ou transitoires ; la comorbidité
psychiatrique et l’anx étaient améliorées dans
le groupe opépar rapport à létat de base.
Commentaire. Partant des premres cohortes
opérées et publiées, l’AMM officielle de cette
thérapie s’adresse à des malades à un stade
très évolué de leur maladie avec une perte de
leur autonomie en phase off (stades IV et V de
Hoehn et Yahr). Depuis quelques années déjà,
dans notre pratique clinique, il y a une tendance
à opérer des parkinsoniens plus précocement, la
chirurgie nétant plus considérée comme expé-
rimentale. Les auteurs de cette étude enfoncent
donc le clou et montrent pour la première fois,
et avec une approche scientifique rigoureuse,
l’int de la stimulation subthalamique chez le
patient jeune à un stade très précoce. Elle peut
donc être discutée chez un patient jeune qui
remplit les critères diagnostiques de maladie
de Parkinson 5 ans après le but des premiers
signes et qui commence à être gêné dans sa
vie socioprofessionnelle par des fluctuations
motrices et des dyskinésies. Il s’agit ici d’une
petite série de malades, et il n’y a pas eu de
complication chirurgicale sévère. Cette étude
pilote demande donc à être confirmée à plus
large échelle et une étude multicentrique
franco-germanique est en cours. Si les résultats
de cette étude pilote se confirment, la prise en
charge de ce sous-groupe de parkinsoniens sera
profondément modifiée.
P. Krack, département de neurologie, CHU de Grenoble.
Schüpbach WMM et al. Neurosurgery at an earlier stage of
Parkinsons disease. Neurology 2007;68:267-71.
»
»
Éradication de Helicobacter pylori
et réponse thérapeutique
à la L-dopa
L
Une étude ouverte de Pierantozzi et al.
avait suggéré que l’éradication de Heli-
cobacter pylori pouvait améliorer la réponse
clinique à la L-dopa chez les patients parkin-
soniens infectés par la bactérie. Forts de ces
résultats, les auteurs ont ensuite mené une
étude randomisée en double aveugle étudiant
l’effet de léradication de H. pylori sur la réponse
clinique et pharmacocinétique à la L-dopa.
Trente-quatre patients parkinsoniens porteurs
d’une gastrite avec sérologie et biopsies gastro-
duodénales positives pour H. pylori et traités
par L-dopa en monothérapie ont participé à
cette étude. Un placebo leur fut donné pendant
15 jours puis, après randomisation, 17 patients
reçurent le traitement éradicateur (TE) [amoxi-
cilline, clarythromycine et oméprazole] et 17 un
traitement antioxydant cicatrisant (allopurinol).
Les patients furent suivis jusqu’à 3 mois après la
fin du traitement. Les résultats ne montrèrent
aucun effet significatif du placebo et du trai-
tement antioxydant sur la réponse clinique et
pharmacocinétique à la L-dopa. En revanche,
le TE améliora significativement les paramè-
tres pharmacocinétiques de la L-dopa après
administration unique ou pétée du traitement
antiparkinsonien. Cet effet fut associé à une
amélioration des scores cliniques après deux
semaines de TE et jusqu’à 3 mois après son arrêt
(scores UPDRS, durée totale des phases on et
sévérité de la gastrite).
Commentaire. Le TE contre H. pylori, par le
biais dune augmentation prolongée de la concen-
tration plasmatique de L-dopa, semble induire
une ponse plus stable à la L-dopa et réduire les
fluctuations motrices. La corrélation temporelle
entre l’amélioration des sions de gastroduodé-
nite et l’amélioration motrice suggère un rôle
des altérations muqueuses dans les troubles de
l’absorption duodénale du médicament. Étant
donné la forte prévalence d’infection à H. pylori
dans la population générale, les sultats de cette
étude engagent à la recherche sysmatique de la
bactérie chez les patients parkinsoniens présen-
tant des fluctuations motrices inexpliquées.
S. Cantiniaux,
service de neurologie et de pathologie du mouvement,
CHU La Timone, Marseille.
Pierantozzi M, Pietroiusti A, Brusa L et al. Helicobacter
pylori eradication and L-dopa absorption in patients with PD
and motor uctuations. Neurology 2006;66:1824-9.
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