La place des inhibiteurs des tyrosine kinases de l’EGFR

604 | La Lettre du Cancérologue Vol. XX - n° 10 - décembre 2011
MISE AU POINT
La place des inhibiteurs
des tyrosine kinases de l’EGFR
dans les cancers bronchiques
non à petites cellules avancés
The role of EGFR tyrosine kinase inhibitors
in non-small-cell lung cancer
I. Elghissassi*, H. Inrhaoun*, H. M’rabti*, H. Errihani*
* Service d’oncologie médicale,
Institut national d’oncologie, Rabat,
Maroc.
L
e cancer du poumon est un problème de santé
publique dans le monde. Il se situe au quatrième
rang des cancers les plus fréquents en France
avec une estimation d’environ 35 000 nouveaux
cas par an. C’est la première cause de mortalité par
cancer chez l’homme dans le monde et en France :
18,3 % de l’ensemble des décès par cancer (1).
Le type histologique non à petites cellules représente
85 % des cas de cancer pulmonaire, et approxima-
tivement 65 % des patients se présentent d’emblée
à un stade avancé (2-4). Le traitement habituel-
lement proposé à ces patients dont l’état général
est préservé est un doublet de chimiothérapie à
base de cisplatine. Cependant, au fi l des années,
ces cytotoxiques conventionnels ont atteint un
plafond thérapeutique avec une médiane de survie
ne dépassant pas 9 mois (5, 6).
Récemment, la recherche sur le plan moléculaire
sur les stades les plus avancés du cancer bron-
chique non à petites cellules (CBNPC) a ouvert de
nouvelles perspectives thérapeutiques avec l’arrivée
de nouvelles stratégies et de nouvelles molécules.
Le récepteur du facteur de croissance épidermique
(Epidermal Growth Factor Receptor [EGFR]) est un
récepteur transmembranaire de la famille des récep-
teurs à activité tyrosine kinase. Cette glycoprotéine
de 170 kDa comporte un domaine extracellulaire
riche en cystéine où se fi xe le ligand, un domaine
transmembranaire et un domaine intracellulaire
à activité tyrosine kinase. La suractivation de ce
récepteur est impliquée dans la stimulation et le
maintien de la croissance cellulaire, l’angiogenèse
et l’accroissement du pouvoir métastatique (7).
Les inhibiteurs des tyrosine kinases (ITK) de l’EGFR
sont de petites molécules qui entrent en compé-
tition avec l’adénosine triphosphate (ATP) pour la
liaison au niveau du récepteur kinase, bloquant ainsi
l’activation du récepteur (8). Une surexpression de
l’EGFR est observée chez plus de 60 % des patients
atteints d’un CBNPC métastatique et est corrélée
à un mauvais pronostic (9).
Deux inhibiteurs sélectifs et réversibles de l’activité
tyrosine kinase de l’EGFR ont été largement testés
et développés dans le CBNPC avancé : le géfi tinib
et l’erlotinib. D’autres molécules, comme l’icotinib
ou l’afatinib, sont actuellement en cours d’étude, et
les résultats préliminaires sont très encourageants.
Nous allons détailler, à travers une revue de la litté-
rature, les différents essais qui ont testé les ITK de
l’EGFR dans le CBNPC avancé ainsi que les perspec-
tives qu’offrent ces molécules ciblées.
Inhibiteurs des tyrosine kinases
de l’EGFR
au-delà de la première ligne
Initialement, les monothérapies par ITK de l’EGFR
ont été développées dans le CBNPC avancé après
échec d’une chimiothérapie standard à base de
platine.
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La Lettre du Cancérologue Vol. XX - n° 10 - décembre 2011 | 605
Résumé
Le pronostic du cancer bronchique non à petites cellules (CBNPC) s’est considérablement amélioré ces
dernières années, notamment grâce à la découverte à l’échelle moléculaire de certaines mutations qui
engendrent une sensibilité particulière aux inhibiteurs des tyrosine kinases (ITK) de l’EGFR. L’utilisation
de ces derniers, selon des critères biocliniques bien définis, a affiné la prise en charge thérapeutique
des CBNPC, qui, désormais, ne repose plus seulement sur le type histologique et le stade de la tumeur.
