HGE-EBM maq. 14/01/03 9:02 Page 340 Xä | w x Ç v x @ u t á x w Å x w | v | Ç x Faut-il effectuer un remplissage après ponction d’ascite évacuatrice ? Ce qu’il faut retenir L’hypovolémie induite par la paracentèse doit être traitée! car elle persiste au moins " mois! augmentant le risque de récidive de l’ascite et la mortalité à long terme# En cas de ponction de plus de $ l! la supériorité de l’albumine sur les macromolécules de syn% thèse! en termes de prévention de l’hypovo% Niveau de preuve _Ë 2 ascite est la complication la plus fréquente de la cirrhose ; environ 50 % des patients atteints de cirrhose non décompensée développeront cette complication dans les 10 années à venir. La survenue d’une ascite marque un tournant évolutif, puisque 50 % des patients vont décéder dans les 2 ans qui suivent. La paracentèse évacuatrice constitue le traitement de première intention de l’ascite tendue. Sa supériorité, comparativement aux traitements diurétiques en termes d’efficacité (réduction de la durée d’hospitalisation), de coût et de tolérance (incidence plus faible d’encéphalopahie hépatique, d’insuffisance rénale et d’hyponatrémie), a été clairement démontrée par quatre essais randomisés. Cependant, en l’absence de remplissage vasculaire, la paracentèse évacuatrice induit une hypovolémie dans 75 % des cas, caractérisée biologiquement par une élévation de l’activité rénine plasmatique de plus de 50 % (1). Ces modifications hémodynamiques 340 lémie postparacentèse! est bien établie et! malgré l’absence de bénéfice démontré sur la survie! l’albumine est recommandée# Pour les ponctions de moins de $ l! l’efficaci% té des différentes solutions de remplissage est similaire# sont consécutives à une accentuation de la vasodilatation artérielle périphérique, déjà présente chez les cirrhotiques. L’hypovolémie postparacentèse débute dans les 24 heures qui suivent la ponction, pour atteindre son maximum au sixième jour (2). Elle est d’autant plus marquée que le volume d’ascite soustrait est important. Les conséquences à court terme de l’hypovolémie postparacentèse sont l’hyponatrémie, constatée chez 26 % des patients développant une hypovolémie contre 15 % des patients sans hypovolémie, et l’insuffisance rénale (20 %) (2). À moyen terme, les conséquences de l’hypovolémie ont été mises en évidence plus récemment, grâce à une étude randomisée multicentrique, incluant 289 patients traités par paracentèse totalement évacuatrice, et comparant trois modalités différentes de remplissage vasculaire (albumine, dextran 70 et polygéline). La survenue d’une hypovolémie postparacentèse, malgré un remplissage vasculaire, était associée à une reconstitution plus rapide de l’ascite, avec un délai médian de réadmission de 1,3 mois, significativement inférieur à celui des patients sans hypovolémie postparacentèse (3,5 mois) (2). De plus, la médiane de survie était de 9,3 mois en cas d’hypovolémie postparacentèse, significativement plus courte que celle des patients sans hypovolémie postparacentèse (16,5 mois). L’hypovolémie postparacentèse persistait durant les 6 mois de suivi de l’étude. Ces résultats soulignent clairement les La lettre de l’hépato-gastroentérologue - n° 6 - vol. V - novembre-décembre 2002 HGE-EBM maq. 14/01/03 9:02 Page 341 Hépatologie conséquences potentielles de l’hypovolémie postparacentèse, en termes de morbidité et mortalité, justifiant le recours logique à un remplissage vasculaire postparacentèse préventif. Différents solutés de remplissage ont été étudiés : albumine humaine à 20 % ou macromolécules de synthèse de coût moindre (polygéline, dextran 70, hydroxyéthylamidons) à la dose habituelle de 8 g de macromolécules par litre d’ascite évacué, 50 % de la dose étant perfusée dans les 2 heures qui suivent la paracentèse et 50 % dans les 6 heures suivantes. Plusieurs études ont