D O U L E U R Prise en charge de la douleur : avancées thérapeutiques en 2002 Congrès mondial de la douleur (San Diego, 17-22 août 2002) ● M Luu*, MT Gatt* algré les moyens disponibles, les recommandations et les nombreux programmes de formation, la douleur du cancer reste encore sous-estimée, sous-évaluée et sous-traitée. Le développement de modèles animaux de douleur du cancer suscite beaucoup d’espoir. Ils devraient permettre une meilleure connaissance des mécanismes mis en jeu dans la douleur du cancer et la mise au point de thérapeutiques antalgiques plus spécifiques. Devant la résistance de certaines douleurs aux thérapeutiques habituelles, et particulièrement aux opioïdes, un système de classification des syndromes douloureux permettant de prédire les difficultés de prise en charge serait particulièrement utile. C’est dans ce but que le système de classification d’Edmonton a été développé. La douleur est un déterminant important de la qualité de vie des patients cancéreux. C’est également un prédicteur potentiel des résultats cliniques, un marqueur de l’évolution de la maladie et la base de la comparaison des traitements. Les échelles multidimensionnelles de la douleur ont leur place au côté des échelles de qualité de vie dans les études cliniques, les résultats obtenus avec chacune d’elles n’étant pas superposables. La grande majorité des douleurs cancéreuses répondent aux thérapeutiques recommandées par l’OMS. Dans les cas de douleurs peu sensibles aux traitements opioïdes systémiques, plusieurs stratégies de prise en charge ont été proposées. Deux d’entre elles sont développées : la rotation des opioïdes et les blocs cœliaques. M LA DOULEUR DU CANCER : SOUS-ESTIMÉE, SOUS-ÉVALUÉE, SOUS-TRAITÉE Malgré la mise en place de nombreux programmes de formation sur la prise en charge de la douleur du cancer, tant dans le cadre de la formation continue que des études médicales et infirmières, la douleur du cancer reste sous-estimée, sous-évaluée et sous-traitée. Pourtant, les recommandations de l’OMS ont été largement diffusées, et les moyens thérapeutiques sont disponibles dans les pays occidentaux. Les pays en voie de développement restent néanmoins très défavorisés, particulièrement en ce qui concerne l’accès aux traitements opioïdes. * Unité douleur-soins palliatifs, hôpital Avicenne, 93009 Bobigny, Cedex. 244 Lors d’une évaluation préalable à la mise en place d’un programme de prise en charge de la douleur dans un hôpital belge, Payen et al. retrouvent une douleur modérée à sévère chez 40 % des 291 patients hospitalisés. Trente-trois d’entre eux n’avaient aucun traitement antalgique. Dans une étude britannique portant sur l’utilisation des ressources et le coût des soins palliatifs, Guest et al. montrent que chez des patients cancéreux en phase avancée, depuis l’initiation d’un traitement opioïde jusqu’à leur décès, la douleur n’est pas prise en charge de façon adaptée malgré l’existence de recommandations. Au Portugal, Freitas et al. ont analysé les réponses de 450 médecins et infirmières à un questionnaire évaluant les thérapeutiques antalgiques les plus fréquemment prescrites, leur efficacité clinique et les difficultés de prescription. Les La Lettre du Cancérologue - volume XI - n° 6 - novembre-décembre 2002 résultats montrent que la douleur du cancer tant en hospitalisation qu’en ambulatoire est souvent sous-évaluée, traitée de façon insuffisante avec des thérapeutiques ne suivant pas des protocoles établis. En France, deux enquêtes téléphoniques menées par Brasseur et Larue, l’une en 1992, l’autre en 2001, auprès d’oncologues et de médecins généralistes, montrent qu’en dix ans, les connaissances sur les douleurs du cancer et les traitements morphiniques se sont améliorées, particulièrement chez les oncologues. Néanmoins, la prévalence de la douleur du cancer reste encore estimée comme faible, et la réticence à prescrire un morphinique est toujours présente, même si elle a diminué. Cette réorganisation semble différente de celle observée dans les modèles de douleur chronique inflammatoire et neuropathique chez la souris. Par des études