LesITK de l’EGFR ont également dessiné leur place dans la stratégie de maintenance et dans le traitement
des sujets fragiles ne supportant pas une chimiothérapie classique. Nous présentons ici les résultats des
principaux essais ayant évalué ces molécules, leurs indications ainsi que les perspectives d’avenir.
Mots-clés
Récepteur du facteur
de croissance
épidermique
Inhibiteurs
destyrosine kinases
Cancer bronchique
non à petites cellules
Summary
The prognosis of non-small-
cell lung cancer (NSCLC) has
improved considerably in the
past years, particularly through
the discovery at the molecular
level of some mutations that
cause a particular sensitivity
to EGFR tyrosine kinase inhib-
itors (TKI). The use of these,
according to bioclinical criteria,
refined the management of
NSCLC, which is now no longer
based solely on the histological
type and stage of the tumor.
The EGFR TKI have also their
place in the maintenance
strategy and in treatment of
patients that do not support
conventional chemotherapy.
We will develop in this work
the results of major trials that
evaluated these molecules,
their indications and future
prospects.
Keywords
Epidermal growth factor
receptor
Tyrosine kinase inhibitor
Non-small-cell lung cancer
Lessai IDEAL 1 (10), mené au Japon, et l’essai
IDEAL 2 (11), mené en Europe et aux États-Unis,
sont des études de phase II randomisées comparant
250 et 500 mg/j de géfi tinib, en monothérapie en
deuxième, troisième ou quatrième ligne de traite-
ment après échec d’une chimiothérapie à base de
platine et/ou de docétaxel. Cinquante pour cent
des patients ont tiré un bénéfi ce clinique du traite-
ment (réponse partielle ou stabilisation). Un tiers
des patients étaient en vie 1 an après le début du
traitement par géfi tinib. En revanche, dans l’essai de
phase III randomisé ISEL (12) comparant le géfi tinib
au placebo chez 1 692 patients atteints de CBNPC en
échec après 1 ou 2 lignes de chimiothérapie, le taux
de réponse était de 8 % pour le géfi tinib versus 1 %
pour le placebo, mais ni la survie médiane (5,6 versus
5,1 mois ; p = 0,089) ni la survie à 1 an (27 versus
21 mois) n’étaient signifi cativement améliorées. Les
résultats de cet essai n’ont pas fait retenir le géfi tinib,
initialement approuvé par la Food and Drug Admi-
nistration (FDA) en mai 2003, dans cette indication.
Dans l’essai canadien BR.21 (13) portant sur
730 patients atteints de CBNPC de stade avancé,
l’erlotinib à la dose de 150 mg/j a été comparé au
placebo. Les patients avaient reçu une première,
une deuxième ou une troisième ligne de chimio-
thérapie (avec du cisplatine dans plus de 90 % des
cas). Lobjectif principal était la survie globale (SG).
Le taux de réponse était de 9 % avec l’erlotinib (1 %
de réponse complète et 8 % de réponse partielle).
La survie médiane était de 6,7 versus 4,7 mois et
la survie à 1 an, de 31 versus 22 %. Ces différences
étaient statistiquement signifi catives (p = 0,0001) et
à l’origine de l’approbation de l’erlotinib aux États-
Unis et en Europe dans le CBNPC après échec d’une
première ligne de chimiothérapie.
Par ailleurs, les études précédentes ont montré une
effi cacité des ITK de l’EGFR plus importante chez les
patients d’origine asiatique, de sexe féminin ou non
fumeurs et lorsque la tumeur était de types histo-
logiques adénocarcinome et bronchiolo-alvéolaire. La
survenue d’un rash cutané chez les patients au cours
du traitement par les ITK, qui sont généralement bien
tolérés, la survenue d’une diarrhée et ou d’une toxicité
cutanée (principalement) ainsi que la présence d’un
grand nombre de copies de l’EGFR étaient des facteurs
prédictifs de la réponse et de la survie (13, 14).
