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La Lettre de l’Hépato-Gastroentérologue - no2 - vol. III - avril 2000
DOSSIER THÉMATIQUE
d’expression de certains anticorps utiles au diagnostic différen-
tiel avec d’autres lymphomes B à petites cellules (IgD, CD5,
CD10, CD23), et surtout de mieux mettre en évidence les lésions
lympho-épithéliales par l’étude des marqueurs épithéliaux, (anti-
corps anticytokératine).
L’immunohistochimie est rarement nécessaire dans les cas
typiques ; elle est utile pour mettre en évidence les lésions lym-
pho-épithéliales. La recherche d’une monotypie est également
utile dans les cas à différenciation plasmocytaire.
Les techniques de biologie moléculaire avec amplification
génique (PCR) peuvent permettre la mise en évidence rapide d’un
réarrangement clonal des gènes des immunoglobulines, ce qui
peut être un élément décisif du diagnostic sur des biopsies. Les
anomalies cytogénétiques les plus fréquemment retrouvées dans
les lymphomes de type MALT sont la trisomie 3 (50 à 60 %) et
une translocation t (11, 18).
Les lymphomes de faible malignité de type MALT évoluent
lentement et restent longtemps confinés à la localisation ini-
tiale. Il n’y a pas d’urgence à traiter ce lymphome de façon
agressive et, en cas de doute diagnostique sur une biopsie, il
faut prendre le temps de réaliser d’autres biopsies, de complé-
ter l’étude histologique par la recherche d’une population lym-
phoïde montrant un même réarrangement clonal de la chaîne
lourde des Ig. L’éradication de H. pylori doit être la première
étape thérapeutique, même si son efficacité est parfois longue
à apparaître (plusieurs mois) et nécessite une surveillance endo-
scopique et biopsique prolongée. Si ce traitement s’avère insuf-
fisant, il est alors nécessaire de proposer une chimiothérapie
ou une gastrectomie totale, car les lésions sont habituellement
multicentriques.
L’évolution enfin peut aboutir au développement d’un lym-
phome B à grandes cellules, de haute malignité.
• Lymphome de type MALT de faible malignité : autres
localisations : elles peuvent survenir dans n’importe quel
segment digestif mais sont plus fréquentes dans l’intestin grêle
que dans le côlon ou le rectum, où elles sont exceptionnelles.
Leur aspect est identique à celui des localisations gastriques,
mais les lésions lympho-épithéliales, quoique présentes,
apparaissent plus rares. Leur transformation en lymphome de
grande malignité est plus fréquente que dans l’estomac, et leur
pronostic moins bon, avec un taux de survie à 5 ans inférieur
à50%.
• Lymphome de type MALT de faible malignité : IPSID :
les IPSID, exceptionnellement rencontrés sous nos climats,
sont représentés essentiellement par la maladie des chaînes
lourdes alpha (MCa), qui constitue un lymphome diffus de
type MALT se développant habituellement dans l’intestin
grêle. Ils représentent le premier exemple de l’efficacité d’un
traitement antibiotique dans la rémission d’un lymphome, bien
avant que le succès de l’éradication de H. pylori ait été reconnu
dans les lymphomes localisés de l’estomac.
La MCa, décrite en 1968, est une infiltration lymphoïde maligne
de l’intestin grêle, diffuse, sans intervalle de muqueuse saine,
caractérisée par la sécrétion d’une chaîne lourde alpha anormale,
dépourvue de chaîne légère. L’IPSID sera ultérieurement défini
par l’OMS (1976) comme une infiltration lymphoïde diffuse
de l’intestin grêle d’aspect similaire à celui observé dans la
maladie des chaînes alpha, mais sans préjuger de la nature de
l’immunoglobuline sécrétée ni du caractère bénin ou malin de
la prolifération.
Un des caractères histopathologiques essentiel de la MCa
est l’atteinte de toute la longueur de l’intestin grêle, sans laisser
d’intervalle de muqueuse saine. On décrit trois stades, de mali-
gnité croissante. Au stade A, l’infiltrat cellulaire est limité à la
muqueuse et constitué de plasmocytes “matures”, plus rarement
de lymphocytes. Dans la moitié des cas environ, des lésions simi-
laires à celles décrites dans les formes localisées de lymphome
de type MALT sont associées : foyers de prolifération de petites
cellules centrocyte-like avec LLE et follicules lymphoïdes hyper-
plasiques. Le stade C est un lymphome de grande malignité,
immunoblastique avec différenciation plasmocytaire, responsable
de tumeur(s) ulcérée(s). Le stade B est intermédiaire : l’infiltrat
atteint au moins la sous-muqueuse, les cellules plasmocytaires
présentent d’importantes anomalies cytonucléaires et des immu-
noblastes peuvent être présents (7).
Les lésions peuvent progresser ; les trois stades peuvent se suc-
céder dans le temps et/ou s’observer simultanément dans le même
segment digestif ou dans différents segments.
Les ganglions mésentériques sont habituellement (mais pas tou-
jours au stade A) atteints par la prolifération lymphoïde. L’IHC
permet d’évoquer le diagnostic de MCasur la présence dans les
plasmocytes d’une chaîne lourde alpha, sans chaîne légère asso-
ciée. Elles sont particulièrement intéressantes en cas de forme
non sécrétante ou pour le suivi lorsque la chaîne lourde alpha
n’est plus détectée dans le sang ou le liquide duodénal, alors que
des cellules malignes résiduelles peuvent être retrouvées sur les
prélèvements biopsiques (8).
Lymphomes B à grandes cellules
On distingue un peu artificiellement des lymphomes de haut grade
de type MALT et “les autres”. On peut dire d’un lymphome de
grande malignité qu’il possède les caractéristiques d’un lym-
phome de type MALT lorsqu’il existe un contingent lympho-
mateux de faible degré de malignité de type MALT, avec des
LLE caractéristiques, ou bien un tropisme particulier des élé-
ments tumoraux de grande taille pour les structures épithéliales,
mimant des LLE à grandes cellules. Quoi qu’il en soit, la dis-
tinction entre ces deux formes ne semble présenter aucun intérêt
pour le patient, et il est possible que certains lymphomes à grandes
cellules soient simplement liés à la disparition du contingent de
faible grade.
Les lymphomes B à grandes cellules (centroblastiques et immu-
noblastiques) sont les plus fréquents des lymphomes primitifs
digestifs.
Leur diagnostic est le plus souvent facile, même sur prélèvements
biopsiques : il s’agit d’une prolifération tumorale maligne détrui-
sant la muqueuse, souvent largement ulcérée et constituée par un
infiltrat lymphoïde dense, diffus, fait de cellules de grande taille,
de type centroblastique ou immunoblastique avec de nombreuses
mitoses (figures 2a et b).
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