de biologie cellulaire, pharmacologique et comportementale, les auteurs mettent en évidence le rôle de trois facteurs dans la douleur osseuse : activité ostéoclastique excessive, production de COX-2, génération d’un état de douleur neuropathique, et ils montrent que les thérapeutiques qui bloquent la douleur du cancer atténuent la réorganisation neurochimique induite par la tumeur. Afin d’étudier dans quelle mesure la douleur pouvait être sousestimée, Knotkova et al. ont demandé à 71 patients présentant un cancer intra-abdominal d’évaluer leur douleur à l’aide d’une échelle numérique en 6 points et d’un questionnaire d’évaluation multidimensionnel. Dans le même temps, les médecins évaluaient la douleur de leur patient à l’aide d’une échelle numérique et de l’indice de Karnofsky. Les résultats montrent que l’évaluation de la douleur par les médecins reflète l’auto-évaluation des patients uniquement chez ceux dont l’indice de Karnofsky est supérieur à 30, alors qu’elle est sous-estimée pour les patients ayant un indice de Karnofsky inférieur. La présence d’une plus grande souffrance émotionnelle et d’une diminution du bien-être, qui contribuent à l’évaluation de la douleur chez ces patients, pourraient expliquer la sous-estimation des médecins. Un certain nombre de patients cancéreux présentent des syndromes douloureux difficiles à gérer. La possibilité de disposer d’un système de classification des douleurs du cancer reconnu sur le plan international, comme le système TNM pour les tumeurs cancéreuses, permettrait d’identifier précocement ces patients et d’améliorer ainsi leur évaluation et leur prise en charge, qui s’avère souvent longue et complexe. C’est dans ce but que Fainsinger et al. ont développé le système de classification d’Edmonton (Canada). Plusieurs fois remanié, il se compose actuellement de 5 facteurs qui auraient une valeur pronostique concernant le contrôle de la douleur. Constituent des facteurs de mauvais pronostic : 1) les douleurs à composante neuropathique (compression, envahissement, destruction ou dysfonctionnement du système nerveux central et périphérique) ; 2) les douleurs incidentes ou provoquées par le mouvement ou une autre activité, alors que le patient est bien soulagé au repos ; 3) la nécessité de doses rapidement croissantes d’opioïdes due à une augmentation de la douleur sous-jacente ou à un phénomène de tolérance ; 4) l’existence d’une détresse psychologique avec dépression et/ou anxiété majeures ; 5) des antécédents d’abus de drogue ou d’alcool pouvant prédisposer à une addiction aux opioïdes. D’autres travaux sont encore nécessaires pour que cet outil puisse obtenir un agrément international. Une autre cause de la faible utilisation des morphiniques reste la peur de la pharmacodépendance, comme le montrent Guerrero et al. dans une étude portant sur un questionnaire rempli par 110 patients cancéreux ambulatoires présentant une douleur sévère traitée par opioïdes. Cette peur est renforcée par l’attitude négative de la famille vis-à-vis de la morphine. Pour les auteurs, l’information du patient et de sa famille devrait être un prérequis avant toute initiation d’un traitement opioïde. UN MODÈLE ANIMAL DE DOULEUR DU CANCER Le développement de modèles animaux de douleur du cancer constitue une avancée importante, tant pour la compréhension des mécanismes que pour la mise au point de thérapeutiques spécifiques, tout particulièrement pour les douleurs par envahissement nerveux périphérique et/ou osseux, qui constituent 75 % des douleurs cancéreuses chroniques et qui sont parmi les plus difficiles à gérer. Mantyh et al. ont développé un modèle de cancer osseux chez la souris en injectant des cellules tumorales dans l’espace médullaire du fémur. Ces cellules entraînent une destruction osseuse ainsi que des comportements douloureux spontanés et provoqués similaires à ceux retrouvés chez les patients présentant des douleurs osseuses cancéreuses. Sur le plan neurochimique, les auteurs démontrent non seulement une réorganisation au niveau des afférences primaires et de la moelle qui reçoivent les messages du membre envahi. La