Association d’inhibiteurs
des tyrosine kinases de l’EGFR
et de chimiothérapie
en première ligne
Après que les ITK de l’EGFR eurent prouvé une
certaine efficacité en deuxième ligne thérapeu-
tique dans le CBNPC avancé, il était logique de
conduire des études évaluant la combinaison de
ces molécules à une chimiothérapie standard en
première ligne de traitement. Cependant, aucun
des 4 essais de phase III réalisés n’a pu montrer
un bénéfice en termes de survie à associer un
ITK à la chimio thérapie de première ligne ; au
contraire, cette association augmente la toxicité
(tableau I) [15-18]. Lessai de phase II, présenté par
P.A. Janne et al. à l’ASCO® 2010 (American Society
of Clinical Oncology), a randomisé 181 patients
peu ou non fumeurs entre un traitement combi-
nant erlotinib et chimiothérapie par paclitaxel-
carboplatine, d’une part, et une monothérapie par
erlotinib, d’autre part. Il n’y avait aucun bénéfice
du triplet par rapport à l’erlotinib seul en termes
de survie sans progression (SSP) : 6,6 et 6,7 mois
respectivement [19].
Actuellement, l’association des ITK et de la chimio-
thérapie est contre-indiquée dans le traitement des
CBNPC avancés ou métastatiques.
Tableau I. Essais de phase III évaluant l’ajout des inhibiteurs des tyrosine kinases de l’EGFR à la
chimiothérapie en première ligne thérapeutique dans le CBNPC.
Étude Molécule Médiane de survie
(mois)
Survie à 1an
(%)
p
INTACT1
(15)
Géfi tinib 250-500mg
Placebo
9,9
11,7
41-43
45
NS
INTACT2
(16)
Géfi tinib 250-500mg
Placebo
8,7-9,8
9,9
37-41
42
NS
TALENT
(17)
Erlotinib 150mg
Placebo
9,9
10,1
41
42,1
NS
TRIBUTE
(18)
Erlotinib 150mg
Placebo
10,6
10,5
45,9
43,9
NS
NS : non signifi catif.
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606 | La Lettre du Cancérologue Vol. XX - n° 10 - décembre 2011
La place des inhibiteurs destyrosine kinases del’EGFR
dans les cancers bronchiques non à petites cellules avancés
MISE AU POINT
Inhibiteurs des tyrosine
kinases de l’EGFR et mutations
de l’EGFR :
une ère nouvelle s’installe
Le séquençage du gène EGFR dans le tissu tumoral
a montré que la majorité des tumeurs répondant
aux ITK de l’EGFR portaient des mutations dans le
domaine tyrosine kinase de l’EGFR, spécifi quement
dans les exons 18 à 21 (20, 21). Deux mutations,
les délétions 747-752 de l’exon 19 et la mutation
ponctuelle L858R de l’exon 21, représentent à elles
seules 85 % des mutations de l’EGFR. La distribu-
tion de ces 2 mutations activatrices serait similaire
dans les études, qu’elles soient d’origine asiatique
ou non (22).
Plusieurs méta-analyses et études prospectives de
cohorte ont confi rmé que les patients qui présen-
taient une mutation activatrice de l’EGFR avaient
un meilleur taux de réponse objective, de SSP et de
SG que ceux dont l’EGFR nétait pas muté (22-25).
D’autres essais de phase III ont évalué l’intérêt d’un
traitement par géfi tinib ou erlotinib par rapport à
une chimiothérapie standard en première ligne chez
des patients présentant un CBNPC avancé ou méta-
statique en se fondant soit sur les critères cliniques
d’effi cacité des ITK, soit sur la présence de mutations
de l’EGFR (tableau II).
Lessai IPASS est la plus grande étude de phase III
ayant comparé en première ligne de traitement un
ITK de l’EGFR, le géfitinib (n = 609), à une chimio-
thérapie par paclitaxel-carboplatine (n = 608) [26].
Les critères de sélection étaient cliniques ; la popu-
lation était constituée de patients exclusivement
asiatiques, majoritairement des femmes, anciens
fumeurs légers (moins de 10 paquets-années) ou
non fumeurs et porteurs d’un adénocarcinome. Cet
essai a montré la non-infériorité du géfitinib par
rapport à la bithérapie (médiane de SSP : 5,7 versus
5,8 mois). Cependant, l’analyse des courbes montre
qu’elles se croisent, ce qui signifie que l’étude avait
enrôlé 2 populations, ce que les auteurs avaient
anticipé en prévoyant une analyse pré-spécifiée
de la population avec mutations d’EGFR. L’ana-
lyse a montré que, chez les patients EGFR positifs
(EGFR+), les taux de réponse et de SSP étaient
largement meilleurs pour les patients traités par
géfitinib que ceux des patients EGFR négatifs
(EGFR−).
