Vissage pédiculaire de la septième vertèbre cervicale (C7): Bases

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Vissage pédiculaire de la septième vertèbre
cervicale (C7): Bases anatomiques et
technique chirurgicale
C. BARREY, F. COTTON, J. JUND, P. MERTENS ET G. PERRIN
Introduction
La septième vertèbre cervicale possède des caractères morphologiques propres
émanant à la fois du rachis cervical inférieur et du rachis thoracique [19], ce qui
avait amené Albrecht à parler de « vertèbre pseudo-cervicale » [16]. Ces
particularités anatomiques, concernant à la fois la taille de pédicules et l’épaisseur
du massif articulaire, sont à l’origine de spécificités en terme de technique
chirurgicale [23].
Que ce soit dans le cadre de la pathologie traumatique, tumorale ou dégénérative,
la fixation par voie postérieure de la septième vertèbre cervicale peut parfois être
problématique. Le vissage articulaire n’est pas recommandé au niveau de C7 en
raison de la très faible épaisseur de ses massifs articulaires [5, 23] et, par
conséquent, de la faible tenue mécanique des vis. Les techniques de laçage ou
utilisant des crochets lamaires ne peuvent pas, le plus souvent, être utilisées du
fait de la nécessité de réaliser une laminectomie et/ou de l’atteinte de l’arc
postérieur (fracturé, par exemple). Enfin la mise en place de vis dans les pédicules
peut paraître délicate [1, 2, 3, 4, 8, 11, 17].
Il nous est apparu intéressant de réaliser une étude dans le but d’évaluer la
faisabilité du vissage pédiculaire de C7. Pour cela, nous avons tout d’abord réalisé
une étude morphologique en tomodensitométrie avec principalement une analyse
de la taille et de l’orientation des pédicules de C7. Puis, dans un second temps,
nous avons voulu savoir si la mise en place de vis pédiculaires guidée uniquement
par les repères topographiques au niveau de la face dorsale de C7, c’est-à-dire
sans réaliser de lamino-foraminoplastie, permettait d’assurer un vissage
pédiculaire suffisamment sécurisant.
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Matériel et méthodes
L’étude a été réalisée sur 18 rachis cervicaux humains adultes prélevés à partir de
cadavres humains frais et non formolés (10 hommes, 8 femmes, âgés en moyenne
de 76 ± 6,4 ans). Elle a porté sur un total de 36 pédicules de C7. Pour chaque
paramètre, la moyenne et écart type (±) ont été précisés.
Une tomodensitométrie hélicoïdale a été réalisée pour chaque pièce anatomique
avec une acquisition en coupes jointives de 2 mm et un index de reconstruction de
0,8 mm. L’ensemble des mesures a ensuite été effectué sur des reconstructions
multiplanaires de 1 mm d’épaisseur. Deux plans de coupe, l’un transversal, l’autre
sagittal, ont été utilisés pour l’ensemble des mesures linéaires et angulaires
effectuées sur les pédicules. Chaque plan de coupe passait par la partie centrale du
pédicule et par le point d’entrée de la visée pédiculaire à la face postérieure du
massif articulaire.
Les mesures linéaires ont concerné:
- la largeur et la hauteur du pédicule, mesurées au niveau de la partie la
plus étroite du pédicule (figs.1a, 2a) ;
- l’épaisseur des corticales médiale, latérale, supérieure et
inférieure (figs.1a, 2a) ;
- la longueur de la visée pédiculaire, définie comme la distance séparant
le point d’entrée à la face postérieure du massif articulaire (fig.1a) de la
limite postérieure de la corticale antérieure du corps vertébral.
Les mesures angulaires ont concerné:
- l’angulation transversale de la visée pédiculaire par rapport à l’axe
sagittal médian (fig.1b) ;
- l’angulation sagittale de la visée pédiculaire par rapport au plan du
plateau inférieur de C7 (fig. 2b) ;
- l’angle transversal du cône de sécurité de la visée pédiculaire calculé à
partir du point d’entrée de la visée et limité en dedans par le canal
vertébral et en dehors par le foramen transversaire ou par la corticale
latérale du pédicule, si celui-ci n’existait pas (fig. 1b).
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Nous avons également utilisé une coupe sagittale passant le milieu du massif
articulaire afin d’en mesurer l’épaisseur antéro-postérieure (fig. 3).
Nous avons ensuite réalisé, dans les mêmes conditions qu’au bloc opératoire et
après un abord postérieur classique du rachis cervical inférieur, un vissage
pédiculaire de C7 bilatéral sur un total de 15 rachis cervicaux. Trois rachis avaient
préalablement servi à la mise au point de la technique.
Le point d’entrée de la visée pédiculaire au niveau de la face postérieure du massif
articulaire (fig. 4) a été défini par l’intersection de deux lignes : la verticale
passant par le milieu de l’interligne articulaire C6-C7, et la ligne horizontale
passant 1 mm sous le milieu du processus transverse. L’orientation du vissage
était de 35° vers le dedans dans le plan transversal. L’orientation sagittale, plus
difficile à reproduire, était de 5° vers le bas par rapport au plan du disque C7-T1.