Lettre du Cancérologue - volume XI - n° 6 - novembre-décembre 2002 CARACTÉRISATION DES DOULEURS DU CANCER Utilisant uniquement les caractéristiques de la douleur, Caraceni et al. ont comparé les syndromes douloureux dus au carcinome à ceux du sarcome chez 220 patients consécutifs (145 carcinomes, 57 sarcomes). Ils montrent que les syndromes douloureux dus au sarcome sont plus difficiles à gérer avec les opioïdes. Bien qu’il n’existe pas de différence d’intensité de la douleur au repos et aux mouvements entre les deux groupes, les douleurs neuropathiques et l’infiltration de la paroi thoracique et des tissus mous des membres inférieurs sont plus fréquents dans le sarcome. De plus, à contrôle antalgique comparable, ce dernier nécessite des doses plus importantes de morphinique. ÉVALUATION MULTIDIMENSIONNELLE DE LA DOULEUR DU CANCER Parmi les nombreux questionnaires multidimensionnels disponibles pour l’évaluation de la douleur du cancer, le Brief Pain Inventory (BPI) reste l’un des outils les plus largement utilisés. 245 D O U L E U R Il permet d’évaluer la douleur et son retentissement sur l’activité, l’humeur, la marche, les relations avec les autres, le sommeil et la joie de vivre. Dans une étude portant sur 100 patients cancéreux douloureux, Jage et al. montrent que cet instrument pratique et facile d’utilisation permet de détecter une amélioration du soulagement de la douleur, mais également une diminution de son retentissement comportemental et psychologique quelques jours après la modification des thérapeutiques, ce que ne permet pas un questionnaire de qualité de vie utilisé dans le même temps. de la recommandation selon laquelle la titration doit être réalisée avec la morphine à libération immédiate. Dans un essai clinique multicentrique randomisé, Thaler et al. montrent tout l’intérêt de l’évaluation non seulement de la qualité de vie mais également de la douleur. Les questionnaires utilisés ont été le Brief Pain Inventory (BPI) et le Functional Assessment of Cancer Therapy (FACT). Les évaluations ont été réalisées le premier jour de chacun des 4 cycles de chimiothérapie : cisplatine versus cisplatine + paclitaxel dans les cancers du col avancés. Les résultats montrent que le BPI prédit de façon significative la réponse à la chimiothérapie, tandis que le BPI et le FACT (PWB : bien-être physique) prédisent fortement la survie. La moitié des 269 patients inclus ont complété les questionnaires à 4 reprises. Parmi eux (la plupart “répondeurs”), le BPI s’est amélioré, alors que le PWB ne s’est pas modifié. Parmi les patients n’ayant pas répondu à tous les questionnaires (la plupart “non-répondeurs”), le BPI s’est aggravé sous cisplatine relativement à cisplatine + paclitaxel, tandis que le PWB s’est aggravé légèrement dans les deux bras de chimiothérapie. Fallon rappelle que les recommandations de l’OMS ne doivent pas être considérées comme une alternative aux autres stratégies de prise en charge de la douleur du cancer mais doivent faire partie intégrante de l’ensemble des stratégies disponibles. Radiothérapie, chimiothérapie, chirurgie, physiothérapie, blocs anesthésiques, relaxation, neurostimulation transcutanée, acupuncture... sont des stratégies qui doivent être utilisées dans des situations individuelles appropriées. LES RECOMMANDATIONS DE L’OMS : TOUJOURS D’ACTUALITÉ Les recommandations de l’OMS concernant le traitement symptomatique de la douleur du cancer restent toujours d’actualité. Elles permettent de soulager la grande majorité des patients cancéreux, comme le montrent Pawe, Wosniak et al. dans une étude portant sur 435 patients admis en unité de soins palliatifs. En se basant sur une étude rétrospective portant sur 235 patients cancéreux douloureux, Lesnoy et al. montrent que 75,6 % d’entre eux ont bien répondu aux traitements antalgiques. Les auteurs soulignent que la connaissance pharmacologique des opioïdes et des traitements adjuvants ainsi que la compréhension des mécanismes de la douleur rendent possible un soulagement adapté de la douleur chez la plupart des patients. La morphine est l’opioïde du niveau III de l’OMS