La deuxième étude fondée sur des critères de sélec-
tion cliniques est FIRST SIGNAL (27). Cet essai,
dont l’effectif est moins important, a également
démontré la supériorité du géfi tinib sur une chimio-
thérapie à base de gemcitabine + cisplatine chez la
population EGFR+, en termes de réponse objective
et de SSP.
Les études OPTIMAL, NEJ002 et WJTOG3405 (28-30)
ont pris comme critère de sélection la mutation de
l’EGFR. La comparaison entre ITK de l’EGFR (erlotinib
et géfi tinib) et chimiothérapie, chez ces patients
tous porteurs de mutations d’EGFR, est largement
en faveur du groupe recevant un ITK.
Lessai européen de phase III EURTAC a comparé,
en première ligne de traitement, l’erlotinib à une
chimiothérapie standard chez des patients exclu-
Tableau II. Essais de phase III comparant un inhibiteur de tyrosine kinase à une chimiothérapie standard en première ligne thérapeutique dans le CBNPC EGFR muté.
Étude IPASS
(26)
OPTIMAL
(28)
NEJ002
(29)
WJTOG3405
(30)
FIRST SIGNAL
(27)
EURTAC
(31)
Critère desélection Cliniques Mutation
EGFR
Mutation
EGFR
Mutation
EGFR
Cliniques Mutation
EGFR
Molécule
Nombre
G
132
PC
129
E
83
GCa
82
G
114
PC
110
G
86
DC
86
G
26
GC
16
E
77
CBP
76
Taux de réponse
objective (%)
71,2 47,3
p=0,0001
83 36
p<0,0001
74 29
p<0,001
62,1 32,2 84,6 37,5
p=0,002
54,5 10,5
p < 0,0001
Survie sans
progression (mois)
9,5 6,3
p<0,001
13,1 4,6
p<0,0001
10,4 5,5
p<0,001
9,2 6,3
p<0,0001
8,4 6,7
p=0,084
9,4 5,2
p < 0,0001
Survie globale
(mois)
18,8 17,4
p=0,109
NR NR 28 23,6
p=0,354
NR NR 30,6 26,5
p=0,648
22,9 18,8
p = 0,42
CBP: chimiothérapie à base de platine; DC : docétaxel + cisplatine ; E : erlotinib ; G : géfi tinib ; GCa : gemcitabine + carboplatine ; GC : gemcitabine+ cisplatine ; NR : non rapporté ; PC : paclitaxel +
carboplatine.
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La Lettre du Cancérologue Vol. XX - n° 10 - décembre 2011 | 607
MISE AU POINT
sivement caucasiens présentant un CBNPC EGFR
muté. Les résultats, présentés cette année à l’ASCO®
et au WCLC (World Conference on Lung Cancer),
montraient une amélioration signifi cative en termes
de SSP (objectif principal) en faveur du bras erlo-
tinib (9,4 versus 5,2 mois ; p < 0,0001). Cet avan-
tage était retrouvé dans tous les sous-groupes de
strati fi cation en dehors de celui des fumeurs actifs
et des ex-fumeurs. La médiane de survie et le taux
de réponse objective (objectifs secondaires) étaient
respectivement de 10,5 % et 18,8 mois sous chimio-
thérapie, versus 54,5 % et 22,9 mois sous erlotinib
(p < 0,0001 ; p = 0,42). La tolérance sous erlotinib
était acceptable avec comme principales toxicités
des diarrhées (57,3 %), de l’asthénie (53,3 %) et des
rashs (49,3 %) [31].