comparé l’albumine humaine à 20 % au dextran 70 (deux études), à la polygéline (une étude) ou à l’hydroxyéthylamidon (une étude). Aucune différence statistiquement significative n’a pu être mise en évidence concernant la survenue de complications au cours de l’hospitalisation, que les patients aient reçu l’albumine ou un autre soluté de remplissage. En l’absence de suivi à distance de l’hospitalisation, aucune conclusion sur les conséquences à long terme de ces différents traitements n’a pu être apportée. Un essai clinique randomisé, ayant inclus un grand nombre de patients cirrhotiques (289), a mis en évidence une incidence moindre d’hypovolémie postparacentèse chez les patients recevant de l’albumine (18,5 %) comparativement aux patients traités par dextran 70 (34,4 % ; p = 0,018) ou polygéline (37,8 % ; p = 0,004) (2). La différence d’efficacité entre albumine et macromolécules de synthèse variait avec le volume d’ascite prélevé : pas de différence pour une ponction inférieure à 5 l, 17 versus 31 % pour une ponction de 5 à 9 l, 24 versus 56 % pour une ponction supérieure à 9 l. Cependant, la récidive de l’ascite et la survie des patients à 6 mois étaient comparables entre les trois modalités de remplissage vasculaire. Une méta-analyse de quatre essais randomisés, rassemblant les résultats obtenus sur 500 patients pendant l’hospitalisation initiale, a montré une moindre incidence de l’hyponatrémie (12 versus 18 %) après administration d’albumine (3). Aucune différence significative n’a été mise en évidence entre les malades traités par albumine ou un autre colloïde concernant la survenue d’une insuffisance rénale ou la mortalité. Ainsi, bien que la supériorité de l’albumine humaine à 20 % dans la prévention de l’hypovolémie postparacentèse soit clairement établie, son intérêt dans le remplissage vasculaire postparacentèse reste controversé, et ne fait pas l’objet d’un consensus en raison de son absence d’efficacité démontrée sur la survie des patients à long terme (4). En pratique, les experts européens recommandent l’utilisation de l’albumine humaine à 20 % pour les paracentèses, de plus de 5 l (5). Pour des ponctions de moins de 5 l, les macromolécules de synthèse peuvent être utilisées pour des raisons de coût. Le choix se fera entre la polygéline et le dextran 70, l’hydroxyéthylamidon n’étant plus commercialisé, en raison de cas rapportés d’aggravation des fonctions hépatiques et rénales. R É F É R E N C E S 1. Rutz-Del-Arbol L, Monoeschillo A et al. Paracentesis-induced circulatory dysfunction : mechanism and effect on hepatic hemodynamics in cirrhoris. Gastroenterology 1997 ; 113 : 579-86. 2. Ginès A, Fernandez-Esparrach G et al. Randomized trial comparing albumin, dextran 70 and polygeline in cirrhotic patients with ascites treated by paracentesis. Gastroenterol 1996 ; 111 : 1002-10. 3. Bernard B, Moreau R et al. Albumin versus synthetic plasma expanders in cirrhotic patients with ascites treated by paracentes : a meta-analysis. Hepatology 1997 : 26 (4) : 363A. 4. Runyon BA. Care of patients with ascites. N Engl J Med 1994 ; 330 : 337-42. 5. Moreau R. Faut-il prévenir l’hypovolémie efficace induite par la paracentèse chez les malades atteints de cirrhose ? Gastroenterol Clin Biol 1997 : 21 646-47. Autres ? uestions non résolues ◆ En dehors du volume d’ascite évacué, quels sont les facteurs prédictifs de la survenue d’une hypovolémie postparacentèse ? ◆ Quels sont les mécanismes pathogéniques expliquant la diminution de la survie en cas d’hypovolémie postparacentèse ? ◆ Comment obtenir une expansion volémique plus importante que celle obtenue dans les études publiées ? ◆ Quelle est la place des traitements vasoconstricteurs dans la prévention de l’hypovolémie postparacentèse ? La lettre de l’hépato-gastroentérologue - n° 6 - vol. V - novembre-décembre 2002 341