le plus largement utilisé. Ses modalités d’utilisation sont bien codifiées, mais certains aspects sont encore fondés sur une opinion d’experts. Klepstad et al. , dans une étude randomisée en double aveugle sur 37 patients ayant une douleur faible à modérée, montrent qu’une titration simplifiée utilisant la morphine à libération prolongée une fois par jour est d’efficacité comparable et n’a pas plus d’effets secondaires qu’une titration utilisant la morphine à libération immédiate donnée toutes les quatre heures. Ces résultats devraient entraîner la révision 246 Dans une étude portant sur 87 patients douloureux bien équilibrés par la morphine i.v., Mahmoud et al. confirment la persistance d’un bon contrôle de la douleur pour la majorité des patients par la morphine per os en utilisant le rapport de conversion i.v./p.o. 1:3, un rapport inférieur entraînant une aggravation de la douleur. La sévérité des effets secondaires n’est pas affectée par le rapport de conversion. STRATÉGIES CLINIQUES DE PRISE EN CHARGE DES DOULEURS PEU SENSIBLES AUX TRAITEMENTS OPIOÏDES SYSTÉMIQUES La prise en charge de la douleur cancéreuse chez certains patients s’avère problématique dès lors qu’elle répond mal aux opioïdes. Les variations individuelles de la réponse aux opioïdes sont probablement d’origine multifactorielle. Parmi les facteurs en rapport avec le syndrome douloureux, on retrouve un mécanisme neuropathique et les douleurs incidentes. Les facteurs en rapport avec le patient peuvent être une détresse psychologique ainsi que tout facteur prédisposant un patient aux effets secondaires, comme un âge avancé ou la défaillance d’un organe majeur. Devant l’impossibilité d’atteindre un soulagement satisfaisant sans effet secondaire intolérable lors d’une titration graduelle, Portenoy propose quatre stratégies : – augmenter les doses du même opioïde en renforçant le traitement des effets secondaires lorsque cela est possible ; – changer d’opioïde afin d’obtenir un rapport analgésie/effet secondaire plus favorable : la rotation des opioïdes ; – utiliser des traitements pharmacologiques qui diminuent la demande en opioïdes systémiques : co-administration d’un analgésique non opioïde ou d’un traitement adjuvant tel que ceux cités dans les recommandations de l’OMS. Certains syndromes douloureux nécessitent des traitements spécifiques, comme les douleurs neuropathiques, les douleurs osseuses, les douleurs abdominales des syndromes occlusifs ; – utilisation des techniques non pharmacologiques : anesthésiques, neurochirurgicales, neurostimulation, physiothérapie, psychothérapies, autres (acupuncture...). Très variées, ces thérapies sont très différentes dans leurs indications et leur mise en œuvre. Devant l’absence d’essais cliniques comparatifs, le choix d’une thérapie ou d’une autre relèvera du meilleur jugement clinique. Celui-ci pourra être guidé par une évaluation soiLa Lettre du Cancérologue - volume XI - n° 6 - novembre-décembre 2002 gneuse du patient et du syndrome douloureux et par une bonne connaissance des indications des techniques disponibles. Des réévaluations régulières permettront de repérer des modifications du syndrome douloureux pouvant nécessiter de nouvelles explorations et un changement dans la stratégie thérapeutique. De même, une connaissance précise des comorbidités physiques (évolution de la maladie, état du patient) et psychosociales permettra de clarifier le but des soins et leur faisabilité. LA ROTATION DES OPIOÏDES Les effets secondaires des opioïdes peuvent limiter la dose de titration avec, comme conséquence, un mauvais soulagement de la douleur. La rotation des opioïdes utilisant des doses équianalgésiques diminuerait les toxicités en maintenant ou en améliorant le contrôle de la douleur. Les recommandations préconisées par Portenoy tentent de réduire le risque d’un relatif sous- ou surdosage alors qu’un opioïde est arrêté et l’autre administré. Il préconise pour plus de sécurité d’utiliser des doses inférieures à celles des tables d’équi-analgésie. En effet, tant l’analgésie que les effets secondaires peuvent être supérieurs à ceux attendus. Ce