Pneumonie aiguë communautaire de l'adulte
La maladie
La pneumonie aiguë communautaire (PAC) de l'adulte est une infection aiguë du parenchyme
pulmonaire, essentiellement bactérienne, dont la mortalité avant l'ère des antibiotiques pouvait
dépasser 50 %.
Physiopathologie
Les germes responsables sont par ordre habituel de fréquence : Streptococcus pneumoniae,
Mycoplasma pneumoniae, Haemophilus influenzae et, plus rarement, Legionella
pneumophila, Chlamydia pneumoniae, enfin Staphylococcus aureus, et des entérobactéries
chez le sujet âgé. Des germes anaérobies sont observés au cours des pneumonies de
déglutition. Dans les suites d'une grippe, une surinfection bactérienne est possible :
Streptococcus pneumoniae est le plus souvent en cause ; mais également Staphylococcus
aureus, avec un risque de résistance (S. aureus résistant à la méthiciline : SARM), voire
S. aureus sécréteurs de leucocidine Panton-Valentine (toxine PVL).
Epidémiologie
L'incidence de la maladie est de 10 à 16 pour 1 000 personnes par an, avec un risque de
survenue 3 à 10 fois plus élevé après 65 ans. De 25 à 33 % des patients sont hospitalisés. La
mortalité, de 1 à 5 % chez les patients ambulatoires, atteint 12 % s'ils sont hospitalisés. Les
pneumonies peuvent survenir chez n'importe qui. Elles sont plus fréquentes et plus graves
chez les sujets âgés, en présence d'une immunodépression ou de comorbidités.
Complications
La PAC peut se compliquer d'un état de choc, d'une insuffisance respiratoire et d'une
extension locorégionale de l'infection (pleurésie purulente, abcès du poumon, etc.).
Diagnostic
Le diagnostic de pneumonie aiguë communautaire bactérienne de l'adulte (PAC) repose sur
des signes et symptômes d'apparition récente et rarement tous présents : douleur thoracique,
toux avec expectoration d'emblée ou secondairement, dyspnée, polypnée, fièvre, frissons. Les
signes auscultatoires sont diffus ou focalisés : râles crépitants, matité. Une confusion mentale
peut être associée, en particulier chez les patients âgés.
Le diagnostic est confirmé par la radiographie thoracique (debout, face et profil), qui doit être
réalisée dans les 72 heures, ou immédiatement en cas d'urgence. Elle montre typiquement un
ou plusieurs foyers d'alvéolite dont les images peuvent être retardées.
La pneumonie est dite communautaire si elle survient en dehors de l'hôpital, ou à l'hôpital
mais au cours des 48 premières heures de l'hospitalisation.
Devant une pneumonie aiguë communautaire, la distinction des patients à hospitaliser
d'emblée de ceux pouvant être traités en ambulatoire repose sur la recherche et l'analyse de
signes de gravité et de facteurs de risque de mortalité.
Quels patients traiter ?
Tous les patients avec un diagnostic affirmé ou probable de PAC doivent recevoir un
traitement antibiotique.
Objectifs de la prise en charge
Guérison du foyer infectieux.
Prévention des complications.
Prise en charge
Pneumonie aiguë communautaire de l'adulte
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Signes de gravité et situations particulières
Signes de gravité : atteinte des fonctions supérieures, atteinte des fonctions vitales (PA
systolique < 90 mmHg ; fréquence cardiaque > 120/minute ; fréquence respiratoire
> 30/minute) ; température < 35 °C ou ≥ 40 °C ; néoplasie associée ; pneumonie d'inhalation
ou sur obstacle trachéobronchique connu ou suspecté.
Situations particulières : suspicion d'épanchement pleural ou d'abcédation, conditions
socioéconomiques défavorables, inobservance thérapeutique prévisible, isolement social
notamment chez les personnes âgées.
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Comorbidités et facteurs de risque de mortalité
Âge > 65 ans, insuffisance cardiaque congestive, maladie cérébrovasculaire, rénale ou
hépatique, BPCO, immunodépression, drépanocytose homozygote, antécédent de pneumonie
bactérienne, diabète décompensé, hospitalisation dans l'année, vie en institution, tabagisme,
alcoolisme, trouble de la déglutition.