Le plan du disque C7-T1 a pu être repéré à l’aide d’un ciseau froid introduit au
niveau de l’espace intervertébral à la face antérieure du rachis cervical. Cette
méthode a remplacé le repérage per-opératoire possible de ce plan par l’utilisation
d’un amplificateur de brillance. Les vis utilisées avaient un diamètre de 3,5 mm et
étaient en titane, afin de permettre une exploitation optimale de l’imagerie après
vissage.
Sur la tomodensitométrie de contrôle, nous avons relevé les angulations effectives
de la vis dans les deux plans sagittal et transversal, ainsi que la présence ou non de
l’effraction d’une corticale du pédicule (Fig. 5). L’effraction de la corticale a été
classée « grade I » si elle n’intéressait qu’une partie de la vis et « grade II » si la
totalité de la vis se trouvait en dehors du pédicule.
L’analyse statistique a été réalisée avec l’aide du logiciel SPSS. Pour chaque
mesure, la moyenne, l’écart type et l’intervalle de confiance ont été calculés. Les
différences ont été considérées comme significatives si p < 0,05.
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Résultats
Etude morphologique (tableaux 1-3)
Aucune anomalie anatomique particulière n’a été retrouvée lors du prélèvement
ou de l’examen scannographique.
Mesures linéaires
La largeur du pédicule de C7 était en moyenne de 6 ± 1,2 mm, avec une valeur
minimale de 4 mm et maximale de 8,6 mm. On trouvait une différence hautement
significative (p<0,001) entre les hommes (6,7 ± 0,9 mm) et les femmes (5 ± 0,6
mm). Quatre pédicules avaient un diamètre inférieur à 4,5 mm (11% des cas).
La hauteur était en moyenne de 5,8 ± 1,1 mm, avec une valeur minimale de 3,8
mm et maximale de 8 mm. Il existait également une différence significative
(p=0,005) entre les hommes (6,3 mm) et les femmes (5,3 mm), mais celle-ci était
moins marquée que pour la largeur.
La longueur de vis pédiculaire était en moyenne de 29,3 ± 3,2 mm, aucune valeur
n’était inférieure à 24 mm et la valeur maximale était de 35 mm.
L’épaisseur de la corticale latérale mesurée à 0,4 ± 0,3 mm était significativement
inférieure (p=0,001) à l’épaisseur des autres corticales autour de 1,1 mm, comme
il est classique de l’observer au niveau du rachis cervical inférieur [12].
Mesures angulaires
L’orientation transversale du pédicule était de 33,4° ± 6.6 avec une valeur
minimale de 22° et maximale de 46°. Dans le plan sagittal, l’orientation était de +
4,3° ± 4,5 avec une valeur maximale de +15° et minimale de -4°. Pour ces deux
valeurs aucune différence significative n’a été trouvée entre les hommes et les
femmes. Nous pouvons noter que la variabilité était plus importante pour
l’orientation transversale du pédicule (intervalle de confiance IC : [20,5 - 46,3])
que pour l’orientation sagittale (IC : [- 4,5 – 13,1]). L’angle transversal du cône de
sécurité avait une valeur moyenne de 23,2° ± 7 et était significativement
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(p=0,001) plus élevé chez les hommes (27,6° ± 6,2) que chez les femmes (19,4° ±
5,1). Plus le pédicule était large, plus l’angle de sécurité était important, ce qui
semblait logique a priori.
Epaisseur antéro-postérieure du massif articulaire
L’épaisseur antéro-postérieure du massif articulaire était mesurée en moyenne à
9,1 ± 1,4 mm avec une valeur minimale à 6,5 mm et maximale à 12,5 mm, sans
différence significative en fonction du sexe.
Vissages pédiculaires (tableau 4)
Les angulations des vis sur l’imagerie de contrôle étaient de 33° ± 5,1 dans le plan
transversal et de 1,45° ± 4,2 dans le plan sagittal (référence : plateau inférieur de
C7). Ces valeurs étaient très proches des angles mesurés dans l’étude
morphologique. Nous trouvions 63,3% (19/30) de vis correctement placées, c’est-
à-dire sans aucune effraction corticale. Aucune effraction de grade II (lorsque la
totalité de la vis se trouve en dehors du pédicule) ne fut déplorée (fig. 5). Les
corticales les plus fréquemment franchies étaient la corticale médiale (5/30, soit
16,7%), puis la corticale latérale (4/30, soit 13,3%). Les corticales les moins
franchies étaient les corticales inférieure (2/30, soit 6,7%) et supérieure (2/30, soit
6,7%) (tableau 4).
Discussion
Etude morphologique
Les dimensions des pédicules de C7 trouvées dans notre étude sont légèrement
inférieures aux données de la littérature (tableau 5). Ceci peut être lié au fait que
nous nous sommes attachés à mesurer la largeur et la hauteur à la partie la plus
étroite du pédicule. Quoi qu’il en soit, l’analyse morphométrique nous montre
qu’en C7 la taille des pédicules est compatible avec le vissage pédiculaire,
puisque la largeur et la hauteur moyennes du pédicule se situent autour de 6 mm.
Cette technique de vissage reste toujours possible pour les valeurs minimales,
puisque la largeur et la hauteur minimales mesurées étaient respectivement de 4 et
de 3,8 mm. Il apparaît néanmoins prudent d’utiliser des vis de diamètre inférieur
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