phénomène est expliqué par une tolérance croisée incomplète entre les opioïdes et/ou par le fait que les doses équi-analgésiques ont été calculées lors d’essais à dose unique. Il existe néanmoins deux exceptions : le patch de fentanyl (facteur de sécurité intégré dans la table) et la méthadone (réduction importante : de 75 à 90 %). Pour les patients âgés ou qui présentent une maladie cardio-pulmonaire, hépatique ou rénale sévère, la dose du nouvel opioïde pourra être réduite. L’étude de Walsh et al. va dans ce sens. Dans leur série, 40 des 275 patients présentant principalement un cancer du sein ou du poumon ont subi une rotation des opioïdes pour neurotoxicité, absence de contrôle de la douleur ou nausées et vomissements sévères. Après rotation, les effets secondaires ont diminué et le contrôle de la douleur s’est amélioré avec une dose équianalgésique inférieure à celle prédite. Dans une autre étude portant sur 800 patients en soins palliatifs, Muller-Busch et al. analysent la fréquence, les raisons et l’efficacité de la rotation des opioïdes. Celle-ci est plus fréquente chez les patients hospitalisés que chez les patients ambulatoires. Les critères de sélection ne sont pas clairs et dépendent des préférences personnelles. Ils sont le plus souvent en rapport avec des raisons médicales en unité de soins palliatifs (USP) (analgésie insuffisante et/ou effets secondaires intolérables) alors que, pour les patients ambulatoires, ils sont plutôt en rapport avec des raisons non médicales (peur des opioïdes, compliance ou problème économique). La fréquence de succès est supérieure en USP, bien que les problèmes de douleur semblent être plus complexes, en rapport avec le stade de la maladie. Les auteurs soulignent que, si la rotation des opioïdes est une option thérapeutique empirique utile, les raisons médicales et non médicales qui conduiront à la décision d’y recourir ou non doivent être soigneusement prises en compte. La Lettre du Cancérologue - volume XI - n° 6 - novembre-décembre 2002 LES BLOCS CŒLIAQUES NEUROLYTIQUES Les techniques invasives conservent leur intérêt dans les douleurs intenses rebelles en phase avancée de la maladie. Les blocs neurolytiques utilisent des substances comme l’éthanol ou le phénol et peuvent être précédés par un bloc aux anesthésiques locaux. Ils doivent être réalisés par des anesthésistes entraînés, et le patient doit être bien informé des complications possibles (déficit sensoriel et/ou moteur). En cas d’efficacité, la diminution du traitement opioïde doit se faire par quart ou par tiers de la dose initiale afin de prévenir la somnolence et la dépression respiratoire. Parmi les blocs neurolytiques, le bloc cœliaque est particulièrement intéressant dans les douleurs des cancers du pancréas, qui répondent souvent mal aux traitements opioïdes optimisés. Wong et al. ont étudié l’effet d’un bloc cœliaque neurolytique sur le soulagement de la douleur, la qualité de vie et la survie des patients présentant un cancer du pancréas inopérable dans une étude clinique prospective randomisée, en double aveugle. Cent patients ont eu soit un bloc cœliaque neurolytique soit l’injection d’un placebo. À une semaine, la douleur et la qualité de vie ont été améliorées de façon significative dans les deux groupes, avec un soulagement de la douleur significativement plus important chez les patients ayant reçu le bloc. Avec le temps, la douleur reste significativement moins importante dans le groupe bloc. Cependant, la consommation d’opioïdes, la qualité de vie et la survie totale ne diffèrent pas de façon significative entre les deux groupes. Dans une autre étude, Lejcko et al. montrent que le bloc cœliaque neurolytique peut être utilisé de façon répétitive avec un effet prolongé. La plupart des patients ont toujours besoin d’opioïdes, mais à des doses nettement inférieures. R É F É R E N C E S B I B L I O G R A P H I Q U E S 1. Brasseur L, Larue F. Surveys on oncologists and primary care physicians’ attitudes toward pain control and morphine prescribing in France : changes from 1992 to 2001. Boulogne, France, abstr. 679. 