Lensemble des résultats de ces études convergent
pour montrer qu’un traitement par ITK en première
ligne apporte un bénéfi ce signifi catif en termes de
taux de réponse et de SSP chez les patients présen-
tant un EGFR muté par rapport à une chimio thérapie
classique. L’absence de bénéfi ce en termes de SG
notée dans ces essais pourrait s’expliquer par l’effet
des lignes ultérieures du traitement ( crossover),
sachant que le bénéfi ce des ITK serait identique
qu’ils soient administrés en première ligne de
traitement ou au-delà. En effet, la mutation de
l’EGFR est elle-même facteur de bon pronostic, et
les patients reçoivent en général plusieurs lignes
de traitement, notamment par ITK de l’EGFR
chez les patients initialement traités par chimio-
thérapie. Dans l’étude observationnelle de R. Rosell
et al. (22), 217 patients présentant un CBNPC
avancé avec mutation de l’EGFR ont reçu de l’erlo-
tinib en première ligne (n = 113) ou en deuxième
ligne (n = 104) de traitement. Il n’y avait pas de
différence statistiquement signifi cative en termes
de médiane de SSP (14 versus 13 mois ; p = 0,62)
ni de SG (28 versus 27 mois ; p = 0,67).
Inhibiteurs
des tyrosine kinases de l’EGFR
en maintenance
Lobjectif du traitement de maintenance est de
consolider l’effet d’une chimiothérapie de première
ligne, dès la fi n de celle-ci, par l’introduction d’une
nouvelle thérapeutique chez les patients répondeurs
ou stables. Ces dernières années, les résultats de
plusieurs essais évaluant cette approche, en parti-
culier avec des molécules comme le pémétrexed (31)
et les ITK, ont été publiés.
Quatre essais rapportés à ce jour ont évalué l’apport
des ITK dans le CBNPC en situation de maintenance,
dont 3 avec l’erlotinib (SATURN, ATLAS et IFCT-
GFPC 0502) et 1 avec le géfi tinib (EORTC 08021)
[tableau III].
Lessai de phase III SATURN (32) a randomisé
889 patients n’ayant pas progressé après 4 cycles
d’une première ligne de chimiothérapie à base de
platine entre maintenance par erlotinib et placebo
jusqu’à progression ou toxicité inacceptable. La SSP
(objectif principal) était meilleure dans le bras erlo-
tinib (12,3 versus 11,1 mois ; p < 0,0001). La SG était
également signifi cativement améliorée, avec un
hazard-ratio (HR) de 0,79. Actuellement, l’erlo-
tinib est approuvé en traitement de maintenance
en Europe, y compris en l’absence de mutation acti-
vatrice de l’EGFR, chez les patients stables après une
chimiothérapie d’induction.
Tableau III. Études de phase III évaluant les inhibiteurs des tyrosine kinases de l’EGFR en maintenance.
Étude Première ligne Comparaison Survie sans progression Survie globale
HR (IC95) p HR (IC95)p
SATURN
(32)
Platine + 3G Erlotinib versus placebo 0,71
(0,62-0,82)
S 0,81
(0,70-0,95)
S
ATLAS
(33)
Platine + 3G + bévacizumab Bévacizumab + erlotinib
versus
bévacizumab + placebo
0,72
(0,59-0,88)
S 0,92
(0,70-1,21)
NS
IFCT-GFPC 0502
(34)
Gemcitabine + cisplatine Erlotinib versus observation 0,82
(0,73-0,93)
S 0,91
(0,80-1,04)
NS
EORTC 08021
(35)
Platine + 3G Géfi tinib versus placebo 0,61
(0,45-0,83)
S 0,83
(0,60-1,15)
NS
3G : cytotoxiques de 3e génération ; NS : non signifi catif ; S : signifi catif.
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608 | La Lettre du Cancérologue Vol. XX - n° 10 - décembre 2011
La place des inhibiteurs destyrosine kinases del’EGFR
dans les cancers bronchiques non à petites cellules avancés
MISE AU POINT
Dans l’essai de phase III ATLAS (33), randomisé
en double aveugle, la maintenance par l’associa-
tion bévacizumab et erlotinib a été comparée à
l’association de bévacizumab et d’un placebo chez
743 patients. Les médianes de SSP étaient respecti-
vement de 4,76 et 3,75 mois (p = 0,0012), toutefois
sans impact signifi catif sur la SG.
Létude IFCT-GFPC 0502 (Intergroupe franco-
phone de cancérologie thoracique – Groupe fran-
çais de pneumo-cancérologie) [34], conduite par
M. Pérol et al., a comparé sur 464 patients atteints
de CBNPC de stades IIIB et IV, après 4 cycles de
gemcitabine + cisplatine, 3 bras : observation, main-
tenance continue par gemcitabine et maintenance
par erlotinib. La médiane de SSP pour ce dernier
bras était signifi cativement meilleure que celle du
bras observation (p = 0,002). Il y avait également
une tendance à l’amélioration de la SG, mais qui
n’atteignait pas la signifi cativité.