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Score CRB 65
L'évaluation à l'hôpital est nécessaire en présence d'au moins 1 critère parmi les suivants :
Confusion (présente ou non), Respiratoire (fréquence ≥ 30/minute), Blood pressure (PAS < 90
mm/Hg ou PAD ≤ 60 mm/Hg), 65 (âge ≥ 65 ans, plus que l'âge civil, l'âge physiologique,
notamment chez les patients sans comorbidité, est à prendre en compte).
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Prise en charge ambulatoire
L'antibiothérapie, probabiliste, doit être débutée dès le diagnostic clinique posé, idéalement
dans les 4 heures, et réévaluée après 48-72 heures. La voie orale est privilégiée.
La radiographie thoracique (dans les 72 heures) ne doit pas retarder le début du traitement.
L'examen cytobactériologique des crachats n'est pas utile en pratique de ville.AE
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Choix de l'antibiothérapie de 1re intention
Adulte sans facteur de risque ni signe de gravité : amoxicilline per os (active sur S.
pneumoniae), pristinamycine ou télithromycine (actives sur S. pneumoniae et aussi sur les
germes atypiques) à discuter en cas de doute. Macrolide réservé aux cas de suspicion de
bactéries atypiques (Chlamydiae, Mycoplasma) chez un sujet < 40 ans, avec un début
progressif, une fièvre modérée, sans signes de gravité, dans un contexte épidémique
(notamment pour Mycoplasma).
Sujet avec comorbidité(s) ou âgé ambulatoire sans signe de gravité : amoxicilline-acide
clavulanique, fluoroquinolone (lévofloxacine) ou ceftriaxone (IM) si voie orale impossible.
PAC : prise en charge hospitalière
PAC en contexte grippal
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Éléments d'orientation diagnostique des PAC
En faveur du pneumocoque, agent étiologique le plus fréquent chez le sujet ≥ 40 ans et/ou
avec comorbidité(s) associée(s) : début brutal, fièvre élevée dès le 1er jour, malaise général,
point douloureux thoracique, opacité alvéolaire systématisée, hyperleucocytose à
polynucléaires neutrophiles. Présence de cocci à Gram+ à l'examen direct de l'ECBC et/ou
antigénurie du pneumocoque positive et antigénurie de Legionella négative.
En faveur des bactéries « atypiques », contexte épidémique (notamment pour Mycoplasma
pneumoniae) : début progressif en 2 à 3 jours d'un tableau clinique sans signes de gravité,
sujet jeune.
En faveur d'une légionellose, contexte épidémique ou situation à risque (thermes, exposition à
de l'eau contaminée, etc.) : comorbidité(s) fréquente(s), tableau clinique évocateur (1/3 des
cas) avec pneumonie d'allure sévère, début progressif, sans signe ORL, pouls dissocié, atteinte
souvent bilatérale, présence de signes extrathoraciques digestifs (douleurs abdominales,
vomissements, diarrhée), neurologiques (troubles de la conscience, céphalées, myalgies),
échec des bêtalactamines actives sur le pneumocoque.
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Précautions d'emploi pour certains antibiotiques
Comparée aux autres antibiotiques, la télithromycine est associée à un risque plus élevé de
survenue d'effets indésirables hépatiques graves. Elle est utilisable si l'amoxicilline ou la
pristinamycine ne peuvent être prescrites.
Les fluoroquinolones antipneumococciques (FQAP) ne doivent pas être prescrites si le malade
a reçu une fluoroquinolone, quelle qu'en soit l'indication, dans les 3 derniers mois. Il est
recommandé de les utiliser avec prudence en institution.
Les indications d'AMM de la lévofloxacine ont été limitées aux situations dans lesquelles les
antibiotiques recommandés dans les traitements initiaux de ces infections sont jugés
inappropriés (ANSM, octobre 2012), ce qui est conforme aux recommandations
thérapeutiques en vigueur.
La moxifloxacine doit être réservée au traitement des pneumonies communautaires lorsque les
antibiotiques recommandés dans le traitement initial de ces infections sont jugés inappropriés.