2. Caraceni A et al. Pain syndromes due to sarcoma. A pilot study. Milan, Italie, abstr. 885. 3. Fainsinger RL. TNM classification system for cancer pain ? Edmonton, Canada, abstr. 713. 4. Fallon MT. Advances in pharmacological management of cancer pain. Glasgow, Royaume-Uni, abstr. 713. 5. Fallon MT. Management of cancer pain with evidence for each strategy. Glasgow, Royaume-Uni, An update review : refresher course syllabus. 6. Freitas DM et al. Insufficiencies, facts and contradictions in oncologic pain therapeutics. Funchal-Madeira, Portugal, abstr. 1630. 7. Guerrero C et al. Fear of addiction in a palliative care population. Bogota, Colombia, abstr. 160. 8. Guest JF et al. Treatment patterns and resource costs of palliative care for advanced cancer patients starting strong opioid treatment with 12-hourly sustained-release morphine or transdermal fentanyl. Northwood, Royaume-Uni, abstr. 688. 9. Jage J et al. Guideline-based analgesic treatment in patients with cancer pain : prospective quality assurance of analgesic effectiveness. Mainz, Allemagne, abstr. 1632. 10. Klepstad P et al. Immediate or sustained-release morphine for dose-finding during start of morphine to cancer patients : a randomised, double-blind trial. Trondheim, Norvège, abstr. 1634. 247 D O U L E U R 11. Knotkova H et al. Unrecognized emotional suffering in cancer patients of 18. Pawe S, Wosniak P et al. The role of opioids in treatment of advanced can- lower Karnofsky performance status accounts for underestimation of their pain by medical staff. Prague, République tchèque, abstr. 1392. 12. Lejcko J et al. The effect of plexus coeliacus neurolysis on severe cancer abdominal pain. Pilsen, République tchèque, abstr. 585. 13. Lema JM. Invasive analgesia techniques for avanced cancer pain. Buffalo, États-Unis, abstr. 713. 14. Lesnoy II et al. Cancer pain treatment in an Ukrainian pain relief department. Zhitomir, Ukraine, abstr. 1638. 15. Mahmoud FA et al. The relative milligram potency ratio of intravenous to oral morphine in cancer pain. Cleveland, États-Unis, abstr. 156. 16. Mantyh P. A mechanism-based understanding of cancer pain. Minneapolis, États-Unis, abstr. 1082. 17. Muller-Busch HC et al. Opioid rotation in palliative care - Frequency, reasons and success. Berlin, Allemagne, abstr. 158. cer pain. Wroclaw, Pologne, abstr. 1618. 19. Payen MC et al. Implementation of a pain management program. Brussells, Belgique, abstr. 704. 20. Portenoy RK. Clinical strategies for the management of cancer pain poorly responsive to systemic opioid therapy. New York, États-Unis, An update review : refresher course syllabus. 21. Thaler HT et al. Pain assessment as a prognostic factor and quality of life component in advanced cervical cancer. New York, États-Unis, abstr. 1069. 22. Walsh D et al. Parenteral opioid rotation in advanced cancer. Cleveland, États-Unis, abstr. 1623. 23. Wong GY et al. The effect of neurolytic celiac plexus block on pain relief, quality of life, and survival in patients with unresecable pancreatic cancer : a prospective, double-blinded, randomized clinical trial. Rochester, États-Unis, abstr. 169. ✂ À découper ou à photocopier OUI, JE M’ABONNE AU MENSUEL La Lettre du Cancérologue Merci d’écrire nom et adresse en lettres majuscules ❏ Collectivité ................................................................................. à l’attention de .............................................................................. ABONNEMENT : 1 an ÉTRANGER (AUTRE QU’EUROPE) FRANCE/DOM-TOM/EUROPE ❐ ❐ ❐ 90 € collectivités 72 € particuliers 45 € étudiants* ❐ ❐ ❐ *joindre la photocopie de la carte ❏ Particulier ou étudiant *joindre la photocopie de la carte + M., Mme, Mlle ................................................................................ 