Létude EORTC 08021 (European Organisation for
Research and Treatment of Cancer) [35], compa-
rant un traitement de maintenance par géfi tinib
et un placebo, a été arrêtée prématurément pour
recrutement insuffi sant. Alors que 589 patients
étaient initialement prévus, seuls 173 ont été
inclus. La médiane de SSP était signifi cativement
meilleure dans le bras géfi tinib (4,1 versus 2,9 mois ;
p = 0,0015). Il n’y avait pas de différence en termes
de SG, objectif principal de l’essai.
Grâce aux résultats positifs de ces essais, il est clair
que la maintenance avec les ITK est une nouvelle
option chez les patients présentant un CBNPC avancé
ou métastatique n’ayant pas progressé après une
chimiothérapie première. Elle permet aux patients
de recevoir directement un traitement de deuxième
ligne (presque la moitié des patients ne l’auraient
pas reçu en cas d’attente jusqu’à la progression),
de bénéfi cier d’une période sans chimiothérapie
(et donc de se rendre moins souvent à l’hôpital) et
de prendre des molécules par voie orale générale-
ment bien tolérées.
Inhibiteurs des tyrosine kinases
chez les patients
dont l’état général les rend
non éligibles à un traitement
par chimiothérapie
Dans les CBNPC avancés ou métastatiques, les
patients se présentant dans un mauvais état général
(Performance Status [PS] 3 ou 4) ne sont pas consi-
dérés éligibles à un traitement par chimiothérapie,
en raison de la toxicité et de l’absence d’effi cacité
de cette dernière chez cette catégorie de malades.
Plusieurs auteurs ont tenté d’évaluer le bénéfi ce
des ITK de l’EGFR dans cette situation (tableau IV).
Les différentes études n’ayant pas utilisé de critères
de sélection pour le géfi tinib ont retrouvé des résul-
tats insatisfaisants, avec un taux de réponse objec-
tive de l’ordre de 25 % et une survie médiane qui ne
dépassait pas les 2,5 mois (36, 37). En revanche, dans
l’étude de A. Inoue et al. (38), qui évaluait spécifi -
quement le géfi tinib chez des patients porteurs de
mutations d’EGFR, un taux de réponse objective de
68 % et une survie médiane atteignant les 17,8 mois
ont été notés. Cela indique que le géfi tinib serait la
meilleure option pour les patients avec état général
altéré et EGFR muté, qui ne peuvent recevoir une
chimiothérapie standard.
Inhibiteurs des tyrosine
kinases : perspectives d’avenir
L’icotinib est un nouveau ITK de l’EGFR qui partage
la même structure chimique que l’erlotinib, à l’ex-
ception de leurs chaînes latérales. Ce dernier a été
comparé dans l’essai chinois ICOGENE au géfi tinib
dans le CBNPC chez des patients ayant reçu 1 ou
2 lignes de chimiothérapie. Il s’agit d’une étude de
phase III de non-infériorité dans une population
chinoise non sélectionnée (39). Il n’y avait pas
de différence statistiquement signifi cative entre
les 2 bras en termes de SSP (objectif principal) :
137 jours pour l’icotinib versus 102 jours pour le
géfi tinib. La SG, le taux de réponse et la qualité
de vie étaient également comparables dans les
2 bras, alors que la tolérance était meilleure sous
icotinib, avec moins de rashs cutanés et de diarrhées.
Tableau IV. Inhibiteurs des tyrosine kinases chez les patients de performance status supérieur
ou égal à 3.
Auteur
Molécule
n Sélection PS
3/4
Réponse
objective
(%)
Survie
médiane
(mois)
G.C.Chang et al.
(36)
Géfi tinib
52 Aucune 43/9 25 2,5
Y.J. Lee et al.
(37)
Géfi tinib
74 Aucune 48/26 27 2
A. Inoue et al.
(38)
Géfi tinib
21 EGFR muté 17/4 68 17,8
EGFR:
Epidermal Growth Factor Receptor
.
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