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Facteurs de risques d'infection à P. aeruginosa
Bronchectasies, mucoviscidose, antécédents d'exacerbations de BPCO dues à P. aeruginosa.
Ceftazidime et ertapénem sont non recommandés en raison d'une activité intrinsèque
insuffisante, respectivement sur Streptococcus pneumoniae et Pseudomonas aeruginosa.
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Les PAC dues à des S. aureus
Sécréteurs de la toxine de Panton-Valentine (PVL), les S. aureus sont à l'origine de
pneumonies nécrosantes gravissimes. La résistance fréquente à la méthicilline (SARM)
justifie, en complément des C3G, la prescription d'un glycopeptide (vancomycine) associée à
de la clindamycine ou de la rifampicine. Le linézolide (IV) a là aussi une indication.
Cas particuliers
Pneumonie du sujet âgé
La clinique est souvent fruste, avec une polypnée et une confusion fréquentes.
L'infection peut entraîner la décompensation, parfois au 1er plan, d'une pathologie associée :
diabète, insuffisance cardiaque ou respiratoire, etc.
L'antibiothérapie proposée est : amoxicilline/acide clavulanique per os (avec 3 g
d'amoxicilline) ou céphalosporine de 3e génération par voie injectable (ceftriaxone) ou,
lorsque ces antibiotiques sont jugés inappropriés, fluoroquinolone antipneumococcique
(lévofloxacine).
Les traitements adjuvants occupent une place prépondérante dans la prise en charge :
hydratation, équilibre électrolytique, kinésithérapie respiratoire, oxygénothérapie, prévention
des complications thromboemboliques.
L'évolution est plus lente que chez les sujets jeunes. La normalisation des images
radiologiques peut demander plusieurs semaines, voire plusieurs mois.
Légionellose
Les recommandations concernant le choix de l'antibiothérapie dans le traitement de la
légionellose de l'adulte ont fait l'objet d'une mise au point de l'ANSM en juillet 2012. Le
choix de l'antibiotique dépend de la gravité de la légionellose et du terrain sous-jacent.
Dans les cas de formes non graves (patient ambulatoire ou hospitalisé en médecine ou aux
urgences), le traitement fait appel à une monothérapie par macrolide (azithromycine
préférentiellement, choix qui doit être souligné car l'azithromycine n'a pas pour l'instant, en
France, d'AMM dans cette indication, alors que c'est le cas dans la plupart des autres pays).
Dans les cas de formes graves (patient hospitalisé en unité de soins intensifs ou en
réanimation, et/ou patient immunodéprimé), le traitement sera :
soit une monothérapie par fluoroquinolone (par ordre de préférence : lévofloxacine,
ofloxacine, ciprofloxacine) ;
soit une association de 2 antibiotiques au sein des 3 familles suivantes : macrolides par
voie IV (spiramycine plutôt qu'érythromycine), fluoroquinolones (par ordre de préférence :
lévofloxacine, ofloxacine, ciprofloxacine), rifampicine (les associations avec la rifampicine
n'étant pas à privilégier).
La durée du traitement est de 8 à 14 jours pour les formes non graves (5 jours en cas de
traitement par l'azithromycine) et doit être prolongée à 21 jours dans les formes graves et/ou
chez le patient immunodéprimé (10 jours en cas de traitement par l'azithromycine).
Vaccination
La vaccination antipneumococcique est recommandée pour la prévention des infections
invasives à pneumocoques (dont certaines pneumonies) chez les sujets à risque :
sujet immunocompétent fragilisé ou susceptible d'être fréquemment hospitalisé (diabète,
bronchite chronique, insuffisance respiratoire, insuffisance cardiaque, alcoolotabagie, etc.), et
les sujets de plus de 65 ans en institution où cette indication reste discutée ;
sujet immunodéprimé (splénectomisé, drépanocytaire, syndrome néphrotique) ;
sujet porteur d'une brèche ostéoméningée.
La revaccination systématique des sujets ayant reçu une primovaccination n'est pas
recommandée.
Suivi et adaptation du traitement
Adaptation du traitement ambulatoire en cas d'échec
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