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Toutes les formes cliniques – aiguës, chroniques – et physiopathologiques (excès de nociception, douleur neuropathique) peuvent se rencontrer. De plus, l’origine des douleurs en cancérologie est multiforme : en relation avec l’envahissement tumoral, liée aux gestes thérapeutiques et parfois sans rapport avec la tumeur elle-même, comme, par exemple, chez les sujets porteurs d’une neuropathie périphérique diabétique ou d’une simple arthrose. On admet que trois quarts des malades porteurs d’un cancer souffrent de leur maladie. La prise en charge de la douleur estelle suffisante actuellement en France ? On peut encore la considérer comme globalement insuffisante, malgré certains progrès indéniables, mais très inégaux. Là encore, les situations au cours desquelles on rencontre la douleur pendant la maladie cancéreuse sont très diversifiées. La douleur du cancer ne se résume pas à la phase terminale et aux soins palliatifs. Si on prend l’exemple du cancer du sein ou de la prostate, la durée de survie en phase métastatique s’est nettement a l l o n g é e e t d é p a s s e fréquemment plusieurs années (15 % à 5 ans, 5 % à 10 ans dans le cancer du sein métastatique, dans l’Enquête permanente Cancer 1975- 1986), durant lesquelles de nombreux phénomènes douloureux, de causes variées, peuvent survenir, et chez des malades en bon état général. Ainsi, une étiologie sous-évaluée est celle des actes invasifs ou des soins douloureux : une enquête SOFRES-ASTRA récente, sur 584 malades, a montré que les malades sous chimiothérapie interrogés avaient subi environ 16 gestes invasifs (médiane) par mois dans les 3 mois précédents... Les conséquences de ce type de douleur répétée sont aujourd’hui mieux appréhendées : anxiodépression et/ou agressivité réactionnelles, moindre observance, voire diminution des dosesintensités thérapeutiques, etc. Il convient donc d’anticiper et de traiter toutes les douleurs et cela a justifié la mise en place d’un second plan “douleur” dans lequel les structures “algologiques” existantes (SETD, SFAP, etc.), en lien avec les autorités sanitaires (DGS), tentent de coordonner leurs compétences. Qu’en est-il du comportement des thérapeutes face à l’utilisation des opioïdes ? Est-il timoré ou plus ouvert ? Nous progressons, même si l’on doit considérer que la situation idéale est loin d’être atteinte. Un groupe de travail DGS-AFSSAPSSETD est en cours pour optimiser la prescription des opioïdes, terme qui doit peu à peu remplacer celui de “stupéfiants”. Il y a déjà maintenant un relatif consensus pour leur utilisation dans les phases précoces de la maladie. On peut peutêtre regretter encore une certaine résistance à l’escalade “posologique”, qui doit pourtant améliorer les performances antalgiques. Des enquêtes sont en cours, qui pourront sans doute valider des règles thérapeutiques. Il faut rappeler par ailleurs que les opioïdes ne sont pas la seule réponse aux douleurs cancéreuses. Ainsi, comme il existe dorénavant la psychooncologie, peut-on imaginer que se développe une néodiscipline, que l’on pourrait appeler “l’algooncologie” ? Dans les faits, elle a déjà sa réalité, et un nombre croissant de jeunes cancérologues s’y investissent, même si les carrières sont encore très insuffisamment attractives. La mise en place de structures de soins oncologiques de support, intégrant des compétences “douleur”, dans tous les centres de cancérologie devrait faciliter une évolution indispensable, attendue des équipes et nécessaires pour les malades. On peut regretter, que d’une part, les centres anti-douleur ne soient pas assez sollicités par les cancérologues et que, d’autre part, ces mêmes centres, lorsqu’ils ont un fort recrutement cancérologique, ne soient pas assez investis par les cancérologues... Trop de praticiens parlent de pluridisciplinarité sans oser s’y engager réellement – sans doute par manque de temps, mais aussi par crainte de mettre en danger certaines certitudes... Tous les articles publiés dans La Lettre du Cancérologue le sont sous la seule responsabilité de leurs auteurs. Edimark S.A., 62-64, rue Jean-Jaurès, 92800 Puteaux Tous droits réservés - Dépôt légal : à parution - © mai 1992 - Edimark S.A. - Imprimé en France - Point 44 - 94500 Champigny-sur-Marne Un encart publicitaire Novartis et un encart publicitaire Roche sont jetés dans ce numéro. La Lettre du Cancérologue - volume XI - n° 6 - novembre-décembre 2002 249